• il y a 4 mois
Ce programme vise à sensibiliser le public sur l'impact environnemental souvent méconnu du numérique, en le comparant à d'autres sources de pollution plus visibles comme l'aviation.
Transcription
00:00Bonjour à toutes et à tous, je suis très heureuse de vous retrouver pour la saison 2 de « Maman, j'ai arrêté l'avion »
00:05et quoi de mieux en cette rentrée de nous intéresser à notre empreinte numérique qui n'a vraiment rien de virtuel.
00:11Tiens, savez-vous à quoi équivaut un mail, un selfie, un like, une vidéo en streaming sans coût écologique, j'entends ?
00:17Tous les jours, nous sommes pourtant plusieurs milliards à communiquer par courriel, à scroller, poster, liker, chatter, zoomer, visionner,
00:24streamer et à se vautrer le plus innocemment du monde dans une débauche énergétique qui ressemble furieusement à un désastre environnemental.
00:31Mais chut, il ne faut pas trop le répéter car c'est un gigabusiness.
00:34Seulement, derrière chacune de nos petites actions en ligne, il y a un inframonde qui tourne H24 7 jours sur 7
00:39et pompe un max d'énergie, Raphaël Ittier, sans compter l'empreinte carbone de nos joujoux du quotidien
00:45et nos applis favorites toujours plus gourmandes en énergie et en bande passante.
00:49Oui, Daphné, 1 milliard de 100 millions, c'est le nombre de smartphones qui ont été vendus rien que sur l'année 2020,
00:55sachant que la fabrication d'un seul de ces téléphones nécessite 80 matériaux différents.
01:01En France, on dénombre déjà 15 équipements connectés par habitant et le numérique au niveau mondial consomme 10% de l'électricité
01:09et participe jusqu'à 4% des émissions de gaz à effet de serre, c'est-à-dire qu'il est déjà au-dessus du secteur aérien.
01:15Et cette pollution numérique, Raphaël, est invisible.
01:18On nous a fait croire que le cloud était un nuage, en réalité ce sont des millions de câbles, de serveurs et d'antennes relais,
01:23sans parler bien sûr de la 5G qui va démultiplier nos usages.
01:26Bref, si l'on veut sauver la planète, il va falloir sérieusement revoir nos comportements.
01:30Mais est-ce seulement possible à l'heure du monde globalisé ?
01:33Et des apéros Zoom ?
01:34Au fait, maman, j'ai arrêté l'avion.
01:46Et puis, le moteur de la compagnie d'automne est de 5 à 11 000 watts, comme je l'aime.
01:58Mel, 5G, streaming, terminaux, qu'est-ce qui pollue vraiment et que peut-on faire dans un monde digitalisé
02:03où plus on dématérialise, plus on utilise de matières et d'énergie et où l'IA s'apprête à révolutionner nos vies ?
02:09Pour en parler, Raphaël Guastavi, directeur adjoint de l'économie circulaire à l'ADAM,
02:15l'agence de la transition écologique, le journaliste et spécialiste du numérique Guillaume Pitron,
02:19auteur notamment de l'Enfer numérique que je vous conseille,
02:23et Sheila O'Hara, en charge des solutions technologiques pour le développement durable chez IBM France.
02:29Bonjour et bienvenue à tous les trois.
02:31Alors, avant de vous laisser la parole, allons du côté de ces fameux datacenters,
02:35centres de données en VF, voir comment ils fonctionnent et ce qu'ils consomment.
02:38Aujourd'hui, le secteur numérique et ses infrastructures représentent, on l'a dit, 10% de la consommation électrique en France.
02:44En 2030, le numérique consommera pas moins de 13% de l'électricité mondiale.
02:48Son impact spatial énergétique est donc loin d'être neutre, d'autant qu'il est aussi très polluant.
02:53Alors, dans la petite ville de Vissou, près d'Orly,
02:56l'installation d'un datacenter pour le compte d'Amazon fait grincer les dents, à tort ou à raison.
03:01C'est ce que l'on a cherché à démêler.
03:02Le tout-opposé, c'est un reportage d'Alexis Breton, Jaouar Nadi et Joseph Allais.
03:15Vissou, une petite ville tranquille de près de 8000 habitants en Essonne.
03:19Il y a deux ans, Jean-Luc Touly, élu municipal, a découvert qu'un datacenter exploité par Amazon
03:27s'était discrètement installé dans cet ancien entrepôt de logistique collé à la ville.
03:31Un datacenter, c'est-à-dire un centre de stockage des données numériques.
03:36Jean-Luc Touly vient d'apprendre une nouvelle supplémentaire.
03:41Ses capacités vont être quintuplées dans les prochaines années.
03:45Vous voyez le bâtiment avec deux cheminées.
03:48Il en est prévu 12 autres si le projet vient à son objectif final
03:52d'un bâtiment qui ferait un datacenter de 100 mégawatts.
03:55Aujourd'hui, on en est à 19,8 avec deux cheminées.
03:59C'est très sécurisé.
04:00Il y a des caméras un peu partout.
04:03Il y a des vigiles, puisqu'on n'a pas le droit de rentrer.
04:05Même les élus de la commune n'ont pas le droit de venir visiter.
04:09Vous voyez, ce n'est pas possible.
04:10On est à l'extérieur, là, on peut filmer.
04:13Moi, je suis élu de la commune, je n'ai pas le droit de rentrer
04:17parce qu'effectivement, on est dans un état un peu secret ou c'est confidentiel.
04:23Mais à partir du moment où c'est la ville de Vissou, moi, je peux aller partout.
04:26Je ne peux pas rentrer, mais c'est moi qui leur ai demandé de venir.
04:30Bientôt, le datacenter de Vissou consommera 8 fois plus
04:34que l'ensemble des habitants de la commune.
04:36Un impact carbone démesuré, avec des conséquences locales également.
04:40Le centre rejette de la chaleur et des particules fines
04:43vers les habitations toutes proches.
04:45Comme chez Philippe Soum, qui a décidé lui aussi de se mobiliser.
04:49Bien le bonjour à vous.
04:51Allez, viens.
04:51C'est vous.
04:52Très bien, merci.
04:58C'est ça, on voit le truc blanc, là.
05:01Ça, c'est le bâtiment principal.
05:04Et les cheminées dont je vous parle, les 12 cheminées supplémentaires,
05:08ça va être justement à l'angle de ce bâtiment blanc et gris que vous voyez.
