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Vendée Globe 2024 / Rencontre avec Sam Davies, Initiatives-Cœur

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Sport
Transcription
00:00Pour commencer, Sam, est-ce que tu peux te présenter, tout simplement ?
00:03Je m'appelle Sam Davis, je suis skipper du bateau Initiatives-Coeur.
00:09Je suis anglaise, mais j'habite en France, en Bretagne.
00:13Et là, ça va être mon quatrième Vendée Globe.
00:17Alors raconte-nous ton histoire avec la voile, parce que toi, t'es née sur un bateau
00:22et la voile a très vite fait partie de ta vie.
00:26Oui, je suis née à terre quand même, mais d'une famille de marins.
00:31Et mes deux grands-pères étaient marins professionnels, en fait.
00:36Donc, il y avait un grand-père qui était commandant sous-marinier,
00:41qui a fait la Deuxième Guerre mondiale à l'âge de 26 ans,
00:46et il était au commandant sous-marin.
00:49Et il était très fort, a priori.
00:53Et l'autre grand-père avait un chantier de navale, et lui, il fabriquait des bateaux.
01:00Et il a déjà fabriqué pas mal de...
01:04Beaucoup de bateaux de travail, un peu de bateaux militaires,
01:07et puis son passion était la course au large, mais bateau à motard.
01:12Donc lui, il rigotait sur les bateaux rapides à son époque.
01:18Et mes deux parents, donc ils étaient tous les deux les enfants des marins.
01:23Déjà, ils étaient passionnés par la mer,
01:25et j'ai eu de la chance que mes parents avaient toujours un bateau.
01:29Au début, c'était un tout petit bateau motard,
01:32et quand je suis née, ils avaient passé en voilier,
01:36puisque c'est plus safe quand on a un bébé à bord.
01:40Donc, j'ai grandi un peu sur un bateau à côté de l'eau,
01:47mais pour le plaisir, donc les week-ends, les vacances,
01:52les aventures en famille depuis toute petite jusqu'à...
01:58Pendant tout mon enfance, en fait.
02:00Alors, t'es quand même partie dans un cursus scolaire classique,
02:04t'es devenue ingénieure,
02:06mais rapidement, quand même, la voile et la course au large t'ont rappelé à l'ordre.
02:11T'as eu envie quand même d'aller voir si tu pouvais pas tracer ton sillon
02:17sur la course au large ?
02:20Pas exactement, en fait, moi, j'étais...
02:23J'étais passionnée au début par la natation synchronisée, donc rien à voir.
02:27Mais à force de naviguer, j'avais vu ces bateaux incroyables
02:30dans le Solent, en Angleterre,
02:33qui faisaient des grandes courses autour du monde,
02:35ou les Fastnet Race, ou l'Admiral's Cup,
02:39et c'était les bateaux un peu du dernier génération,
02:43haute technologie, et les bateaux me passionnaient.
02:47Les courses aussi, ça me faisait un peu rêver,
02:49mais j'ai jamais imaginé, moi, sur un de ces bateaux-là,
02:52parce que les courses, ça me semblait bien trop dur à faire et trop long.
02:57Mais j'étais passionnée par les bateaux, et je voulais rentrer dans ce milieu-là,
03:01et c'est pour ça que...
03:03En fait, je voulais être architecte navale,
03:05ou ingénieure en bureau d'études, ou quelque chose comme ça,
03:08et c'est pour ça que j'ai choisi de faire les études d'ingénieur,
03:13et j'ai eu ce que j'ai fait à Cambridge University,
03:16j'ai fait un Master of Engineering.
03:20Et donc, pendant quelques années, j'étais aux études,
03:23et je ne regardais pas trop les bateaux pour ne pas être distraite par les bateaux,
03:28et pour bien faire mon diplôme avant d'aller ailleurs.
03:32Et donc, moi, sur les bateaux,
03:34mes premiers pas dans la course large professionnelle,
03:38en fait, c'était quand j'ai fait un stage avec un architecte navale anglais
03:43qui s'appelle Rob Humphreys,
03:45entre le bac et la grande école, comme on dit en France,
03:51et j'ai fait neuf mois de stage avec lui,
03:53et dessiné des bateaux des courses autour du monde à l'époque.
03:57Et du coup, j'ai rencontré un sorte de réseau des marins professionnels
04:03grâce à mon stage avec lui,
04:06et en même temps, je naviguais un petit peu,
04:08je faisais des courses, des regattes sur les habitables,
04:13parce que je commençais à bien aimer ça,
04:16et donc, j'ai mis un peu mon réseau d'architecte navale
04:20et ce réseau de début de passion de regatter sur les bateaux ensemble,
04:26et ça m'a ouvert des portes, en fait,
04:27d'avoir un peu plus d'expérience dans la course large.
04:31Et puis donc, rapidement, la course large arrive,
04:33première expérience en équipage,
04:36et puis va arriver l'envie de naviguer en solitaire quand même assez rapidement,
04:42et là, il y a ce franchissement de la manche, tout simplement,
04:47parce que la course en solo, c'est plutôt en France que ça se passe.
04:51Oui, mais en fait, oui,
04:52mais pour moi, ça n'a pas passé si vite que ça,
04:57et mes premiers rêves, en fait,
04:59quand j'ai commencé à me rendre compte que j'étais capable de faire la course large,
05:03et très large et professionnelle,
05:07moi, je voulais faire les tours du monde en équipage,
05:10et j'ai eu cette opportunité de faire une trophée Jules Verne,
05:15donc mon premier tour du monde,
05:18j'ai été sélectionnée de faire partie de l'équipage,
05:22c'était un équipage féminin pour un tentative sur une trophée Jules Verne,
05:26et quand j'ai eu mon contrat,
05:29et jamais j'imaginais d'avoir un contrat de travail sur un bateau à cet âge-là,
05:34j'avais 22 ans,
05:36donc à 23 ans, j'ai fait mon premier tour du monde,
05:38et c'était en trophée Jules Verne,
05:40et pour moi, c'était incroyable, j'ai appris énormément de choses,
05:44et c'était vraiment une belle expérience qui a duré longtemps,
05:50et après, j'ai fait un peu la préparation olympique, de voile olympique,
05:54donc j'ai fait plusieurs choses,
05:57avant de basculer sur les courses en solitaire,
06:01quand j'avais croisé une très jeune Hélène MacArthur,
06:07moi, le tour du monde était fini,
06:10et j'avais un peu de temps libre,
06:12et du coup, j'ai aidé Hélène à préparer son première route de voile,
06:17et c'est comme ça que j'ai découvert le monde de la course large en français,
06:22et la course large en équipage réduit, donc en double rond en solitaire,
06:26c'est grâce à moi que j'ai fait côté d'Hélène,
06:33pour préparer cette première route du monde qu'elle avait faite,
06:37et puis ça me donnait un petit peu envie, oui.
