• il y a 2 mois
Constance de Pélichy, députée LIOT du Loiret.
Elle a gagné à deux reprises là où aucun homme de sa famille politique n'avait osé se lancer... Constance de Pélichy a de l'audace, mais elle n'est pas prête à tout sacrifier pour la politique. Ex-membre des Républicains, elle siège aujourd'hui au sein du groupe LIOT à l'Assemblée.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00Elle a gagné à deux reprises, là où aucun homme de sa famille politique n'avait osé se lancer.
00:06Mon invitée a de l'audace, mais elle n'est pas prête à tout sacrifier pour la politique.
00:10Ex-membre des Républicains, elle sèche aujourd'hui au sein du groupe Lyott à l'Assemblée nationale.
00:30Bonjour Constance de Pellichy.
00:32Bonjour.
00:32Alors vous avez créé l'une des surprises de ces dernières élections législatives en vous imposant
00:38dans le Loiret face à la députée du Rassemblement national de Mathilde Paris.
00:42La conséquence directe de cette élection, c'est que vous avez dû renoncer à votre mandat de maire de l'affaire T.
00:48Saint-Aubin, c'est la règle, avec le nom cumul des mandats.
00:51Je vous propose de revoir une image de votre tout dernier conseil municipal.
01:00Applaudissements
01:04Constance de Pellichy, on vous voit très émue.
01:07Vous étiez maire depuis dix ans, renoncée à ce mandat, ça a été un déchirement.
01:13Ça a été très brutal.
01:14C'est vrai que je m'étais projetée sur un temps plus long, jusqu'à 2026.
01:19J'avais envisagé de quitter mon poste à l'issue de mon second mandat.
01:24Et donc je m'étais préparée dans ma tête à mes dernières fois.
01:28Voilà, un dernier jumelage avec l'Allemagne, la fin de certains projets qu'on avait lancés.
01:34Tout était timé par rapport à cette échéance de 2026.
01:38Et ça s'est terminé beaucoup plus vite que je ne l'avais imaginé.
01:42Donc je n'étais pas tout à fait prête dans ma tête.
01:44Et c'est dix ans de ma vie où je me suis investie corps et âme avec mes élus,
01:49mais aussi avec les agents.
01:50Ça a été une aventure humaine incroyable où on a fait énormément de choses.
01:54Et donc, forcément, extrêmement émue de voir la belle surprise
01:59que les agents et les élus m'avaient réservée pour ce dernier Conseil municipal.
02:03Je crois que les conseillers municipaux vous ont même offert un kit de survie
02:07pour vos premiers pas à l'Assemblée nationale.
02:08Ce sont les agents de la ville qui m'ont offert ce kit de survie.
02:12Alors, il contient notamment une paire de boules-caisses
02:16quand les débats à l'Assemblée nationale prennent un peu trop de volume,
02:20une paire de chansons pour les soirées qui seront très longues dans l'hémicycle,
02:25du doliprane pour éviter les prises de tête,
02:29un Rubik's cube quand les débats deviennent ennuyeux.
02:32Voilà, tout un tas de petits clins d'œil comme ceux-là qui m'ont beaucoup amusée
02:36et qui témoignent aussi du lien qu'on a pu tisser avec les agents de la commune.
02:41Alors, pour en revenir à ces législatives de 2024,
02:44les candidats potentiels dans votre famille à droite ne manquaient pas,
02:47mais aucun n'a osé y aller. Pourquoi ?
02:50La question qui s'est posée, c'est qui était le plus à même
02:53de reprendre cette circonscription au Rassemblement national ?
02:57Moi, j'ai été maire d'une des communes les plus importantes de la circonscription.
03:01C'est vrai que j'ai un beau bilan à mon actif au niveau de ma commune.
03:07Et en en parlant avec les autres élus du territoire,
03:11on est vite arrivé à la conclusion qu'on n'était pas très nombreux
03:14à pouvoir l'emporter, à condition qu'il n'y ait pas de division en notre sein.
03:19Et quand vous y êtes allée, objectivement, vous pensiez pouvoir gagner ?