05:12Une usine polluante, mais qui surtout ne s'arrête jamais.
05:16Le problème du bruit, parce que c'est un vrai souci, surtout en période nocturne.
05:20La nuit, quand même, les avions, à partir de 22h, 23h, à Orly, ça s'arrête.
05:25Là, entre 23h et 6h du matin, là, ça marche tout le temps.
05:30Et en tout cas, ça marche en cas de coupure, ça marche pour les tests.
05:33Et puis en cas de problème d'hiver.
05:36Des data centers comme celui-là, ils en poussent un peu partout en ce moment,
05:39en France et dans le monde.
05:41En 2030, ils représenteront 13% de la consommation énergétique mondiale.
05:50En cause, nos écrans, nos nouveaux doudous dont on ne se sépare plus.
05:54Pour 80% des jeunes, c'est même le premier geste du matin.
05:58Notre écran nous suit désormais partout.
06:00Au petit-déjeuner, dans la salle de bain et même, pour 48% d'entre nous, aux toilettes.
06:07Les Français passent 4 heures par jour sur leur smartphone.
06:10Et quand ils le quittent, c'est pour se mettre devant un ordinateur.
06:13Le soir, enfin, 8 millions d'entre nous finissent la journée devant un film en streaming.
06:20Un usage du numérique aux coûts écologiques énormes.
06:23Dans le monde, on estime à 34 milliards le nombre d'appareils numériques en fonctionnement.
06:28Des appareils dont la fabrication nécessite des dizaines de métaux,
06:32comme le lithium ou le cobalt,
06:34polluants et souvent extraits dans des conditions inhumaines, comme ici au Congo.
06:43Enfin, pour fonctionner, ces appareils ont besoin de supports physiques.
06:47Des millions de kilomètres de câbles, d'antennes, d'ordinateurs et de datacenters.
06:53Bombes à retardement climatique pour les uns,
06:55outils indispensables pour notre société moderne selon les autres.
06:58Le numérique peut-il être écologique ?
07:01Deux visions s'opposent sur le sujet.
07:03D'un côté, Régis Castanier, directeur général France des KINIX,
07:07numéro 1 mondial des datacenters.
07:09De l'autre, Lorraine de Montenay, de l'association Green Haiti.
07:13Je considère que le numérique est une chance.
07:17Tout comme les révolutions industrielles se sont faites autour du moteur à explosion,
07:22de l'électricité, de l'informatique et de l'internet.
07:26Aujourd'hui, le numérique, l'intelligence artificielle, le quantique qui se développe
07:32sont des chances pour la planète.
07:33Tout ça, en fait, c'est extrêmement matériel.
07:34Il a fallu fabriquer ces équipements.
07:36Ils ont un poids, donc ils ont un sac à dos écologique.
07:39C'est-à-dire parce qu'en fait, on n'a pas envie que le numérique
07:43soit le coup de grâce sur une planète déjà abîmée.
07:49En banlieue parisienne, depuis l'autoroute,
07:51on aperçoit un drôle de bâtiment encore en construction
07:54qui ressemble à s'y méprendre à un stade de foot.
07:57Mais à l'intérieur, pas de MBAPE ni de ballon rond.
08:01Cécile Diguet est urbaniste à l'Institut Paris Région.
08:04Elle va nous expliquer comment fonctionne concrètement un datacenter.
08:08Ce bâtiment, c'est un datacenter,
08:11c'est-à-dire un lieu où on stocke et on traite les données numériques
08:13qui peuvent être les vôtres sur votre email, sur de multiples supports.
08:16Là, on a un quart qui est déjà construit
08:19et un autre qui est en train d'être construit.
08:22Une fois terminé, il s'étendra sur 40 000 mètres carrés.
08:26Il sera alors le plus grand de France.
08:28Un bâtiment ultra sécurisé qui cache le cœur de l'industrie numérique.
08:33À l'intérieur, ce qu'on y trouve, ce sont des très grandes salles
08:37remplies de serveurs informatiques où sont justement traitées ces données,
08:40entourées d'équipements techniques, électriques, de rafraîchissement.
08:43Donc en fait, on est sur un bâtiment très complexe
08:46et qui consomme aussi beaucoup d'électricité.
08:48C'est l'équivalent d'une huile de 400 000 habitants.
08:50C'est quatre fois montreuil.
08:52C'est quatre fois poitier.
08:54Si les datacenters consomment autant d'énergie,
08:57c'est parce qu'ils fonctionnent en permanence.
08:59Pourquoi un datacenter tourne 24-24-77 ?
09:02Eh bien tout simplement parce que vous et moi,
09:04quand on a une insomnie à 3 heures du matin
09:07et qu'on a envie de regarder son Netflix,
09:08eh bien il faut que son Netflix soit disponible.
09:10Et si ce n'est pas le cas, on n'est pas content.
09:11Et là, je parle juste, moi, en tant que consommateur.
09:14Mais quand on parle ensuite de toute l'industrie,
09:16l'industrie, elle tourne 24-24-77.
09:19Le cloud, ce n'est pas du tout dans un nuage, très concrètement.
09:22On a donc des datacenters qui sont des hangars géants
09:27dans lesquels vous allez avoir une compilation énorme
09:30de matériel informatique qui fait du calcul et du stockage.
09:33Et puis, vous allez avoir tout le réseau
09:35pour pouvoir envoyer cette information
09:37jusqu'à nos ordinateurs, nos téléphones, nos télévisions, etc.
09:41Et effectivement, ce système fonctionne sur des énergies fossiles.
09:45La moitié de la consommation électrique des datacenters
09:48est consacrée à refroidir les serveurs, constamment en surchauffe.
09:53Ces refroidissements se traduisent instantanément
09:55par des rejets de chaleur dans le voisinage.
09:59Près de Paris, Cécile nous emmène au pied d'un autre datacenter
10:02construit en 2009, juste à côté, une foule de nouveaux logements.
10:07Les datacenters doivent se refroidir encore plus l'été,
10:11quand il fait très chaud,
10:12et rejettent cette chaleur qu'on appelle fatale dans l'atmosphère.
10:15Donc, tous ces bâtiments-là, toutes ces personnes qui habitent là,
10:18en situation de canicule, vont avoir encore plus chaud
10:21puisqu'on a en face une installation qui rejette de la chaleur.
10:25Ces bâtiments peuvent augmenter la température
10:27d'un quartier de 2 degrés supplémentaires en été.