06:41Et donc déjà, est-ce qu'il y a des idées de Vendée Globe, ou pas encore,
06:44et c'est step by step ?
06:45Ah non, pour moi, le Vendée Globe, je voulais même pas le faire,
06:49parce que c'était pour les fous aventuriers,
06:53et moi, en fait, j'avais fait une première course autour du monde en équipage,
06:59mais vraiment à la régate,
07:02où il y avait, moi j'étais numéro 1 sur le bateau,
07:04il y avait des barreuses, c'était vraiment...
07:08Cloisonné.
07:09Oui, cloisonné, et après, je suis allée très vite en régate du match-race et de la voile olympique,
07:19où c'est de la régate pure, et c'est haut de niveau,
07:23et pour moi, le Vendée Globe, c'était l'aventure,
07:28c'était pas la régate des bananes, les courses côtiers, les empannages, la stratégie et tout ça,
07:33et moi, j'étais passionnée par la compétition et la régate,
07:38et le Vendée Globe ne m'a pas attirée à ce moment-là,
07:43parce que c'est plus la solitaire du figure-o, les courses du figure-o, le mini-transat,
07:49le mini-transat, parce que c'était une façon de rentrer dans ce milieu pour voir si c'est possible,
07:54et puis la classe figure-o, les courses de figure-o,
07:58parce que c'est là où je trouvais l'équivalence de la voile olympique au niveau de la régate sur cette course-là,
08:06qui avait quand même une sorte d'appel large aussi,
08:10mais on est toujours en contact avec tous les bateaux,
08:16et pour moi, le Vendée Globe, ce n'était pas ça,
08:20c'était plus la maîtrise d'un bateau et de réussir à le mener jusqu'au bout sur du monde,
08:29qu'à l'époque où je commençais la course large,
08:34moi j'ai envie de me battre, de me bagarrer côte à côte des autres sur les circuits plus petits.
08:42Donc c'est ce que tu vas faire pendant quelques années, en mini, en figure-o,
08:46et à quel moment naît l'idée du Vendée Globe ?
08:50Déjà de rentrer sur ces circuits, mini-transat, la solitaire du figure-o,
08:57c'est là où je rencontre Michel Dejoyeux, Loic Perron, un peu les stars du Vendée Globe à l'époque,
09:07et je découvre la course que j'avais vue un peu plus de l'extérieur depuis l'Angleterre,
09:19la course n'a pas la même image à l'époque en Angleterre,
09:25mais c'était plus juste de découvrir la course, pas imaginer moi sur la course,
09:32parce que pareil, j'étais sur le circuit figure-o et je voulais vraiment m'améliorer,
09:38je voulais rester là et progresser sur ce circuit-là.
09:41Mais à ce moment-là, j'ai été contactée par le projet Roxy,
09:49qui à l'époque, c'était Anne Liardet qui avait fait un super Vendée Globe avec Roxy en 2004,
10:01et à ce moment-là, Roxy voulait donner, après Anne, l'opportunité à quelqu'un d'autre,
10:07il voulait changer de skipper, et donc j'étais une des filles qui étaient contactées pour ce projet-là,
10:17et c'est là où j'ai dit « waouh, ils me proposent ça ? ».
10:24Donc, pour moi, ça m'a aidée à me confirmer que j'étais prête et que j'étais capable,
10:32parce que quelqu'un vient me chercher pour faire ça,
10:35et c'est juste là où je commence à vraiment penser au Vendée Globe.
10:39Et c'est un Vendée Globe qui va très bien se passer, sur un bateau un peu mythique quand même,
10:45si les bateaux ont une âme, tu vas nous raconter,
10:48est-ce que celui-là en a une, mais il avait déjà gagné deux éditions ce bateau-là ?
10:51Raconte-nous ce qui t'en reste succinctement de cette première édition,
10:56qui t'a ensuite donné le goût de continuer, et 20 ans après, t'es encore là, sur cette course,
11:02ça a apporté quand même ta vie ?
11:04C'était vraiment un chouette projet, d'avoir quelqu'un et d'avoir Roxy qui sont venues,
11:11et qui ont dit, nous on veut toi, et on veut que c'est toi qui fais à ta façon,
11:16entouré par les personnes que tu veux, on a confiance que tu vas faire ça super bien.
11:25Et eux aussi, ils cherchaient un peu comme moi, la performance,
11:31cette compétitive où ils avaient fait un premier Vendée avec un très vieux bateau,
11:38et ils avaient acheté ce super bateau mythique pour remonter juste un peu au niveau de performance,
11:48mais en 2008, à ce moment-là, il y avait 11 bateaux neufs qui l'ont été construit,
11:56et en fait mon bateau Roxy, finalement, ils l'avaient upgradé par rapport à ce qu'ils avaient en 2004,
12:03mais finalement, sur papier, je crois que j'étais 25, 26ème en vitesse pure,
12:11parce que finalement, c'était un bateau avec une belle masse, énorme, puisqu'il avait fait deux victoires,
12:17mais le bateau était un peu plus ancien, donc j'avais quand même un vieux bateau en 2008,
12:28mais j'avais de la chance, parce que j'avais des moyennes, et j'avais une super équipe,
12:34et j'avais aussi l'anecdote que j'avais gardée un peu depuis le prépa olympique, le matrice, le figo,
12:43à faire le mieux que je pouvais avec les outils que j'avais,
12:49et donc j'ai gardé, même avec un vieux bateau, cet esprit de performance,
12:56et puis ça a bien marché, puisque j'ai fini 4ème, mais c'était aussi une année très très dure,
13:04et donc j'avais un super bateau aussi, puisque c'était un bateau qui avait déjà été fiabilisé par Michel Hège,
13:12et puis Vincent Rieu, et leurs équipes, et puis tenu super bien par mon équipe,
13:19donc c'était un bateau qui était solide, et je tombais sur une année très très dure,
13:23où il y avait énormément d'abandon, et je crois qu'on était 11 bateaux à l'arrivée, sur 30 au départ,
13:31donc pour cette course-là, la clé de la performance aussi était l'endurance,
13:38et là où j'avais la chance, et le sens marin aussi,
13:42et puis on a réussi à monter petit à petit, doubler le flotte qui s'explosait un peu à droite à gauche,
13:50avec ces conditions météo qui étaient très dures, et puis j'ai fini 4ème sur ce premier Vendée Globe,
13:57qui était loin de là de ce que j'avais imaginé au départ, que j'étais capable.
14:03Et du coup ça t'ouvre des perspectives, en te disant, bah ouais, c'est fait pour moi en fait ça ?
