1 200 morts, 251 otages au bout d’une journée d'attentat historique et sans précédent. C’est à 6 h 29 que tout commence le 7 octobre 2023 lorsque le Hamas lance une pluie de bombes dans le sud d’Israël. Dans les kibboutz à la frontière de Gaza, des combattants assassinent des centaines de civils et dans le désert du Néguev, d’autres transforment le festival Tribe of Nova en cauchemar. Cette journée d’horreur laisse des millions de traumatisés et signe le début d’un cycle sanglant de guerre.
Pour comprendre ces heures noires et leurs conséquences, Caurentin Courtois a discuté avec Sonia Delesalle-Stolper, cheffe du service planète de Libération.
Pour comprendre ces heures noires et leurs conséquences, Caurentin Courtois a discuté avec Sonia Delesalle-Stolper, cheffe du service planète de Libération.
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00:00On va parler du 7 octobre 2023. Le 7 octobre 2023, c'est une journée de massacres,
00:04une attaque terroriste du Hamas contre le sud d'Israël, 1200 morts, 251 otages.
00:10Et aujourd'hui, on est le 7 octobre 2024.
00:12Un an après, avec tout ce qu'on a appris de ce massacre,
00:17on va essayer de comprendre cette journée, ce conflit entre le Hamas et Israël.
00:21On va essayer de le comprendre ensemble avec Sonia Delsal Stolper,
00:25qui est la chef de notre service Planète.
00:27Bonjour, bonjour Sorantin.
00:29Je vous fais une petite pause dans la discussion.
00:31S'il vous plaît, abonnez-vous à la chaîne YouTube de Libération.
00:33On propose des entretiens comme ça chaque semaine.
00:35Vous pouvez aussi commenter sous cette vidéo.
00:37Et d'ici là, je vous souhaite un bon visionnage.
00:39Pour commencer, Sonia, est-ce que tu peux nous parler de l'attaque en elle-même?
00:43Ça commence à 6h29.
00:45Comment se déroule cette journée?
00:46Écoute, ça commence à 6h29 par des sirènes qui retentissent dans tout Israël
00:51pour prévenir que quelque chose se passe.
00:53En général, c'est une attaque.
00:55Effectivement, c'est une attaque d'une ampleur sans précédent
00:58avec des roquettes qui sont tirées par milliers.
01:04Et en même temps, simultanément, une incursion de la bande de Gaza vers Israël,
01:09donc vers le sud d'Israël, et qui se passe dans 29 points différents.
01:13Donc, en fait, c'est une attaque qui est simultanée dans plein d'endroits.
01:18On a beaucoup parlé de ce fameux festival de Nova,
01:21où sont arrivés quand même des types en parachute.
01:25Et en fait, je pense que ce qui est peut-être le plus frappant,
01:30parce que nous, moi, je l'ai vécu en tant que journaliste,
01:34j'ai été réveillée immédiatement par ce qui se passait.
01:38Et en fait, personne n'a compris au début.
01:40C'est ça qui est le...
01:41C'est même pas encore la sidération, c'est vraiment l'incompréhension.
01:45Qu'est-ce qui se passe?
01:46Parce que ça ressemblait à rien de ce qu'Israël connaît ou connaissait.
01:51Il y a déjà eu des missiles tirés par le Hezbollah, tirés par le Hamas,
01:56des alertes aériennes, etc.
01:59Mais une attaque de cette ampleur et de ce type, ça n'était jamais arrivé.
02:05Concrètement, sur cette attaque,
02:08que font les combattants du Hamas?
02:10Qu'est-ce qui se passe? Par où ils entrent?
02:13Comment ça se passe sur cette journée exactement?
02:16Mais c'est ça qui est fou.
02:17C'est qu'en fait, ils attaquent toutes sortes de cibles différentes.
02:20Donc, ça va du poste militaire à la frontière,
02:24à l'endroit où on passe et où ce mur qui était censé être impénétrable devient une passoire.
02:31Ça va dans des kibbutz, qui sont situés pas très loin, effectivement, de la frontière.
02:37Les kibbutz, c'est des villages à la frontière entre Gaza et Israël?
02:40Absolument. Les kibbutz, ce sont des communautés, en fait,
02:43et de manière assez intéressante, c'est que ces kibbutz-là étaient souvent
02:50peuplés de gens qui étaient plutôt en faveur de la paix,
02:55qui étaient plutôt des militants pour la paix,
02:57qui avaient souvent des contacts assez proches avec les Palestiniens et avec leurs voisins.
03:03Et l'attaque se fait, c'est une attaque totalement indiscriminée.
03:05Donc, en fait, les cibles, ce sont les militaires,
03:08mais ce sont les habitants des kibbutz, les personnes âgées, les couples, les civils, les enfants.
03:14Les jeunes qui étaient à la fameuse rave party,
03:16c'est en fait tous les civils qui sont là, sont pris pour cibles,
03:20à la fois soit pris en otage, soit abattus sur place directement,
03:27voire torturés, brûlés. Enfin, ça a été abominable.
03:31C'était un choc pour beaucoup et on ne s'y attendait pas, notamment parce que
03:36il était dit que c'était une frontière qui est censée être impénétrable entre Israël et Gaza.
03:40Pourquoi? Comment? Et comment ils ont pénétré, finalement?
03:43Il y a eu une faille, il n'y a aucun doute et l'enquête est encore en cours.
03:47Elle arrivera un jour. On aura une enquête très précise, sans doute un jour,
03:51sur les failles de la sécurité israélienne à ce moment-là, des services de sécurité qui n'ont pas vu venir.
03:56Il y a eu cette histoire de ce qu'on appelle les femmes qui étaient postées
04:02pour surveiller ce qui se passait parce qu'il y avait des caméras,
04:04parce qu'il y avait tout ce qu'il fallait,
04:07qui étaient postées à la frontière pour voir ce qui se passait et qui ont signalé
04:11qu'elles constataient depuis plusieurs semaines qu'il y avait des entraînements
04:14de membres du Hamas qui se faisaient à Gaza
04:19et ça n'a pas été pris en compte par les services de sécurité.
04:21Donc, il y a eu vraiment une faille à ce niveau-là qui a permis aux Hamas,
04:26aux combattants du Hamas, de se précipiter et de perpétrer cet acte terroriste
04:33absolument innommable.