03:22Quand j'y suis allée, ce n'est pas le raisonnement que j'ai fait.
03:27C'est plutôt de me dire, je ne supporte pas l'idée
03:31de laisser un député Rassemblement national être réélu dans un fauteuil sans se battre.
03:37Alors, dix ans plus tôt, vous étiez lancée déjà dans une autre élection
03:40que votre camp jugeait ingagnable.
03:42Donc, cette élection municipale a laferté Saint-Aubin.
03:45Une fois de plus, à droite, aucun homme de votre camp n'a osé y aller
03:48face aux maires socialistes, sortant que tout le monde donnait gagnant.
03:52Vous êtes celle qui y va quand les hommes n'osent pas y aller ?
03:55Il y a un peu de ça, en tout cas, sur laferté Saint-Aubin.
03:57Oui, c'est clairement ce qui s'est passé quand je suis allée voir, à l'époque,
04:02le responsable de l'UMP sur le département.
04:06Je lui ai dit, écoute, voilà, j'envisage peut-être d'aller à laferté Saint-Aubin.
04:10Il m'avait répondu, vas-y, ça m'arrange bien, je n'ai personne à envoyer au casse-pipe.
04:15C'est d'autant plus étonnant que vous étiez arrivée dans cette ville seulement un an plus tôt.
04:18Les habitants ne vous connaissaient pas vraiment.
04:20Il y a 27 ans, vous battez le maire qui était en place depuis 13 ans.
04:24On dit souvent que les femmes n'osent pas se lancer en politique.
04:26Vous, vous vous lancez. Quel est votre secret ?
04:29Je me lance dans les combats pour lesquels je n'ai rien à perdre.
04:33C'est beaucoup plus facile. C'est très désinhibant.
04:37Et je me lance quand j'ai quelque chose à faire valoir.
04:43À la mairie de laferté Saint-Aubin, il y avait une forme d'usure du pouvoir.
04:46Il y avait une ville qui s'étendait beaucoup plus vite que ce que les habitants étaient capables d'assimiler et d'accepter.
04:52Et finalement, n'ayant rien à perdre à cette époque-là, je me suis dit, allons-y.
04:59Mais par contre, si on y va, il faut y aller franchement et on y va jusqu'au bout.
05:02Donc on a fait toute la ville en porte à porte.
05:04Ça nous a pris des semaines et des semaines.
05:07On a fait une communication énorme et ça a fonctionné.
05:10Mais ça fonctionne aussi à cause des hommes.
05:14Quand je suis arrivée à laferté Saint-Aubin, j'ai gagné parce que le maire en place n'a jamais cru un seul instant qu'une gamine de 27 ans était capable de le mettre en danger.
05:22Donc il n'a pas fait campagne. Il n'a pas défendu son territoire.
05:26J'y suis allée parce qu'il m'a sous-estimée.
05:28Et d'une certaine manière, ma prédécesseure sur la circonscription a fait un peu la même chose.
05:34Elle avait déjà réservé un espace pour fêter sa victoire le soir du premier tour.
05:40Quand on part trop gagnant dans sa tête, ça ne fonctionne pas.
05:44Aspertissement à vos futurs adversaires.
05:47En découvrant votre parcours, on va remonter dans le temps, un fait m'a étonné.
05:50Vous avez travaillé deux ans au Parlement européen avec Dominique Baudis.
05:54C'était à vos débuts, incarnation Dominique Baudis d'une droite modérée.
05:58Et puis vous avez cheminé aux côtés de Guillaume Pelletier, tenant d'une droite dure, figure même de l'extrême droite aujourd'hui puisqu'il a rejoint Éric Zemmour en 2022.
06:08Comment expliquer ce qui ressemble à un grand écart ?
06:11Dominique Baudis, c'est vraiment la rencontre professionnelle qui aura changé toute ma vie.
06:18Il est mort quelques jours après que j'ai été élue maire de la Ferté-Saint-Aubin.
06:24Et il ne se passe pas une semaine sans qu'à un moment donné, j'ai une pensée pour lui,
06:29en me demandant quel regard il porterait sur la situation politique qu'on est en train de traverser, par exemple.
