Un assistant familial agréé par l'Aide sociale à l'enfance a été mis en examen et incarcéré pour le viol d'une fillette de 4 ans dont il avait la garde. Comment son sélectionné les accueillants de l'ASE ? Les contrôles sont-ils suffisants ? Lyes Louffok, militant des droits de l'enfant est l'invité pour tout comprendre.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Vincent Parizot du 30 septembre 2024.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Vincent Parizot du 30 septembre 2024.
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00:00Agnès Bonfillon, Vincent Parizeau, RTL Soir.
00:04Bonsoir, Elias Soufoc.
00:06Bonsoir.
00:07Je rappelle que vous êtes militant des droits de l'enfant.
00:09On vous remercie d'être avec nous dans RTL Soir pour essayer de nous aider à comprendre l'incompréhensible.
00:14Je résume. Un homme de 32 ans a été mis en examen, placé en détention provisoire à Nantes.
00:19Un assistant familial agréé par l'aide sociale à l'enfance.
00:23Il est accusé de viol avec acte de torture et de barbarie sur une petite fille de 4 ans dont il avait la garde.
00:32Tout d'abord, est-ce que vous avez des infos supplémentaires sur cette épouvantable affaire ?
00:39Est-ce que vous en avez pris connaissance par la presse, comme tout le monde ?
00:43Oui, comme tout le monde. Moi, j'ai découvert cette affaire dans la presse.
00:46Il faut préciser que malheureusement, ces dernières semaines,
00:48le nombre d'affaires qui impliquent des dysfonctionnements à l'aide sociale à l'enfance se font de plus en plus nombreuses.
00:55Une de vos consœurs, par exemple, en début de semaine a révélé que le département du Nord,
01:00avec d'autres départements, avait embauché des familles d'accueil clandestines sans aucun agrément.
01:05Des dizaines d'enfants y ont été malheureusement maltraités avec plus de 630 000 euros d'argent récolté
01:11qui n'ont jamais été déclarés au fisc.
01:14Ce n'est pas nouveau et c'est quelque chose qui devrait évidemment tous nous alerter.
01:19La situation aujourd'hui à l'aide sociale à l'enfance est catastrophique.
01:22Ce type d'affaires n'est pas si étonnante que ça,
01:25notamment parce qu'on est confronté à une pénurie extrêmement grave de familles d'accueil pour accueillir ces enfants.
01:31Les départements, de plus en plus, sont contraints d'embaucher malheureusement le premier.
01:36Pas étonnante, mais on peut s'en étonner et même s'en révolter.
01:39Notamment, là cet homme vivait seul, il avait le statut de famille d'accueil.
01:45Comment est-ce possible qu'une personne aussi jeune, célibataire, en confie des enfants à un célibataire ?
01:53C'est en effet assez surprenant.
01:55Les départements ont quand même énormément de difficultés à délivrer des agréments
01:59à des personnes seules, célibataires, sans enfants, qui plus est en plus un homme.
02:05Je crois que manifestement, il y a eu une négligence dans l'évaluation de la situation de cet homme.
02:11Une négligence tant au moment de l'évaluation qui a ensuite permis à la délivrance d'un agrément
02:17que dans le contrôle opéré une fois que l'enfant a été placé au sein de son domicile.
02:21Cet enfant est en plus reconnu comme porteur de handicap.
02:25Pour les enfants qui sont handicapés en général, on va préférer une cellule familiale avec plusieurs parents,
02:32souvent une coparentalité.
02:34Parce que ça peut être extrêmement difficile d'accompagner au quotidien un enfant handicapé
02:39en plus de ses propres enfants.
02:41En tout cas, une personne seule peut avoir des difficultés à ce niveau-là.
02:44Donc c'est vrai que moi personnellement, je ne comprends pas trop la décision de ce département,
02:48la loi Atlantique, d'avoir délivré un agrément pour accueillir un enfant aussi jeune,
02:53qui plus est handicapé, auprès d'une seule personne.
02:55Et on n'en aurait rien su si les services judiciaires d'un pays étranger
03:00n'avaient pas averti la France, parce qu'ils ont eu connaissance de ces vidéos,
03:04parce qu'en plus ils postaient les vidéos de ces actes sur le réseau social Telegram.
03:10Chez nous, il était passé complètement sous les radars.
03:13Oui, mais parce qu'il n'y a quasiment jamais de contrôle effectué par les services d'aide sociale à l'enfance
03:19dans les familles d'accueil, ou plus généralement même dans les foyers de l'ASE.
03:23Et c'est un véritable scandale.
03:25On ne peut pas aujourd'hui confier des enfants à des personnes
03:29sans s'assurer qu'elles soient réellement protégées
03:32et que toutes les conditions de vie soient les plus épanouissantes possibles pour ces mineurs-là.
03:39Il y a aujourd'hui un vrai enjeu sur ces contrôles.
03:42Je me rappelle qu'en 2022, le gouvernement avait déposé un projet de loi
03:46sur la protection de l'enfance pour réformer notre système.
03:49Et dans le cadre de ce projet de loi,
03:51figurait notamment la création d'un fichier national des agréments pour les familles d'accueil.
03:56Ça a été voté, ça a ensuite été promulgué par le Président de la République.
03:59C'était en 2022.
