Les 4 vérités - Charles Michel

  • il y a 3 mois
Pour cette édition spéciale des 4 vérités en direct du Trocadéro, Maya Lauqué reçoit Charles Michel, Président du Conseil européen. 

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Transcription
00:00Et on va laisser les changements de place se faire à vue, comme on dit, comme ça vous participez aussi un petit peu
00:08aux coulisses de ce télématin exceptionnel et je vous accueille, bonjour Charles Michel.
00:13Bonjour.
00:13Merci d'être avec nous ce matin, après peut-être une courte nuit parce que je crois que vous étiez hier
00:17au dîner offert par le couple Macron au chef d'état de gouvernement au Louvre.
00:21Bon, c'était comment ce dîner ?
00:23C'était très bien, c'était très bien et d'ailleurs on est ravis d'être là et on soutient
00:27cette organisation parce que je pense que ce sera un bon moment, la France est au centre du monde.
00:32Dîner fastueux au musée du Louvre, de quoi on parle dans ce genre de dîner ?
00:37Est-ce qu'on fait un peu de politique ou on essaye de pas...
00:40Quand des responsables politiques se croisent dans un dîner, ils ne peuvent pas éviter
00:43d'évoquer quelques sujets et les Jeux Olympiques sont évidemment un moment de rassemblement,
00:49de l'humanité autour de valeurs partagées autour du sport.
00:52Mais quand il y a des chefs d'état de gouvernement, c'est l'occasion aussi d'identifier le sport
00:56en étant un vêteur central pour plus d'inclusion, pour faire reculer les discriminations
01:01ou pour développer des valeurs qui doivent être partagées.
01:04L'effort, le dépassement de soif, tous ces sujets étaient aussi au centre des discussions hier soir.
01:09Un peu plus tôt dans la journée, Emmanuel Macron a reçu des chefs d'entreprise étrangers.
01:14L'objectif, nous dit-on, était de rassurer après la dissolution en France.
01:19Est-ce que la France a aussi aujourd'hui besoin de rassurer ses partenaires politiques
01:24et en Europe notamment ?
01:26Moi, je suis très confiant parce que, vous savez, nous regardons la France
01:29et nous voyons qu'il y a des institutions qui sont robustes, qui sont solides.
01:32Et puis, il est certain que dans beaucoup de pays européens,
01:35il y a une tradition de coalition parlementaire.
01:37Ce n'est pas une tradition en France en lien avec la Constitution française, les institutions françaises.
01:42Mais dans beaucoup de pays, y compris le mien, la Belgique, mais c'est le cas aussi en Espagne,
01:46c'est le cas en Allemagne, c'est le cas aux Pays-Bas, dans beaucoup de pays européens,
01:50pour former un gouvernement après des élections parlementaires en général,
01:53il faut plusieurs semaines ou plusieurs mois.
01:55Et puis, il faut mettre un peu d'eau dans son vin.
01:57Ça veut dire qu'il faut tenter de faire des accords
02:00et voir quels sont les intérêts prioritaires autour desquels on peut se retrouver
02:04pour mettre en place un gouvernement.
02:06J'allais justement vous en parler.
02:07Vous avez été Premier ministre de la Belgique suite aux élections fédérales de juin 2014.
02:11Vous aviez participé aux négociations de coalition avant d'être nommé quatre mois plus tard.
02:16Aujourd'hui, en France, nous, on est un peu perdus
02:19avec un gouvernement démissionnaire qui gère les affaires courantes,
02:22une coalition qui propose un Premier ministre dont le Président, pour l'instant,
02:25ne veut pas forcément entendre parler.
02:27Et on a l'impression qu'on a des gens qui n'ont pas envie de travailler ensemble.
02:30Est-ce que vous avez un conseil à donner à nos dirigeants et à nos politiques ?
02:34Je n'ai pas de conseil à donner, naturellement,
02:36mais l'expérience que nous avons en Belgique,
02:40il faut parfois accepter qu'un peu de patience est nécessaire
02:43pour mettre en place une équipe gouvernementale.
02:45Et puis, dans nos pays européens, dans nos démocraties européennes,
02:48on a des institutions qui sont robustes.
02:51Regardez, il y a certes un gouvernement en affaires courantes,
02:53comme on dit, qui gère les situations immédiates et urgentes,
02:57mais vous voyez cette organisation qui est tout de même très lourde
03:00en termes de sécurité, en termes de logistique,
03:02et on voit que la France fonctionne, et la France fonctionne plutôt bien.
03:05Est-ce qu'elle a perdu, après la dissolution,
03:08après les législatives qui ont divisé le pays,
03:10est-ce que la France a perdu malgré tout un peu
03:13de son influence à l'international ?
03:15Je pense qu'il y a un paradoxe que j'ai aussi observé
03:17quand j'étais Premier ministre en Belgique.
