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00:00Dans mon enquête, j'ai découvert les existences de tutos viols sur le dark web consacrés aussi à la soumission chimique
00:06et où on conseille aux agresseurs de faire ça sur le lieu de vie de la victime
00:11parce que c'est là où elle va relâcher sa confiance, elle va moins comprendre ce qui s'est passé
00:15et potentiellement croire que ce qui s'est passé est de sa faute.
00:18On s'est longtemps consacré, notamment les médias, à la figure du grand méchant GHB
00:22comme la drogue du viol, la drogue du violeur.
00:24Et en fait, la substance la plus utilisée dans la soumission chimique, ce sont les médicaments
00:28des anxiolytiques, des somnifères, des médicaments contre les allergies.
00:32En deuxième position, vous avez la MDMA.
00:34Le rapport de l'agence du médicament pour 2021 montre que ces agressions sont surtout vues en contexte privé
00:40à 42,6% et seulement 19,5% en contexte festif.
00:45Et on a pu le voir dans l'actualité, notamment avec Sandrine Jossot, la députée,
00:49qui s'était fait droguer par un autre parlementaire qui était de sa connaissance.
00:53On peut voir qu'effectivement, ça peut être aussi dans le cercle familial, professionnel.
00:57La nuit est différente selon le genre.
00:59Il y a un certain privilège masculin qui est l'insouciance dans la fête, ce qui n'est pas le cas des femmes.
01:03Dans la morale dominante, quand la victime a consommé des substances,
01:07souvent, on fait porter la responsabilité sur elle, c'est-à-dire de s'expliquer de sa sexualité.
01:12Même là, on a pu le voir dans le procès Mazan, c'est la victime qui a quand même dû s'expliquer,
01:15de montrer qu'elle était une échangiste.
01:17Est-ce qu'on peut considérer que faire boire une femme,
01:20c'est, d'une certaine manière, une soumission chimique, ou en tout cas un début ?
01:22L'alcool, c'est le plus grand facteur de vulnérabilité chimique.
01:26C'est-à-dire qu'on va profiter de l'ivresse des femmes pour profiter d'elles.
01:30Effectivement, c'est à instiller un rapport de pouvoir sur les femmes,
01:34un grand dossier qu'il va falloir ouvrir dans les prochaines années, je pense.
01:37En fait, derrière tout ça, c'est quoi l'idée ?
01:39C'est comment arriver le plus rapidement et facilement possible à posséder le corps de la femme.
01:45C'est l'objectivation de la femme, cette recherche du corps inanimé.
01:48C'est ce qui sous-tend beaucoup la culture de la séduction masculine,
01:51avec une pression chopée, entre guillemets, le plus possible.
01:54Et puis, la construction sociale des fantasmes, donc des scénarios sexuels aussi.
01:58On a pu voir, que ce soit sur TikTok, des publications.
02:02On explique que si on arrêtait le temps, qu'est-ce qu'on ferait de cette possibilité ?
02:05La plupart des jeunes garçons répondent,
02:08j'en profiterais pour abuser de toutes les femmes disponibles.
02:11C'est même devenu une catégorie de pornographie à part.
02:15Au départ, je ne me sentais pas forcément légitime de parler de soumission chimique.
02:18Je me disais que c'était plutôt aux femmes et aux féministes de porter ce combat,
02:22et ce qu'elles font très bien.
02:23Mais en fait, je me suis rendu compte que ma place d'homme pouvait être aussi intéressante
02:27pour donner à voir des choses que les femmes, justement, ne connaissent pas.
02:30Dans la socialisation des garçons, que moi-même j'avais reçues,
02:34et des techniques de drague que se transmettent les jeunes garçons,
02:38notamment, je pense, je parle dans le livre de la voiture ballée,
02:41qui est de repérer la femme la plus vulnérable dans un lieu festif et de la ramener chez soi.
02:48Chaque homme a cette partie de la culture du viol en lui.
02:51Il y a ceux qui passent à l'acte et d'autres pas.
02:53Même dans mon cercle d'amis, de connaissances, ça a pu créer certaines frictions, débats.
02:58Une espèce de culture du secret, on se protège les uns les autres.
03:01C'est ce qui se passe à Vegas, reste à Vegas,
03:03qui finalement est devenu une sorte de mantra pour couvrir les excès de ses frères, entre guillemets.
03:09C'est très ancré dans la culture masculine.
03:11Il y avait cette espèce d'idée, défendue par l'un des avocats,
03:14qu'il y aurait viol et viol, ou qu'il y aurait divers degrés de viol.
03:18Ça fait partie des excuses que se racontent les agresseurs.
03:22J'ai des psychologues qui m'ont raconté ça.
03:24Certains se dénouanent en se disant que si la victime n'est pas consciente, ce n'est pas un viol.
03:30Non, la soumission chimique, c'est un viol.
03:31C'est une préméditation, une planification avec une méthode.
03:34Ça reste justement un traumatisme très important.
03:37C'est une violence inouïe, en fait,
03:39parce que ce sont des victimes qui vont lutter pour comprendre ce qui s'est passé.
03:43C'est très compliqué de réussir à le prouver,
03:45parce qu'il faut déjà comprendre ce qui vous est arrivé.
03:47Il faut trouver des médecins ou des agents des forces de l'ordre
03:51qui vont bien vouloir recueillir votre parole
03:54et faire ce qu'il faut derrière pour faire les bons tests
03:57et ensuite vous guider vers la voie judiciaire.
04:00Donc c'est très compliqué.
04:02Grâce au courage de Gisèle Pellicot d'avoir levé ce huis clos,
04:05d'avoir permis que dans l'agenda médiatique et dans l'opinion publique, on en parle,
04:10on peut espérer que ça change des choses,
04:11que les gens comprennent un peu la banalité du mal.
04:14C'est une bonne occasion pour les hommes de se joindre aux manifestations,
04:17de réfléchir aussi à ce sujet,
04:19parce que là on n'est pas à la défense de l'agent masculine,
04:23mais bien de faire avancer les choses, d'agir tout simplement,
04:25de discuter de ces choses-là avec vos amis femmes, vos amis hommes,
04:29d'ouvrir la parole.