14:09Oui, il y a deux choses, parce que quand moi, c'est Roxy qui est venue me chercher,
14:15moi je ne suis pas quelqu'un qui a rêvé de faire le Vendée Globe depuis que j'ai 10 ans, loin de là,
14:20et après je ne suis pas très rêveuse, c'est mon côté ingénieur,
14:26donc j'imagine faire les choses que quand je sais que je suis capable de faire ça super bien.
14:33Mais quand j'ai un peu signé de faire le Vendée Globe,
14:40j'étais, wow, j'espère que déjà je suis faite pour ça, et j'espère que ça va être plaisir et pas trop dur,
14:51parce qu'on ne sait pas en fait avant qu'on fasse un premier Vendée Globe si on est faite pour ça,
14:57si on va bien aimer, en fait ça fait partie du Vendée Globe, du magique,
15:02il y a toujours tellement de points d'interrogation, même quand on en a fait une on ne sait pas trop pour la prochaine,
15:07mais pour la première on se dit j'espère que ça va, parce que trois mois si on n'aime pas ça c'est bon.
15:14Mais je m'appelle juste après une semaine, ou déjà de commencer à naviguer sur bateau,
15:20de faire les autres courses et de préparer ce Vendée 2008,
15:24j'ai ressenti tout de suite que c'est pour moi, j'adore ça,
15:33donc assez vite pendant ce premier Vendée Globe j'ai dit mais il faut absolument que je refais ça,
15:39j'espère que ce n'est pas la seule fois de ma vie que je vais faire ça, parce que c'est trop incroyable,
15:45donc déjà c'est un côté plaisir, un côté je me rends compte que je suis capable et que j'aime bien ça,
15:55même je dis ça mais il y a plein de moments où c'est hyper dur sur le moment,
16:00pourquoi je fais ça, mais la plupart du temps j'ai hâte, j'espère que je vais avoir une deuxième opportunité de faire le Vendée Globe,
16:09et puis le fait que j'ai fini quatrième, j'ai fait la preuve aussi à moi-même que j'étais à 1,20 du podium,
16:18j'étais bien plus loin du 24 parce qu'il y avait des gros écarts entre 1, 2, 3,
16:26donc là j'avais un vieux bateau, si j'ai quelque chose, si je suis aux armes égales, là en fait je suis capable de faire quelque chose de bien,
16:39donc c'est non seulement le fait de dire voilà j'ai envie, j'ai hâte de refaire, mais aussi en plus je peux vraiment faire une perf.
16:49Est-ce que cette première édition, ce souvenir un peu, je ne sais pas comment tu le bichonne, tu le caresse,
16:56est-ce que ce souvenir a servi de moteur pour le reste, pour retrouver ce plaisir de la première édition ?
17:03Oui carrément, le souvenir, cette première édition, je pense que pour tout le monde la première Vendée Globe ça reste corvé dans la tête quoi qu'il arrive,
17:13et c'est sûr il y a les gens qui me demandent pourquoi tu reviens une quatrième fois,
17:20je dis en fait c'est parce que je cherche encore ce que je sais que je suis capable,
17:26que je n'ai pas encore réussi à faire depuis cette première édition en 2008.
17:30Il y a 4 ans, c'était une édition qui était avec un bateau compétitif,
17:37tu as rencontré des difficultés, tu as fait le choix quand même de continuer la course hors course,
17:43de continuer le tour du monde plus exactement.
17:46Quel souvenir tu gardes de cette édition et de ce tour du monde quand même ?
17:52Et donc quand même éprouvant, quand même fatigant, quand même joyeux, quand même avec des moments de bonheur,
17:57mais ça a dû être quand même un truc très particulier.
18:01Ah oui la dernière édition, je pense que je n'ai jamais été autant dans les émotions haut et bas,
18:09parce que oui c'était vraiment une épreuve très difficile sur le moment,
18:17mais quand j'ai passé et je dis la ligne d'arrivée,
18:22mais ce n'était même pas la ligne d'arrivée pour moi parce que j'étais hors course,
18:26mais quand même l'organisation, je crois qu'ils étaient là, ils avaient mis quand même la ligne pour moi.
18:31Et quand j'ai passé cette ligne et que j'ai remonté mon bateau dans les Channels de l'Est de Pologne,
18:38j'avais l'impression d'avoir une victoire incroyable, d'avoir réussi à boucler le boucle,
18:44malgré tout ce qu'on avait reçu pendant ce tour du monde qui était très très dur.
18:52Et pour moi c'était un énorme apprentissage et découverte de où sont les limites.
19:02Et puis aussi pour moi, je pense qu'avant ce Vendée Globe et avant chaque Vendée Globe,
19:13on a une impression énorme, on a tous envie de finir le Vendée Globe, de revenir à Sabdelone.
19:19Et mon premier Vendée Globe, j'ai eu la chance, j'ai fini en plus au quatrième et donc je suis revenue de monter le channel.
19:26Et je pense que depuis que je navigue chez Initiatives-Cœur, c'est encore plus fort.
19:32Mais quand on fait le Vendée Globe, on a envie de finir et donc on nous met une impression énorme.
19:38Finir, il faut finir à tout prix, peut-être pas tout le monde, mais moi en tout cas j'ai toujours voulu boucler le boucle,
19:46à un point où je vais prendre un peu plus de nourriture en me disant si j'ai une panne, je vais continuer lentement, mais je vais finir quand même.
19:53Et du coup là, avant ce Vendée Globe-là, je pense que depuis que je navigue avec Initiatives-Cœur, qui est un projet qui défend une cause aussi,
20:06en fait j'ai deux raisons de boucler le boucle parce que si j'abandonne la course, j'ai vécu ça sur d'autres courses,
20:14le fonction un clic un cœur, ce qui nous permet de lever de l'argent pour sauver les enfants avec Initiatives-Cœur,
20:24si j'abandonne plus tôt dans la course, tu s'écroules en fait, les clics s'arrêtent, les dons réduisent et puis on va sauver moins d'enfants.
20:37Donc moi, en plus de la pression du Vendée Globe pour les sponsors, pour moi, pour le public, que j'ai envie de finir la course,
20:45en fait j'ai cette pression-là pour sauver les enfants, il faut aussi finir la course et j'ai rendu compte assez longtemps après l'édition 2020
20:55qu'en fait j'ai parti en 2020 mais avec une pression énorme à finir et c'est encore plus la déception quand on a un avari et là en plus c'était un avari sur un accident
21:08qui m'a fait peur, qui m'a cassé les côtes, qui m'a fait mal, donc tout ça s'ajoutait en fait, c'était des émotions hyper dures à gérer à Cape Town quand j'ai abandonné le Vendée Globe.
