Anne Marty, présidente de Domaines Skiables de France
Anne Marty vient d'être élue présidente de Domaines Skiables de France. Elle était notre invitée ce jeudi matin sur France Bleu Pays de Savoie.
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00:00On s'intéresse ce matin à nos stations de moyennes montagnes.
00:03Elles sont de plus en plus vulnérables face au manque de neige.
00:06On vous révèle d'ailleurs, on en parlait ce matin,
00:08que celle de Notre-Dame-du-Près en parenthèse ne rouvrira pas cet hiver.
00:12Alors, est-ce que ça veut dire que le ski c'est fini pour les stations les plus fragiles ?
00:15C'est une des questions qu'on va poser à notre invité, Philippe Anne-Marty.
00:19C'est la nouvelle présidente de Domaine Skiable de France.
00:21Bonjour Anne-Marty !
00:22Bonjour !
00:23Merci d'être en direct avec nous dans nos studios à France Bleu Pays de Savoie.
00:26Vous venez donc tout juste d'être élue présidente de Domaine Skiable de France.
00:30C'était début octobre.
00:32Vous dirigez Alti-Service, c'est le principal exploitant des stations de montagnes des Pyrénées.
00:36Vous êtes des Pyrénées, mais rassurez-nous, vous n'allez pas laisser de côté les Alpes du Nord ?
00:41Alors, clairement non.
00:42Je vous rassure tout de suite, le barycentre de l'économie touristique et au ski est vraiment dans les Alpes.
00:50J'étais déjà présente, mais je serai très présente environ une semaine sur deux à Chambéry.
00:55J'adore Chambéry, c'est bien.
00:58C'est une information France Bleu Pays de Savoie qu'on révèle ce matin.
01:01Anne-Marty, la petite station de Notre-Dame-du-Près, en parenthèse, ne rouvrira pas cet hiver.
01:06Elle est définitivement fermée à cause du manque de neige.
01:10C'était 20 000 euros de déficit chaque hiver ces dernières années pour les trois tiers-fesses.
01:14On a d'autres exemples chez nos voisins de l'Isère ou encore dans les Hautes-Alpes.
01:18Le ski, c'est fini pour les stations de moyenne montagne ?
01:21Alors, dire que c'est fini, c'est faire un raccourci clavier qui me semble vraiment trop rapide.
01:27Dire que les difficultés sont réelles, oui, effectivement.
01:31Alors, moi, quand on me parle de Notre-Dame-du-Grand-Près, la première chose qui me vient à l'esprit,
01:37c'est clairement l'esprit de responsabilité qui a amené à cette décision.
01:44Dire qu'il y a une décision qui a été politique, c'est les élus qui ont pris cette décision.
01:49Derrière, il y a eu un référendum de la population qui, à 70%, s'est prononcé pour la fermeture de la station.
01:56Donc, j'ai envie de dire, quand une décision comme ça est prise dans un territoire, bien évidemment qu'elle est légitime.
02:02Alors, 20 000 euros de déficit...
02:05Elle est légitime, elle est de toute façon... De fait, c'est acter le fait qu'il n'y a pas de neige,
02:09il n'y a pas de quoi faire tourner la station. Ce n'est pas non plus de gaieté de cœur.
02:13Alors, ce n'est pas de gaieté de cœur.
02:15Maintenant, vous me dites 20 000 euros de déficit. 20 000 euros, c'est une somme relativement modeste comme déficit.
02:23Néanmoins, ça veut sans doute dire que les habitants ont jugé qu'à l'échelle du territoire,
02:28en réalité, le rapport investissement au sens propre, engagement pour faire tourner cette station,
02:36n'était pas à la hauteur des retombées.
02:42Donc, il y a un choix qui a été fait.
02:45Après, on parle d'une station avec 3 téleskis, on sait que sur des petites stations comme ça, c'est fragile.
02:51C'est la question que je vous pose. Est-ce que ce n'est pas là le symbole, le symptôme ?
02:56On a cité d'autres stations, chez nos voisins Iserois par exemple, ou dans les Alpes de Haute-Provence.
03:01Est-ce que ce n'est pas là le symptôme de stations qui ne peuvent plus tenir face au réchauffement climatique ?
03:06Alors, le réchauffement climatique est là, c'est une réalité.
03:10Maintenant, ces stations-là, ce n'est pas directement le réchauffement climatique, c'est tout un système.
03:18C'est-à-dire qu'une station qui repose sur 3 téleskis était de nature fragile quand elle a été créée.
