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Elle se décrit comme "Madame Violence" du tribunal de Nîmes, la responsable de la cellule dédiée aux violences intrafamiliales du barreau de Nîmes accompagne des femmes, pour beaucoup, victimes de violences verbales, physiques, sexistes et sexuelles. Des victimes qui trouvent le courage, pour certaines, de porter plainte. Quels sont leurs droits quand elles portent plainte ?
Maître Karline Gaborit était l'invitée de France Bleu Gard Lozère ce lundi 18 novembre.

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Transcription
00:00Belle matinée en Lauserre et dans le Gard avec France Bleu, 7h46, notre invitée Maïa Baldoro-Frodon,
00:06c'est un petit peu la madame violence du tribunal de Nîmes.
00:09Oui, c'est un petit peu comme ça qu'elle se décrit.
00:10Bonjour Maître Carline Gabory.
00:12Bonjour.
00:13Vous êtes responsable de la cellule dédiée aux violences intrafamiliales du barreau de Nîmes.
00:18Vous accompagnez des femmes, pour beaucoup, victimes de violences verbales, physiques, sexistes et sexuelles.
00:24Des victimes qui trouvent le courage, pour certaines, de porter plainte.
00:28Qu'est-ce que c'est, leurs droits, nos droits, à nous les femmes, quand on porte plainte ?
00:32Alors déjà, le premier droit d'une femme, c'est de ne pas subir les violences, quelles qu'elles soient.
00:38Quand on est en couple, les violences verbales, les humiliations, les agressions physiques, les viols,
00:44on a le droit de ne pas les subir et on a le droit de quitter l'auteur des violences.
00:50Et puis, à partir de là, il y a tout un arsenal juridique qui se met en place,
00:55mais il est fondamental, et c'est le pas le plus difficile à franchir, d'aller déposer plainte.
01:02Pour cela, il y a une nouveauté, et ça c'est un nouveau droit dont on n'entend pas encore assez parler,
01:09c'est le droit d'être accompagné, lors du dépôt de plainte, par un avocat.
01:14C'est un droit vraiment fondamental qui peut changer toute la suite des événements
01:20pour la femme qui souhaite sortir des violences.
01:22En quoi ?
01:24En quoi ? Déjà, il faut savoir qu'à peu près une femme sur quatre seulement, ou une victime sur quatre,
01:31ose franchir le pain et dépose plainte.
01:34Les statistiques, je m'en méfie beaucoup, mais quand même, il y a des chiffres qui sortent,
01:42on vous explique que 60%, 80% des plaintes qui sont déposées par les victimes
01:49ne sont pas suivies des faits, sont classées sans suite, ou font l'objet d'une mesure alternative,
01:56et ne vont pas devant un tribunal comme elles devraient y aller.
02:00À partir de là, cet acte fondamental, où il faut beaucoup de courage pour une femme
02:06pour aller parler comme ça devant un inconnu, il faut le préparer.
02:11Et le préparer, il faut donner les moyens aux enquêteurs de police de mener une enquête.
02:17Si vous êtes accompagné par un avocat, et pas seulement un avocat, mais j'en dirai deux mots si vous voulez,
02:23par des associations aussi, on prépare à la plainte, on prépare au récit.
02:29Parce que le récit, il doit être à la fois précis et peut-être court,
02:36mais il doit donner des pistes, des pistes de témoin sur l'effet des violences, des moyens de preuve,
02:42et ça, c'est avec un avocat qu'on peut mieux le préparer.
02:46Et c'est grâce à un avocat qu'on peut augmenter ses chances que sa plainte suive son parcours judiciaire.
02:55Il y a le fait d'être accompagné par un avocat, il y a aussi le fait de recevoir cette plainte.
03:01Est-ce qu'aujourd'hui, dans les commissariats, dans les casernes de gendarmerie,
03:05est-ce que les forces de l'ordre qui reçoivent les plaintes sont suffisamment préparées à recueillir cette parole,
03:10suffisamment armées aujourd'hui en 2024 ?
03:13Alors, j'aimerais bien être négative, c'est dans l'air du temps, mais non.
03:18Oui, tant mieux !
03:21Il y a 20 ans, quand j'ai commencé à accompagner des femmes victimes,
03:25il n'était pas rare qu'elles soient tout simplement éconduites des commissariats ou des gendarmeries
03:33par ceux qui les recevaient.
03:37Aujourd'hui, c'est fini.
03:39C'est-à-dire que maintenant, les commissariats et gendarmeries, d'abord,
03:43reçoivent de plus en plus une formation spécifique sur les violences intrafamiliales
03:49pour savoir qu'est-ce que c'est que ce phénomène,
03:52pour savoir ce qui se passe dans la tête d'une victime et pour mieux accueillir.