06:37Guillaume Pelletier, c'est tout à fait différent.
06:40On s'est rencontrés en 2014, à un moment donné où il y a eu un grand renouvellement des élus en Sologne.
06:48Et à ce moment-là, on a eu envie de fédérer quelque chose et d'aller plus loin pour faire avancer le territoire.
06:55Au départ, je ne voulais pas rencontrer Guillaume Pelletier justement parce qu'il était le symbole de cette droite dure.
07:00Donc il a fallu qu'il s'arme de patience avant de réussir à me rencontrer,
07:07parce que vraiment, j'avais mis un stop et je ne voulais pas le rencontrer.
07:11Et finalement, on a fait plein de choses ensemble.
07:14À ce moment-là, il cherchait plutôt à cheminer vers une droite populaire qui était en quête de justice sociale.
07:20Il qualifiait d'ailleurs son engagement à l'extrême droite d'erreur de jeunesse.
07:25Et donc moi, à partir du moment où on travaillait sur des projets de territoire et où il était en quête de justice sociale, je m'y retrouvais.
07:32Et je m'y retrouvais totalement.
07:34Il a ensuite évolué vers l'extrême droite et à ce moment-là, les choses ont été très claires.
07:39Vous avez rencontré lui en 2022.
07:41Vous avez aussi quitté Les Républicains en 2022 quand Éric Ciotti en a pris la présidence.
07:45Depuis, c'est lui, Éric Ciotti, qui a quitté Les Républicains.
07:47Mais vous, vous n'y êtes pas revenu. Pourquoi ?
07:49Je vous disais tout à l'heure, la rencontre professionnelle de ma vie, la rencontre politique de ma vie, c'est Dominique Baudis.
07:55C'est cette ouverture sur le monde.
07:57C'est ce cheminement politique qu'il m'a permis d'avoir.
08:01Avec Éric Ciotti, moi, j'avais l'impression que finalement, si les choses vont mal, c'est toujours de la faute de l'immigration.
08:08L'immigration est un sujet sérieux, mais dire que tout est de la faute de l'immigration, ça n'est pas sérieux.
08:15Et c'est ce qui fait que, lorsqu'il est arrivé à la tête des Républicains, je ne me suis plus retrouvée dans ma famille politique.
08:20Donc, je l'ai quitté le jour de son élection.
08:23Vous siégez aujourd'hui au sein du groupe Liott.
08:26Je siège au sein du groupe Liott.
08:28Chez Les Républicains, je sens qu'il y a encore un petit peu de flottement sur la ligne politique.
08:33Moi, j'apprécie énormément la liberté que j'ai au sein du groupe Liott.
08:39Et il y a une chose que Dominique Baudis m'a apprise, c'est que les partis politiques,
08:43quand on peut prendre sa liberté, il ne faut jamais s'en priver.
08:48Il y a un autre homme politique dont on n'a pas parlé, mais vous connaissez depuis très longtemps.
08:51Depuis 2009, vous l'avez soutenu dans sa candidature à la primaire de la droite.
08:55Il a été l'un de vos premiers soutiens législatifs, et cet homme, c'est Michel Barnier.
08:59Comment est-ce que vous décririez votre relation avec Michel Barnier ?
09:03Eh bien, Michel Barnier, c'est effectivement une personnalité que j'ai rencontrée en 2009
09:08quand je suis arrivée au Parlement européen avec Dominique Baudis.
09:11Ils avaient eu un parcours politique commun.
09:15Je l'ai ensuite retrouvée en 2014 à la Ferté Saint-Aubin,
09:20puisqu'il y a une maison familiale.
09:23Il y est d'ailleurs assez régulièrement, et donc tout au long de ses 10 années de mairie à la Ferté Saint-Aubin,
09:28on a maintenu le lien. Je suis très amie avec l'un de ses fils.
09:32J'ai marié sa fille.
09:34C'est une personnalité dont j'ai toujours apprécié l'humilité et le respect.