03:25Est-ce que les lits, les hébergements étaient là ? La réponse est non.
03:30Et donc, en réalité, c'est l'attractivité au sens large du territoire qui, sans doute,
03:34dès le début, a fait défaut pour pouvoir héberger et retenir les touristes.
03:40Mais il n'en reste pas moins que le changement climatique est là et que ça rebat les cartes dans un certain nombre de stations.
03:46Effectivement, les stations de basse altitude, ce sera de plus en plus difficile et on le sait.
03:507h49 sur France Bleu, pays de Savoie. Notre invitée, c'est la présidente de Domaine Skiable de France.
03:55On parle des stations de moyenne montagne fragilisées par le manque de neige.
03:58Est-ce que ça vous inquiète ? Est-ce que vous avez peut-être, d'ailleurs, des solutions à proposer ?
04:03Si vous voulez dialoguer avec notre invitée Anne Marty, vous nous appelez maintenant 0806 00 10 10.
04:08Le changement climatique est bien là, vous le dites Anne Marty.
04:11Et on voit aussi que certaines stations continuent d'injecter et d'injecter de l'argent année après année
04:17pour toujours plus de diversification, mais parfois pour faire tourner une station qui n'a plus de neige.
04:23Comment vous voyez les choses par rapport à ça ? Est-ce que ça a vraiment un sens ?
04:30Alors, ce n'est pas à moi de juger si ça a un sens ou non, parce qu'encore une fois, c'est à chaque territoire de voir ce qu'il a à faire.
04:37Par contre, quand on a de la diversification qui est mise en place sur un territoire,
04:43ça permet, parce qu'on sait très bien que la neige, il y a des années avec, des années sans ou avec moins.
04:51Et du coup, le fait d'avoir, je prends pour exemple une luge, par exemple,
04:56fait que s'il y a une année, il y a un peu moins de neige, ça permet quand même aux clients qui sont là
05:02d'avoir des choses à faire et des activités à faire.
05:08Et donc, c'est intéressant quand même d'avoir ce genre d'activités complémentaires.
05:12Après, injecter de l'argent, c'est toujours le rapport entre ce qu'on injecte et ce qu'on reçoit.
05:18C'est-à-dire qu'à l'échelle des remontées mécaniques, souvent il y a un déficit.
05:22Sur l'économie globale du territoire, ça reste favorable.
05:25Moi, j'ai fait l'exercice sur certaines stations pyrénéennes, il n'y a pas photo.
05:29Sur les remontées seules, nous, on perdait de l'argent.
05:32L'économie du territoire était excédentaire de 500 000 euros.
05:35La diversification, ça va être l'enjeu de votre présidence. Vous avez un mandat de 3 ans.
05:39Alors, j'ai un mandat de 3 ans. Alors, est-ce que ce sera l'enjeu ?
05:43Oui, en tout cas, sans doute qu'on est en train de voir effectivement
05:46beaucoup de projets de diversification se mettre en oeuvre.
05:51On est en train d'adapter nos classifications pour intégrer ces nouveaux métiers
05:56parce que c'est une réalité aujourd'hui.
05:58Donc, on va suivre ça très attentivement.
06:01Après, aujourd'hui, on est conscient d'une chose, c'est que
06:04cette diversification ne permet pas de suppléer l'économie du ski.
06:08Ça, c'est un constat.
06:09Juste une info, Anne Marty, vous dites, s'il n'y a pas de neige, on fait de la luge.
06:13Pour les gens qui payent un forfait à la semaine,
06:15je pense qu'ils attendent autre chose que de faire un petit peu de luge.
06:17Ça peut aussi faire perdre une clientèle si on a un manque de neige.
06:20Alors, ce n'est pas ce que j'ai dit.
06:23Je dis, si on a réservé ses vacances et que malheureusement,
06:28cette année-là, il y a un peu moins de neige,
06:32le fait d'avoir d'autres produits à proposer à la clientèle
06:36garde une attractivité au site, bien qu'il y ait les balades, etc.
06:41Une station où la neige n'est pas là une année,
06:44ce n'est pas pour autant que les clients annulent.
06:46Pour beaucoup d'entre eux, ils viennent quand même.
06:48Mais, et on le voit avec les tendances G2A, les clients viennent pour le ski.
06:52C'est très clair.
06:530806 001010, à 7h52, on vous donne la parole.
06:57Est-ce que ces fermetures de petites stations vous inquiètent ?
