Le Royaume-Uni est touché par de nombreuses émeutes violentes

  • il y a 2 mois

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00:0019h33, dans Europe Un Soir, le Royaume-Uni est secoué par des émeutes.
00:05Pareille violence, n'avait pas éclaté depuis des années.
00:07Émeute après l'attaque au couteau à Southport, qui a coûté la vie à trois fillettes la semaine dernière.
00:11Des groupes d'ultra-droite tentent de tirer parti de la situation.
00:15Le Royaume-Uni n'avait pas connu de telles violences depuis 13 ans.
00:19Bernard Cohen Haddad, Vincent Roy, vous êtes toujours avec nous dans Europe Un Soir.
00:23C'est symptomatique d'une société britannique qui va mal ?
00:27C'est symptomatique d'un échec de la communautarisation de la vie.
00:32Et les Anglais, le Royaume-Uni a été un spécialiste pendant des années.
00:37On a même vanté cette communautarisation de la vie publique,
00:41alors que nous, nous sommes plutôt des teneurs de la laïcité dans l'espace public.
00:46On a voulu, à travers cette glorification du Commonwealth,
00:52de faire en sorte que tout était possible, surtout à un moment avec le Parti Travailliste.
00:56Y compris, il faut le rappeler, avec des tendances antisémites,
01:03puisque M. Corbyn, qui a été le leader du Parti Travailliste,
01:07a bien travaillé cette clientèle-là, un peu comme la France Insoumise chez nous.
01:12On voit aujourd'hui les limites de ce type de politique,
01:15et on voit bien une attente réelle des populations,
01:19de la sécurité, de l'ordre, et aussi d'une communauté anglaise
01:25qui reste une communauté anglaise partagée,
01:28et non pas une communauté de communautés au pluriel,
01:31dans les quartiers ou dans certaines villes.
01:33Alors, ça a changé de couleur récemment.
01:35Le Premier ministre britannique, Keir Starmer,
01:37a rompu d'ailleurs avec l'aile de Jérémy Corbyn,
01:40et il est désormais au pouvoir.
01:42C'est une première épreuve d'ailleurs pour ce Premier ministre récemment arrivé.
01:46Le Travailliste doit faire face au sujet de l'immigration,
01:49qui est le plus brûlant au Royaume-Uni.
01:53Écoutez, sur cette affaire, l'affaire qui nous occupe aujourd'hui,
01:56il s'y est mal pris.
01:58Il y a eu un grand flou au début de cette affaire,
02:01sur l'identité même de l'assaillant.
02:05Ça, ça a été très mal perçu.
02:08Mais il ne faut pas oublier une chose.
02:10Ce que vous êtes en train de voir là,
02:12n'est que la face visible de l'iceberg.
02:14La colère anglaise, elle est beaucoup plus profonde,
02:17depuis des mois, depuis des années.
02:20Regardez, il y a eu avant des événements à Leeds,
02:22il y a tout un tas d'événements qui se sont produits.
02:25Et là, vous voyez qu'il s'agit en quelque sorte,
02:28et pour utiliser une expression convenue,
02:30de la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
02:32C'est ça qu'il faut bien comprendre.
02:33La colère anglaise, elle n'est pas récente.
02:36Deux, pour traduire les propos de mon camarade,
02:40de mon corréligionnaire,
02:41il ne faut pas oublier une chose,
02:43c'est que le multiculturalisme à l'anglaise,
02:48c'est fini, et c'est fini depuis longtemps.
02:51Il faut se l'avouer.
02:52Trois, on parle de bandes d'extra-droites.
02:57Oui, certes, il y en a, je pense, assez minoritaires.
03:01Ce qu'on a, c'est que ce sont des gens
03:03qui votaient d'ailleurs traditionnellement travaillistes,
03:06des blancs, plutôt des campagnes non urbains,
03:09qui là, se coalisent.
03:11Alors évidemment, ça donne des résultats pas terribles,
03:15le bas instinct rendre responsable tous les musulmans
03:17des exactions d'un seul,
03:19ça n'est pas bien.
03:21On est tous d'accord sur la question.
03:22Simplement, c'est là, parce que cette colère,
03:25elle est motivée par, précisément,
03:27cet échec du multiculturalisme.
03:29Vous savez, l'immigration incontrôlée,
03:32si elle ne marche pas en France,
03:33si ça ne marche pas en France,
03:34ça ne marche pas mieux au Royaume-Uni.
03:36Et vous avez ces résultats-là.