10:30Des effets locaux, certes,
10:31mais ils montrent bien les besoins énergétiques spectaculaires
10:34de ces centres géants.
10:36Alors, les datacenters sont-ils le nouveau fléau écologique ?
10:43Benoît Chevalier, directeur des études chez Equinix,
10:46veut nous prouver le contraire.
10:48Et pour cela, il nous reçoit dans un datacenter à Saint-Denis
10:51qu'il a conçu en 2022.
10:54Il est le seul à avoir accepté notre caméra.
10:57Car, comme nous allons le constater,
10:59les datacenters sont des lieux très secrets.
11:02On bat d'une première fois, ça ouvre le sas.
11:04Ensuite, on se met à l'intérieur.
11:05Là, il y a des petites plaques de pression qui viennent vérifier
11:08qu'il y a bien le poids d'une seule personne
11:09et qu'il n'y a pas 2-3 personnes qui sont rentrées à l'intérieur.
11:12Et ensuite, j'ai mes empreintes dans le badge
11:14et je viens vérifier que c'est bien moi qui correspond à ce badge-là.
11:18Et là, j'ai l'autorisation d'entrer.
11:20C'est un petit bunker aussi ?
11:22C'est... On s'assure de savoir qui rentre et qui sort
11:25et qu'il y ait les bons droits qui vont avec.
11:30Tout est fait pour protéger un trésor.
11:33Nos données, qui sont conservées dans d'immenses salles comme celle-là.
11:40Là, on est dans ce qu'on appelle, nous, les data halls.
11:43Donc, c'est vraiment les salles d'hébergement
11:45dans lesquelles on a les équipements clients, les serveurs.
11:48Typiquement, vous voulez regarder une vidéo en streaming.
11:50La vidéo, vous ne l'avez pas sur votre ordinateur.
11:52Cette vidéo, elle est stockée quelque part.
11:54Elle est stockée dans des endroits comme ici.
11:55Donc, ça vaut pour des grands sites de streaming.
11:58Ça vaut pour des photos que vous pouvez uploader, vous, sur des réseaux sociaux.
12:02En fonctionnant, toutes ces machines produisent cette fameuse chaleur.
12:06Mais Benoît Chevalier pense avoir trouvé la solution
12:09en la réutilisant de manière originale.
12:19Nous voilà à l'intérieur de la serre.
12:20Donc, en ce moment, c'est plutôt les tomates, quelques petites herbes aromatiques.
12:24Tout ce qui est récolté ici, on travaille avec un partenaire ici local
12:28qui le met à disposition dans un marché solidaire pour les habitants de la commune.
12:31Il y a un petit circuit ici où on vient récupérer directement la chaleur d'en bas
12:35et chauffer cette serre.
12:37Donc, ça, ça se fait assez facilement.
12:38C'est direct, en fait.
12:39On est juste au-dessus des salles d'attaque.
12:40Donc, il y a entre guillemets uniquement à remonter de l'eau chaude ici.
12:45Ça, c'est pour la serre.
12:46Et ensuite, on vient se connecter au réseau urbain de la ville de Saint-Denis
12:49et de Pleine-Commune.
12:51Et là, on chauffe le centre aquatique olympique et la ZAC Solnier,
12:55qui est un nouveau quartier avec des habitations et des bureaux.
12:58Avec ce système, Equinix redistribue gratuitement à la ville de Saint-Denis
13:02une énergie qui permet de chauffer 1 500 logements en plus
13:06de la future piscine olympique.
13:09Mais ce bâtiment est le seul de ce genre en France.
13:15Ça n'avait jamais été fait de manière industrielle en France,
13:17mais ça fait désormais partie de notre design standard.
13:20Donc, dès qu'on va construire un data center,
13:22on va s'assurer que ce data center, il est à proximité d'un réseau de chaleur,
13:25déjà qu'on puisse réutiliser cette chaleur.
13:27Et ensuite, bien évidemment, on va mettre ça en œuvre avec les collectivités locales.
13:30Ça peut être du greenwashing.
13:32On risque d'aller juste dans le fait de démultiplier le nombre d'utilisations
13:37qu'on va faire d'un service parce qu'il est plus efficace.
13:39C'est assez classique, en fait.
13:41Quand on a une technique, une technologie qui devient plus efficace,
13:44on a tendance, quel que soit le secteur, à augmenter son utilisation.
13:49Et donc, on crée ce qu'on appelle un effet rebond.
13:52Les data centers essayent d'améliorer leur empreinte écologique.
13:55Mais ils ne sont finalement qu'une petite partie du problème.
13:58Car il n'existe que pour faire fonctionner tous nos appareils numériques.
14:02Or, nous en consommons des quantités astronomiques.
14:05En France, nous changeons de téléphone tous les deux ans environ.
14:09À Paris, nous avons rendez-vous avec Samuel Sauvage.
14:12Il est le cofondateur de Hop,
14:14une association qui milite contre l'obsolescence programmée,
14:18le fait que les entreprises réduisent exprès la durée d'utilisation de leurs appareils.
14:23Le numérique, en France, on estime que c'est à peu près 2,5%
14:26des émissions de gaz à effet de serre.
14:28Et le plus problématique, c'est qu'on prévoit que ça doit tripler d'ici 2050.
14:33Et quand on voit qu'est-ce qui cause ces pollutions,
14:37il y a souvent trois catégories qui sont mises en avant.
14:40Il y a les terminaux, c'est-à-dire nos appareils.
14:44Il y a les réseaux, c'est-à-dire tous les câbles
14:48et tout ce qui permet à ces appareils de fonctionner en commun.
14:52Et puis, les data centers qui gèrent les données.
14:56Ce qu'on oublie parfois de dire quand on montre ces trois impacts,
14:59c'est que les terminaux, c'est à peu près, au minimum,
15:02on va dire 80% des impacts du numérique.
15:06Donc, agir sur les appareils doit être une priorité aujourd'hui.
15:11Le fait, par exemple, de faire durer un an de plus votre ordinateur
15:16va avoir beaucoup plus d'impact que le fait d'avoir nettoyé votre boîte mail
15:21de tous les spams et tous les messages dont vous n'aviez plus besoin.
15:25Par exemple, un mail avec pièces jointes, c'est à peu près 20 grammes de CO2.
15:29C'est beaucoup moins qu'une heure de streaming, qui est 5 ou 6 fois plus.
15:35Mais c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup moins, c'est 5000 fois moins
15:40que le fait de renouveler fréquemment son ordinateur.
