Philippe Val : «Mieux que les Jeux Olympiques, les Paralympiques !»

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Chaque lundi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Philippe Val livre son regard sur l'actualité.
Retrouvez "Philippe Val - Les signatures d'Europe 1" sur : http://www.europe1.fr/emissions/philippe-val-les-signatures-deurope-1

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00:00Il est l'heure de vos signatures Europe 1, au programme jusqu'à 9h dans un quart d'heure,
00:06le zapping politique de Dimitri Vernet, ce sera la rentrée d'Emmanuel Ducrox également.
00:11Dans cinq minutes, la revue de presse d'Europe 1 avec Olivier Delagarde à la une des journaux ce matin, mon cher Olivier.
00:17Eh bien je vais vous parler des cauchemars de cette rentrée.
00:20Des cauchemars de cette rentrée.
00:21Oui, il y a un cauchemar principal.
00:24Tout de suite, mais d'abord, comme chaque lundi et encore cette saison sur Europe 1, on retrouve Philippe Valle.
00:29Bonjour Philippe.
00:30Bonjour Dimitri, bonjour à tous et tous mes voeux à Sonia.
00:33Eh bien voilà qu'on va retrouver dans deux semaines.
00:35Philippe, vous vouliez nous parler ce matin de ce qui a été le point d'orgue de l'actualité médiatique de cet été, les Jeux Olympiques.
00:42Oui, comme tout le monde, je suis allé m'acheter un nouveau maillot de bain et des lunettes de nage ridicules,
00:49après avoir applaudi aux performances de Léon Marchand.
00:52C'est agréable quand même, il faut le dire, de voir tant de gens heureux, contents de vivre, contents d'admirer des athlètes de tous les pays,
01:00contents d'être à Paris.
01:02Ça nous a désintoxiqué de la ronchonnerie chronique dont souffre la France.
01:06Mais le meilleur est à venir.
01:09J'ai un gros faible pour les Jeux Paralympiques.
01:12Oui, moi aussi, mais vous avez des raisons particulières, Philippe.
01:15Les Jeux Paralympiques témoignent, mieux encore que la différence entre l'homme et la bête,
01:21la différence entre le sauvage et l'homme civilisé.
01:23Dans la nature, l'animal handicapé n'a aucune chance de survie.
01:27Et contrairement à ce que prétendait Jean-Jacques Rousseau, à savoir que l'homme n'est bon et que la société le pervertit,
01:34il n'y a pas de bon sauvage.
01:36Dans le monde primitif, il ne fait pas bon être aveugle, unijambiste ou même asthmatique.
01:41De nombreux témoignages d'anthropologues le confirment.
01:44Le génie de la civilisation, c'est d'abord le génie de mettre les qualités de l'esprit avant la perfection physique.
01:51Alors, est-ce que vous avez des exemples ?
01:53Au fondement même de notre civilisation, il y a Homer.
01:57Le plus grand, le plus respecté à juste titre, celui dont l'œuvre rivalise en importance avec la Bible.
02:04Or, chacun sait qu'Homer était aveugle et ce n'est pas un hasard si le signal de départ de notre culture est le coup de génie d'un infirme.
02:13La civilisation consiste précisément à contredire les prétendues lois de la nature
02:19et heureusement, sinon Voltaire, toute sa vie souffrant de mille mots, n'existerait pas.
02:24Ni Marcel Proust, si on y imagine, né dans une tribu maçai
02:28où l'on devient un homme à l'issue d'un corps-à-corps victorieux avec un lion,
02:32alors qu'un poil de chat faisait suffoquer le petit Marcel.
02:35Ni Gérard de Nerval et Hölderlin, qui étaient fous.
02:38Ni Mozart, qui souffrait d'on ne sait quoi, qu'il l'emportait à 35 ans.
02:42Ni Toulouse-Lautrec, ni Stevie Wonder.
02:45Victor Hugo, toujours visionnaire, offre à notre admiration au moins deux monstres héroïques,
02:51l'homme qui rit et Quasimodo.
02:54La civilisation apparaît quand l'appartenance à l'humanité prime sur tout le reste.
02:59Les jeux paralympiques portent en eux le mystère de la joie de vivre.
03:03Que voulez-vous dire par là, Philippe ?
03:05Les déficiences du corps, la maladie, l'infirmité
03:09sont des fatalités que l'esprit humain peut conjurer par le courage intellectuel.
03:14Et la liberté, c'est ce qu'expérimente l'intelligence humaine
03:18lorsqu'elle parvient à surmonter une fatalité physique.
03:22Nous vivons une période où la mode consiste à se présenter comme une victime opprimée
03:27à cause de son origine, son sexe, son poids, de son âge, de sa profession,
03:32de sa condition sociale, de sa religion.
03:34Une victime qui exige que l'on pose sur elle un regard pleurnichard et intersectionnel.
03:40On est quand même loin de Nantanin Keïta qui est aveugle et championne du monde du 400 mètres.
03:46Eh oui, je ne vous le fais pas dire.
03:49Et plus encore que Léon Marchand et autres athlètes admirables,
03:53les athlètes paralympiques s'adressent à quelque chose de très profond, de très intime.
03:59Ils s'adressent à nos fragilités, à nos peurs inavouées, à nos lâchetés secrètes,
04:04à notre humanité souffrante.
04:06Ils nous encouragent à penser à autre chose qu'à nous-mêmes
04:09et à faire preuve d'une vaillance dont on ne peut pas dire qu'elle sature l'air du temps.
04:14Ils nous font aimer et admirer des corps lesquels sans la force mentale qui les anime
04:19nous ferait peur voire nous dégoûterait.
04:22Voilà pourquoi j'aime les athlètes paralympiques.
04:25Oui, ils portent en eux un mystère qui nous concerne tous.
04:29Celui de la conjugaison de la douleur et de la joie
04:32sans laquelle la vie ne vaut pas la peine d'être vécue.
04:35Signature Europe 1.
04:36Philippe Vall, merci beaucoup.
04:37Philippe qu'on se retrouvera en chair et en os dans le studio du Road Europe 1 lundi prochain.

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