03:37Cette flambée xénophobe, elle est quand même alimentée
03:39par une rumeur, on l'a dit au début,
03:41il y a eu un flou sur l'identité du tueur
03:44qui a poignardé ses fillettes à Southport.
03:47On l'a cru qu'il était musulman,
03:49en fait, il serait plutôt catholique,
03:50qu'il était étranger, en fait,
03:52il est né au pays de Galles, de parents rwandais.
03:54Il a 17 ans, il a été inculpé aujourd'hui.
03:58Il y a des forces qui œuvrent à manipuler
04:01cette colère-là, qui est visiblement
04:03présente au Royaume-Uni depuis longtemps,
04:05mais qui, là, s'exacerbe sur les réseaux sociaux
04:08et tend à manipuler ces foules en colère.
04:11Bien entendu, aujourd'hui, on est dans
04:14des acteurs internationaux qui veulent
04:16déstabiliser des États, il faut le reconnaître,
04:18je ne veux pas citer de nom, mais on y pense tous,
04:20que ce soit la Russie, soit l'Iran, soit d'autres pays,
04:25pour de bonnes ou de mauvaises raisons,
04:27surtout de mauvaises raisons, y compris dans des élections
04:29nationales ou internationales,
04:31il y a une volonté de déstabiliser des États,
04:33tout simplement pour pouvoir avoir
04:35une influence politique et une influence économique.
04:38Et financer aussi ce type de groupuscules
04:41qui peuvent être, comment dirais-je,
04:43à l'origine de contre-manifestations.
04:46Mais, ce qui aujourd'hui est flagrant
04:49dans la communauté anglaise,
04:51on va dire britannique,
04:53c'est qu'il y a aussi une vraie paupérisation,
04:55qui n'est pas récente, Vincent Rouen l'a dit tout à l'heure,
04:58qui vient depuis de nombreuses années,
05:00il y a des quartiers entiers
05:02qui ne sont pas des quartiers anglophones,
05:05avec des maires qui ne sont pas anglophones,
05:07donc on voit bien qu'il y a,
05:09comment dirais-je aujourd'hui,
05:11un inversement de tendance, et on peut le dire,
05:13il ne s'agit pas de racisme,
05:15parce que la tradition
05:17du monde britannique,
05:19c'est une tradition de pays
05:21qui sont membres du Royaume,
05:23ce qui n'est pas le cas chez nous.
05:25Donc il y a une volonté habituelle de travailler
05:27avec d'autres communautés, y compris d'avoir,
05:29on le sait bien, des policiers
05:31avec des coiffures
05:33qui sont des coiffures d'autres pays
05:35que ceux du Royaume-Uni.
05:37On voit bien qu'il y a aujourd'hui une vraie exaspération,
05:39une vraie paupérisation,
05:41une vraie volonté aussi
05:43de passer à des régimes
05:45beaucoup plus égalitaires,
05:47et puis une façon de retrouver
05:49des valeurs communes, et aussi une histoire commune,
05:51ce qui n'est pas le cas.
05:53Et justement, l'égalité et les valeurs communes
05:55passent davantage par un projet politique commun
05:57que le Royaume-Uni,
05:59jusque-là, son projet politique
06:01reposait avant tout sur l'intégration par l'économie,
06:03par le libéralisme,
06:05par le capital, qui permettait à ces populations-là
06:07de pouvoir s'élever par la liberté individuelle.
06:09Eh bien, ça ne marche pas.
06:11Vous avez vu que
06:13nous avions deux modèles
06:15très différents, le modèle français
06:17et le modèle
06:19anglo-saxon, le modèle britannique.
06:21Eh bien, voyez que dans les deux cas,
06:23et cela doit nous interroger, ça ne fonctionne pas.
06:25Alors, qu'est-ce qui ne fonctionne pas ?
06:27Puisque, dans un cas comme dans l'autre,
06:29ce qui compte, c'est le contrat social.
06:31Or, le problème du contrat,
06:33le problème de tous les contrats,
06:35c'est qu'il faut qu'il soit signé par tous les partis.
06:37Et vous voyez bien qu'il y a un certain
06:39nombre aujourd'hui d'individus,
06:41dans un pays comme dans l'autre,
06:43en France comme en Angleterre, qui ne veulent pas
06:45signer le contrat social.
06:47Alors, pour quelles raisons ?
06:49On peut les développer en tous sens,
06:51en tous les cas, ça doit nous interroger,
06:53et ça doit nous interroger
06:55tout à la fois, et notamment,
06:57sur l'intégration, puisque
06:59l'intégration, ça vaut pour la France,
07:01mais ça vaut aussi pour le modèle
07:03multiculturel anglais.