04:34Est-ce qu'on a des informations sur comment cette opération s'est montée du côté du Hamas?
04:39Est-ce que tu disais qu'il y a eu des failles sur le fait que
04:42le gouvernement israélien n'est pas forcément au courant?
04:45Comment est-ce que tout ça s'est préparé?
04:46Est-ce qu'on sait comment ça s'est préparé?
04:48Alors, on ne sait pas s'il n'était pas au courant
04:51de certaines choses, puisque clairement, il y a eu des alertes,
04:53il y a eu des choses qui ont été signalées.
04:57Après, là où il y a eu un défaut évident, c'est de compiler
05:02toutes ces informations en se disant
05:04qu'il y a une attaque d'ampleur qui est en train de se préparer.
05:07Et ça, c'est complètement passé à côté du radar.
05:09Pour quelle raison? Qui n'a pas pris en compte les avertissements, etc.?
05:15Ça, c'est l'enquête qui le dira.
05:17Est-ce que c'est au niveau des services secrets, de l'armée,
05:21du gouvernement de Netanyahou?
05:22On ne sait pas et ce sera établi plus tard.
05:26Mais ce qui est sûr, c'est qu'effectivement, à aucun moment,
05:29et on le voit dans la lenteur de la réaction aussi, de la réaction israélienne,
05:32c'est-à-dire en fait, il y a plein d'habitants des kiboutz qui ont expliqué
05:35parce qu'il faut rappeler qu'en Israël,
05:37c'est pour ça qu'aussi on parle souvent des alertes,
05:40tout le monde vit avec, dans sa maison, dans son immeuble.
05:44En général, il y a un abri parce qu'on sait qu'on n'est pas à l'abri
05:47d'une attaque terroriste.
05:48Et tout le monde dans les kiboutz, les habitants ont essayé de se réfugier
05:51dans ces chambres fortes qui sont supposées être fermées
05:54et qui n'ont malheureusement pas toujours protégé les habitants.
05:57Et on a attendu, on a attendu que l'armée arrive,
06:00que des sauveteurs arrivent.
06:03Or, clairement, à ce moment-là, il y a eu un décalage
06:06puisque l'attaque a commencé à 6h29 et que l'armée israélienne
06:10entre vraiment en œuvre autour de 10h30, 10h34 à peu près.
06:18Donc, il s'est passé quand même plusieurs heures
06:20pendant laquelle, en fait, il y a quelques fois,
06:22il y a des policiers qui faisaient la circulation
06:24qui se sont retrouvés à essayer d'attraper une arme
06:26pour défendre les civils autour d'eux qui ne sont pas formés pour ça.
06:30Et ça participe de ce sentiment de totale sidération
06:34et de ne pas comprendre ce qui se passe.
06:36Du côté de la société israélienne, on ne s'y attendait vraiment pas.
06:39Il y a une chose qui montre ça, c'est qu'il y avait un festival
06:41à quelques kilomètres de la frontière entre Gaza et Israël.
06:47Le festival Tribe for Nova, c'est ça ?
06:50Oui, c'est ça. Un festival pour la paix
06:52où des jeunes sont venus danser sur de la musique techno
06:56toute la nuit et sur plusieurs vêtements.
06:59Toute la nuit et sur plusieurs jours.
07:01Et il y avait à peu près 3500 personnes qui étaient là,
07:04qui avaient garé leur voiture et qui dansaient,
07:07qui dormaient sous des tentes.
07:09C'était un festival un peu hippie
07:13où il y avait énormément, énormément de jeunes.
07:16Et ça a été la panique totale parce que c'était à l'aube.
07:18Il y avait certains qui étaient encore en train de danser.
07:21La musique couvrait les bruits des premières détonations.
07:24Et puis, il y a eu un mouvement de foule.
07:26Et d'ailleurs, c'est ce qu'on a en une de notre journal aujourd'hui.
07:28Cette foule et cette jeune fille qui court
07:32et qui clairement a compris ou n'a pas compris ce qui se passe,
07:35mais sait qu'il faut qu'elle court, que sa vie en dépend.
07:37Et c'est ce qui s'est passé.
07:38C'est effectivement une fuite absolue.
07:41Et on a retrouvé quand même 370 personnes
07:44qui ont été tuées à bout portant,
07:46souvent parfois sexuellement attaquées également,
07:51violentées sur ce désert.
07:54C'est un champ dans le désert, en fait.
07:56Si on retourne dans le récit de cette journée,
08:02à quel moment est-ce que l'armée israélienne
08:04parvient à intervenir dans cette attaque terroriste ?
08:08Comme je le disais un peu plus tôt,
08:09ça a commencé vers 10h30, 10h34 à peu près.
08:13C'est la réplique de l'armée israélienne.
08:17Mais en fait, le fait est que c'était tellement étalé,
08:22les attaques étaient tellement étalées, tellement diverses.
08:24Et par ailleurs, il y avait aussi des terroristes
08:27qui se sont habillés en soldats israéliens,
08:30donc qui ont détourné l'attention,
08:32trompé certains civils qui ont couru vers eux
08:35pensant être sauvés,
08:36et en fait se sont retrouvés otages ou tués.
08:39Et donc en fait, c'était sur l'autoroute,
08:41c'était dans un kibbutz,
08:43c'était dans un autre kibbutz,
08:44c'était au Festival Nova,
08:46c'était dans la ville de Sderot,
08:48dont le commissariat est devenu un siège,
08:51il a finalement été rasé.
08:54Et ces combats ont duré plus de 24 heures en fait.
08:57Plus de 24 heures, il faut penser à ça,
08:59c'est que je pense qu'on ne réalise pas...
09:03Souvent les attentats qu'on est habitué à raconter
09:07ou qu'on peut traverser,
09:09y compris ceux de Paris,
09:10se déroulent sur quelques heures
09:12ou quelques minutes, même parfois,
09:15quand c'est une bombe qui explose par exemple.
09:17Là, ça a duré, les combats ont duré plus de 24 heures,
09:19et il y a eu cette espèce d'incertitude
09:21sans savoir si les zones étaient sécurisées
09:23avant le dimanche,
09:26puisque ce 7 octobre était un samedi l'an dernier.
09:29Donc voilà.