15:44Ce petit geste, vous pouvez le faire.
15:46Mais surtout, n'oubliez pas le grand geste qui est d'acheter intelligemment
15:50vos produits et de les faire durer.
15:52Faire durer votre portable, le geste primordial.
15:56Et ce, essentiellement à cause des matériaux qui sont utilisés pour les fabriquer.
16:02Nous, en portable, on a à peu près 70 métaux différents.
16:04Pourquoi est-ce que ça a beaucoup d'impact sur les gaz à effet de serre ?
16:08Tout simplement parce qu'il va falloir extraire les métaux de la terre.
16:11Et donc, par exemple, pour avoir une tonne de nickel,
16:14il va falloir extraire 571 tonnes de terre.
16:19Donc, vous imaginez, pour chacun des métaux différents,
16:22chacune des terres rares différentes, il va falloir ensuite les raffiner.
16:27Par exemple, pour les terres rares, vous allez avoir besoin de bains d'acide.
16:31Tout ça, c'est des processus qui sont extrêmement coûteux pour l'environnement.
16:35Parmi ces métaux, il y a le nickel, l'or ou encore le lithium,
16:39présents dans toutes nos batteries.
16:41Le lithium vient principalement de Chine ou d'Amérique du Sud.
16:45Mais face à l'explosion de notre consommation,
16:47de nouvelles mines vont être ouvertes en Europe et même en France.
16:51À Echassière, dans l'Allier, Xavier Tabaran, guide nature,
16:55se bat contre le projet d'une nouvelle exploitation de lithium
16:58à proximité de la forêt qu'il aime tant.
17:01Donc voilà, on arrive dans ce beau site, cette ancienne carrière.
17:05Donc là, on est juste à côté de la mine de la Bosse, la future mine d'Immeris.
17:08Le problème, c'est que là-bas, ils ont trouvé, en faisant des forages, du lithium.
17:11Et ce lithium, ils ont décidé de l'exploiter.
17:14Et ils vont nous faire, là du coup, ce ne sera plus une carrière, ce sera une mine.
17:16Ils vont creuser en profondeur, au moins jusqu'à 500 mètres de profondeur.
17:21Il n'y a déjà pas beaucoup d'eau.
17:22On a peur que la carrière aspire l'eau et que ça assèche le reste de la forêt, entre autres.
17:27Immeris, l'entreprise française qui n'a pas pu nous recevoir,
17:31réfute ces accusations.
17:32Elle a surtravaillé pour développer des techniques plus respectueuses de l'environnement.
17:36Avec cette future mine,
17:38Immeris souhaite extraire 34 000 tonnes de lithium par an à partir de 2028.
17:44L'ère de la pollution numérique ne fait que commencer.
17:47Selon l'ADEME, d'ici 2050, les émissions du numérique pourraient quintupler en France.
17:55Alors, la Startup Nation, cher Emmanuel Macron,
17:57entend faire de l'Hexagone une terre promise pour les data centers.
18:01Bonnes ou mauvaises nouvelles au vu de ce que l'on vient de voir ?
18:04Alors, plutôt une mauvaise nouvelle si on considère effectivement
18:07les besoins en ressources nécessaires à la construction de data centers,
18:11aux besoins en énergie consommée et également en tout ce que ça importe
18:17comme émissions directes et indirectes.
18:21Bonnes nouvelles si on considère que l'électricité française
18:24est quand même relativement décarbonée
18:26et que si ces data centers ne sont pas en France,
18:28ils seront dans d'autres pays où peut-être, justement,
18:30l'électricité a plus de carbone intrinsèquement
18:34et donc, par rapport à notre utilisation, des usages qui seraient aussi plus carbonés.
18:41Alors, si les prochaines phases du projet sont validées,
18:43le data center de Vissou va devenir le cinquième plus grand en France.
18:47La ville n'est membre d'aucun syndicat urbain de chauffage,
18:51donc impossible de valoriser ou de recycler la chaleur rejetée.
18:54N'est-ce pas déjà, à ce titre, avant toute autre considération,
18:58une aberration écologique ?
19:00D'abord, ça ne m'étonne pas que la chaleur fatale ne soit pas forcément réutilisée
19:04et on a vu un reportage intéressant où le cœur de métier
19:10semblait être de faire pousser des tomates plus que de gérer des données.
19:13Et en fait, dans l'industrie des data centers, ce n'est pas ça, la réalité.
19:16D'ailleurs, ils le disent, ils disent que notre métier,
19:18ce n'est pas de récupérer la chaleur fatale.
19:20C'est très bien, sur le plan de la communication, c'est parfait,
19:22ça fait l'image qui est très belle à la télévision.
19:24Non, alors, des impératifs de sécurité énergétique, si vous voulez,
19:27d'un côté, vous allez avoir une industrie qui va justement prendre compte
19:32de ces enjeux-là et de ces sujets-là, de ces critiques-là,
19:35et je suis sûr qu'on va l'entendre, en disant,
19:37mais nous, on a l'obligation, et au-delà de nos obligations,
19:40de toute façon, on travaille à améliorer notre performance.
19:43Donc, pour X données produites, on va baisser la consommation énergétique,
19:47on va optimiser, et de l'autre, vous avez une consommation de ces données
19:51qui est absolument exponentielle, parce que nous sommes à l'ère de l'IA générative,
19:55de chat GPT, des crypto-monnaies.
19:58Et donc, le sujet, c'est, la course de vitesse est-elle en train d'être gagnée
20:00par le business qui est capable d'améliorer ses performances
20:04ou est-ce qu'elle est perdue, cette course de vitesse,
20:06compte tenu de l'explosion de nos usages et du fait que demain,
20:09tout sera connecté, y compris nous, avec des puces sous la peau.
20:12Et ce que l'on voit, c'est typiquement l'effet rebond,
20:14c'est-à-dire qu'en fait, puisque ça pollue moins,
20:16eh bien, je peux me permettre de consommer encore un peu plus.
20:19Il y a le buffet à volonté, donc on se gave.
20:21Et du coup, on se gave.
20:22Ce que l'on gagne d'un côté, on le perd de l'autre.
20:24C'est open bar, et on est tous sortis d'un buffet à volonté,
20:27on est tous sortis d'un buffet à volonté en ayant trop mangé.
20:29Oui.
20:30Sheila O'Hara, comment faites-vous, vous, pour précisément optimiser
20:34et décarboner le stockage de vos données ?
