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00:00Pardon.
00:01Je vous en prie. C'est terrible. C'est un témoignage très...
00:05Je l'aurais dit le lendemain de 7 à 8.
00:07La vérité.
00:08Vous avez fait 7 à 8.
00:10J'ai appelé le maire et j'ai dit que j'avais peur
00:12qu'il tue mes parents.
00:14J'ai pris les médicaments, etc.
00:16Et je me dis... J'essaie de me tuer aussi en voiture.
00:19Bref, j'essaie plein de trucs.
00:21En voiture ? Vous accélérez.
00:22Vous dites que vous allez vous placer.
00:24Oui, je vais me prendre le pilier du pont.
00:27C'est pas mal pour en terminer.
00:29Il y a une fois, je commence à partir
00:31et j'ai mis mon portable à côté de moi
00:34avec des chansons de Freddie Mercury.
00:36Et je visionne, j'imagine mes parents devant mon cercueil.
00:39Et là, tout d'un coup, je me dis...
00:41Comme je suis très empathique, je me dis
00:44ce que je vais faire vivre à mes parents.
00:46Ils ont déjà eu la pauvreté, ils ont déjà eu charcot, Alzheimer.
00:50Mon père a eu un accident.
00:51Ils se sont battus pour que je m'en sorte.
00:54Je veux leur infliger un enterrement.
00:57On voit une scène... Il y a ma propre mort.
00:59J'ai mis deux acteurs qui font mes parents
01:02pour que je montre cette vraie scène.
01:04Ca m'a empêchée d'aller au bout.
01:06Vous en avez parlé avec eux ou pas ?
01:08C'est des sujets très compliqués.
01:10Chez nous, on parle de tout.
01:12D'autant plus que...
01:13Maintenant qu'il y a eu le livre, on parle de tout.
01:16On parle de la mort.
01:17Quand vous leur avez dit
01:19que vous aviez pensé vous supprimer,
01:21Adeline Tognotti ?
01:22Ils étaient sans voix.
01:27Ils se sentaient un peu coupables.
01:29Notre fille en était là, et nous, on n'a pas réussi à le voir.
01:32Je suis forte, donc je ne montre pas.
01:34Ils pensaient que je maigrissais parce que je perdais ma voix,
01:38mais surtout parce que j'avais quelqu'un
01:40qui m'étouffait à la maison.
01:42Au sens propre et au sens figuré, Jordan.
01:45Donc mes parents, ils se sont sentis coupables.
01:48Pourquoi tu ne nous as rien dit ?
01:50Parce que j'ai tout raté dans ma vie,
01:52j'ai plus de voix, je ne sais pas.
01:54J'ai tout raté dans ma vie, je n'ai plus de voix.
01:57Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?
01:59J'ai honte, même.
02:00C'est fou d'avoir honte alors que rien n'est de votre faute.
02:03On a honte parce que les personnes qui vous frappent
02:06vous font penser que c'est de votre faute,
02:09que vous n'êtes pas à la hauteur.
02:11Quand vous voulez partir, ils menacent de tuer vos parents.
02:14D'abord de vous tuer, puis ensuite de tuer votre famille.
02:17Combien de temps de relation avec cet homme ?
02:20Je ne veux pas donner exactement le temps
02:22pour ne pas qu'on...
02:23Il y a une histoire judiciaire,
02:25mais il y a quand même eu plus d'une année.
02:27Plusieurs années, voilà.
02:29Au début, tout va bien ?
02:31Au début, c'est l'homme...
02:34J'ai l'impression que le bon Dieu m'a envoyé l'homme parfait.
02:37Il est agréable, il est souriant, il est plein d'énergie,
02:40il est très entreprenant dans sa vie, etc.
02:43Il réussit.
02:44Quelle est la chose, Adeline, qui va faire tout basculer ?
02:47D'abord, ça n'a pas basculé.
02:49Au début, il dit qu'il est jaloux.
02:51Ca m'inquiète qu'il soit jaloux,
02:52mais comme je ne suis pas souvent à la maison,
02:55je ne me rends pas bien compte et je ne veux pas voir.
02:58Quand je perds ma voix, c'est là qu'il va devenir atroce.