21:23Mais par contre le fait d'avoir travaillé avant dans ma tête, avec ma famille, avec l'équipe, en disant si jamais quelque chose arrive on va essayer à tout prix de boucler hors course la course
21:36parce que pour moi c'est important d'emmener mon bateau autour du monde quand même, c'est un bateau en opportunité incroyable et qu'on a réussi à repartir, à réparer le bateau et moi à repartir,
21:50en fait ça m'a fait une preuve que c'est moins grave que ça d'abandonner le Vendée Globe parce qu'on était capable, avec le projet Initiatives-Cas, à faire quelque chose d'incroyable, quelque chose de bel et même sauver plus d'enfants que peut-être j'aurais pu si j'avais été en course
22:07et ça m'a en fait eu cette expérience 2020 qui était hyper dure, hyper riche en émotions, solidarité, il y a plein de choses, des hauts, des bas, très bas et puis revenir et pour moi finalement ça m'a été une boost de confiance
22:29et aussi un soulagement de dire en fait maintenant je suis là en 2024 et j'ai beaucoup moins de cette lourdade et il faut finir pour sauver les enfants, en fait j'essaie qu'on est capable de faire quoi qu'il arrive quelque chose d'incroyable chaque fois on part sur le Vendée Globe.
22:48C'est ce qu'on appelle l'expérience.
22:50Peut-être c'est l'expérience, je ne sais pas.
22:54Ce cycle-là de 2024, tu as upgradé ton bateau pour le faire suivre, le niveau sportif qui a continué à monter, il y a une concurrence incroyable, un niveau sportif passionnant et tu as confirmé ces deux dernières années que tu étais l'une des actrices de ce match aux avant de la flotte, ça veut dire que sportivement tu as encore plus d'ambition que tu n'en as jamais eu ?
23:23Je pense que j'ai toujours eu des ambitions sportives, ça n'a pas changé mais là enfin que j'ai eu la chance de partir quasiment aux armes égales, de faire vrouiller et ça c'est incroyable, je suis hyper fière et je me rends compte de la chance que j'ai aussi d'avoir ce soutien dans ce projet Initiatives-Cœur, on n'a pas le plus gros budget ou la plus grosse équipe.
23:52Mais c'est un projet qui monte en puissance et qui reconnaît aussi que la performance est importante, même si on navigue aussi pour sauver les enfants, on a deux objectifs, mais cet objectif performance est important aussi pour l'association.
24:12Oui j'ai eu la chance d'avoir un nouveau bateau, pour moi je n'ai jamais eu ça, le bateau Initiatives-Cœur 4 avec qui je vais faire ce Vendée Globe a été construit en 2022, on a fini chez nous à Lorient avec l'équipe Initiatives-Cœur, avec l'équipe technique.
24:33Le bateau n'est pas complètement dessiné autour de moi parce que c'est un V2 d'un manoir de 2020, mais j'ai eu la chance de pouvoir participer dans le design du bateau pour essayer d'adapter sur la façon que je navigue, avec l'expérience que j'ai depuis les autres Vendée Globe.
24:57J'ai travaillé avec Sam Manua, avec mon équipe technique pour essayer de mettre le bateau comme ça marche le mieux pour moi, ça c'est une chance énorme d'avoir ça.
25:12Et là tu t'attends à quoi sur ce Vendée Globe là, sportivement j'entends ?
25:19Sportivement, c'est là où c'est top de partir avec un bateau, je pense qu'il y a des bateaux qui sont encore plus neufs que le mien parce que c'est un design de 2020, mais on a eu la chance de mettre des nouveaux foils cette année,
25:37j'ai fait la preuve sur ces deux transats au début de cette année que mon bateau et moi sommes capables d'aller vite et parfois au moins rester dans le match.
25:52Donc moi je cherche ça en fait sur ce Vendée Globe, de pouvoir faire le tour du monde entier, sans collision, bien sûr on va avoir les avaries du monde, les problèmes,
26:08mais si je peux faire ce Vendée Globe, c'est en restant dans le match, c'est ça que je cherche, de faire la regatte tout autour du monde.
26:17J'ai eu la chance en 2020, j'étais dans le match au début, mais avec un bateau un peu plus ancien, c'était quand même un bateau d'occasion que j'ai eu en 2020, jusqu'à ce que j'ai eu cette collision.
26:29Mais après j'étais déçue, je n'étais plus en course et ce n'est pas pareil.
26:35Donc pour moi c'est ça, c'est de naviguer comme je sais faire et comme j'ai fait sur les deux transats du début de cette année 2024.
26:45Mais pendant les 70 jours qu'on va faire tout autour du monde, et si je peux faire ça, voilà je suis très très fière.
26:55Est-ce que vous allez pouvoir jouer comme vous nous l'avez montré justement sur même on peut dire les quatre dernières transats de ces dix derniers mois,
27:05avec ce niveau-là d'intensité, d'engagement des skippers sur une telle durée ?
27:12Nous c'est vraiment la question qu'on se pose tous et évidemment vous aussi.
27:17Est-ce que toi tu penses que c'est possible de maintenir ce niveau d'engagement sur trois mois ?
27:24C'est une question que je me pose aussi.
27:27Moi je suis hyper fière parce que j'ai réussi à faire ça sur deux transats qui étaient assez rapprochés les deux.
27:33Donc c'était un bon exercice au début de l'année en faisant les deux,
27:37parce que le deuxième on commence fatigué donc ça simule un petit peu ce besoin d'endurance de pouvoir maintenir sur plusieurs semaines.
27:48Mais non on n'a pas encore fait ça depuis quatre ans.
27:52Mais la flotte qui a fait le Vendée Globe 2020, et là il y avait une belle match avec une dizaine de bateaux, voire plus.
28:00Ils étaient bien capables.
28:03Moi je me dis est-ce que je suis capable de faire ça pendant 70 jours ?
28:07Dix fois ce qu'on a fait sur la Transat CIC, ça va être dur.
28:12Mais je pense que quand on a les autres bateaux à côté qui sont en train de faire la même chose,
28:17et on est tous dans les mêmes conditions, on va tous avoir les petits problèmes, les gros problèmes.
28:27C'est sûr que c'est ça qu'on va chercher.
28:30C'est ça qu'on vient de chercher, c'est cette match.
28:35Une fois quand on est bateau à côté, c'est une course.
28:38En fait on oublie un peu tout le reste.
28:41Mais je pense que c'est bien possible.
28:44Mais je n'ai pas trop envie de voir les têtes de nue à l'arrivée.
28:49Il va falloir se reposer un petit peu après je pense.
28:52Le niveau d'engagement justement, il dépend, tu viens de le dire,
28:56de ton entourage direct, de ce que tu as autour de toi, la flotte, de ce que tu peux jouer.
29:03Comment placer le curseur au bon endroit ?