20:37Oui, c'est justement le focus, en fait, de plusieurs solutions qu'on a,
20:42dans les data centers en particulier.
20:45Oui, en fait, on va travailler sur cette performance.
20:48On va travailler sur une consolidation des tâches
20:51pour essayer de réduire l'espace nécessaire, en fait,
20:55pour faire tourner, en fait, tous les calculs.
21:00On va travailler aussi avec des partenaires.
21:02Par exemple, on a un partenariat avec Dassault Systèmes, en fait,
21:05qui vont travailler sur tout ce qui est une amélioration
21:07de la refroidissement, en fait, de ces data centers.
21:10Donc, un focus fort sur faire plus avec moins,
21:16parce qu'on voit les demandes qui explosent en termes de besoin de calcul
21:21ou de nouvelles technologies comme le Generative AI.
21:26Je pense qu'il y a aussi, en fait, une éducation qui doit être faite,
21:32au sens large, sur cet impact du numérique,
21:36parce que je constate, quand je croise des jeunes
21:40qui viennent découvrir, on va dire, le numérique, en fait, chez IBM...
21:45Les digital natives.
21:46Ils n'ont aucune conscience de cet impact.
21:49Conscience de l'impact environnemental du numérique, oui.
21:51Donc, je pense qu'il y a aussi un fort travail d'éducation,
21:55que nous aussi, dans le numérique, on doit contribuer, en fait, à cet éducation.
22:01Ce que vous nous dites chez la OARA, c'est que l'innovation nous sauvera
22:04de l'épuisement des ressources et des changements climatiques.
22:07Mais avec le cloud, la consommation des serveurs devrait doubler tous les quatre ans.
22:11Donc, ça veut dire plus de technologies, c'est nécessairement plus de matières premières,
22:14donc plus d'énergie et plus d'impact environnemental.
22:17Pas forcément, parce qu'on a aussi des technologies comme le quantique
22:22qui offrent des capacités, on va dire, de calcul exponentiel,
22:27mais qui ont un impact, on va dire, énergétique minime.
22:31Alors, ça, c'est le grand argument aujourd'hui, le quantique.
22:33Est-ce que c'est la solution, le quantique ?
22:34Il y a des échéances qui ne répondent pas à l'urgence climatique.
22:37Vous n'allez pas installer l'informatique quantique dans les dix ans pour répondre à la...
22:41Ça ne va pas remplacer tout l'ordinateur.
22:44En fait, mais ça ne va pas remplacer non plus les ordinateurs, on va dire, traditionnels.
22:50Pour simplifier, c'est-à-dire que pour une puissance de calcul bien plus importante,
22:55on a besoin de ressources énergétiques bien plus faibles parce que le process n'est pas le même.
22:58Voilà, d'accord. Le process n'est pas le même
23:00et on a une puissance, on va dire, de calcul qui est exponentielle.
23:04En fait, un ordinateur traditionnel de 4 bits va faire un calcul.
23:08Un ordinateur quantique de 4 qubits peut faire 16 calculs.
23:13Donc, on est...
23:14La physique quantique, c'est la solution à la pollution numérique ?
23:17C'est pour quoi faire, en fait ? C'est surtout ça la question.
23:21Justement, si c'est pour nourrir nos usages...
23:25Voilà, c'est dans l'usage de ces technologies qu'on verra effectivement un gain ou encore un impact supplémentaire.
23:30C'est ça, l'effet rebond.
23:32Mais j'aimerais juste qu'on revienne sur ces data centers qui rejettent cette fameuse chaleur fatale.
23:39Plus de 2 degrés à l'ère du réchauffement climatique, c'est très très loin d'être neutre pour les riverains.
23:44C'est énorme et effectivement, ça peut continuer à rendre invivable.
23:47Certains quartiers, aujourd'hui, on est plutôt à chercher à récupérer au maximum cette chaleur fatale
23:53et à trouver des solutions de free cooling qui permettent un refroidissement sans avoir de rejets à l'extérieur de cette chaleur.
24:00En termes de santé, au niveau des rejets liés aux data centers,
24:04est-ce que les riverains sont susceptibles d'avoir raison de s'inquiéter en termes de particules ?
24:09C'est vrai qu'on a entendu dans le reportage...
24:10Les centrales électriques de ces cours fonctionnent au diesel
24:13et les cheminées du data rejetteraient l'équivalent de 416 allers-retours Paris-New York.
24:19Ça aussi, c'est pas neutre.
24:21C'est énorme, c'est tous les groupes électrogènes de secours.
24:25L'idée, c'est que ça ne fonctionne pas.
24:29Mais ça fonctionne tout de même, 15 heures par an pour les questions de maintenance.
24:33Dans la partie test et maintenance.
24:34C'est des data centers qui tournent 24 sur 24, 7 jours sur 7
24:37et qui ne peuvent pas se permettre d'avoir des pannes.
24:41Donc on revient au problème, c'est surtout...
24:44C'est au cas où.
24:45C'est très énergivore pour un au cas où.
24:48Voilà, c'est exactement ça.
24:50Et c'est aussi énergivore pour des tas de données qui ne sont pas utilisées, quelque part.
24:54Alors justement, Guillaume Pitron, ces centres de données sont très énergivores,
24:57peu pourvoyants d'emploi et bénéficient de nombreux privilèges
25:00comme l'abattement sur le prix d'achat de l'électricité.
25:02Ne faudrait-il pas mieux réguler ce secteur et faire payer le juste prix
25:06à ces industriels aux bénéfices records ?
25:09Si on leur fait payer ces prix-là, c'est parce que c'est quand même de l'industrie.
25:13C'est la fameuse start-up nation dont vous avez parlé.
25:16Géré à Emmanuel Macron.
25:17Il y a des entreprises qui sont des champions européens
25:20et qui sont d'ailleurs des entreprises françaises.
25:21On pense à On vous héberge, OVH.
25:24Il y a des villes en France qui, aujourd'hui, se spécialisent dans cet écosystème-là.
25:28Je pense en particulier à Marseille,
25:30puisque Marseille est aussi une ville par laquelle arrive un salon de câbles sous-marins
25:34qui relie l'Europe à l'Asie.
25:36Donc, Marseille est une zone naturelle d'arrivée des câbles.
25:39Et à l'arrivée des câbles, il y a forcément des centres de données.
