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La mise à disposition de locaux n'est pas une sous-location avec Baptiste Robelin, Associé fondateur, Novlaw Avocats.

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Transcription
00:00On poursuit ce LexInside, on va parler beaux commerciaux, mises à disposition de locaux
00:15et sous-locations avec mon invité Baptiste Roblin, associé fondateur de Novlo.
00:21Baptiste Roblin, bonjour.
00:23Bonjour.
00:24Nous allons nous intéresser à l'interaction entre la mise à disposition de locaux et
00:29la sous-location avec le partage de locaux professionnels, qu'on connaît bien avec
00:34le co-working.
00:35On va se demander si ce partage de locaux professionnels peut être considéré comme
00:40une forme de sous-location.
00:41Avant toute chose, pouvez-vous nous rappeler ce qu'est une sous-location ?
00:46Oui, tout à fait.
00:47Alors, un contrat de sous-location, c'est un contrat au terme duquel le locataire va
00:53mettre à la disposition d'un tiers, qu'on appelle le sous-locataire, la chose ou le
00:58local qu'il loue.
00:59J'ai coutume de dire que dans une sous-location, on a minimum deux contrats, trois parties,
01:03c'est-à-dire un contrat de bail principal, un sous-contrat, le contrat de sous-location,
01:06un bailleur, un locataire, un sous-locataire.
01:08Alors, en matière de beaux commerciaux, il faut savoir que la sous-location est particulièrement
01:15restrictive.
01:16Il y a un régime qui prévoit que d'une part, le locataire ne peut pas sous-louer
01:21sans avoir obtenu l'accord du bailleur et d'autre part, on a un régime correctif qui
01:25permet au bailleur, le cas échéant, de solliciter une augmentation de loyer s'il s'avère que
01:30le loyer du sous-contrat, de la sous-location, est supérieur au montant du loyer du bail
01:36principal.
01:37L'idée, c'est que le législateur veut éviter de permettre au locataire, s'il
01:41voulait, de se faire un profit sur le dos du bailleur et puis c'est aussi de permettre
01:45au bailleur d'avoir une forme de droit de regard sur ce qui se passe sur son local,
01:48savoir qui l'occupe de manière effective.
01:49Alors, ces dernières années, la mise à disposition de locaux s'est développée,
01:56ces systèmes de co-working, de partage d'espaces professionnels.
02:00Cette mise à disposition d'espaces de travail professionnels doit-elle être considérée
02:05comme de la sous-location ?
02:06Alors, évidemment, tout dépend de ce qu'on appelle sous-location.
02:10Si vous voulez, dans le langage commun, pour un non-juriste, on peut avoir l'impression,
02:12si vous demandez à un co-worker quel est le contrat qui est le sien, souvent, il va
02:16vous dire, c'est de la sous-location finalement, j'occupe le local au sein d'une entreprise,
02:19qui a tout un immeuble.
02:20Bon, pour un juriste, on sait de longue date que ce sont deux choses différentes et j'allais
02:26dire, on n'a pas attendu le développement du co-working pour faire une distinction entre
02:30mise à disposition ou encore contrat de prestation de service et sous-location.
02:34En réalité, cette distinction, elle existe de longue date, on la voit par exemple en
02:38matière de contrat d'hôtellerie.
02:39Dans l'hôtellerie, quand vous avez un hôtelier qui accueille des clients, il va leur mettre
02:44à disposition une chambre et on voit bien que ce n'est pas une sous-location.
02:48Pourquoi ? Parce qu'il y a mise à disposition d'un espace, la chambre, mais également
02:52fourniture de toute une gamme de services associés, le ménage, Internet, la sécurité,
02:56etc.
02:57Et donc, dans ce cadre-là, l'obligation, si vous voulez, du prestataire de service,
03:01on va appeler prestataire de service, ce n'est pas malheur, ce n'est pas simplement de
03:03mettre à disposition un local, mais c'est aussi de fournir cette somme de services associés.
03:09Donc, ce n'est pas la même chose et si c'était considéré comme étant la même
03:14opération, finalement, il faudrait, si je reprends l'exemple de l'hôtelier qui demande
03:17systématiquement l'accord du bailleur pour accueillir un client, et puis le bailleur
03:20aurait toujours la possibilité de demander une augmentation de loyer au motif que le
03:23prix des chambres est supérieur au prix du loyer.
03:25Donc, ça reviendrait à permettre au bailleur de cannibaliser d'une certaine manière le
03:28fonds de commerce de son exploitant.
03:30Donc, de longue date, la jurisprudence nous dit, dès lors que l'objet principal du bail
03:35commercial, c'est la mise à disposition de locaux, alors c'est exclusif de la qualification
03:40de sous-location.
03:41D'accord.
03:42Alors, on va revenir justement sur ce que dit précisément la jurisprudence.
03:46Pouvez-vous nous dire les tendances jurisprudentielles en la matière sur le co-working et cette
03:51qualification de sous-location ?
03:53Tout à fait.
03:54Alors, remarque préliminaire d'abord, ce contentieux autour de la qualification de
03:59la distinction entre mise à disposition de locaux et sous-location est né, comme bien
04:02souvent, d'une maladresse rédactionnelle dans un bail, puisque, comme je l'avais dit,
04:06si le bail prévoit une mise à disposition de locaux, alors c'est forcément exclusif
04:11de la qualification de sous-location.