29:06Comment gérer l'engagement et gérer la skippeuse et récupérer le physique ?
29:15J'ai l'impression que c'est l'une des clés de ce Vendée.
29:18C'est la gestion humaine sur ces bateaux extrêmement sollicitant, extrêmement dure.
29:23C'est à celui qui sera le plus lucide, le plus longtemps,
29:27sur sa gestion perso pour placer les attaques au bon moment ?
29:31Oui, je pense que c'est là où on va découvrir l'ergonomie des bateaux,
29:39comment on peut moins souffrir sur la durée sur nos bateaux.
29:44Ça va nous aider à rester lucide, à rester à l'attaque.
29:51Et puis aussi, si on est trop cramé, on peut faire des bêtises
29:57qui peuvent coûter les plats sur la course,
29:59mais qui peuvent aussi coûter des gros dégâts sur nos bateaux ou voire pire.
30:05Et c'est là où je pense que c'est important de se rappeler.
30:09Oui, c'est bien sûr, c'est top pour me regarder autour de nous,
30:14de regarder les autres, le match et tout,
30:17mais en tout cas, pour moi, je sais comment je dois naviguer avec mon bateau.
30:24Et là où je suis super contente d'avoir travaillé très bien avec mon équipe
30:30depuis deux ans sur tout le côté performance, réglage, tous les capteurs.
30:39Je connais les charges des alarmes.
30:42En fait, j'ai un bible entier pour comment mener mon bateau.
30:46Et je me connais pas mal aussi.
30:50Donc, je sais et j'ai un peu essayé de faire ça au début de cette année sur les deux transats.
30:55Il y a des moments où en fait, il ne faut pas regarder trop les autres non plus
30:58parce qu'on peut être emmené à faire des bêtises.
31:02Peut-être se mettre trop dans le rouge,
31:05peut-être faire une stratégie qu'on n'avait pas prévue de faire
31:08parce qu'on est emmené par un groupe sur un endroit qu'on n'avait pas choisi de faire.
31:17Donc, il y a plein de moments où en fait, il faut aussi un peu rester dans sa bulle un peu.
31:24Et en avant confiance qu'en fait, même s'il n'y avait personne autour de soi,
31:29en tout cas moi avec mon bible technique de mon bateau qu'on a fait avec l'équipe,
31:35si je ne vois plus personne, je sais que je suis encore capable d'être à 100% et faire les bons choix.
31:43Et je pense que c'est ça, c'est de trouver l'équilibre entre le piège de se mettre dans le rouge
31:51à cause de trop regarder les autres.
31:54Mais si on ne les regarde pas trop non plus, ça peut être pas bien.
31:59Donc, il faut mettre le curseur bien.
32:04Parce que sur le Vendée Globe, à la différence des Transat,
32:08c'est qu'il y a quand même pas mal de phases où si tu racles le système météo que les autres prennent,
32:13tu risques d'être décroché, d'avoir du mal à revenir.
32:16C'est un peu la différence je trouve avec les Transat, non ?
32:20Sur toutes les courses, ça dépend des métiers.
32:23Il peut y avoir un train à ne pas rater et aussi il peut y avoir une compression de la flotte
32:32où on se retrouve tous, même ceux qui ont eu 500 000 d'avance,
32:37et on se retrouve tous dans le même parking.
32:40Donc, c'est la magie aussi de la course large, c'est qu'on ne sait pas trop avant qu'on parte,
32:45c'est ce qu'on va voir.
32:47Donc, il faut être prête à soit appuyer pied au plancher pour pouvoir partir dans le bon wagon,
32:57mais aussi il faut avoir une bonne analyse du métier pour dire,
33:03en fait là, si je suis à fond, je vais user trop mon bateau
33:08et il faut qu'il me reste des voiles pour remonter l'Atlantique.
33:12Et de toute façon, là, on va se retrouver dans l'anticyclone dans le Pacifique Sud,
33:17donc là, on peut préserver le matériel à ce moment-là.
33:21Donc, c'est une question d'analyse avec un bon véhicule,
33:27du métier qui part toujours facile, mais oui, il y a sûrement les trains à ne pas rater.
33:33Combien on passe d'heures par jour sur la météo sur un Vendée Globe ?
33:39Après, il y a des jours où on va passer quasiment la journée entière
33:44parce qu'il va y avoir des décisions très claires à prendre
33:49où il y a peut-être des systèmes à accrocher ou des choix où il faut aller à fond à droite ou à gauche
33:57et il y a des points, en fait.
33:59Moi, je mets des points sur ma carte, je note.
34:02Il faut décider maintenant.
34:04Il décide ici.
34:05Donc, il y a des moments où, avant ces points-là, on peut passer les heures et les heures devant le métier.
34:12Les options, on ne fait que du routage, de l'informatique.
34:17Et il y a d'autres jours où, une fois on est dans un système, et surtout dans les Alizés, par exemple,
34:24ou dans le maire du Sud, on prend un train et là, on est dedans.
34:30Et là, on décroche le cerveau et on appuie.
34:34Et là, on peut avoir les jours aussi, les jours et les jours où on est dans les mêmes systèmes
34:40et qu'on peut faire une petite pause pour se reposer le cerveau.
34:48Ce n'est pas un truc quotidien.
34:50Tous les jours, je passe une heure et demie ici et trois heures là.
34:54Je passe une heure et demie ici et trois heures là.
34:57Et puis, c'est comme ça, jour après jour.
34:59En fait, ça dépend d'où on est et des choix qu'il va falloir faire.
35:04Il faut être très flexible et prêt à passer.
35:11C'est comme aussi, on peut passer les journées entières à être sur un réglage.
35:16Donc, il y a les jours où il faut mieux être dehors et régler la voile toute la journée
35:20parce que le vent est très instable que de passer trois heures devant le métier.
35:26Donc, c'est ça aussi où il faut savoir où sont les priorités.
35:31Et ce n'est pas pareil à chaque jour.
35:34Est-ce que tu peux nous parler de ta bulle ?
35:36Tu parlais de bulle tout à l'heure.
35:37Il faut rester dans sa bulle au sens propre comme au sens figuré
35:41parce que ton cockpit est très vitré.
35:44Donc, ça fait vraiment l'effet d'une bulle.
35:47Tu es une des rares, je trouve, qui partage son plaisir d'être en mer.
35:52C'est transparent comme ta bulle d'ailleurs.
35:57Et tu le montres dans les grandes largeurs
35:59parce que ça a aussi été l'une de tes forces dans ces dernières années.
36:03C'est de filmer, monter et montrer, faire l'effort de montrer beaucoup ton bateau
36:09là où d'autres cachent le jeu
36:12et te donnent vraiment un plan serré sur le visage du skipper, mais pas plus.