25:42Mais la plaine commune, au nord de Paris,
25:44là où on était au sud dans le reportage, mais dans le nord de Paris,
25:47on l'a vu aussi à peu près tout à l'heure avec ce grand datacentre en construction,
25:51ce sont des zones qui, effectivement, sont de plus en plus disponibles
25:55du fait de la volonté des pouvoirs publics,
25:57parce que c'est la numérisation de nos économies
26:01et parce que nous sommes dans une guerre économique.
26:03J'entends bien, mais faudrait-il quand même leur faire payer
26:05un peu plus l'électricité ou, par exemple, envisager à l'échelle européenne
26:09une taxe sur le volume des données stockées ?
26:12Alors, moi, je suis pour la taxe, parce qu'en fait,
26:13ça aurait un impact sur notre façon de consommer.
26:16Voilà.
26:16Et je dirais même qu'il faudrait presque que cette taxe,
26:19elle ne s'applique pas seulement aux fournisseurs du service...
26:21Mais également aux usagers.
26:22...de l'infrastructure, mais aux usagers...
26:23Sur le prix des forfaits, par exemple.
26:24Oui, mais sauf que moi, aujourd'hui, j'ai un forfait à 20 euros
26:27pour, en fait, une consommation illimitée de données.
26:29Justement.
26:29Et rappelez-vous, en 1999, mon premier portable,
26:33j'avais droit à 40 SMS dans le mois.
26:35Absolument.
26:35Aujourd'hui, j'ai droit à...
26:36Donc, il faut jouer sur la fiscalité pour dissuader
26:39ou, en tout cas, restreindre l'usage que l'on a du numérique.
26:42Et, au fond, responsabiliser les usagers.
26:45Des forfaits par tranche, comme il y a des tranches d'impôts,
26:48qui permettraient de faire en compte un petit peu du débit qu'on utilise pour de vrai.
26:51Plus vous streamez, plus vous payez.
26:52Des modèles économiques...
26:53Ça existe, mais ça impose de remettre à plat
26:55tout le modèle économique des gaffes femmes.
26:57Est-ce que c'est possible ?
26:59Ça me paraît excessivement compliqué.
27:00Alors, on voit des nouveaux modèles économiques
27:01qui apparaissent dans l'écosystème Internet.
27:03Je pense en particulier à Roblox,
27:04qui est en fait une espèce de métavers pour jeunes Américains, notamment,
27:07où, en fait, vous construisez des jeux,
27:09vous jouez avec des gens que vous ne connaissez pas,
27:11avec des jeux que vous avez construits,
27:12et vous touchez une partie, en pourcentage,
27:15de l'argent qui a été généré par le jeu sur lequel les autres viennent jouer.
27:18C'est un nouveau modèle économique
27:19qui vient bousculer le modèle économique traditionnel.
27:22Mais aujourd'hui, quand on voit la puissance des groupes gaffes femmes
27:25qui s'est fondée, parce que ce sont avant tout des régies publicitaires sur les publicités,
27:28je n'ai pas de boule de cristal pour vous dire à quoi ressemblera le futur.
27:31Mais ce qui est sûr, c'est que c'est un modèle qui fonctionne très bien
27:32et personne dans cet écosystème-là a envie que ça change.
27:35Alors, justement, Guillaume Pitron,
27:36des villes comme Amsterdam ont pris des moratoires sur ces datacenters.
27:40Stockholm leur impose déjà des exigences drastiques
27:42et l'Irlande et Singapour, après leur avoir ouvert grand les bras,
27:46se ravisent et réfléchissent à leur tour
27:48à la mise en place d'un moratoire face à un modèle insoutenable.
27:51Je sais que les expériences des uns ne servent pas aux autres,
27:53mais n'y aura-t-il pas des leçons à en tirer ?
27:55Amsterdam a été la première ville à poser un moratoire
27:58parce qu'en fait, l'extension des datacenters
28:00était devenue incontrôlable.
28:02Ils poussaient comme des champignons partout,
28:03y compris dans les communes alentours.
28:05Et en fait, la ville avait perdu le contrôle de sa planification urbaine.
28:08Et donc, ils ont porté un moratoire pendant un an
28:10de façon à pouvoir reprendre le dessus
28:12et être capables aussi de mieux envisager à l'avenir
28:15la consommation énergétique de ces datacenters
28:17et de ne pas les faire rentrer en conflit d'usage
28:20avec le besoin de se chauffer ou de l'électricité.
28:22Donc là, il y a le besoin de cette reprise de contrôle.
28:24Mais, Daphné Roulier,
28:26Poutine a dit « celui qui tient l'informatique quantique tiendra le monde ».
28:29Pour l'instant, c'est la Chine.
28:30C'est un enjeu.
28:31C'est la Chine, c'est peut-être les États-Unis.
28:33Mais les supercalculateurs sont américains.
28:35Ils ont été chinois pendant un temps.
28:36Mais à un moment, celui qui contrôle le cyberspace
28:39est celui qui, demain, contrôlera le monde.
28:41Nous sommes dans une vaste guerre économique, technologique
28:45où si jamais vous vous faites doubler par ces grands blocs-là,
28:48vous êtes perdus.
28:49Pourquoi est-ce qu'on a développé la 5G en France ?
28:51Pas parce qu'on sait vraiment à quoi ça va servir,
28:52mais parce qu'on ne voulait pas avoir des antennes chinoises
28:54« made in China », 5G sur notre territoire.
28:56Donc en fait, on accélère nous-mêmes en Europe et en France sur la 5G.
28:59Faute vraiment de savoir à quoi ça sert.
29:00Mais en tout cas, pour ne pas nous faire doubler dans une course technologique
29:02qui est une course à la souveraineté technologique.
29:05Et donc, je crains que dans ce monde-là
29:06où les tensions géopolitiques sont de plus en plus fortes,
29:09cette question écologique, elle ne passe pas nécessairement
29:12par le cerveau de nos dirigeants qui pensent, en fait,
29:15maintien de la souveraineté européenne dans un monde en tension.
29:18Alors effectivement, une chose est sûre,
29:20les IA vont faire péter la facture énergétique.
29:23Et ne parlons pas du déploiement de la 5G qui va démultiplier nos usages.
29:27Alors, bonne ou mauvaise nouvelle, la 5G, Raphaël Ittier,
29:30c'est toute la question de votre climatoscope.
29:39La 5G est en train de se développer.
29:41Les opérateurs avancent l'idée qu'on va améliorer
29:44l'efficacité énergétique du système.
29:46Et à ce titre-là, c'est une bonne nouvelle pour l'environnement.