03:01Il me dit qu'il ne sert à rien.
03:03C'est fou, au lieu de vous aider, il vous carbonise.
03:06Ah oui, c'est atroce.
03:08C'est atroce.
03:09C'est très dur à décrire.
03:11Avec des mots, sans que je me mette à pleurer.
03:14Je suis un tados, je ne sers à rien.
03:16Parce que vous maigrissez ?
03:17Je suis une sale pute.
03:18Je suis une sale pute parce que quand on va chez des amis,
03:22un homme va me regarder, je n'ai rien fait,
03:24et je vais me faire taper parce que j'ai dragué le mec
03:27alors que je ne mangeais rien.
03:28C'est quoi la limite, à ce moment-là ?
03:30C'est une amie qui va m'aider, Jordane.
03:33C'est une amie, elle s'appelle Jenny.
03:35Je souhaite à tout le monde de rencontrer une Jenny.
03:38Des fois, dans la vie, là-haut,
03:40un ange nous ouvre les yeux.
03:41Jenny m'a fait peur. Elle m'a dit
03:43qu'un jour, il va te pousser dans les escaliers,
03:46ta colonne vertebrale va se briser en deux
03:48avec la maladie de Charcot.
03:49Je sais ce que c'est d'être handicapée.
03:51Je l'ai vécue, je l'ai vue.
03:53J'ai vu ma grand-mère quand elle ne pouvait pas se laver.
03:56Je n'ai plus de voix. Qu'est-ce que je vais rajouter ?
03:59Vos parents sont au courant ?
04:01Comment vous cachez les coups ?
04:02Ils pensent que je suis triste à cause de ma voix.
04:05Mes parents respectent mon silence.
04:07Je suis en deuil parce que j'ai perdu ma voix.
04:09D'accord. C'est fou parce que c'est un cercle.
04:12On est enfermés.
04:13On est enfermés.
04:14On est en prison.
04:15Les crises de violence, c'est tous les jours
04:18ou c'est en fonction de certains événements ?
04:20En fonction de certains événements,
04:22le rabaissement, c'est au quotidien.
04:24Les grosses crises de violence,
04:26il faut le temps qu'ils me laissent me remettre avant de recommencer.
04:30Sinon, je vais finir morte et ils ne veulent pas que je meure.
04:33Est-ce que vous lui dites les yeux dans les yeux, Adeline,
04:36à votre compagnon violent, tu vas me tuer ?
04:38Oui, je lui dis.
04:40Il vous répond quoi ?
04:41C'est de ta faute. T'as qu'à être à la hauteur.
04:43T'es qu'une merde. Tu crois quelqu'un veut de toi ?
04:46La violence qui a été la plus terrible pour vous, Adeline,
04:50c'est quelque chose qui est vraiment...
04:53La plus grande violence,
04:54c'est quand il dit qu'il va tuer mes parents.
04:57Oui.
04:59Qu'il peut s'en prendre à vous.
05:01Oui, à mes parents, à ma famille.
05:03Vous l'acceptez.
05:04Je sais pas que je l'accepte, mais que moi, je meurs, à la limite.
05:08Mais que mes parents meurent...
05:13Pardon.
05:14Je vous en prie.
05:15C'est terrible. C'est un témoignage très...
05:18Je l'aurais dit le lendemain de 7 à 8.
05:21La vérité.
05:22Vous avez fait 7 à 8.
05:23J'ai appelé le maire et j'ai dit que j'avais peur
05:26de témoigner à 7 à 8.
05:29J'ai appelé le maire, au lieu de mes parents.
05:32Vous le pensiez, qu'il en était capable ?
05:36Bien sûr, oui.
05:37Mais maintenant, je m'en fous.
05:39J'ai fait ma méthode de chant.
05:40Si j'y meurs, vous avez tous les secrets pour bien chanter.
05:44Dans ce livre-là ?
05:45Oui, il y a tout.
05:46Donc, presque tout ce qu'on peut écrire.
05:48Donc, j'avais peur...
05:51Non, c'est vrai, oui.
05:56Je pensais qu'on allait parler de chant,
05:58mais on parle du chant de l'âme.