09:30Cette journée, comme tu le dis,
09:32ça se déroule jusqu'à à peu près 20h.
09:34À 20h, qu'est-ce qui se passe ?
09:35C'est quoi ? C'est les soldats du Hamas qui se retirent ?
09:38Oui, alors pas forcément des soldats,
09:41les combattants ou les terroristes du Hamas se retirent.
09:44Soit ils se retirent,
09:46soit ils ont été tués dans les combats.
09:49Il y en a beaucoup quand même de ceux qui sont arrivés,
09:52et on sait que les corps de beaucoup des terroristes
09:55sont gardés dans des chambres froides aujourd'hui,
09:59en Israël,
10:00dans l'attente d'un accord sur les échanges de prisonniers
10:04et des otages,
10:05puisque chacun, chaque partie, entre guillemets,
10:08va essayer de récupérer les corps de leurs proches.
10:11Donc ça fait partie aussi des négociations en général,
10:14quand il y a des négociations,
10:16s'il y a un jour des négociations qui aboutissent,
10:18mais ça fait partie du jeu.
10:20Donc effectivement, il y en a une partie qui ont été abattues,
10:23une autre partie qui se retire,
10:25et l'armée qui commence à sécuriser zone après zone,
10:30et c'est à ce moment-là qu'on commence à mesurer,
10:33enfin on avait commencé un peu plus tôt dans la journée,
10:35mais à mesurer l'ampleur vertigineuse de cet attentat.
10:40Et le nombre de victimes absolument dingue
10:43par rapport à la population,
10:44en une journée, en quelques heures,
10:47tout sexe, âge confondu,
10:51qui sera le bilan de cette journée.
10:54Et dès la fin de cette journée,
10:57Netanyahou annonce des représailles immenses,
11:02et dès le lendemain, c'est ça,
11:03il y a eu d'énormes bombardements à Gaza ?
11:06En fait, à 2h19, je crois,
11:09Netanyahou fait un communiqué,
11:11et promet une vengeance,
11:13c'est une guerre qui va être longue et épuisante.
11:18J'aime pas trop dire que Netanyahou avait raison en général,
11:21puisque voilà, mais pour le coup,
11:23on en est là aujourd'hui, un an après,
11:25on est avec une guerre qui, effectivement,
11:28a rasé Gaza, ou presque,
11:29c'était vraiment une vengeance implacable,
11:32et on est avec une guerre qui, maintenant,
11:35s'est étendue au Liban,
11:37qui pourrait s'étendre, l'Iran a frappé deux fois,
11:40à deux reprises, a tenté de frapper durement Israël,
11:43Israël a promis des représailles,
11:45donc on est quand même dans un contexte explosif,
11:47avec une guerre qui s'est étalée partout,
11:48des victimes, on a des bilans qui varient,
11:52mais on a à peu près un bilan,
11:54une estimation basse de 40 000 morts,
11:5640 000 morts à Gaza,
11:582 000 ou 3 000 au Liban,
12:02et c'est une guerre qui n'en finit pas,
12:04et dont on voit, effectivement, pas la fin.
12:06Faut peut-être souligner, peut-être rappeler,
12:09peut-être pour expliquer aussi
12:11pourquoi c'est tellement,
12:13pourquoi les représailles sont tellement violentes,
12:15c'est aussi que pour Israël, à ce moment-là,
12:17Israël était considéré comme étant
12:21l'endroit de refuge,
12:23c'est comme ça, et c'est sur cette idée
12:26que l'État d'Israël a été créé,
12:28de pouvoir avoir un endroit où
12:30les Juifs du monde entier
12:32peuvent vivre en paix, et se réfugier,
12:34et vivre en paix.
12:36Et là, soudain, ce sentiment,
12:38qui était un faux sentiment de sécurité,
12:40puisqu'on a déjà parlé du fait qu'il y avait des alertes,
12:42régulièrement, et il y a eu plusieurs guerres
12:44au fil des années, qui se sont avec les voisins,
12:46mais il y avait quand même ce sentiment
12:48que, sur le sol d'Israël,
12:50on était à peu près en sécurité.
12:52Or, là, ce sentiment-là
12:54explose, complètement, ce jour-là.
12:56Ça veut dire qu'il n'y a plus aucun endroit,
12:58il n'y a plus aucun sentiment de sécurité.
13:00Donc, il y a ce sentiment aussi
13:04de citadelle assiégée,
13:06et qui provoque, derrière, ces représailles
13:08qui n'en finissent pas.
13:10Vu la puissance de ces représailles,
13:12moi, je me demande,
13:14pourquoi le Hamas prend cette décision d'attaquer ?
13:16Est-ce qu'il ne pouvait pas s'attendre
13:18à des représailles aussi violentes ?
13:20Est-ce qu'on sait ce qui s'est passé,
13:22dans la tête des chefs du Hamas,
13:24pour prendre cette décision ?
13:26Alors, non, on ne sait pas ce qui s'est passé.
13:28Ce qui est intéressant, c'est que, souvent,
13:30de ce qu'on sait pour le moment, en tout cas,
13:32c'est que l'attaque a surpris,
13:34y compris les alliés du Hamas.
13:36Donc, y compris le Hezbollah, au Liban,
13:38y compris, peut-être,
13:40une partie de la branche politique
13:42du Hamas,
13:44qui était au Qatar.
13:46Donc, ça a pris tout le monde par surprise.
13:48Il y a des théories, selon lesquelles,
13:50initialement, ils auraient voulu, essentiellement,
13:52prendre des otages, pour pouvoir, effectivement,
13:54obtenir un échange de prisonniers, machin.
13:56Ça ne tient pas trop debout,
13:58vu la violence et l'atrocité,
14:00la perversité de l'attaque,
14:02qui dépasse
14:04l'entendement.
14:06Je crois que, non,
14:08c'est compliqué d'avoir
14:10la moindre interprétation
14:12de ce qui a poussé.
14:14Ce n'est pas un acte de résistance
14:16pour une cause. Ça ne peut pas être ça,
14:18parce qu'effectivement, le Hamas
14:20et Sinoir, le chef de la branche militaire,
14:22ne pouvaient pas imaginer
14:24une demi-seconde que...
14:26Le chef du Hamas ne pouvait pas ignorer
14:28ses représailles.
