On entend souvent que les femmes sont "pires entre elles". Mais au fait, ça vient d'où cette histoire de rivalité féminine ?
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00:00Il y a énormément de films qui alimentent cette idée de rivalité féminine,
00:03notamment les teen movies, qu'on a énormément vus dans les années 90 et 2000,
00:07où il y avait toujours une méchante et une gentille de façon très stéréotypée et archétypale.
00:12On avait toujours cette gentille qui devait batailler un petit peu pour exister
00:16face au harcèlement de ces méchantes filles.
00:18Au-delà du cinéma, il y a aussi le rôle de la presse people.
00:21Je pense par exemple à toutes ces rivalités montées en épingle,
00:24comme par exemple celle de Lady Diana avec Camilla, on voit bien que ce n'est pas nouveau.
00:29Il y a aussi la musique, je pense à Britney Spears et Christina Aguilera.
00:32Je pense aussi à une chanson que j'écoutais quand j'étais petite qui est The Boy Is Mine,
00:35où Brandy et Monica s'affrontaient pour l'amour d'un homme.
00:38Toutes ces représentations-là, elles comptent, elles nous ont façonnées
00:41et elles participent à normaliser cette idée de la rivalité féminine.
00:44Il y a un archétype qui est très puissant, qui est celui de l'autre femme.
00:47L'autre femme, c'est la voleuse de Marie, avec de très gros guillemets.
00:52C'est une femme qui, justement, est mise au banc de la société
00:55parce qu'elle a fait l'erreur d'avoir une relation avec un homme en couple.
01:00Je pense au cas d'Angelina Jolie, Brad Pitt et Jennifer Aniston,
01:04où on a tout mis sur le dos d'Angelina Jolie,
01:06on a tout présenté comme une espèce de catfight entre les deux actrices.
01:09On a même eu des t-shirts Team Aniston, Team Jolie, c'était une folie.
01:13Et Brad Pitt, dans cette histoire, était totalement absent.
01:17Pour comprendre la misogynie intériorisée,
01:19il faut déjà admettre que nous vivons dans une société misogyne,
01:23avec de nombreuses normes sexistes.
01:25Ces normes, les hommes les intègrent,
01:26mais les femmes les intègrent aussi de la même manière
01:28parce qu'elles sont soumises aux mêmes influences et aux mêmes représentations.
01:32Il y a plusieurs études qui montrent que les femmes,
01:35lorsqu'elles sont en position d'autorité, notamment en entreprise,
01:38ont tendance à harceler beaucoup plus les femmes que les hommes.
01:40Elles ont aussi tendance à être beaucoup plus dures avec les femmes qu'avec les hommes.
01:44Ça, pour moi, c'est réellement un exemple de misogynie intériorisée,
01:47dans le sens où elles n'ont pas forcément grand-chose à reprocher à ces femmes-là,
01:51mais pourtant, ça se traduit par une rivalité,
01:54une forme de rivalité finalement avec des femmes qui leur sont subalternes.
01:57On dit souvent que les femmes sont pires entre elles.
02:00Si c'est vrai, comment expliquer ça ?
02:01Ça s'explique vraiment par le fait qu'elles ont intériorisé cette misogynie,
02:04c'est-à-dire que pour elles, les autres femmes sont forcément manipulatrices,
02:09dangereuses, menteuses.
02:12Et c'est assez difficile à ce moment-là de construire des relations de confiance entre femmes
02:16si l'on considère qu'elles ne sont pas fiables et qu'on ne peut pas leur faire confiance.
02:20Pour commencer, il y a l'insécurité.
02:22C'est-à-dire que les femmes sont construites dans l'insécurité.
02:25Elles ne sont jamais assez belles, elles ne sont jamais assez jeunes, elles ne sont jamais assez minces.
02:28Du coup, elles vont se sentir menacées par les femmes qui, selon elles, ont l'air de mieux réussir leur vie,
02:33ce qui peut mener à une forme d'agressivité défensive, d'une certaine manière.
02:38Ensuite, il y a la tension masculine et le besoin de validation.
02:41C'est-à-dire que les femmes, on les a construites dans une idée
02:44qu'elles ressentent une pression de conjugalité extrêmement forte.
02:48Ça crée parfois une bataille pour la tension masculine et la validation masculine.
02:54On entend souvent le mot « pick me », mais qu'est-ce que ça veut dire et d'où ça vient exactement ?
02:57Une pick me, c'est une femme qui, pour obtenir la validation masculine,
03:01ne va pas hésiter à rabaisser les autres femmes.
03:03En fait, moi, clairement, je ne traîne pas avec les meufs, tu vois.
03:05En fait, je ne me sens pas à l'aise dans… Tu sais, c'est des hypocrites, en fait.
03:08Il y a beaucoup de femmes qui mettent en avant le fait qu'elles ne sont pas comme les autres filles.
03:11Ça, c'est assez problématique parce que c'est souvent un motif de fierté.
03:15Si c'est un motif de fierté, qu'est-ce que ça sous-entend ?
03:18Que c'est pas cool d'être une fille.
03:19A l'origine, le terme « pick me », il est apparu sur Twitter en 2016 avec le hashtag « tweet like a pick me ».
03:24Au départ, l'idée, c'était de se moquer de certaines femmes qui mettaient en avant leur « wifey material »,
03:29c'est-à-dire le fait qu'elles étaient « bonnes à marier »,
03:31et qui en profitaient pour rabaisser d'autres femmes moins intéressées par la conjugalité.
03:36Certaines personnes font aussi remonter l'utilisation du terme à 2006
03:39avec un épisode de Grey's Anatomy dans lequel le personnage principal, Meredith Grey,
03:44s'adresse à l'objet de son affection en lui demandant de la choisir par rapport à sa rivale.
03:50Et elle lui dit ces termes-là « pick me », « love me », « choose me ».
03:55Aujourd'hui, on utilise le terme « pick me » pour désigner des femmes qui, par exemple,
03:59aiment le sport ou n'aiment pas se maquiller ou qui font le choix de vivre autrement.
04:03Alors, interpeller les femmes sur leurs comportements misogynes, c'est important
04:06et c'est ce qui permet de nous faire avancer toutes.
04:08En revanche, utiliser ces termes-là pour rabaisser toutes les femmes,
04:12pour peu qu'elles aient des envies différentes, pour peu qu'elles aient des aspirations différentes,
04:17là, c'est extrêmement problématique et ça relève juste de la misogynie pure.
04:21Beaucoup de femmes ont tendance à balayer le sujet sous le tapis et à pointer les hommes du doigt.
04:25Certes, on peut pointer les hommes du doigt pour leur misogynie,
04:27mais ça n'empêche pas de se remettre en question
04:29et d'admettre qu'on a pu soi-même avoir des comportements problématiques envers d'autres femmes.
04:33Ça commence comme ça.
04:34Ensuite, il faut s'informer et il faut également prendre le temps de se demander comment on peut mieux faire,
04:40comment on peut s'améliorer et comment on peut faire en sorte de créer avec d'autres femmes
04:43une réelle solidarité solide et pérenne.