06:02Il en est où, aujourd'hui, lui ?
06:04Je sais pas. Des fois, j'ai des vents de trucs.
06:07Il a une nouvelle femme.
06:08Vous avez porté plainte ?
06:10Oui.
06:11C'est donc...
06:12À l'époque, Jordan, les plaintes ne donnaient pas suite.
06:15On parle d'il y a longtemps, déjà.
06:17J'ai eu l'occasion d'en parler avec la ministre,
06:20l'ancienne ministre, parce que ça a changé,
06:22qui me disait qu'ils ont mis en place des choses
06:25qui font que c'est pris plus vite et plus au sérieux
06:28la violence conjugale, grâce aux artistes
06:30comme Camille Lelouche, comme moi, qui parlons,
06:32comme Judith Schemla, etc.
06:34C'est ça qui est intéressant dans votre message.
06:37C'est aussi pour ça que l'émotion
06:39que vous émanez de cette interview est intéressante.
06:41Il faut aussi pouvoir dire à toutes ces femmes
06:44qui n'arrivent pas à s'en sortir...
06:46Demandez de l'aide.
06:47Les choses changent.
06:48Il faut demander de l'aide, il faut en parler à quelqu'un.
06:51Si vous en parlez à quelqu'un, on va vous dire
06:54que c'est pas normal d'être frappé,
06:56d'être abaissé au quotidien, d'être sous emprise.
06:59Il y a un numéro qui s'affiche juste en dessous de cet écran
07:02pour appeler à l'aide si ça ne va pas.
07:04Vous dites, à juste titre, dans une interview que j'ai vue,
07:07que le meilleur moyen de partir, ce sont nos jambes,
07:10c'est nous, les femmes.
07:11C'est la plus belle des choses qu'on puisse dire.
07:14Je comprends ce que vous me dites.
07:16Il faut prendre un moment, ce temps, et se dire,
07:18je vais partir.
07:20En laissant aussi, parce qu'il y a quelque part
07:22certainement une affection qu'on a pour cette personne,
07:25même si elle nous fait du mal.
07:27C'est de l'emprise.
07:28Au début, on en a, mais après, on n'en a que de la peur qui reste.
07:32Libérer la parole permet de libérer les jambes.
07:35Qu'est-ce que vous souhaitez pour lui, pour la suite ?
07:37Le maximum ? Vous souhaitez être tranquille ?
07:40J'ai chanté une chanson avec Vincent Niclos
07:42sur le pateau de la Star Academy,
07:44qui s'appelle The Prayer.
07:46Il y a une phrase qui dit,
07:47on espère que toutes les âmes vont se trouver.
07:50J'espère qu'un jour, le monde va être plus dans la lumière.
07:53Je ne souhaite pas du mal aux gens,
07:55je souhaite qu'ils s'améliorent.
07:57Quand vous êtes partis, il a réagi comment ?
08:02Ah ben, ça a mal réagi.
08:04Il a essayé de vous retrouver ? Vous vous êtes cachée ?
08:07Déjà, la première fois que je suis partie,
08:09il m'a rattrapée en voiture, il m'a mis dans le bas-côté.
08:14Et puis, la fois d'après, il a très mal réagi,
08:17mais j'arrive plus trop à me rappeler.
08:19Comme mon père était au courant et qu'on a été déménagés,
08:22reprendre les affaires, et que ma tante,
08:25ma Dédé Rebelle, dont je parle dans mon livre,
08:27était là et m'a dit qu'il fallait qu'il me passe dessus
08:30pour qu'il te retrouve.
08:31Il y avait une réaction familiale tellement forte.
08:34Lors de ce déménagement,
08:35j'ai l'impression d'être dans un Louis-de-Finesse.
08:38Tout le monde s'énervait sur Renard, tout le monde l'insultait.
08:42Mon père se vengeait sur la machine à laver.
08:44C'est dur à expliquer, mais il faudrait lire le livre.
08:47Je me sentais en sécurité.
08:49Du coup, même s'il a pété un câble, je ne me rappelle plus trop
08:52parce que j'avais la famille Toniti qui était là.