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De l’arche de Noé aux camps de réfugiés, du Togo à l’Ukraine, de l’art ancien à nos jours… quelque 200 œuvres témoignent de l’expérience humaine de l’exil. Une exposition passionnante, à découvrir jusqu’au 20 janvier 2025.
Transcription
00:00Je suis ravie de vous accueillir au Louvre-Lens.
00:02Je vais vous inviter à visiter avec moi l'exposition Exil, regard d'artiste.
00:06Une exposition réunit environ 200 oeuvres,
00:09des oeuvres d'artistes anciens comme des oeuvres d'artistes contemporains.
00:13L'oeuvre la plus ancienne a environ 4500 ans.
00:16L'oeuvre la plus récente a été créée quelques semaines avant l'exposition,
00:20au cours de l'été 2024.
00:23Et le point aussi important à dire,
00:25c'est que l'exposition regroupe des oeuvres de tous les continents,
00:29dans une sorte d'odyssée que je vais vous inviter à un voyage partagé,
00:33qui est lié à l'actualité d'aujourd'hui,
00:34mais qui est lié aussi à l'actualité du monde depuis sa création.
00:38Allons-y !
00:42Alors dans cette visite, j'ai choisi de vous parler de trois oeuvres en particulier.
00:46Et celle-ci, qui est juste derrière moi,
00:49c'est la plus ancienne des trois oeuvres que nous allons évoquer ensemble.
00:52C'est une oeuvre qui date du tout début du XVIIe siècle.
00:55Elle est l'oeuvre d'un peintre célèbre en son temps,
00:57qui s'appelle Antoine Carache,
00:59et qui a peint Le Déluge.
01:02Elle se trouve dans la première salle de l'exposition,
01:05celle qui installe l'idée que,
01:10par rapport aux textes anciens, nous sommes un peu tous désexilés.
01:12Le Déluge, c'est quelque chose que vous connaissez,
01:16on l'évoque souvent par l'Arche de Noé.
01:18C'est sans doute lié à des phénomènes climatiques qui ont existé,
01:21et qui décrit un phénomène climatique
01:23dont, malheureusement, beaucoup d'hommes, de femmes et d'enfants de l'époque
01:28ont été victimes.
01:29Et c'est ce que nous montre Antoine Carache.
01:31Il nous montre celles et ceux qui, malheureusement,
01:35n'ont pas survécu,
01:36dans une dimension humaine assez tragique,
01:39mais en même temps,
01:40cette tragédie-là qui est représentée
01:43montre aussi l'humanité de ces personnages
01:45qui sont emportés dans ce moment terrifiant de la montée des eaux,
01:50mais qui essayent aussi de s'aider les uns les autres,
01:52de s'accompagner les uns les autres.
01:55Ici, je vais vous parler d'une œuvre qui m'est particulièrement chère,
01:58qui compte beaucoup pour moi,
01:59qui est la deuxième œuvre dont je voulais vous parler,
02:02qui est un grand chef-d'œuvre de Gustave Courbet,
02:06qui est certainement pour lui son chef-d'œuvre de l'Exil.
02:08Gustave Courbet, c'est un artiste du XIXe siècle
02:11qui a été accusé, de manière assez absurde,
02:15d'avoir démantelé tout seul la colonne Vendôme.
02:18Ensuite, il est condamné, emprisonné,
02:22et on exige de lui une amende très forte qu'il ne peut pas payer.
02:26Il est donc contraint de s'exiler en Suisse.
02:28Cette œuvre évoque pour moi
02:31quelqu'un qui serait fixé dans un endroit,
02:34avec la nostalgie,
02:35quoi il a pu avoir accès, mais où il n'a plus accès.
02:39Ce tableau est un tableau de grande dimension,
02:41où il représente de son temps
02:44un lieu qui est le château de Chillon.
02:47Courbet est installé pas très loin de là,
02:49il est installé à la Tour de Pels,
02:50donc il voit ce lieu,
02:53et ce lieu le nourrit, l'inspire.
02:56Mais l'inspire de manière extrêmement intéressante,
02:58parce que là, il mêle à la fois
03:01le souvenir de ses propres toiles,
03:04cette vallée d'Ornans, dans le Jura français,
03:07où il n'est jamais revenu,
03:08puisqu'il meurt malheureusement en exil,
03:11et toute la partie gauche du tableau
03:14rend sensible cette évocation des falaises
03:17avec leur matière, avec leur couleur d'ornans.
03:21Et en même temps, dans la partie droite,
03:24on est dans un courbet beaucoup plus romantique
03:26qu'il ne l'est souvent,
03:27avec une évocation du lac,
03:30du côté vert des eaux,
03:32avec un très beau ciel, un ciel magnifique,
03:35un ciel vraiment romantique,
03:37où se jouent des reflets d'ailleurs
03:39entre le ciel, le château et le lac.
03:41Alors c'est la troisième œuvre que je voulais vous montrer.
03:45C'est l'œuvre d'un artiste contemporain,
03:47Raled Daoua, qui a fui la Syrie pour Paris
03:50il y a quelques années,
03:51et qui a conçu cette œuvre très forte,
03:54qui est une maquette, qui est une sculpture,
03:56maquette qui représente une rue de Damas,
03:59sa ville natale,
04:01et une rue de Damas détruite par la guerre.
04:05Le titre de l'œuvre dit bien ce côté personnel,
04:07dit bien ce côté à la fois de profondeur du souvenir
04:11et presque de douleur du souvenir,
04:13puisque le titre de l'œuvre, c'est « Voici mon cœur ».
04:15Ce qui me touche vraiment,
04:17c'est tous les petits détails, les voitures, les objets.
04:21Il n'y a plus personne, mais il y a encore tout ça qui est là.
04:24Moi, c'est un grand désarroi.
04:27Beaucoup d'émotions.
04:28Tout est parti, tout est perdu.
04:31Daoua, à la fois, s'inspire de dessins, de photographies,
04:34des photographies personnelles,
04:35comme des photographies, j'allais dire, de presse,
04:38mais il s'inspire aussi de la manière dont il ressent lui-même toujours son œuvre.
04:43Et quand il l'a montée, il m'a dit,
04:45« Tu sais, c'est formidable et je suis très contente qu'elle soit présentée ici,
04:49mais en même temps, c'est une œuvre tellement forte pour moi
04:53que c'est difficile pour moi de la quitter. »
04:56Et je lui ai dit,
04:58« Raled, je comprends vraiment parce que c'est une œuvre très émouvante
05:00et qui raconte ton histoire,
05:02mais quand moi, je la vois,
05:04je vois certes Damas dans tes yeux,
05:07mais je vois aussi Carthife,
05:09mais je vois aussi Gaza
05:11ou je vois aussi Saint-Lô en 1944
05:14ou Dresden en 1945, d'autres éléments. »
05:17Et alors, il m'a regardé et on a beaucoup échangé, il m'a dit,
05:20« D'accord, si tu vois ça aussi, elle est bien là. »
05:23Donc, dans cette section qui parle de l'exil,
05:27de se souvenir, de ses mémoires meurtries,
05:31mais de ses mémoires aussi créatives que Raled Daoua souligne ici.

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