07:00On parlait de celle de Notre-Dame-du-Près ce matin.
07:03Vous habitez vous aussi dans une station de moyenne montagne
07:06et vous constatez ce changement climatique.
07:08On en parle avec vous, 0806 001010.
07:14Emmanuel va justement habiter une station de moyenne montagne.
07:17C'est dans les Beauges, au-dessus de Chambéry.
07:19Bonjour Emmanuel.
07:20Bonjour Emmanuel.
07:21Bonjour.
07:22Votre sujet, peut-être, vous aviez souhaité,
07:25vous souhaitez en tout cas ce matin interpeller notre invité,
07:27Anne Marty, qui est à nos côtés.
07:29Oui, bonjour.
07:31Effectivement, j'ai écouté par rapport à ce qu'elle disait.
07:35Déjà, pour avoir eu le tour deux années d'affilée,
07:38malheureusement, quand il n'y a pas de neige,
07:40il y a quand même des clients qui annulent leur venue.
07:42C'est un fait.
07:43Et on sait qu'ils vont plutôt sur les grosses stations.
07:45Nous, les moyennes stations, de mon point de vue,
07:48on va être en difficulté.
07:49Et ce qui m'embête, c'est que les clients, finalement,
07:51se rabattent tous sur les grosses stations.
07:53On va concentrer toutes les activités invernales
07:55que sur les grosses stations.
07:56Les moyennes stations sont, à terme, sur voie à Pérexité,
07:59à fermer définitivement, je pense, d'ici une dizaine d'années.
08:02Il y aura pas mal de stations qui vont fermer.
08:04Merci en tout cas, Emmanuel, de ce témoignage.
08:07On va peut-être donner la parole à Anne Marty.
08:09Alors, de toute façon, si on regarde,
08:14il y a 250 domaines sciables en France aujourd'hui.
08:17Il y en a 170, je crois, qui ont fermé depuis les années 70.
08:22Donc, il y a un rythme de fermeture
08:24qui a toujours été plus ou moins constant.
08:27Là, il y a une donnée supplémentaire depuis plusieurs années,
08:30c'est effectivement le réchauffement climatique.
08:32Et une prise de conscience, en fait,
08:34sur la fragilité de l'économie de ces stations-là.
08:38Alors, bien évidemment, monsieur a raison,
08:40des clients annulent quand il n'y a pas de neige.
08:42Et effectivement, il peut y avoir un report.
08:44Par contre, ce qu'on voit aussi, c'est que les années où il y a la neige,
08:46ces stations-villages, ces stations de cœur, sont très attractives.
08:50Et les gens y vont parce qu'ils aiment cette ambiance
08:54et cet état d'esprit.
08:56Donc, aujourd'hui, est-ce qu'on demande à Peugeot ou à Renault
09:01où est-ce qu'ils en seront dans 15 ans avec leur véhicule ?
09:05On leur demande de ne plus produire de véhicules thermiques neufs.
09:11Est-ce qu'il y a un moment jusqu'où on va pouvoir aller, en fait,
09:15sur la question du ski dans des stations
09:17où il n'y aura plus l'or blanc ?
09:21Alors, bien évidemment, celle où il n'y aura plus.
09:23Mais le pas de temps, en fait.
09:25Moi, ce qui me gêne, c'est qu'aujourd'hui,
09:27on nous dit « le ski c'est fini ».
09:29Quand on dit « le ski c'est fini »,
09:31on dit « la vie sur le territoire, c'est fini ».
09:33C'est-à-dire que je trouve que c'est d'une violence extrême.
09:38Quand je vois ce qui se passe sur l'Alpe du Grand-Serre, par exemple,
09:41c'est 200 personnes qui vont se retrouver au chômage.
09:45Je ne sais pas combien il manque pour faire la jonction,
09:48mais un mois au chômage pour 200 personnes, c'est 200 000 euros.
09:51De toute façon, le coût humain et le coût économique est extrêmement lourd.
09:56Donc, à un moment donné, c'est juste la ligne de crête qu'il faut trouver.
10:00Ce n'est pas le ski à tout prix,
10:02c'est comment on maintient l'équilibre
10:04et comment, finalement, on va au bout du modèle actuel
10:08en engageant une diversification.
10:10Et aller vers de la diversification.
10:12Merci beaucoup, Anne Marty, d'avoir été notre invitée ce matin.
10:14Je rappelle que vous êtes la présidente de Domaine Skiable de France.
10:17Bonne journée.