14:30Donc, en fait, ce qu'il faut peut-être souligner,
14:32c'est qu'en fait, ni Sinoir
14:34à Gaza,
14:36pour le Hamas,
14:38ni Netanyahou,
14:40n'ont vraiment à cœur
14:42la cause de leur population.
14:44Quel défenseur
14:46de son peuple
14:48peut engager une action qui va
14:50provoquer derrière l'anéantissement
14:52de 40 000
14:54de ses citoyens,
14:56et la destruction
14:58absolue du territoire ?
15:00De la même manière,
15:02quel chef d'État et de gouvernement
15:04peut continuer à aller toujours plus loin
15:06dans les représailles,
15:10alors que
15:12150 otages sont encore aux mains
15:14on ne sait pas combien sont encore vivants,
15:16sont encore aux mains du Hamas
15:18dans des tunnels, dans des conditions,
15:20on n'a aucune idée de leur état.
15:22On suppose que peut-être au moins
15:24une soixantaine d'entre eux sont peut-être déjà morts.
15:26Enfin, voilà.
15:28Et puis, de se retrouver dans un état
15:30de siège permanent,
15:32de violence permanente.
15:34Donc en fait, je pense qu'aucun des deux
15:36protagonistes
15:38qui sont les deux côtés de ce conflit
15:40n'ont vraiment à cœur
15:42la survie
15:44de leur population, ou le bien-être de leur population.
15:46Est-ce que
15:48on sait s'il y a des liens
15:50politiques entre
15:52Netanyahou, le Premier ministre israélien,
15:54et le Hamas, avant cette attaque-là ?
15:56Alors, il n'y a pas des liens politiques.
15:58Il faut bien faire
16:00attention. Le Hamas est une organisation
16:02terroriste, considérée comme
16:04terroriste par l'ONU, par l'Union
16:06Européenne, etc.
16:08Le gouvernement de Netanyahou est
16:10un gouvernement démocratique, élu
16:12démocratiquement. Ce qui se passe,
16:14c'est que le Hamas a été élu,
16:16à un moment donné, on peut discuter des conditions,
16:18mais a été élu pour gouverner, entre guillemets,
16:20Gaza.
16:22Donc effectivement, des membres
16:24de la branche politique du Hamas
16:26gouvernent les différentes
16:28institutions à Gaza.
16:30Et ce qui est vrai, c'est que pendant pas mal d'années,
16:32Netanyahou a plutôt
16:34favorisé
16:36le Hamas
16:38dans le sens où a laissé passer
16:40par exemple des financements
16:42qui passaient par le Qatar et qui arrivaient
16:44par Israël et qui étaient ensuite transmis au Hamas
16:46pour construire un hôpital,
16:48développer une université, etc.
16:50Donc en fait,
16:52ce lien-là,
16:54je dis souvent Netanyahou a favorisé,
16:56je ne sais pas si c'est favorisé, mais en tout cas, il n'a pas
16:58empêché le Hamas
17:00en pensant, et je pense que quelque part
17:02il s'est dit que le Hamas gère
17:04Gaza. L'autorité palestinienne
17:06ça la faiblit parce que du coup
17:08le Hamas prend la main sur Gaza
17:10et donc l'autorité palestinienne est réduite
17:12à la portion congrue
17:14sur la Cisjordanie notamment.
17:16Et par ailleurs,
17:18Netanyahou
17:20n'a jamais eu beaucoup d'intérêt
17:22à ce qu'en fait
17:24l'autorité palestinienne
17:26ou la solution
17:28à deux États
17:30se profile vraiment.
17:32Pourquoi ? Pour plusieurs raisons. La première,
17:34c'est parce qu'il n'est au pouvoir que grâce
17:36au soutien de l'extrême droite,
17:38qui elle-même est en faveur de la disparition,
17:40surtout pas de l'existence
17:42d'un État palestinien qui soutient
17:44la colonisation illégale
17:46de la Cisjordanie et de Gaza
17:48aujourd'hui. Donc,
17:50il est tenu, il ne doit
17:52sa présence au gouvernement que grâce à
17:54cette rallie avec cette extrême droite
17:56et d'autre part parce qu'il a
17:58une série de casseroles judiciaires
18:00j'allais dire
18:02aux chevilles, on va dire,
18:04pour pas dire autre chose
18:06et qui font que pour le moment, il bénéficie
18:08de l'immunité dans la mesure politique
18:10puisqu'il est Premier ministre
18:12et le jour où il n'est plus au pouvoir,
18:14la machine judiciaire se remet en route.
18:16Ce sont des procès pour corruption
18:18et il risque la prison. Donc, il n'a aucun
18:20intérêt ni à ce que la guerre se termine
18:22ni à ce qu'il quitte le pouvoir. Donc, pour lui,
18:24l'intérêt c'est, plus la guerre se prolonge,
18:26plus ou moins
18:28les barreaux d'une prison
18:30éventuelle se rapprochent.
18:32Et justement, en un
18:34an, comment est-ce que la société
18:36israélienne a perçu
18:38ce conflit ? Comment est-ce que ça a
18:40évolué ? Comment la société israélienne a perçu
18:42les actions du Hamas et de
18:44Netanyahou ?
18:46C'est très compliqué
18:48à expliquer. Je pense que
18:50il y a à la fois... On en parle
18:52très souvent avec notre correspondant sur place,
18:54qui connaît très bien la société israélienne,
18:56Nicolas Rouget. En gros,
19:00il n'y a pas une opposition
19:02énorme à la guerre,
19:04comme il y a pu avoir
19:06à certains moments des manifestations
19:08terribles. Il y a
19:10d'énormes manifestations. Il y a quand même 400 000
19:12personnes, en gros, qui tous les week-ends,
19:14tous les week-ends, depuis
19:16des mois, manifestent
19:18dans les rues de Tel Aviv, vont jusque
19:20devant la résidence de Netanyahou,
19:22contre Netanyahou, en lui disant
19:24qu'il faut arrêter, ramener les otages,
19:26etc. Après, il y a ça.