04:12Bien sûr.
04:13Il y a eu un arrêt récent de la Cour de Cassation, le 27 juin 2024, qui est venu nous rappeler
04:17comment est-ce qu'on allait passer de la qualification de l'un à l'autre.
04:20En 2024, la Cour de Cassation nous dit, en fait, à partir du moment où le prix qui
04:24est payé par l'occupant, le sous-locataire, si vous voulez, rémunère non pas simplement
04:29une mise à disposition d'espace, mais également toute une gamme de services associés, ménage
04:34interne, etc.
04:35Alors, ce n'est pas de la sous-location, c'est bien de la mise à disposition d'un
04:40local, un contrat de prestation de services, si vous voulez.
04:43On avait une jurisprudence antérieure en 2002 qui nous disait que les deux critères
04:48qu'il fallait regarder, c'était la question de la précarité du contrat et également,
04:53en sus de la précarité, la question du transfert de la garde.
04:56En fait, ce qu'il nous dit la Cour de Cassation avant, c'est finalement si la garde est transférée
05:01à l'occupant, on est bien dans un contrat de sous-location.
05:04Et inversement, s'il est là de manière précaire, temporaire, et qu'il a besoin
05:08de demander toujours une forme d'autorisation d'accès, si vous voulez, au locataire,
05:12à ce moment-là, c'est un contrat de mise à disposition.
05:15Ça, c'était un arrêt de 2002.
05:16Et là, les critères, quels sont-ils ? Est-ce que ça a bougé un peu ?
05:20A priori, en 2024, on comprend que le nouveau critère, ce serait justement l'idée que
05:26le prix qui est payé par l'occupant doit rémunérer des services associés et pas
05:32simplement une mise à disposition d'espace.
05:34Et je pense que ce nouveau critère, appelons-le comme ça, est plutôt bienvenu parce que les
05:38critères antérieurs qui étaient utilisés dans la jurisprudence en 2002 ne me paraissaient
05:43pas tout à fait adaptés à ce type de situation.
05:45En fait, quand vous avez un coworking, d'abord, le contrat peut ne pas être précaire.
05:50On peut avoir des gens qui restent en coworking très longtemps sur des contrats à durée
05:52indéfinie.
05:53Et puis, cette histoire du transfert de garde aussi est problématique parce que ce n'est
05:57pas parce que vous êtes un coworker, si vous voulez, que vous ne pouvez pas avoir les clés
06:00de votre propre bureau et priver le prestataire de service de l'accès au bureau quand vous
06:05l'occupez.
06:06Et j'en veux d'ailleurs pour preuve qu'il y a aujourd'hui des cabinets d'avocats qui
06:09sont dans des espaces de coworking.
06:10Et vous voyez bien que pour des raisons liées à la confidentialité, par exemple, il ne
06:13faut pas permettre au prestataire de service de rentrer comme il le veut dans le bureau.
06:17Et pour autant, ça reste du coworking.
06:18Vous voyez, donc on a quand même un transfert de la garde, mais ça reste du coworking parce
06:23qu'il y a d'autres services associés.
06:24C'est pour ça que cet arrêt de 2024 me paraît bienvenu.
06:25Alors, est-ce qu'il faut malgré tout faire adapter le cadre juridique ou finalement ce
06:31que nous dit la jurisprudence, puisque ça semble être le cas, c'est satisfaisant ?
06:35Si vous voulez, quand on regarde le développement massif du coworking ces dernières années,
06:41j'aurais tendance à dire qu'à priori, il n'y a pas besoin d'adapter le cadre
06:44législatif puisqu'il n'y a pas de frein particulier.
06:47J'aurais plutôt tendance à me poser la question de la manière suivante.
06:50Si autant de personnes contournent aujourd'hui le dispositif du statut des baux commerciaux,
06:55c'est peut-être que ce dispositif est mal adapté aux nouvelles formes d'activité,
06:59du moins à cette forme d'activité dans laquelle les prestataires recherchent de la souplesse.
07:02Vous voyez, je pense par exemple à la résiliation triennale.
07:05Quand vous êtes locataire dans un bail commercial, vous pouvez résilier le contrat tous les
07:10trois ans et ce n'est pas forcément adapté pour des gens qui recherchent des locaux de
07:13manière extrêmement flexible, qui peuvent vouloir changer assez rapidement, etc.
07:17Inversement, on pourrait encore se poser la question dans l'autre sens en se disant que
07:20du coup, les co-workers évoluent dans une forme de no man's land far west juridique
07:24puisqu'il n'y a pas de cadre et donc on pourrait se demander ce qu'il ne faut pas légiférer
07:28pour encadrer un petit peu, par exemple pour apporter une petite dose de protection.
07:31Je pense notamment à la question du loyer qui est très encadré en matière de baux
07:34commerciaux et ça ne l'est pas du tout du coup en matière de co-working.
07:37On va conclure là-dessus.
07:39Merci d'être venu sur notre plateau.
07:41Je rappelle Baptiste Roblingue, vous êtes associé fondateur de Novlo Avocat.
07:44Merci.
07:45Merci à toutes et à tous pour votre fidélité.
07:48Quant à moi, je vous retrouve très bientôt sur BeSmart for Change.
07:50Restez curieux et informés.

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