29:50C'est-à-dire que l'énergie consommée pour une certaine quantité d'informations
29:54va baisser.
29:55C'est lié aux systèmes d'antennes qui sont utilisés.
29:58C'est-à-dire qu'au lieu d'envoyer un signal absolument partout,
30:00on a des antennes directionnelles ciblées sur le portable
30:04qui réclame une connexion.
30:06Donc du coup, de ce point de vue-là,
30:08la quantité égale d'informations consommées,
30:10effectivement, c'est plutôt un bénéfice pour l'environnement.
30:12Mais ce n'est pas aussi simple que ça.
30:13Non, évidemment, on en a parlé tout à l'heure.
30:15C'est l'effet rebond qui est vieux comme la technologie.
30:18Et j'avais en tête l'exemple des machines à vapeur à la fin du 19e siècle.
30:22Quand on a amélioré la performance des machines à vapeur,
30:24on s'est dit, c'est bien, on va utiliser moins de charbon.
30:26Mais ce n'est évidemment pas ça qui s'est passé.
30:28À partir du moment où la machine est plus efficace,
30:30on fabrique beaucoup plus de machines
30:31et on a beaucoup plus de consommation de charbon à la clé.
30:34Là, en l'occurrence, la 5G,
30:36elle va permettre d'utiliser beaucoup plus de données.
30:39C'est d'ailleurs un peu sa raison d'être.
30:40Alors, même si on ne sait pas exactement à quoi ça va servir,
30:42il y a un certain nombre de choses qui se profilent,
30:44comme les objets connectés, la robotique connectée
30:47et tout ça qui va utiliser un très, très, très grand nombre de données.
30:50Et c'est assez peu probable que le gain énergétique sur la performance
30:54vienne compenser cette explosion annoncée de la consommation des données.
30:59Et ça a un autre effet pervers sur le climat, bien sûr.
31:02Oui, parce que, par exemple,
31:04on avait observé un petit tassement de l'achat des smartphones.
31:09Et depuis l'annonce de la 5G,
31:10ils nous reprisent des achats de téléphones,
31:12simplement pour actualiser chacun de son téléphone qui va être 5G,
31:16parce que ça va lui permettre de faire plus de choses.
31:18Et puis, si la 5G est là,
31:20ça veut dire qu'on va fabriquer plein d'objets connectés.
31:22Eh bien, ceux-là, il faut les fabriquer.
31:23Alors, concrètement, comment limiter la casse,
31:25ne serait-ce qu'à titre individuel ?
31:26Alors, à l'échelle individuelle, on l'a déjà éduqué tout à l'heure,
31:30le premier réflexe, c'est de ne pas actualiser son téléphone trop vite,
31:33son portable, sa tablette ou quoi au casse,
31:35et d'attendre, c'est ça le poste...
31:37Ce que disait chez la AORA, éduquer.
31:38Éduquer, c'est le poste principal.
31:41Après, il peut y avoir quelques réflexes.
31:44Par exemple, quand on est chez soi, quand on arrive chez soi
31:46et qu'on a le choix entre le Wi-Fi et la 5G,
31:48il se trouve que le Wi-Fi, ça consomme 20 fois moins d'énergie que la 5G.
31:51Donc, c'est un peu à la marge parce que ce n'est pas le poste principal,
31:54mais c'est un réflexe qui est plutôt bien, qui est plutôt bon.
31:57De la même façon que quand on regarde une vidéo sur un écran, sur un portable,
32:02le fait que ça soit en 4K en streaming n'est peut-être pas indispensable
32:05parce qu'en vrai, l'œil humain ne voit pas la différence
32:07entre du 4K et du HD sur un tout petit écran.
32:10Donc, il y a ces petits réflexes-là, peut-être, à avoir
32:12et garder une forme de vigilance par rapport à l'usage qu'on a de ces objets-là.
32:16Et quid des risques sanitaires ?
32:18Alors, les risques sanitaires, la 5G, en fait, ça va être l'exploitation
32:21de trois grandes longueurs d'onde,
32:23dont deux qui sont déjà utilisées pour la 4G ou le Wi-Fi
32:27et dont on sait à peu près qu'on n'a pas pu démontrer
32:29que ça avait d'impact sur la santé.
32:31Donc, pour ces deux longueurs d'onde, il n'y a pas vraiment de nouvelles questions
32:34relatives à l'utilisation de la 5G.
32:37Et on va avoir aussi une nouvelle longueur d'onde qui est le 26 GHz,
32:41pour laquelle il y a moins de données et donc, du coup,
32:43ça pousse l'Agence de la Sécurité Sanitaire à réclamer un petit peu plus d'études
32:49sur cette longueur d'onde pour s'assurer de l'innocuité du signal.
32:55On entend beaucoup dire que le numérique va sauver la planète.
32:58On l'a d'ailleurs entendu lors des dernières COP
33:01que l'IA va permettre de réduire la pollution,
33:03que les smart cities vont nous aider à mieux gérer notre consommation
33:06en devenant des villes vertes.
33:07Que vous inspire à l'un et à l'autre ce discours technosolutionniste ?
33:11Je pense qu'effectivement, dans certains cas,
33:14le numérique peut être un accélérateur pour la transition écologique,
33:19à condition de bien regarder le projet écologique.
33:21C'est ça qui est important, c'est finalement qu'un outil.
33:24Cet outil peut effectivement permettre d'aller plus vite.
33:27S'il est mal utilisé ou s'il est utilisé n'importe comment
33:30et déployé sans vraiment de vision et d'objectif,
33:34il ne servira pas plus qu'un marteau qui est utilisé pour tourner une vis.
33:38Un mot des smart cities.
33:40Vous avez été pionnière chez IBM dans les smart cities
33:42et placé beaucoup d'espoir dans la géo-ingénierie.
33:45Qu'est-ce que vous en attendez ?
33:46Alors sur les smart cities, c'est vrai que ça fait des années
33:51qu'on travaille dans ce domaine sur plusieurs axes,
33:55soit autour des installations physiques, les bâtiments,
33:59pour mettre des outils qui vont permettre
34:02une sobriété énergétique de ces bâtiments,
34:05un peu comme à la maison, on voit maintenant
34:09avec les compteurs connectés qu'on peut suivre en temps réel
34:13notre consommation.
34:14Pour l'instant, ils sont très contestés ces compteurs.
34:16Mais on voit un usage qui peut aider à la sobriété énergétique
34:23au niveau personnel.