19:28Et puis, il y a à côté ce sentiment
19:30effectivement qu'ils sont
19:32en danger, et que le Hamas
19:34est un danger, et que donc il faut
19:36que le Hezbollah est un danger, que l'Iran
19:38est un danger, et que donc
19:40il faut se protéger
19:42d'une manière ou d'une autre, et que pour le moment,
19:44la manière que le gouvernement
19:46israélien a choisi est celle de
19:48de l'attaque violente
19:50et armée. Donc,
19:52il n'y a pas... Le taux
19:54dans l'opinion
19:56publique, Netanyahou
19:58n'est pas très très très populaire, même
20:00il est très très peu populaire. Mais en même temps,
20:02sa côte de popularité très petite
20:04ne diminue pas non plus, parce que
20:06voilà, parce qu'il est
20:08le chef de l'État,
20:10le chef du gouvernement,
20:12et pour le moment, il y a ce sentiment
20:14encore de
20:16comment restaurer la sécurité.
20:18Alors, il y a des voix, y compris,
20:20c'est assez frappant d'ailleurs, on l'a
20:22raconté dans le journal aujourd'hui,
20:24sur le site, on a ces témoignages,
20:26on a pris des témoignages assez
20:28variés, on a choisi 8 voix,
20:30évidemment c'est pas exhaustif, ce sont 8
20:32personnes très différentes,
20:344 Gazaouis, 4 Israéliens,
20:36qui racontent comment cette journée-là
20:38les a fait basculer, comment leur vie
20:40d'avant ne reviendra
20:42jamais, en fait, d'une certaine manière.
20:44Et parfois,
20:46ça tient
20:48à cette journée d'une vraie bascule,
20:50y compris pour les militants
20:52de la paix qui disent aujourd'hui, qui quelque part
20:54au fond d'eux disent, mais moi j'ai toujours voulu
20:56la paix, quoi. Mais en fait, comment
20:58aujourd'hui la construire, cette paix ?
21:00Et d'un côté comme de l'autre, d'ailleurs.
21:02Et c'est terrible, en fait.
21:04Le constat est terrible.
21:06Est-ce que justement, dans ces témoignages qu'on a
21:08dans le journal de Libé du jour,
21:10il y en a un ou deux
21:12qui t'ont particulièrement marqué, dans lequel
21:14tu voudrais rentrer dans le détail ?
21:16Tu nous parles déjà de ce rapport
21:18à la paix. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui te marquent ?
21:20Il y en a plein, en fait.
21:22Ils sont tous très très marquants,
21:24chacun dans leur spécificité,
21:26parce qu'ils représentent tous
21:28une sorte de pièce,
21:30d'un puzzle ultra difficile, quoi.
21:32C'est pas un puzzle à 1000 pièces
21:34ou à 10000 pièces, c'est un puzzle à je ne sais combien de pièces.
21:36Et c'est super compliqué.
21:38Il y a cette survivante du Festival Nova,
21:40la jeune fille qui est sur la une
21:42est une survivante aussi, c'est pas elle
21:44qu'on a interviewée,
21:46et qui raconte qu'en fait,
21:48elle ne se souvient de rien.
21:50Et elle raconte qu'il lui a fallu,
21:52qu'elle comprenait pas, qu'elle dormait pas,
21:54qu'elle faisait cauchemar, et en même temps,
21:56elle ne se souvient de rien.
21:58Elle est en thérapie et post-traumatique.
22:00En gros, elle a effacé.
22:02Elle raconte justement ce sentiment de
22:04elle savait qu'il fallait qu'elle coure, qu'il fallait qu'elle
22:06s'échappe, mais elle ne comprenait pas
22:08ce qui se passait, quoi. Donc je trouve ça
22:10super frappant parce que ça rappelle,
22:12ça redit cet instant de sidération absolue.
22:14Après, il y a aussi
22:16ce Gazaoui
22:18qui était en Cisjordanie,
22:20parce qu'il travaillait en Israël,
22:22il faisait partie des Gazaouis qui avaient le droit de rentrer en Israël
22:24pour aller travailler, parce qu'on oublie ça
22:26aussi, il faut rappeler qu'il y avait
22:28beaucoup de Palestiniens qui travaillaient en Israël
22:30et qui faisaient l'aller-retour tous les jours, etc.
22:32Bon, dans des conditions pas formées
22:34forcément extraordinaires, mais...
22:36Et qui, en fait, dit...
22:38En fait, il n'a jamais pu rentrer
22:40à Gaza, retrouver sa famille, et depuis un an,
22:42il est bloqué en Cisjordanie, dans un
22:44centre culturel coréen, ça s'invente pas,
22:46avec d'autres Gazaouis
22:48qui ne peuvent pas rentrer chez eux,
22:50et donc lui a vu des membres de sa famille
22:52mourir sur les réseaux sociaux,
22:54sur des vidéos qu'on lui envoie, et il ne peut pas
22:56rejoindre sa famille ou le faire venir
22:58sa famille, et il est bloqué là, il est enfermé
23:00là, il ne peut pas quitter la Cisjordanie
23:02non plus, donc c'est...
23:04extrêmement frappant aussi, et puis
23:06il y a ceux qui racontent, comme cette chirurgienne de Gaza
23:08qui était une jeune chirurgienne, qui venait
23:10d'avoir son diplôme de chirurgienne
23:12et qui dit, mais avant, bon, la vie
23:14n'était pas parfaite, mais j'avais une vie. En fait,
23:16ils disent tous ça, ils disent tous, avant, on avait
23:18une vie, c'était pas parfait, il y avait une angoisse
23:20sécuritaire, il y avait une angoisse
23:22de pouvoir voyager autant qu'on voulait
23:24pour les Gazaouis, ou pour les Israéliens,
23:26il y avait cette angoisse des alertes, etc.
23:28Mais on avait une vie, une vie plutôt chouette.
23:30Et aujourd'hui,
23:32on n'a plus rien. Et c'est ça qui
23:34moi, m'a serré le
23:36coeur en lisant
23:38et en recueillant tous ces témoignages.
23:40Dans les articles que vous allez pouvoir retrouver
23:42sur le site de Libération, on a notamment
23:44un récit qui est très intéressant,
23:46on a envoyé Nicolas Rouget sur la route
23:48232, et en fait,
23:50qui, un an après, a refait
23:52le trajet...
23:54qui est retourné sur les lieux du massacre
23:56du 7 octobre 2023.