36:18Parle-nous de cette bulle dans laquelle tu as l'air de te sentir hyper bien.
36:24Oui, j'ai de la chance.
36:28Dès cette première Vendée Globe, j'ai rendu compte que c'est incroyable.
36:33Moi, je suis faite pour ça.
36:35J'ai trop de la chance.
36:37C'est presque égoïste de partir toute seule sur des bateaux magnifiques
36:44comme Initiatives-Coeur, de faire une course autour du monde.
36:48Il y a les gens qui rêvent de passer une heure sur un Emoka à fouilles
36:52qui sont prêts à tout faire pour monter sur un bateau à l'Orient juste pour ça.
36:58Et nous, c'est égoïste.
37:00On va partir 75 jours autour du monde sur ces bateaux incroyables.
37:05Moi, j'ai toujours dit qu'il faut que je partage ça.
37:08Je ne peux pas le garder que pour moi.
37:11Je ressens un devoir de partage parce que c'est trop cool ce que j'ai la chance de faire.
37:24C'est toujours été ça.
37:26Dès ma première Vendée, j'ai toujours été suivie par beaucoup de jeunes
37:31et pas forcément que des marins.
37:33Des gens qui découvrent le Vendée Globe parce que c'est le Vendée Globe.
37:37Donc, j'essaie aussi de partager.
37:40Je sais que les fans de voile nous suivent de toute façon.
37:43Mais j'essaie de partager pour que ceux qui connaissent moins bien la voile,
37:48la mère, les enfants, les classes à l'école et tout,
37:54c'est cette envie-là.
37:56Oui, je m'entraîne.
37:57Comme je m'entraîne à régler mes voiles ou à faire le muscu,
38:03je m'entraîne aussi avec les outils caméra, smartphone, téléphone satellite, micro.
38:10Je m'entraîne à bien faire aussi ce parti de partage.
38:16Donc, pour moi, la performance, ce n'est pas que régler mes voiles et la vitesse.
38:22C'est aussi la performance que mon projet réussit dans tous les domaines.
38:28Donc, pour moi, le partage, c'est quelque chose où je peux aussi faire une belle performance.
38:35Et en plus, le projet Initiatives-Cœur, le mieux je partage,
38:40le plus les gens vont venir mettre des commentaires,
38:44réagir avec moi, envoyer des messages.
38:47Et puis, avec ça, c'est là où, avec un clic, un cas,
38:52mes partenaires donnent de l'argent à la cause et les enfants sont sauvés.
38:55Donc, j'ai un double motivation maintenant pour lever de l'argent.
39:00Ce partage est très important.
39:03Et alors, en termes de vie à bord, de ton univers de vie,
39:08de cette bulle dont on parlait tout à l'heure,
39:11raconte-nous un peu parce que ça a l'air d'être assez confortable par rapport à d'autres.
39:16Ça a l'air plutôt bien, ça a l'air cosy.
39:19Confortable ? Des Imokas à fouet confortables ?
39:23Ben oui, bien sûr. C'est quelque chose que je voulais faire.
39:29J'ai eu de la chance aussi de vivre dans la classe Imoka depuis pas mal d'années maintenant.
39:36Et de suivre cette évolution des bateaux qui était au début,
39:42j'avais l'impression qu'ils allaient vite.
39:44Et maintenant, les vitesses ont augmenté énormément avec des fouelles.
39:48Donc oui, on a un petit peu plus de violence quand on avance vite.
39:54Et aussi le danger.
39:57Moi, j'ai vécu un collision.
40:00Il y a deux choses, nos bateaux plantent dans les vagues,
40:03donc ils s'arrêtent violemment, même sans taper rien.
40:09Mais aussi, on peut avoir des collisions à haute vitesse aussi.
40:12Donc pour moi, c'était primordial d'avoir un bateau qui était, je ne dis pas confortable,
40:22c'est plus que je suis dans un endroit protégé.
40:27Donc protégé des chocs, protégé des mouvements brutaux.
40:33Et le plus souvent, c'est des arrêts buffets qu'on fait.
40:38Et protégé des vibrations, du foie, du sel.
40:46Tout ça, en fait, le plus qu'on peut se protéger, le mieux qu'on emporte.
40:52Et moi, j'adore ça.
40:55Je ne veux pas souffrir parce que j'adore la voile.
40:58Donc c'était important.
41:00Je sais que je navigue vite si je suis heureuse.
41:03Donc tout ça, ça va ensemble.
41:05Pour moi, c'était important de me protéger pour être bien, pour pouvoir performer,
41:13pour être moins fatiguée et pour moins avoir peur.
41:17Parce que si on se sent protégée dans nos bateaux, on a moins peur.
41:21Donc c'était un gros travail que j'ai fait avec l'équipe qui était à l'écoute.
41:26Parce que nous, on peut savoir ce qu'on veut, mais il faut aussi que l'équipe est derrière.
41:31Parce que parfois, eux, ils veulent que le bateau va le plus vite.
41:36Ils disent mais ça, c'est trop lourd.
41:38Ta chaise, c'est trop lourd.
41:40Non, tu n'as pas besoin de banette.
41:42Voilà, on a passé trois mois à essayer de gratter 500 grammes.
41:49Et là, tu nous emmènes un matelas comme ça.
41:52Donc c'est aussi que l'équipe et les skippers, on est sur la même longue dente.
41:59Et j'ai eu de la chance avec l'équipe Initiatives-Coeur,
42:02qui sont une équipe qui navigue beaucoup au large avec moi.
42:07Donc oui, on a développé le bateau comme je voulais pour que je sois bien installée
42:15et dans le cockpit et à l'intérieur.
42:18Donc quand il fait chaud, quand il fait froid, j'ai toujours les super endroits où je suis bien protégée.
42:23Et que je peux faire la nave, je peux faire les petits montages, je peux faire à manger.
42:29Manger et vivre tout simplement et dormir.
42:35Il y a plusieurs endroits pour dormir.
42:37Et oui, je pense, là je suis hyper contente des transats que j'ai faits.
42:44Je me sens bien dans mon bateau et j'arrive à pousser le bateau très vite
42:51sans trop souffrir de cette violence qu'on a sur les émocas.
42:57Mais je pense aussi Initiatives-Coeur, c'est un bateau qui…
43:00Et là c'est un manoir et c'est un des bateaux qui est un des premiers à la SCAO.
43:06Donc c'est un design de 2020.
43:08Et il passe très bien la mer.
43:12Pas sur toutes les allures, mais il y a les allures de portant.
43:16C'est un bateau qui est déjà…
43:20Sam et Emmanuel, je crois qu'ils ont vraiment réussi ça.
43:25Et moi j'aime bien mon bateau dans ces conditions-là.
43:29Ça se voit.
43:31Oui, oui, oui, je m'amuse bien.