03:18Parfois, on a un regard sur nous-mêmes qui est plus pessimiste
03:21que le regard que les autres portent sur vous-mêmes.
03:23Et c'est un cas qui est typiquement belge,
03:26c'est habituellement moins français,
03:28mais peut-être que pour l'instant, ça devient un peu...
03:30Ça devient peut-être une tentation en France.
03:32Non, plus sérieusement, vous savez, le Président Macron
03:34siège au Conseil européen
03:36et est évidemment très engagé sur les sujets européens
03:39depuis le début de son parcours politique,
03:41et certainement dans le cadre de ses fonctions présidentielles.
03:44Et vous voyez que beaucoup de sujets qui ont été portés par la France,
03:48une Europe plus ambitieuse, plus souveraine,
03:50plus engagée sur le plan économique,
03:52plus engagée sur le plan géopolitique,
03:54ce sont des sujets portés par la France
03:56et on voit que l'Europe est inspirée par ces sujets-là.
03:59Et donc, ça montre bien qu'il y a bien un impact.
04:02Et aujourd'hui, je pense qu'on regarde surtout
04:05les joutes olympiques plutôt que les joutes politiques françaises.
04:09Organiser des JO, est-ce que ça offre
04:12une place particulière dans le monde
04:14sur le plan diplomatique ?
04:16Oui, sûrement. C'est une occasion de mettre en lumière
04:18la ville lumière et au-delà l'ensemble de la France.
04:21Je ne m'empêcherai pas comme Européen de dire
04:23que c'est aussi l'Europe qui est sur la carte du monde
04:25au travers de la France.
04:27C'est l'occasion de montrer l'atmosphère,
04:29de montrer la fierté, de montrer
04:31peut-être le passé, l'histoire,
04:33mais également de regarder un pays qui se tourne vers l'avenir.
04:36Vous quitterez vos fonctions
04:38dans quelques mois à la présidence du Conseil européen.
04:40C'est ainsi un chef de gouvernement portugais,
04:42Antonio Costa, qui va prendre la suite.
04:44Est-ce que c'est une bonne décision selon vous ?
04:46C'est une très bonne décision.
04:48Je pense qu'il est essentiel de faire fonctionner ce projet européen.
04:50On l'a vu au moment de la crise du Covid.
04:52On le voit quand il y a des impacts économiques
04:54liés à la guerre déclenchée par la Russie contre l'Ukraine.
04:56On voit que la solidarité européenne,
04:58la capacité et la volonté
05:00d'agir ensemble sur certains sujets
05:02protègent mieux nos citoyens
05:04dans l'ensemble des pays en France et dans les autres pays européens.
05:06Et en cela, on a une vision assez claire
05:08au niveau des 27 chefs d'État de douanement européen
05:10sur ce que sont
05:12les priorités communes partagées
05:14pour les cinq prochaines années.
05:16Nous voulons plus de développement économique,
05:18moins de lourdeur administrative.
05:20L'Europe a un rôle à jouer pour plus faire confiance
05:22à nos entrepreneurs et nous voulons aussi
05:24investir plus dans la sécurité et la défense.
05:26Est-il, Antonio Costa, davantage
05:28von der Leyen compatible que vous ?
05:30On dit que vos relations sont assez exécrables
05:32avec la présidente de la Commission européenne
05:34qui a été reproduite.
05:36On dit beaucoup de choses, mais citons ce sont les faits.
05:38Et vous avez vu que l'Europe a plutôt bien fonctionné.
05:40Cela a été reconnu à la fois
05:42quand on a dû gérer la crise du Covid
05:44ou quand on a dû montrer une unité sans faille
05:46dès lors que la Russie décidait d'envahir l'Ukraine.
05:48Donc pas de friture sur la ligne entre Ursula von der Leyen et vous ?
05:50Vous savez, il y a des institutions,
05:52certains, il y a des personnalités,
05:54mais il y a une volonté d'agir
05:56au service de l'intérêt européen.
05:58Ursula von der Leyen, qui est en train de composer
06:00la nouvelle Commission européenne, elle doit ressembler à quoi
06:02selon vous, cette Commission européenne ?
06:04Je crois qu'il faut plus d'ambition sur le terrain de la souveraineté.
06:06L'Europe a des valeurs à défendre,
06:08a des intérêts à défendre.
06:10On doit défendre nos entreprises,
06:12les emplois de qualité en Europe.
06:14Et pour cela, on doit chercher
06:16à nouer des partenariats, mais des partenariats
06:18d'égal à égal. On doit chercher
06:20aussi à renforcer nos capacités
06:22de sécurité et de défense, parce qu'on voit bien
06:24que nous sommes dans un monde qui est un peu plus incertain
06:26qu'il ne l'était il y a quelques années.
06:28Et autour de nous, il y a beaucoup d'insécurité,
06:30il y a des conflits, certains sont extrêmement graves.