23:58Est-ce que tu peux nous en parler,
24:00Sonia, et nous dire un petit peu ce qu'il raconte ?
24:02Oui, c'est un exercice un peu
24:04différent de ce qu'on fait d'habitude.
24:06En général, on essaye de ne pas trop se mettre en scène
24:08en tant que journaliste quand on raconte,
24:10quand on est dans un reportage, surtout dans
24:12des endroits comme ça, parce que c'est pas
24:14l'important, ce sont les personnes qu'on rencontre
24:16et les personnes qui ont subi ces
24:18événements. Mais là, on s'est dit que c'était
24:20intéressant. Nicolas, il est parti
24:22dès le 7, le matin même,
24:24il est parti vers là...
24:26Donc, on parle du 7 octobre 2023, le jour du massacre.
24:28Dès le jour du massacre, il part.
24:30Il part et il va voir ce qui se passe vers Gaza. Et en fait, lui non plus
24:32ne sait pas ce qui se passe. Il sait qu'il y a un truc énorme
24:34qui se passe, donc il part comme journaliste,
24:36il va faire son travail, il avance
24:38pour aller vers là
24:40où a lieu l'attaque.
24:42Et ce qui s'est passé,
24:44c'est qu'il s'est retrouvé
24:46dans des situations pas très confortables,
24:48à devoir fuir à certains moments,
24:50à se cacher, etc. Parce qu'en fait,
24:52il a réalisé, mais après coup,
24:54que c'était une zone de guerre,
24:56de guérilla en fait,
24:58où tu ne savais pas trop qui était l'ennemi
25:00ou l'ami, où c'était impossible
25:02de comprendre ce qui se passait.
25:04Et donc là, il est reparti sur cette route qui longe
25:06la frontière avec Gaza,
25:08qui est devenue une route
25:10un petit peu mémorielle,
25:12où il y a des endroits, des hangars
25:14qui ont flambé, des kibbutz qui ont flambé,
25:16qui n'ont pas été reconstruits, rien n'a été reconstruit,
25:18ils sont restés assez figés.
25:20Vous avez sûrement vu
25:22ces photos emblématiques de
25:24voitures abandonnées,
25:26criblées de balles sur l'autoroute,
25:28avec des corps parfois allongés à côté.
25:30Les carcasses
25:32de ces voitures ont été
25:34emmenées, posées, repeintes,
25:36posées sur le long d'une route
25:38vers Tel Aviv et vers la résidence
25:40de Netanyahou. Donc il y a toutes ces choses-là.
25:42Et ce n'était pas
25:44simple pour Nicolas de
25:46raconter, parce que ça veut dire que
25:48lui aussi doit se mettre un peu en scène et
25:50se remémorer certaines choses, mais
25:52je pense que l'exercice
25:54est plutôt intéressant
25:56parce qu'il
25:58raconte aussi à quel point ça lui
26:00pose des questions
26:02sur l'exercice de son métier,
26:04sur à quoi ça sert, ce qu'il fait, de raconter,
26:06parce qu'il a pu raconter
26:08très bien les kibbutz,
26:10les survivants, etc.
26:12Il n'a pas accès à Gaza,
26:14aucune presse internationale ne peut aller à Gaza.
26:16Donc en fait, pour humaniser
26:18ce qui se passe aussi à Gaza, c'est super
26:20difficile, même si on a des vidéos,
26:22on a des témoignages, mais c'est jamais la même chose
26:24d'avoir un témoignage par téléphone ou même
26:26par Skype, et d'avoir un témoignage
26:28direct, où on parle à la
26:30personne, où on peut lui prendre la main, où on peut
26:32voir comment elle... C'est complètement différent
26:34de témoigner. Et c'est frustrant
26:36quand on est journaliste et qu'on essaye
26:38de raconter
26:40la réalité d'un conflit,
26:42d'avoir accès qu'à un seul côté.
26:44Donc voilà.
26:46Cet exercice n'a pas été facile
26:48pour lui à écrire.
26:50Ça renvoie à plein de
26:52choses aussi. Il raconte de la société
26:54israélienne, comment la société israélienne
26:56est brisée,
26:58est complètement déchirée
27:00entre ceux qui disent, mais à quoi bon ?
27:02C'est rajouté
27:04de l'horreur à l'horreur
27:06et en même temps ceux qui disent,
27:08mais on n'a pas d'autre choix
27:10et qu'est-ce
27:12que tu expliques à des enfants aujourd'hui
27:14qui grandissent à l'école ? Comment tu leur racontes
27:16ce qui est en train de se passer, ce qui va
27:18se passer plus tard
27:20parce que tu n'as aucune notion ?
27:22Et c'est vrai pour les petits
27:24israéliens aujourd'hui et comme
27:26les Gazaouis qui ne peuvent plus aller à l'école
27:28non plus depuis un an.
27:30Il y en a beaucoup qui disent que Netanyahou
27:32n'a pas vraiment d'intérêt à terminer la guerre parce que
27:34si la guerre se termine, il fera face à de nombreux procès.
27:36Pourquoi est-ce que les gens disent ça ?
27:38Il y a une série de procès en cours
27:42pour corruption
27:44qui sont suspendus puisqu'il bénéficie
27:46d'une immunité puisqu'il est Premier
27:48ministre. Le jour où il n'est plus
27:50au pouvoir, la machine
27:52judiciaire reprend son cours.
27:54Jusqu'à présent, la justice en Israël
27:56fonctionne.
27:58La machine reprendra son cours
28:00et les charges qui pèsent contre lui
28:02de corruption sont extrêmement graves
28:04et peuvent entraîner son emprisonnement.
28:06Donc en fait, il n'a aucun intérêt
28:08à quitter le pouvoir à l'heure actuelle.
28:10Donc du coup,
28:12aucun espoir pour la paix ?
28:14Alors non, il ne faut pas...
28:16Mais tu sais...
28:18Mais je crois que c'est un...
28:20Aucun espoir en fait.
28:22Si on regarde aujourd'hui, on se dit
28:26qu'il n'y a aucun espoir parce qu'effectivement, la guerre
28:28ne fait que s'étendre.
28:30On craint... Israël
28:32a annoncé qu'ils allaient lancer des représailles
28:34contre les derniers tirs
28:36de barrages de missiles lancés
28:38contre Israël par l'Iran.
