C'EST MON MÉTIER. Son métier à lui, c'est souffleur de verre. Et c'est en aidant par hasard un inconnu dans la rue il y a 10 ans qu'il a découvert sa vocation. Aujourd'hui, c'est en famille avec ses deux frères que Victor Stokowski "danse avec le verre". Brut les a suivis dans leur atelier.
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00:00Pas de saut au pied, tranquille.
00:02Ouais, ouais, ouais.
00:04Voilà, ça va, elle est parfaite.
00:06Après, je peux lâcher.
00:07Je peux vous prendre, essayer de fermer la porte.
00:09Ferme la porte, vas-y.
00:14Je pense qu'on est pas mal, non ?
00:15On va avancer doucement.
00:17OK, vas-y, enlève.
00:19Oh, on est bien.
00:20OK, prépare-toi, ramène le saut, Théo.
00:22Ramène le saut, Théo, mets-le à côté.
00:24OK, vas-y.
00:25Merci.
00:26Bien.
00:31C'est comme ça.
00:32Dans l'autre sens, c'est mieux.
00:33T'essaies de mettre les lèvres...
00:34Comme ça ?
00:35Vas-y, mets les lèvres contre le truc.
00:38Voilà, nickel.
00:39Voilà.
00:40Regarde dedans, si tu veux.
00:41C'est chaud, c'est chaud.
00:42Rapidement, c'est très chaud.
00:43Voilà.
00:44Et là, ça sert à quoi, ce que vous avez fait ?
00:46Je viens de le mettre dans le four de recuisson.
00:47C'est-à-dire qu'on va laisser le verre doucement
00:49redescendre de température dans la nuit,
00:51sur 14 heures à peu près,
00:52pour enlever toutes les tensions.
00:53C'est chaud ou pas, là ?
00:54C'est un peu chaud, mais ça va.
00:56On est encore dans la bonne période de l'année.
00:59C'est chaud.
01:00Je suis équipé,
01:01parce que justement, je rentre dans le four à 500°C.
01:03Et si tu t'équipes mal,
01:04c'est tes poils qui crament en premier,
01:05avant la peau et ton temps.
01:07Salut, Brut.
01:08Moi, c'est Victor Stokowski,
01:09et je suis soupleur de verre.
01:16Ça, c'est les trois frères Stokowski,
01:17donc on a chacun un peu nos rôles.
01:18Jimmy, c'est le chef d'atelier.
01:20C'est lui qui gère toute la gestion des fours,
01:22des fournisseurs, etc.
01:23Théo, il fait plus l'aspect commercial,
01:25marketing, relations clients,
01:27et tout ce qui va autour.
01:28Et moi, je fais plutôt la direction artistique et le soufflage.
01:30Mon histoire a commencé il y a maintenant 10 ans, quasiment.
01:33Un jour, en rentrant chez moi,
01:34je croise un monsieur dans la rue de 70 ans,
01:36portant des sacs de sable.
01:37Je lui propose mon aide,
01:38et en fait, il a été touché.
01:39En échange de mon aide,
01:40il m'a proposé un travail.
01:41C'est ce monsieur, ainsi que sa femme,
01:43sont soupleurs de verre.
01:44Ils m'ont engagé pour les aider à déménager leur atelier.
01:46Ils sont partis au Pays-Bas,
01:47j'aurais demandé à faire un stage.
01:48Je devais partir en trois mois,
01:49et je suis resté quatre ans.
01:51Je n'ai jamais fait d'école de verre.
01:52En fait, j'ai fait différents ateliers
01:53pour apprendre différentes techniques
01:54jusqu'à monter la téléscope-ski avec mes frères,
01:56il y a maintenant trois ans.
01:57On peut travailler tout seul,
01:58mais on est très, très vite limités.
02:00Quand on porte une pièce,
02:01en gros, au bout de la canne,
02:02s'il y a 10 kilos,
02:03il faut se dire qu'il faut multiplier entre 3 et 6 le poids.
02:04Chacun porte à différents moments
02:06pour justement se soulager
02:07parce que, ce qu'il fait sur le long terme,
02:09ça abîme vraiment le corps.
02:10Et c'est surtout les poignets
02:11qui prennent un peu sur le long terme.
02:12Les gens ont beaucoup de support d'équipe.
02:14Plus on connaît ses équipiers,
02:15et mieux ça se passe sur le terrain.
02:18Le verre soufflé, c'est pareil.
02:19Avec son frère, c'est parfait
02:20parce qu'on a déjà une très bonne entente.
02:21C'est une équipe plus synchronisée, on va dire.
02:23On ne peut pas être plus synchronisé qu'avec son frère.
02:27Beaucoup de gens nous demandent
02:28est-ce qu'on fait des gros poumons
02:29ou beaucoup de souffle pour pouvoir être souffleur,
02:31et on ne fait pas du tout.
02:32C'est vraiment que du contrôle.
02:33Parce qu'il y a des moments,
02:34on va souffler très, très, très légèrement.
02:37C'est ce qu'on appelle l'épée de fourmi.
02:38Le but, c'est vraiment d'avoir le moins d'air possible.
02:40Comme des fois, on va souffler vraiment très fort,
02:42mais ce n'est pas une histoire de puissance
02:44ou de gros poumons ou autre.
02:46C'est vraiment une histoire de contrôle.
02:51C'est un métier qui est très, très long à prendre
02:52parce qu'en fait, gestuellement,
02:53on ne se rend pas compte,
02:54mais on fait en sorte que la main gauche
02:55tourne toute seule
02:56pendant que la main droite passe.
02:57Rien que ça, ça met quand même des années.
02:59Les premières années,
03:00dans l'apprentissage du verre soufflé,
03:01c'est vraiment un combat.
03:02On est constamment en train de se battre contre la matière
03:05pour éviter qu'elle coule,
03:06qu'elle se torde, qu'elle se casse, etc.
03:08Dès qu'on commence un peu à maîtriser
03:09et qu'on commence un peu à débloquer sa main gauche,
03:12pour qu'elle se désynchronise de sa main droite,
03:14là, on commence à danser avec le verre.
03:16Et là, ça devient vraiment un ballet.
03:18Là, Clémentine, viens voir.
03:20Mets ta main au-dessus
03:21pour que tu sentes un peu la...
03:24C'est pour ça qu'il me protège tout le temps.
03:25S'il ne me protège pas directement,
03:27je me brûle facilement très vite.
03:28Il a des brûlures.
03:29Ça fait des cloches.
03:30Je suis quelqu'un d'hyperactif
03:31et c'est un métier qui est très intense,
03:32qui demande quand même beaucoup d'énergie.
03:34Du coup, ça m'a permis vraiment
03:35de catalyser mon énergie
03:36dans un métier qui demande justement
03:39à avoir beaucoup d'énergie.
03:42Donc, c'est bien tombé.
03:46Quand on commence une pièce,
03:47on est obligé d'aller jusqu'au bout.
03:49Du coup, ce côté très instantané
03:50est très présent
03:51et je trouve très intéressant.
03:53On m'a toujours dit
03:54que vivre dans le présent,
03:55c'est ce qui rend le plus heureux.
03:57Et du coup, mon métier me force
03:58à être dans le présent tout le temps.
04:00Du coup, je suis quelqu'un de plutôt heureux,
04:01en général.