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Clique, c'est présenté par Mouloud Achour, tous les jours pour les abonnés, en deuxième partie de soirée sur CANAL+
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00:00Vous dites cette phrase qui, pour vous, résonne de manière très légère et à la fois très grave,
00:05« le cinéma m'a sauvé la vie », et c'est vrai.
00:08C'est vrai, c'est vrai. En 1942, avec ma mère, on était recherchés par la Gestapo.
00:16On se cachait en France. J'étais séparé de mon père qui était à Alger, à un moment donné.
00:21Donc on a été recherchés par la Gestapo et on changeait de ville tous les jours, ou presque, de région, etc.
00:28On avait des faux papiers. Et un des rares endroits où ma mère me cachait, c'était les cinémas,
00:34parce que j'étais un enfant très turbulent. Je tenais pas en place.
00:38Et le seul endroit où je bougeais pas pendant deux heures, c'est dans une salle de cinéma.
00:42Je suis allé pour la première fois au cinéma à l'âge de 3 ans, 4 ans, au cinéma LREX à Paris.
00:48Et pour la première fois, mes parents se sont aperçus que je bougeais pas.
00:52Et donc ils avaient trouvé la nurse idéale. Ils se sont dit « là, on est tranquille ».
00:57Et donc sous l'occupation, ma mère me confiait des ouvreuses.
01:00Il y avait des ouvreuses à l'époque au cinéma qui ont donné un pourboire.
01:04Et elle me posait dans une salle de cinéma à 2 heures de l'après-midi.
01:07Le cinéma était permanent à l'époque. Et donc jusqu'à 6 heures du soir, je voyais le même film trois fois.
01:13Et j'étais au paradis. J'étais au paradis, je bougeais pas, j'étais comme ça.
01:16Je me disais « c'est fantastique, les gens qui sont sur cet écran, c'est les mêmes que ceux qui sont dans la rue,
01:23mais ont réussi en plus beaux, en plus intelligents, en plus courageux ».
01:27Et c'est vrai que le soir, quand je ressortais, j'avais hâte le lendemain de retourner au cinéma.
01:34Donc on allait dans des villes où il y avait des cinémas.
01:37Et c'est vrai que vous avez été sauvé parce que vous connaissiez des prières catholiques ?
01:43Oui. Ça a été formidable parce que comme on arrêtait évidemment les juifs,
01:50je me rappelle dans une salle de classe, un jour, on m'a fait baisser mon pantalon pour voir si j'étais circoncis.
01:57Et heureusement, ma mère qui était catholique, elle s'est convertie au judaïsme par amour pour mon père.
02:05Donc je suis devenu juif grâce à ma mère.
02:08Mais ma mère qui allait à l'église m'avait appris les prières catholiques.
02:13Elle m'avait dit « si demain matin un Allemand t'arrête, tu récites ta prière.
02:17Notre Père qui est aux cieux, votre nom... » Je les connais encore.
02:20Ça donne quoi ?
02:22Ça m'a sauvé la vie.
02:24Ça m'a sauvé la vie parce que dans la salle de classe, je me rappelle, on a fait baisser le pantalon des petits garçons.
02:33J'étais circoncis. La maîtresse a été géniale aussi.
02:36Elle a dit « non, non, lui, s'il est circoncis parce qu'il fait pipi de travers, on a été obligé de l'opérer. »
02:41Et l'officier allemand a dit « oui, oui, on me l'avait déjà dit ».
02:45J'ai dit « mais vous allez voir, il va vous réciter la prière catholique.
02:49Et à ce moment-là, notre Père qui est aux cieux, votre nom soit sanctifié. »
02:53Et d'un seul coup, l'officier m'a cru à ce moment-là.
03:01Et c'est un curé, la tourette sur l'eau, qui m'a sauvé la vie aussi
03:06et qui me faisait servir la messe comme un enfant de cœur pour donner le change.
03:15Sous-titrage Société Radio-Canada