28:40Donc on risque une escalade
28:42supplémentaire.
28:44On voit bien l'impuissance
28:46où le monde appelle à arrêter tout ça,
28:48à déclarer
28:50un cessez-le-feu, mais ça n'arrête pas.
28:52Donc effectivement, c'est très difficile de garder
28:54espoir. Après, il faut se rappeler aussi
28:56que j'ai interviewé
28:58récemment le haut-commissaire aux droits humains
29:00de l'ONU.
29:02Je lui ai posé
29:04exactement cette question en disant qu'il n'y a plus d'espoir.
29:06Et il m'a dit... J'ai toujours été
29:08frappée de voir que
29:10l'écrivain autrichien
29:12Stefan Zweig s'est suicidé en 1943,
29:14profondément déprimé
29:16par la guerre, au cœur de la guerre,
29:18de la Seconde Guerre mondiale.
29:20Et il venait d'écrire
29:22Le Monde de Demain, un bouquin
29:24un peu visionnaire
29:26sur la fin d'un monde et le début
29:28d'un autre. Et il disait en fait
29:30que s'il avait attendu seulement deux ans,
29:32il aurait vu émerger un monde complètement différent.
29:34Où l'ONU était créée,
29:36où on a ensuite fondé l'Union Européenne,
29:38l'ancêtre de l'Union Européenne,
29:40et un monde en paix, en tout cas,
29:42dans un premier temps.
29:44Donc on ne peut pas,
29:46on ne peut jamais dire, je crois, qu'il n'y a aucun espoir.
29:48Il faut garder quand même un... Et puis je crois
29:50qu'on n'a pas trop de choix non plus.
29:52Il faut garder espoir qu'à un moment donné,
29:54la raison prévaudra
29:56et qu'on y arrivera.
29:58Mais c'est vrai que
30:00le paysage est très sombre
30:02à l'heure actuelle.
30:04À la suite de ce massacre du 7 octobre
30:06et au fil de cette année,
30:08comment est-ce que la communauté internationale a réagi
30:10face aux
30:12conflits au Proche-Orient ?
30:14La communauté internationale,
30:16elle réagit dans... Alors,
30:18elle agit dans le sens où
30:20elle essaye d'apporter une aide humanitaire
30:22notamment à Gaza,
30:24dans la mesure du possible,
30:26dans ce qui lui est autorisé puisque
30:28c'est Israël qui contrôle les passages
30:30et autres.
30:32Elle essaye de faire
30:34pression sur les uns et les autres pour
30:36essayer par des intermédiaires
30:38directement, par des déclarations,
30:40par des poursuites
30:42ou des menaces de poursuites, que ce soit contre Israël
30:44ou contre le Hamas
30:46ou en parlant
30:48avec tous les pays de la région, les pays arabes
30:50de la région qui sont impliqués, le Qatar,
30:52l'Arabie Saoudite, la Jordanie,
30:54l'Egypte.
30:56Mais en fait, la réalité
30:58aujourd'hui, c'est que pour le moment,
31:00à part
31:02cette minuscule trêve en novembre
31:04dernier qui a permis la libération d'une partie
31:06des otages
31:08et la libération
31:10de prisonniers,
31:12on n'y arrive pas.
31:14La communauté internationale
31:16n'arrive pas à convaincre
31:18que ce soit Netanyahou
31:20ou le Hamas d'arrêter, ou le
31:22Hezbollah d'arrêter.
31:24On a des tournées,
31:26je ne sais plus à combien de tournées dans le Moyen-Orient
31:28on en est du
31:30secrétaire d'Etat
31:32américain Anthony Blinken.
31:34Le nouveau ministre des Affaires
31:36étrangères français est en train d'achever
31:38une tournée au Proche-Orient Express.
31:40Il a fait six pays
31:42en quatre jours. Il est en Israël
31:44aujourd'hui. Tout le monde essaye
31:46d'une manière ou d'une autre, mais c'est vrai que
31:48la réalité est que pour le moment, on ne voit
31:50pas
31:52de pression suffisante, en tout cas,
31:54sur les uns ou les autres pour qu'on
31:56arrive à cesser le feu. Et on
31:58n'oublie pas que
32:00celui qui aurait le plus de poids, ou ceux qui ont
32:02le plus de poids, ce sont les Etats-Unis,
32:04sur Israël, il n'y a aucun doute,
32:06qui sont à l'heure actuelle en pleine campagne
32:08électorale. On est à juste un mois
32:10de l'élection présidentielle
32:12qui est extrêmement serrée.
32:14On sait qu'on a Kamala Harris
32:16et Donald Trump sont au coude à coude.
32:18Sur le terrain,
32:20ils vont faire campagne les uns et les autres
32:22jusqu'au dernier moment.
32:24Et c'est vrai que ce n'est pas le moment idéal
32:26pour faire une pression
32:28très forte sur l'un ou l'autre
32:30parce qu'ils sont en campagne électorale.
32:32Ce n'est jamais un bon moment, donc c'est compliqué.
32:34Aujourd'hui, dans le conflit
32:36entre le Hamas et Israël,
32:38où en est-on ? Les otages ?
32:40Les bombardements à Gaza ?
32:42Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui ?
32:44Alors,
32:46il se passe
32:48qu'à Gaza, il y a toujours des bombardements.
32:50Il y a encore des zones...
32:52En fait,
32:54on a parfois tendance à se dire
32:56qu'il n'y a plus rien à détruire tellement
32:58on a vu les images de destruction
33:00quand même, de champs de ruines
33:02qui est devenu Gaza. Mais il se trouve
33:04qu'il y a encore des poches
33:06d'endroits, y compris des zones
33:08de réfugiés. Alors Israël justifie
33:10en disant que le Hamas...
33:12C'est probablement
33:14en partie vrai, puisque c'est ça
33:16depuis le début, que le Hamas se sert
33:18en partie des civils comme couverture
33:20au père de l'intérieur
33:22de certains endroits.
33:24Mais donc, en fait, on a
33:26des civils qui en sont...