09:43Il n'a jamais été obligé de me témoigner autant d'attention que ce qu'il a toujours fait,
09:51et ça m'a toujours touchée.
09:53Il a toujours écouté la perception que j'avais des choses, de l'actualité politique, etc.
09:58C'est une relation qui s'est nouée de manière informelle et amicale de cette manière-là.
10:03Constance de Pellichier, à peine élue maire en 2014, vous aviez prévenu que vous comptiez bien avoir des enfants et une vie de famille.
10:11Mais le 8 mars 2022, à l'occasion de la Journée des droits des femmes, vous postez ce message que je vais lire.
10:17Je formule le vœu que chacun trouve l'équilibre souhaitable entre la vie de famille et la vie professionnelle.
10:23Personnellement, je l'ai perdu.
10:25La vie politique se marie mal avec le postpartum et la maternité.
10:30Être une femme politique et une jeune maman, ce sont deux choses difficiles à concilier ?
10:34C'est compliqué.
10:36C'est compliqué, en particulier quand on a de jeunes enfants.
10:40J'ai eu une petite fille en 2021.
10:43Là, je suis en train d'allaiter ma fille au milieu d'une sainte barbe.
10:46Ça, c'est ma deuxième fille que j'ai eue en 2023.
10:49Donc, c'est compliqué.
10:52Les enfants se réveillent beaucoup la nuit.
10:54Donc, assurer la journée, c'est pas évident.
10:59Et puis, j'ai plongé dans la parentalité.
11:03Je ne m'attendais pas forcément à ça.
11:05Ça m'a fascinée.
11:07J'ai eu envie d'avoir du temps pour mes enfants.
11:10J'ai eu envie de continuer à avoir ce lien un peu sacré qu'une mère peut avoir avec son bébé
11:20et de passer les trois quarts de mes soirées hors de la maison, de peu les voir.
11:25En ce moment, je ne les vois quasiment pas le week-end.
11:27Avec votre mandat de député, j'imagine que c'est d'autant plus difficile.
11:30C'est difficile.
11:31Et donc, oui, d'une certaine manière, la vie politique exclut les mères.
11:35Parce que la vie politique est construite autour d'un emploi du temps,
11:42d'une certaine manière, qui est très difficilement compatible avec la maternité.
11:47J'avais fini par trouver un début de rythme à la Ferté en étant chez moi de 18h à 19h.
11:54Je repartais à 19h.
11:56Et ça veut dire que j'ai un mari très féministe,
12:00puisque c'est lui qui assume une grosse partie de la charge des enfants.
12:06Je vous propose de passer à notre quiz pour finir l'émission.
12:09Vous allez devoir compléter la phrase que je vais vous proposer.
12:11Quand la presse me compare à NKM, Nathalie Kosciusko-Morizet.
12:16Je n'ai jamais eu le sentiment d'être comme NKM.
12:18Je crois que ça tenait surtout à la question des cheveux et peut-être un peu physiquement.
12:24Mais NKM est une femme, je pense, moins empathique que moi, moins sensible que moi.
12:34C'est une femme dont j'admire le courage, mais à laquelle je ne me suis jamais complètement identifiée non plus.
12:41Communiquer sur les réseaux sociaux, je crois que ce n'est pas trop votre truc.
12:46J'ai horreur de ça.
12:47Je m'y mets par la force des choses.
12:51Mais en vacances, mon téléphone portable reste au fond d'un sac, sur une table de nuit.
12:57Je déconnecte très facilement.
13:00Et de fait, comme j'étais en fin de parcours politique, puisque je pensais prendre ma retraite politique en 2026,
13:06je n'alimentais plus du tout mes réseaux sociaux.
13:09Pour finir, le problème quand on est franco-belge.
13:12C'est votre cas.
13:14Ce n'est pas un problème, c'est une fierté, une chance dans la vie.
13:17D'autant plus que j'ai vécu quelques années en Belgique.
13:20Je suis très heureuse d'avoir cette double nationalité.
13:25Merci, Constance de Pellichi, d'être venue dans La Politique et moi.
13:28Merci à vous.
13:47Sous-titrage Société Radio-Canada

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