43:34Mais aussi pour s'amuser, il faut avoir confiance.
43:38Et ça c'est quelque chose où j'ai eu de la chance, parce que j'ai le bateau depuis 2022.
43:44Et j'ai pu faire beaucoup de milles avec.
43:48Donc toutes les transats, en fait toutes les courses, même les convoyages, j'ai toujours été à bord.
43:54Donc quand il y a les convoyages vétos après les courses transatlantiques,
43:58j'ai toujours fait le convoyage véto aussi.
44:02Et toutes les courses, j'ai choisi de les faire toutes pour enquiller des milles.
44:09Et en fait, je pense que dans la liste des inscrits,
44:14je suis celui qui a le plus de milles parcourues par rapport à tous les skippers.
44:22Je le confirme. C'est vrai.
44:25Sur la joie d'être en mer, le plaisir d'être en mer, dont on parle là, le fait d'être heureux,
44:31il y a aussi un aspect sur trois mois qui joue beaucoup, c'est l'alimentation.
44:35C'est un vrai point. Autant sur une transat, on est capable de se priver un peu.
44:41Comment toi tu as organisé, prévu ces trois mois d'alimentation
44:48où il y a d'un côté l'apport calorique nécessaire pour être efficiente
44:52et d'autre part quand même du réconfort, du plaisir.
44:56Beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de chocolat.
45:02Oui, ça aussi, c'est un travail.
45:07L'alimentation, c'est un travail parce qu'on n'a pas le même goût en mer qu'on a à terre.
45:11Donc si on ne met que ce qu'on veut manger à terre, ça ne marche pas.
45:17On est limité en espace, en poids, plus ou moins selon les envies.
45:24Et surtout sur ces bateaux qui bougent tout le temps,
45:27c'est comme vivre sur une montagne russe et essayer de manger un plat,
45:32un bolo sur une montagne russe.
45:34Et c'est ça qu'on fait tous les jours.
45:36Donc déjà d'arriver à mettre de l'eau chaude dans le plat sans se brûler,
45:45ça c'est un défi.
45:47Donc manger, c'est déjà préparer à manger, ce n'est pas facile.
45:51Et puis arriver à manger pendant qu'il est chaud,
45:57parce que souvent quand on prépare ça, il y a un truc qui arrive,
45:59on est obligé d'aller dehors, régler.
46:02Et puis quand on revient, il est froid.
46:04Et puis il faut que le plat passe du bol jusqu'à la bouche,
46:12sans redécorer l'intérieur du bateau.
46:16Donc tout ça, il faut avoir les bonnes ustensiles, les bons bols,
46:20pour essayer de limiter, reprendre le bateau chaque fois qu'on essaie de faire un manger.
46:25Et puis sur quelque chose qui bouge tout le temps,
46:31on est tendu et crispé.
46:34Et parfois, ça tape tellement fort que les abdos sont tellement serrés,
46:41j'ai l'impression que j'avale, que ça ne descend pas.
46:43Parce qu'il faut se tenir pour ne pas se faire secouer sur nos bateaux.
46:50Donc déjà, pour arriver à faire ça, il faut bien choisir des choses que l'on a envie de manger,
46:57parce que déjà c'est très compliqué en soi.
47:00Et puis la relation, est-ce qu'on prend que des livres lisés,
47:05parce que c'est le plus léger, ou on prend les choses qui font plaisir.
47:09Moi c'est plutôt, je travaille avec des nutritionnistes,
47:16il faut avoir beaucoup d'énergie, parce que naviguer sur le bateau,
47:20ça consomme beaucoup de calories.
47:23Et puis, avoir assez de choses variées.
47:29Mais pareil, j'ai beaucoup d'expérience,
47:33et les choses que je ne peux plus manger,
47:35parce que j'ai trop mangé sur les tours du monde, les mêmes plats.
47:39Mais oui, j'ai des bonnes astuces.
47:43Et j'aime bien aussi participer à cet invitement.
47:49Le choix, les courses, comment tu paquais dans le bateau,
47:56parce qu'il faut se retrouver aussi dans les sacs de nourriture,
48:00et on n'a pas forcément envie, le plat qu'on a mis pour lundi,
48:06le jour 35, quand le jour 35 arrive, donc il faut essayer de savoir tout ça.
48:13Ça c'est une vraie gestion, on ne se rend pas compte.
48:16Mais c'est une vraie, d'une part logistique évidemment,
48:19mais après, au sein du bateau, dans l'univers du bateau assez contraint,
48:25la gestion de la nourriture et des sacs, tu en parles,
48:29d'une part parce qu'il faut les matosser régulièrement,
48:32et puis parce qu'on peut passer à un Vendée Globe,
48:36à chercher là où l'équipe a rangé l'huile d'olive.
48:40Oui, et on peut aussi, et ça moi j'ai quelques anecdotes,
48:46donc on peut aussi avoir le malheur d'avoir une boîte de sardines
48:50qui s'explose dans le sac, dans un sac de 10 jours de nourriture.
48:54Et quand toute la nourriture pour 10 jours est repeinte avec l'huile sardine
48:59qui a explosé, mais on n'a pas vu tout de suite,
49:01donc ça fait une semaine que ça se marine dans les températures
49:08entre 27 et 28 degrés dans le bateau,
49:11là on a 10 jours de nourriture qui a un goût de huile sardine pourrie.
49:18Donc il y a beaucoup de choses à gérer avec ces sacs de nourriture,
49:23de matassage, et oui, retrouver...
49:26Quand il n'y a plus de papier sur le rouleau de papier toilette,
49:29et que le prochain rouleau est au fond du tas des 15 sacs,
49:35tout à l'arrière du bateau, il faut tous les sortir
49:38pour chercher le nouveau rouleau de papier toilette,
49:43c'est la déception.
49:44Donc oui, il faut bien maîtriser,
49:47soit l'organisation de ça, et le rangement.
49:53Et maintenant aussi dans le bateau,
49:55et c'est ça que j'ai trouvé, d'aller chercher le sac de nourriture,
50:00si le bateau est lancé à 25 nœuds,
50:03on se met en danger à aller au fond du bateau pour chercher le sac.
50:10Donc aussi c'est une question de gestion.
50:13Là, je vais partir pour 5 jours à fond les ballons,
50:18où les déplacements dans le bateau sont difficiles,
50:21donc j'ai besoin mes prochains 5 jours de nourriture
50:25à portée de main, à côté de mon siège, idéalement.
50:29Donc en fait, la nourriture, la logistique de nourriture,
50:33c'est couplé avec les prévisions météo et le routage,
50:37pour être sûre qu'on se retrouve avec assez de nourriture à portée de main,
50:43parce que parfois c'est trop compliqué d'aller chercher.