33:28On a eu des témoignages qui en sont à la
33:30neuvième déplacement
33:32de leur famille. Donc, ils sont partis
33:34de leur appartement pour aller dans un autre appartement
33:36puis un autre, puis ensuite dans une tente
33:38et puis dans une autre tente, et qui aujourd'hui
33:40reçoivent encore des avis de bombardements
33:42imminents. Et donc, il faut tout empacter
33:44et repartir. Et ils ne savent pas où repartir
33:46parce que la zone où ils vont repartir sera peut-être
33:48la suivante, qui sera à nouveau sous le feu.
33:50Donc ça, c'est quelque chose qui reste quotidien
33:52à Gaza.
33:54On a au Liban
33:56des tirs
33:58incessants du
34:00Hezbollah vers Israël
34:02et d'Israël vers le Liban
34:04sud et Beyrouth.
34:06Notamment la banlieue
34:08sud de Beyrouth, qui est considérée comme un fief du
34:10Hezbollah. On a vu qu'il y a eu
34:12l'attaque spectaculaire au Bipper,
34:14au Tokiwoki,
34:16et l'élimination de pratiquement
34:18tout l'état-major du Hezbollah.
34:20Mais il y a eu aussi des civils qui ont
34:22été tués pendant ces
34:24attaques. Et aujourd'hui, on a des troupes
34:26israéliennes qui commencent à...
34:28qui font des incursions, qui s'approchent de la
34:30frontière avec le Liban. Donc,
34:32ça, c'est le nord. Il faut savoir aussi qu'au nord
34:34d'Israël, il y a 60 000 Israéliens
34:36qui vivaient dans le nord d'Israël
34:38et qui, en fait, ont depuis un an...
34:40Et les premiers tirs du Hezbollah
34:42qui ont suivi littéralement le lendemain de
34:44le 8... Le Hezbollah a commencé à tirer
34:46sur Israël en soutien au Hamas.
34:48Il y a des...
34:50Ces 60 000 personnes ont déménagé,
34:52ont quitté leur maison et sont... n'ont pas pu
34:54rentrer chez eux depuis
34:56un an. Donc, en fait,
34:58on est... Voilà, c'est un
35:00conflit qui est... Qu'est-ce que j'ai oublié
35:02dans la question que tu posais ?
35:04Ma question, c'était aussi sur les otages. Donc,
35:06Hamas a capturé des otages israéliens le jour du
35:087 octobre. Où en est-on ? Est-ce que certains
35:10ont été libérés ? Est-ce que d'autres ont décédé ?
35:12Oui, oui. Il y a eu
35:14250 otages, à peu près,
35:16qui ont été pris en otage au départ. Il y en a eu
35:18un certain nombre libérés
35:20pendant la petite trêve des dix jours au mois
35:22de novembre. Aujourd'hui, je crois
35:24que c'est à peu près 134
35:26otages qui sont
35:28encore
35:30à Gaza. Sur les 134,
35:32alors, il y a
35:34plusieurs sources, et c'est très variable,
35:36donc on ne sait pas combien sont encore en vie.
35:38On sait
35:40qu'on en a... Il y a eu des échos
35:42comme quoi 60 d'entre eux pourraient au moins...
35:44au moins d'entre eux pourraient être morts.
35:46On a appris aujourd'hui
35:48qu'un des otages
35:50est bien mort là-bas, et son corps est encore
35:52à Gaza. C'est sa famille qui l'a annoncé aujourd'hui.
35:54On a dans nos témoignages,
35:56par exemple,
35:58le frère d'un des otages
36:00qui a survécu, en fait,
36:02jusqu'au mois d'août, quoi,
36:04et qui a été tué par
36:06les Israéliens, en fait,
36:08qui les ont pris pour des
36:10terroristes ou pour des
36:12attaquants ou je ne sais quoi. Et donc,
36:14il a été abattu après avoir survécu
36:16des mois otage.
36:18Donc voilà, et on ne connaît pas vraiment
36:20ni leur état de santé,
36:22ni voilà,
36:24ni s'ils sont vivants ou morts.
36:26Sonia, tu voulais parler de la montée
36:28de l'antisémitisme dans le monde à la suite
36:30de ce conflit. Effectivement, on n'a pas évoqué ça,
36:32mais on a parlé d'une région,
36:34on a parlé de deux sociétés déchirées
36:36israéliennes
36:38et palestiniennes. On a parlé
36:40du Liban, de l'Iran, etc.
36:42Ce qu'on n'a pas évoqué, effectivement,
36:44ce n'est pas forcément
36:46le jour, mais en même temps, si, je crois.
36:48À quel point
36:50ce qui s'est passé le 7 octobre a eu un impact
36:52dans nos sociétés, à nous,
36:54nos sociétés, que ce soit la France, l'Europe,
36:56les Etats-Unis, etc.
36:58On l'a vu avec un nombre
37:00de manifestations
37:02à la fois pro-Israël,
37:04mais aussi pro-palestinienne,
37:06et l'incapacité absolue
37:08de pouvoir être
37:10à la fois pro-Israël et pro-Palestine,
37:12comme si, ou pro-palestinien,
37:14comme si c'était absolument
37:16antinomique. Et effectivement, cette
37:18montée, mais immédiate, qui a fait suite
37:20littéralement le lendemain du 7 octobre
37:22de l'antisémitisme et des actes
37:24antisémites
37:26dans nos sociétés, de manière
37:28absolument vertigineuse, ça fait très très
37:30peur, et ça joue aussi
37:32dans ce sentiment de
37:34manque
37:36de sécurité absolue
37:38pour la société
37:40israélienne, mais aussi pour les
37:42juifs du monde entier, et ce n'est pas normal.
37:44Ce n'est pas normal,
37:46et il faut le rappeler.
37:48Et comme ce n'est pas normal,
37:50et c'est curieux de se dire
37:52qu'effectivement, ce conflit a
37:54généré des divisions
37:56dans nos sociétés, à nous aussi,
37:58comme si
38:02souligner
38:04l'atrocité
38:06et la tragédie du 7 octobre
38:08empêchait de souligner
38:10la tragédie et l'atrocité de ce qui se
38:12déroule depuis, 365 jours.
38:14Et moi, je crois
38:16que c'est possible de faire les deux,
38:18et que
38:20de souligner l'un, ne nie
38:22pas la souffrance de l'autre, ou souligner
38:26la douleur de l'un,
38:28n'empêche pas de souligner celle de l'autre.
38:30Voilà, c'était mon petit mot
38:32de la fin.