03:56Et donc, même s'il y a encore des loupés, j'en ai eu une il n'y a pas longtemps
04:01qui était persuadée d'être allée déposer plainte
04:05et au terme d'une audition d'à peu près 8 pages d'horreur dans son procès verbal
04:11à la question « désirez-vous aller déposer plainte ? »
04:15l'officier de police qui a recueilli la plainte a mis non.
04:20Alors qu'elle était persuadée qu'elle avait déposé plainte.
04:24De son propre chef, à lui ?
04:26Alors, je ne sais pas, je n'y étais pas.
04:28Avec un avocat, ça n'aurait pas été possible.
04:31Qu'est-ce qu'on a fait ? On est immédiatement retourné en gendarmerie en l'occurrence
04:36mais ça arrive aussi dans les commissariats et on a complété la plainte.
04:41Mais c'est vous dire que cet accueil s'est amélioré, il y a encore des loupés
04:47mais j'ai vraiment beaucoup d'espoir grâce à la volonté gouvernementale d'ailleurs
04:53et à l'évolution des mentalités.
04:55Mais les mentalités, on ne les change pas par décret, ça met du temps.
04:58Vous insistez sur l'importance de ce que peut apporter un avocat dans ces moments-là
05:02mais est-ce qu'une victime qui n'a pas beaucoup de ressources a le droit à cet avocat ?
05:06Est-ce qu'il faut mettre les sous pour l'avoir ?
05:10Alors ça, c'est une vraie problématique et c'est ce qui me met un peu en colère.
05:14Parce que cette loi, quand elle a permis d'être accompagnée par un avocat
05:17c'est la loi du 24 janvier 2023, elle m'a traumatisée, c'est pour ça que je m'en souviens.
05:22Elle n'a pas été accompagnée de la modification du décret sur l'aide juridictionnelle.
05:28L'aide juridictionnelle qui permet donc un financement ?
05:32L'aide juridictionnelle, c'est pour toute personne sous condition de ressources
05:37qui n'a pas les moyens, la possibilité d'avoir son avocat pris en charge financièrement par l'État.
05:44Ce décret n'a pas été modifié pour un accompagnement à la plainte.
05:50De sorte qu'une victime qui a les moyens peut être accompagnée par un avocat,
05:56une victime qui n'a pas les moyens ne peut pas.
05:58Donc c'est un oubli dans un texte de loi, un décret qui n'est pas à jour
06:01et qui ne permet pas finalement pour tout le monde d'avoir son avocat pris en charge quand on n'a pas les moyens.
06:06Que répondre ? Il y a tellement de lois tous les jours et il y a tellement d'oublis qui vont avec.
06:10Mais j'ai bon espoir que ça va changer, à force de le dire.
06:12On a évoqué ce matin dans nos journaux, en reportage, ce nouvel outil, le plaintomètre
06:17mis en place par Femmes Solidaires, déployé dans le Gard pour évaluer,
06:22pour qu'une victime puisse dire si sa plainte s'est bien passée.
06:24Est-ce que vous pensez que c'est quelque chose d'utile ?
06:26Est-ce que ça peut changer quelque chose véritablement ?
06:29C'est une bonne chose pour prendre conscience que ça ne va encore pas assez bien.
06:37Il faut voir quand il sera mis en œuvre.
06:41Mais ce plaintomètre avec le violentomètre qui existait déjà,
06:46c'est un très bon outil de mesure pour les officiers de police judiciaire eux-mêmes,
06:51parce qu'ils n'ont pas un travail simple.
06:54Et l'auto-évaluation, c'est compliqué.
06:58Évidemment.
06:59Une dernière chose pour terminer, Maître Gabory.
07:02Vous vouliez redonner une annonce, parce qu'on a besoin,
07:06quand on porte plainte d'un avocat, d'être entendu, d'être écouté, d'être accompagné.
07:11Vous êtes là pour ça ?
07:12Oui, tout à fait.
07:15Une annonce, et puis un autre élément qui me tient à cœur.
07:19L'annonce, c'est que pour la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes,
07:24le 25 novembre, l'Ordre des avocats organise une journée
07:28de consultation entièrement gratuite et anonyme.
07:32J'invite toutes les femmes, quel que soit leur stade de sortie des violences,
07:38même si elles ne sont pas prêtes,
07:40à venir rencontrer les avocats de la permanence, tout simplement pour en parler.
07:44Et après, on verra ce qu'on fait.
07:46Et puis la dernière chose, c'est que, ça c'est fondamental,
07:50les violences intrafamiliales, les violences faites aux femmes,
07:53il ne faut jamais travailler seul.
07:54Les avocats doivent travailler en particulier avec le réseau local,
07:57avec des associations, et ça c'est mon petit coup de cœur pour finir,
08:01l'association Via Femina Fama,
08:03qui oeuvre sur le terrain, elle aussi, 24h sur 24, comme notre permanence.
08:07Merci beaucoup Maître Gaboré d'avoir été avec nous ce matin.
08:10Toutes ces informations, tous ces détails, toutes ces infos pratiques
08:13sont à retrouver sur francebleu.fr

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