50:47Quels souvenirs tu gardes, quelles images,
50:50quelles histoires, quelles éditions t'ont marquées en tant qu'observatrice ?
50:55En tant qu'observatrice ?
51:00En fait, moi je n'ai pas de souvenirs du premier Vendée Globe non plus,
51:04parce que dans ces années-là, j'étais ado en Angleterre,
51:10et puis en Angleterre, le Vendée Globe n'était pas dans le media,
51:16et moi, on suivait les courses autour du monde en équipage,
51:19donc les Ocean Race, ou le Wheat Bread Round the World Race.
51:23Donc je n'ai pas trop de souvenirs des premières éditions du Vendée Globe, malheureusement.
51:32En fait, j'ai découvert ça en 2008,
51:36parce qu'avant de partir sur mon premier Vendée Globe,
51:44on est dans l'inconnu, on est à la recherche des infos,
51:49et je pense que ça me moquait un peu le côté
51:55qu'il y a beaucoup de concurrents français qui avaient vu le Vendée Globe,
52:02parce qu'ils ont suivi ça quand ils étaient petits.
52:04En fait, moi, je n'avais pas toutes ces images, ces histoires et tout ça,
52:08et du coup, en 2008, je m'appelle avant le départ,
52:11dans les deux semaines avant de partir au Saint-Dolon,
52:13mais le soir, quand je rentrais chez moi,
52:15je regardais les films des anciens Vendée Globe,
52:18je regardais les films, je pense que c'était des choses qui m'ont marquée.
52:25Forcément, c'était parce que je partais sur le même bateau,
52:29mais il y avait Michel Desjoueurs qui pleurait
52:32parce qu'il ne pouvait pas réparer son moteur,
52:35il n'était pas loin de Cap Horn,
52:37le moteur ne démarrait plus, il n'avait plus d'énergie.
52:40Ça m'a traumatisée de voir ces images-là,
52:43parce que je me dis, si Michel Desjoueurs pleure pendant un Vendée Globe,
52:49moi, je ne vais jamais réussir. Comment je vais faire, moi ?
52:53Donc, c'était un peu décalé,
52:56parce qu'il avait déjà gagné quand je regardais ces images-là.
53:03Donc, oui, j'ai quelques images comme ça.
53:08Forcément, quand on regarde Yves Pallier qui dimmette et qui réussit à remettre,
53:16moi, maintenant, j'ai vécu un dimmettage, j'en ai mon cœur.
53:20Déjà, j'étais fière d'avoir réussi à gérer moi-même un dimmettage,
53:25mais moi, je n'ai pas réussi à remettre la main dans mon bateau.
53:30Quand on regarde ça, moi, ça me fait...
53:34Il y a des gens qui sont des gens, des histoires,
53:39et c'est là où, quand on fait le Vendée Globe, on se rend compte qu'on est bien capable
53:44d'aller au-delà des limites qu'on pensait ou des capabilities qu'on a.
53:49En fait, on peut faire mais loin de plus que ce qu'on imagine,
53:54on est capable, ces histoires-là.
53:58Donc, oui, j'ai quelques-uns, mais pas énormes, énormes non plus.
54:03Et alors, des images de ceux que tu as courus qui ne te concernent pas forcément toi,
54:08qu'est-ce que tu as gardé de ces trois éditions ?
54:11Dans les trois éditions que j'ai courues en 2008,
54:18les choses qui m'ont marquée, c'était peut-être la dureté des casques, des abandons.
54:29Souvent, c'était des bateaux qui étaient pas loin de moi à chaque fois.
54:33Donc, il y a Bernard Stam qui s'est échoué.
54:36Il a essayé de faire une escale avec Irgulen, ça a fini en drame.
54:41Loïc Perron qui dimette et Mike Golding aussi.
54:45Et puis, il y avait ce qui m'a beaucoup marquée, Yann Eliès qui casse sa fumeur.
54:53Pareil, il n'est pas loin, il n'est devant moi pas loin et je vais.
54:59Donc, j'ai été appelée par Denis Aureuil, le directeur de course.
55:04Et donc, j'ai foncé.
55:06Je n'ai jamais navigué aussi vite que ce jour-là parce que j'avais tellement peur.
55:11Et en imaginant Yann tout seul dans son bateau avec une jambe cassée,
55:17j'ai dit mais ce n'est pas possible.
55:19Tout ce que je peux faire pour aider, mais comment on peut faire pour aider quelqu'un
55:23qui a une jambe cassée quand on est déjà tout seul sur un autre bateau assez loin.
55:27Heureusement, ça s'est bien fini.
55:31J'ai été déroutée.
55:33J'ai fait un peu de traduction puisque c'est les Australiens qui sont venus.
55:39Heureusement, ça s'est bien fini.
55:41Les Australiens qui sont venus le chercher.
55:43Donc, cette histoire m'a beaucoup marquée.
55:45Et puis, Jean Le Cam qui chavire.
55:47Pareil, ça m'a énormément marquée puisque j'étais un peu derrière, mais pas énorme.
55:53Donc, j'imagine quand il chavire, je me dis mais si ça m'arrive maintenant,
55:58je ne sais même pas où il est mon petit pièce et il est matissé quelque part.
56:02Donc, en 2008, j'ai vécu tous ces drames un peu en passant à côté avec l'étoile
56:11qui me suivait au-dessus de moi de chance.
56:14Et tout ça, ça m'a beaucoup marquée.
56:17Et aussi, Jean Le Cam, il chavire.
56:19Après, j'arrive fond balle.
56:21On est juste en position, dernière position d'un bateau chaviré qui,
56:26heureusement, s'est bien fini aussi.
56:28Donc, il n'était plus à bord.
56:30Et moi, j'ai 10 boules derrière et je passe un jour et demi sous le pont
56:36avec le masque d'esquis à essayer de regarder devant
56:40parce que j'ai peur d'arrêter en fait sa coque qui va tourner,
56:46qui est impossible à voir.
56:47Il y avait 8 mètres de creux.
56:49Donc, 2008, il y avait beaucoup de tous ces drames qui se passent autour de moi.
56:55Ça m'a beaucoup marquée plus après du coup
57:02parce que pendant, on gère ce qu'on peut et puis on est en train de gérer son bateau.
57:06Mais après, c'était peut-être le fait d'être sur l'eau à côté de tout ça.
57:12Moi, j'étais plus proche de l'histoire et ça m'a plus touchée peut-être.
57:17Ça reste une édition marquante de ce côté-là.
57:20Ça, c'est indéniable.
57:22Oui.
57:23Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter ?
57:30Une belle performance dans le match.
57:34Et en sauvant beaucoup d'enfants pour Initiatives-Cœur.
57:37C'est tout ce qu'on fait.
57:38Merci beaucoup.

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