06:32Et si nous voulons continuer à perpétuer
06:34ce rêve européen, ce rêve
06:36qui a été porté après la Deuxième Guerre mondiale
06:38par ceux que l'on a appelés les fondateurs
06:40de l'Union européenne, il faut avoir
06:42plus d'ambition demain en termes
06:44de défense, de sécurité. C'est aussi du reste un sujet
06:46où la France et le président français
06:48sont extrêmement mobilisés.
06:49Lorsque vous avez été élu pour la première fois à la tête du Conseil
06:51européen en 2019, votre objectif était
06:53d'obtenir une Europe unie,
06:55respectant la diversité nationale, avec des notions
06:57de solidarité, de liberté et de respect
06:59mutuel. En cinq ans, il y a eu le Brexit,
07:01le Covid, la guerre en Ukraine, le réchauffement
07:03climatique, la répercussion du conflit
07:05israélo-palestinien. Dans quel état
07:07se trouve l'Europe aujourd'hui ?
07:08C'est certain, c'est que tous ces défis qui ont été
07:10des moments extrêmement compliqués
07:12ont permis de renforcer l'unité européenne.
07:14Et probablement, c'est ça la magie de l'Europe
07:16quand on fait face aux situations les plus
07:18difficiles. Dans ces moments-là, en général,
07:20on a un sursaut de responsabilité.
07:22Regardez le Brexit, on a cru
07:24que c'était la fin du monde. Je caricature un peu,
07:26on s'en est très bien sortis, on a pris
07:28les décisions qui s'imposaient dans l'unité.
07:30La crise du Covid nous avait branlé partout, dans le monde
07:32entier, et les Européens ont réagi
07:34aussi en solidarité, à la fois
07:36pour prendre des mesures communes
07:38pour faire reculer la menace de la pandémie,
07:40mais aussi pour prendre des mesures en termes
07:42économiques, avec des investissements
07:44conjoints portés par l'ensemble des
07:46Européens. Et puis il est certain que quand
07:48Vladimir Poutine a décidé d'envahir l'Ukraine,
07:50il était convaincu probablement, d'une part,
07:52que l'Ukraine tomberait en quelques jours,
07:54mais il était convaincu surtout que cela
07:56sèmerait une grande division sur le plan européen.
07:58Et c'est l'inverse qui se produit.
08:00Vladimir Poutine, qu'a rencontré il y a quelques jours
08:02Victor Orban, on croit qu'après
08:04la présidence tournante de l'Union
08:06Européenne, une mission pour la paix
08:08a-t-il dit ? Il a aussi rencontré Xi Jinping
08:10et Donald Trump. Il l'a fait
08:12au nom de l'Europe ?
08:14Il incarne l'unité ? – La réponse est non,
08:16parce que la présidence rotative de l'Union Européenne,
08:18en l'occurrence la Hongrie, n'a aucun rôle à jouer
08:20en matière de politique extérieure, c'est un premier
08:22point. J'ai d'ailleurs donné ce
08:24message très clairement avant même qu'il n'atterrisse
08:26à Moscou, c'est un premier
08:28élément. Et puis cet épisode a montré
08:30la fermeté des 26,
08:32pour défendre nos valeurs communes.
08:34– Pour le sanctionnier, une réunion
08:36a été déplacée de Budapest
08:38à Bruxelles, certains commissions
08:40informelles sont boycottées, il faut
08:42aller plus loin, il faut
08:44continuer à boycotter. – Une réunion
08:46qui devait avoir lieu en Hongrie
08:48a eu lieu à Bruxelles, c'est une chose.
08:50Moi je suis contre le boycott, je pense que
08:52les Européens ont besoin de se rencontrer beaucoup pour forger
08:54cette unité européenne, et ce n'est pas
08:56en ignorant
08:58les réunions qui ont fait avancer
09:00ce problème. Dans un moment où on le voit bien, on doit
09:02prendre des mesures fortes pour soutenir
09:04l'activité économique, pour tenter de faire
09:06en sorte que l'on puisse faire baisser les prix de l'énergie
09:08tout en assurant la souveraineté énergétique
09:10de l'Europe et des Etats membres. Dans un moment
09:12on doit investir dans la défense, dans la sécurité.
09:14Pour cela, il faut bâtir des compromis
09:16et pour cela il faut se rencontrer.
09:18Et pour cela, les réunions informelles, y compris
09:20celles qui ont lieu en Hongrie
09:22dans les 6 mois qui viennent,
09:24elles sont importantes. – Merci beaucoup Charles Michel.
09:26– Merci à vous. – Bonjour à vous, vous serez ce soir
09:28à la cérémonie d'ouverture j'imagine ? – Je serai ce soir.
09:30– Vous avez hâte ? Il paraît qu'elle sera spectaculaire.
09:32– On vous fait confiance. – Merci beaucoup.

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