Patricia Blanc témoigne du cancer qui a emporté sa fille
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00:00Comment est-ce qu'on peut annoncer à une ado qu'elle va mourir ?
00:05Bonjour Patricia Blanc, je suis la maman de Margot et de Floriane.
00:09Il y a quelques années, notre vie a basculé lorsque notre fille aînée, Margot,
00:13à l'âge de 14 ans, a été diagnostiquée d'une tumeur au cerveau.
00:16En fait, Margot a commencé à avoir des maux de tête.
00:20Alors c'est vrai, des maux de tête, lorsqu'on a 14 ans, forcément très inquiétant.
00:25Puis elle a commencé à avoir aussi des maux de ventre, donc peut-être une gastro.
00:30Et puis le vendredi, en rentrant de l'école, je trouve Margot allongée sur le canapé,
00:36encore toute habillée, avec son cartable par terre.
00:39Et là, je me dis non, ça ce n'est pas possible,
00:42elle ne peut pas dormir en plein après-midi comme ça.
00:45Il y a quelque chose qui ne va pas.
00:46Je l'emmène aux urgences et là, elle rencontre un premier médecin,
00:51puis un deuxième, un troisième, un quatrième médecin.
00:54Donc devant un peu mon assistance, le médecin me dit « Ok, on va faire un scanner ».
00:58On a attendu quelques minutes et un des médecins qui l'avait vu précédemment est venu me voir,
01:04est venu nous voir, parce que devant Margot, il l'annonce.
01:07« Nous savons pourquoi votre fille a mal à la tête, elle a une tumeur au cerveau.
01:11L'ambulance vous attend, vous allez à l'hôpital Néquer pour faire des examens complémentaires,
01:17prévenez votre mari. »
01:18Et puis Margot me regarde et me dit « Maman, tu meurs, ça veut dire que je vais mourir. »
01:25On attend les résultats, et puis le lendemain, Margot nous dit qu'elle commence à avoir double.
01:32Et là, tout s'enchaîne très très vite, on perd un peu le contrôle sur ce qui va se passer,
01:37parce que voilà, c'était l'urgence, on doit l'opérer.
01:42Les résultats vont tomber.
01:43En premier, oui, c'est une masse, elle a l'air diffuse,
01:47et donc il faut que vous alliez dans un centre pour la soigner.
01:51On attend quelques jours, dix jours, c'est un peu long pour attendre le résultat d'une biopsie.
01:56Puis on nous annonce que Margot a une tumeur neuroglionale maligne.
02:01Le pronostic est très sombre, c'est le mot des médecins,
02:04le pronostic est très sombre, et qu'ils ne sauront pas la guérir.
02:08L'annonce de la maladie, forcément elle est très brutale.
02:12Moi c'est simple, je me suis évanouie, je n'ai pas pu intégrer la chose,
02:15je n'ai pas pu agir.
02:17Moi c'est simple, je me suis évanouie, je n'ai pas pu intégrer la chose,
02:20je n'ai pas pu intégrer cette annonce, ce n'était pas possible,
02:23c'est inacceptable, c'est irréel.
02:25Votre enfant a une tumeur au cerveau, et on ne va pas savoir la guérir.
02:29Je ne peux pas entendre ça, ils se sont trompés,
02:33les statistiques sont ce qu'elles sont, mais Margot va guérir,
02:38donc on va être dans le combat avec elle, et on va l'accompagner.
02:42Ça a été le début d'un long combat, elle savait que sa maladie était très grave,
02:45et puis on ne pouvait pas l'accepter en tant que parent bien sûr,
02:48accepter qu'ils n'aient pas des médicaments pour la guérir.
02:51Mais malheureusement il n'y en avait pas.
02:53Il n'y en avait pas parce que Margot avait 14 ans,
02:56et qu'il y a des essais cliniques pour son type de tumeur pour des adultes,
03:01il n'y en avait pas pour notre ado.
03:03Son combat a duré 16 mois.
03:05Pendant 16 mois, elle a eu 4 opérations au cerveau,
03:0736 séances de radiothérapie tous les jours à l'hôpital.
03:11J'ai dû quitter mon travail du jour au lendemain,
03:14parce que quand on vous annonce le diagnostic d'un cancer de votre enfant,
03:20vous n'avez pas le choix, vous devez vous en occuper.
03:23Pendant 16 mois, elle s'est battue contre sa maladie,
03:26avec beaucoup de courage, toujours le sourire, très tournée vers les autres.
03:31Comment est-ce qu'on peut annoncer à une ado qu'elle va mourir ?
03:36Nous on a choisi de ne pas lui dire dès le départ,
03:39on a choisi d'être dans le combat avec elle,
03:41elle était aussi très positive,
03:43donc on ne lui a pas dit que c'était une maladie incurable.
03:47Mais c'est vrai que petit à petit, son état s'est dégradé,
03:52on savait qu'elle allait bientôt nous quitter.
03:56Il fallait aborder le sujet de la mort avec elle.
03:58À un moment donné, on était encore à Gustave-Roussy,
04:02il fallait qu'on la ramène à la maison parce qu'il n'y avait plus d'espoir.
04:06Et là, on s'est dit qu'on allait avoir quelques mots
04:11pour qu'on voit si elle veut l'exprimer.
04:15Et en fait, on n'a pas eu à le faire parce que son médecin,
04:18quand on est arrivé à l'hôpital, son médecin sortait de sa chambre
04:22et elle nous a dit directement, Margot elle sait qu'elle va mourir,
04:27mais elle ne veut pas en parler.
04:29Donc on est rentrés dans sa chambre,
04:32et puis je m'attendais à qu'elle aborde le sujet,
04:34elle venait de l'aborder avec son médecin.
04:36Et puis Margot, d'une voix très enjouée, nous a dit
04:39« Maman, il faut qu'on rentre à la maison là,
04:42parce que j'en ai marre d'être ici,
04:44et puis il faut qu'on prépare notre prochaine sortie. »
04:47Et donc là, je me suis dit « Ok, Margot ne veut pas en parler,
04:51donc on ne va pas en parler. »
04:53C'est seulement au moment de ses derniers soupirs,
04:57à l'hôpital, qu'on lui a dit au revoir.
05:02Et qu'on lui a dit qu'on l'aimerait éternellement.
05:10Lorsqu'on a créé l'association Imagine Fort Margot,
05:13il y a 12 ans maintenant, la situation était très différente.
05:16Il n'y avait quasiment pas d'investissement des laboratoires pharmaceutiques
05:20dans les cancers de l'enfant.
05:22Il y avait très peu de collaboration entre différentes équipes scientifiques,
05:27ou entre même différentes associations.
05:31Ça a changé parce que la science aussi est plus mature aujourd'hui,
05:35parce qu'il y a eu des avancées.
05:37On a aujourd'hui des exemples concrets de résultats,
05:40grâce souvent, encore malheureusement,
05:43mais en même temps j'ai envie de dire tant mieux,
05:46aux associations qui se mobilisent pour la recherche.
05:49Maintenant on n'y est pas encore.
05:51Et au contraire, ce qu'on a construit depuis 12 ans,
05:54ça devrait permettre maintenant de vraiment changer d'échelle.
05:58Et c'est là où on en est aujourd'hui.
06:00Il faut plus d'investissements publics et surtout aussi des industriels,
06:04que ce soit des biotech ou des start-up,
06:06pour investir dans le cancer de l'enfant,
06:09et aller faire des découvertes,
06:11et aller trouver des nouveaux traitements.
06:13Parce qu'on a les données pour ça,
06:15on a des premiers résultats,
06:17et c'est le moment d'agir.