07:05Le multiculturalisme britannique
07:07ne garantit pas l'intégration.
07:09Voilà ce qu'on peut en tirer,
07:11comme conclusion, d'abord.
07:13Cette colère et ce malaise, on peut la remonter à 2016,
07:15le Brexit, parmi
07:17les raisons du vote pour
07:19le divorce avec l'Union Européenne,
07:21il y avait avant tout la volonté de reprendre
07:23la main sur l'immigration.
07:25Or, bien visiblement, ça ne marche pas,
07:27les derniers chiffres montrent que le nombre de migrants
07:29qui ont traversé la Manche, c'est 8 premiers mois
07:31de 2024, et 35%
07:33plus élevés qu'en 2023,
07:35les précédents gouvernements n'ont pas réussi
07:37à reprendre le contrôle de leurs frontières.
07:39Il faudrait que nos amis britanniques soient
07:41très clairs, s'ils veulent reprendre la main,
07:43et avec précisément le Brexit.
07:45Ça veut dire que la frontière pour l'Angleterre,
07:47ça ne doit pas être Calais, ça doit bien être
07:49Douvres. Alors il faudrait qu'ils
07:51s'assument... Non mais...
07:53Les accords prévoient des milliards
07:55de livres pour que les forces françaises
07:57se chargent justement du traitement des demandes.
07:59Souvent, vous savez,
08:01moi je suis assez Nietzschéen, il faut quand même,
08:03au bout d'un moment, philosophier à coup de marteau.
08:05La frontière anglaise, c'est Douvres, c'est pas Calais.
08:07Quelles que soient les affaires de gros sous.
08:09Donc, si on veut récupérer tout à la fois
08:11sa souveraineté dans le cadre du Brexit,
08:13et gérer sa politique migratoire,
08:15c'est très joli, messieurs les Anglais,
08:17mais faites-le jusqu'au bout, et récupérez
08:19les frontières qui sont les vôtres, et pas les nôtres.
08:21Le contrôle de l'immigration, c'est
08:23aujourd'hui un des principaux soucis
08:25pour la société britannique.
08:27Oui, je rappelle, il y a quelques mois,
08:29on était émus de voir que
08:31les Anglais mettaient
08:33leurs immigrés sur des péniches
08:35qui étaient reconditionnées en centres de
08:37rétention. Ne l'oublions pas.
08:39Donc, il y a un vrai problème
08:41aujourd'hui, mais qui n'est pas qu'aujourd'hui,
08:43d'immigration au Royaume-Uni.
08:45Il y a un double langage,
08:47et on a bien vu, on peut le dire,
08:49cet échec du Brexit, puisque,
08:51y compris dans la communauté européenne,
08:53les Anglais avaient un pied dedans, un pied dehors.
08:55J'allais dire deux pieds dedans, deux pieds dehors, c'est pas possible.
08:57Mais c'était en tous les cas une partie du corps
08:59dedans, une autre partie du corps dehors.
09:01Et aujourd'hui, on le voit bien,
09:03il y a cette difficulté d'intégrer
09:05des populations qui vivent
09:07sur une image du Royaume-Uni
09:09prospère, qui n'est plus le cas aujourd'hui.
09:11Et c'est malheureux,
09:13parce que, effectivement, les
09:15populations, et surtout
09:17les communautés alentours, c'est-à-dire
09:19l'Ouest de l'Europe, dont nous faisons
09:21partie sur cet bord de la Manche,
09:23subissent les conséquences de ce
09:25type de mauvaise politique.
09:27Ce qui signifie que le Brexit, pardon,
09:29ce qui signifie que le Brexit
09:31ne vous garantit pas
09:33un règlement des problèmes.
09:35Et l'annulation de la mesure
09:37d'envoyer les migrants au Rwanda,
09:39un accord qui avait été signé par le précédent
09:41gouvernement de Régis Sunak,
09:43et qui a été annulé par Keir Starmer,
09:45c'est d'ordre à enflammer la xénophobie ?
09:47C'est surtout,
09:49je ne sais pas si c'est d'ordre à
09:51enflammer,
09:53mais en tous les cas,
09:55ça permet à l'ultra-droite
09:57de réveiller
09:59considérablement
10:01ses troupes. Parce que, à mon avis,
10:03ce qui se passe actuellement,
10:05c'est qu'on a moins, comme je vous le disais tout à l'heure,
10:07dans la rue, vraiment, des membres de l'ultra-droite.
10:09Il y en a, certes,
10:11je ne veux pas le contester, mais c'est surtout le travail
10:13de sape que fait l'ultra-droite
10:15dans les consciences.

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