04:01En 2024, nous n'avons toujours pas ce fichier national des agréments.
04:05Et donc, il va falloir que l'État reprenne ses responsabilités
04:10et aille, avec l'aide des départements, contrôler ces familles d'accueil et ces foyers.
04:16Amélias Sloufoc, il n'y a pas assez de contrôle, ça on l'entend bien.
04:19Il n'y a pas assez de familles non plus, vous nous le disiez.
04:21Ce qui fait que parfois, c'est les premiers venus qui sont là.
04:25Ce n'est pas un problème de budget, c'est un problème de volontaire finalement ?
04:31Non, la crise en protection de l'enfance est multifactorielle.
04:35Il y a évidemment un problème de budget dans certains départements.
04:37Ce n'est pas vrai pour tous.
04:38On a des départements excédentaires qui, chaque année,
04:40ont plusieurs centaines de millions d'euros stockés dans les caisses
04:43qu'ils n'utilisent pas pour leur système de protection de l'enfance.
04:46Et ça aussi, c'est un véritable scandale.
04:47Et puis, nous avons des départements qui sont dans le rouge
04:49et qui, eux, pour le coup, mériteraient d'être aidés davantage par l'État
04:52sur le plan budgétaire pour leur permettre de remplir leurs missions correctement.
04:55La pénurie de familles d'accueil, elle est liée par de mauvaises conditions de travail.
04:59Elle est liée au fait que beaucoup d'entre elles sont extrêmement âgées.
05:03Plus de la moitié des familles d'accueil en France vont partir à la retraite
05:05dans les quelques années à venir, sans qu'il y ait forcément un renouvellement
05:09de cette profession-là, parce que sociologiquement,
05:12ceux qui, à l'époque, demandaient des agréments étaient majoritairement des femmes,
05:15des femmes sans emploi, vivant essentiellement en zone rurale.
05:19Aujourd'hui, les femmes travaillent davantage.
05:21Elles n'ont pas nécessairement envie de mettre leur carrière en suspens
05:24pour s'occuper d'enfants, prendre le risque de ne pas retrouver de travail derrière
05:27parce que ces métiers ne sont pas suffisamment valorisés.
05:29Et c'est d'ailleurs pour cette raison que nous demandons aux départements
05:32d'évaluer les candidatures pour les agréments,
05:35notamment des personnes seules, des personnes qui conserveraient leur emploi initial
05:42et rempliraient leur mission tout en conservant un métier en parallèle,
05:46ce qui ramènerait du temps dans la profession et ce qui permettrait
05:50de « désinstitutionnaliser » notre système de protection de l'enfance
05:53en ayant le moins recours possible aux foyers et aux établissements collectifs,
05:57qui, je le rappelle, selon les normes de l'ONU, sont les établissements
06:01les moins protecteurs des droits fondamentaux des enfants
06:04et respectueux de leurs besoins fondamentaux.
06:07Et vous-même, vous l'avez vécu dans votre enfance, je le rappelle.
06:10Un dernier mot, qui va s'occuper de cette pâleureuse petite fille maintenant ?
06:15Qui va porter sa voix, par exemple, au moment du procès ?
06:18Cette petite fille va être assistée d'un administrateur ad hoc.
06:22C'est une personne qui est nommée directement par la justice
06:26et qui aura comme but, comme mission, de défendre les intérêts de cette enfant
06:30dans les procédures judiciaires qui vont la concerner à l'avenir.
06:34Cet administrateur ad hoc va, comme il s'agit d'un procès pénal,
06:37demander évidemment l'assistance d'un avocat.
06:39Donc cet enfant aura l'assistance d'un avocat d'enfant à ses côtés
06:42et il pourra faire valoir ses droits avec tous ces soutiens-là qui l'entoureront.
06:48Ça va être une épreuve difficile, on le sait.
06:51Moi, ce qui me choque, et c'est un peu ce qui me choque dans toutes les affaires,
06:54c'est que malheureusement, trop souvent, il manque systématiquement
06:58quelqu'un sur le banc des accusés.
07:00Ce sont les départements, ce sont eux les responsables
07:03de la protection de l'enfance, de l'aide sociale à l'enfance.
07:06Les départements ? L'État ?
07:08Non, parce qu'en fait, la protection de l'enfance n'est pas une compétence
07:11de l'État, c'est une compétence des départements.
07:13Et donc, les présidents de départements, dans la loi,
07:16sont positionnés comme chefs de file en matière de protection de l'enfance
07:19et ils ont donc une responsabilité civile et pénale individuelle.
07:23S'il se produit quelque chose sur des enfants placés dans un département,
07:29le président de département peut être poursuivi et doit même être poursuivi.
07:34Vous vous demandez effectivement la présence des départements,
07:38des responsables départementaux sur les bancs des prévenus
07:41à l'occasion de ces procès ou de ces procès.
07:44Merci d'être intervenu ce soir sur RTL,
07:47militant des droits de l'enfant, on l'a compris,
07:49l'IS Loufoque.
07:50Ça ne va pas être facile, mais on va essayer maintenant
07:53de sourire après ça, mais on a un spécialiste pour ça.
07:56Marc-Antoine Lebray, il sera avec nous dans un instant.
07:59A tout de suite.
08:03Radio Pariso, Agnès Bonfy.