34:27Ça, à l'échelle des bâtiments, des villes, des usines, etc.,
34:35on a besoin de suivre ces consommations
34:38pour pouvoir détecter des opportunités d'amélioration
34:42ou des gaspillages d'énergie.
34:45Vous croyez à notre salut par les villes intelligentes
34:48bourrées de capteurs et de véhicules autonomes ?
34:51D'abord, je pense qu'elles peuvent permettre un gain.
34:54Vous l'avez dit, il faut vraiment rendre à César qui est à César.
34:56Il ne faut pas oublier que oui, le numérique peut être
34:58une technologie au service de l'environnement.
35:00Évidemment qu'une maison connectée qui automatiquement mesure
35:04la température à l'intérieur de la maison quand vous n'êtes pas chez vous
35:07et qui, du coup, éteint automatiquement la climatisation,
35:10c'est un gain évident.
35:11Et puis, en face de ça, effectivement, il y a les coûts.
35:14Et les coûts me ramènent à une question.
35:16Quelle est la véritable limite de la ville connectée ?
35:19Est-ce que c'est le périph ?
35:20Ou est-ce qu'on va jusque dans les mines de métaux en Chine
35:24où on extrait les matériaux qui sont ceux des objets connectés
35:28qu'on trouve dans la ville connectée ?
35:29Et alors, j'ai fait la recherche parce que j'ai cherché
35:31et j'ai remarqué qu'on avait assez peu produit
35:34jusque tout récemment d'études sur les coûts et les bénéfices
35:37de la ville connectée jusqu'à ce qu'une universitaire danoise
35:40dont le nom est Kiki Lambrecht fasse le travail pour la ville de Copenhague.
35:44C'est le cher Kiki.
35:45Et elle arrive avec le constat qu'en menant,
35:49en mettant face à face les coûts et les bénéfices
35:52pour la seule ville de Copenhague, dit-elle, elle insiste là-dessus,
35:54les coûts sont supérieurs aux bénéfices.
35:57Elle ne dit pas que c'est vrai pour toutes les villes connectées.
36:00Donc elle dit, attention, il ne faut pas généraliser ce propos
36:02dans les villes connectées.
36:02Si Paris peut être un peu plus connectée à certains égards, pourquoi pas ?
36:05Je veux dire, je ne suis pas contre la technologie en soi,
36:08mais les rares études qui ont été produites viennent casser un discours
36:12qui, pour moi, m'a été rabattu à longueur de pubs,
36:15de sommets internationaux, de discours politiques.
36:18Et effectivement, il y a un besoin qui est difficilement réalisable
36:21de quantification, c'est affreusement compliqué.
36:23Oui, mais pardonnez-moi, plus de villes connectées,
36:25ça veut dire plus de matières premières,
36:27ça veut dire l'épuisement des ressources.
36:30On va vers une difficulté d'approvisionnement
36:32et d'épuisement des ressources.
36:34Comment est-ce qu'on va faire, concrètement ?
36:35Alors, je vais y aller, parce que ça, c'est parti.
36:38En fait, d'abord, les ressources,
36:40il y aura toujours un gramme de métal à l'écharge quelque part,
36:42parce que maintenant, on en découvre au fin fond de l'océan Pacifique.
36:44Et puis, pourquoi pas sur les astéroïdes ?
36:46Sur les astéroïdes ?
36:47Oui, il y a un astéroïde qui s'appelle Psyché 16,
36:50qui se trouve dans la ceinture d'astéroïdes entre Mars et Jupiter.
36:52Et on envoie bientôt une sonde pour aller regarder un petit peu
36:54s'il n'y a pas un peu d'or, de cuivre et autres matériaux.
36:57Plus sérieusement, la question, c'est à quel coup ?
36:59À quel coup est-ce qu'on ira économique, écologique, sociétaux,
37:03politique, psychologique ?
37:04Est-ce qu'on ira chercher ces matériaux-là ?
37:06Aujourd'hui, il faut creuser 16 fois plus profondément
37:10dans une mine de cuivre par rapport à il y a un siècle
37:12pour arriver à la même quantité de cuivre.
37:15Donc, ça veut dire qu'il y a un tarissement de la ressource.
37:17Et pour creuser 16 fois plus profondément,
37:19il faut plus d'électricité, plus d'eau, plus d'impact biologique, etc.
37:22Donc, la question, elle n'est pas tant dans la disponibilité,
37:26je dirais, en termes de volume de la ressource,
37:28parce qu'il y aura toujours un petit nodule polymétallique
37:31au fin fond d'une abysse du Pacifique à aller exporter.
37:34Que des modalités d'extraction.
37:35Que des modalités d'extraction et des coûts que ça va représenter.
37:37Je pense qu'un jour, on va se dire,
37:39mais en fait, le coût est supérieur aux bénéfices que j'en attends.
37:41De la même façon qu'on se dit le pétrole,
37:43on peut toujours continuer à en extraire,
37:44mais on considère aujourd'hui que le pétrole
37:45a des coûts qui sont supérieurs aux bénéfices.
37:47Et moi, je pense qu'on arrive vers un monde
37:48où les coûts d'extraction des métaux vont être supérieurs
37:50aux bénéfices qu'on en attend.
37:56Alors, justement, Chellaoua.
37:57Oui, et si on cherchait des alternatives à ces métaux,
38:01et c'est là où, si je peux me permettre,
38:03l'ordinateur quantique et la physique quantique entrent en jeu.
38:08Un exemple, on travaille avec Bosch aujourd'hui,
38:11qui utilise nos systèmes quantiques
38:13pour justement chercher, à un niveau moléculaire,
38:17des substituts ou des alternatives aux métaux lourds.
38:20Et donc, ces calculs quantiques qui sont très spécifiques,
38:24très complexes, etc., ils vont servir, en fait,
38:28pour cette recherche d'autres matériaux,
38:30des matériaux plus durables qui, j'espère,
38:34un jour vont nous permettre de remplacer ces métaux lourds.
38:37Mais si on fait un peu de perspective,
38:38vous qui travaillez sur ce domaine-là,
38:41quelle est l'échéance à laquelle on peut commencer à espérer,
38:45croire que l'informatique quantique va être grand public ?
38:49Il y a déjà, en fait, nous, on a IBM Quantum System One,
38:54il est disponible à l'usage pour tourner des algorithmes quantiques.
39:00Pourquoi ne remplace-t-il pas déjà l'informatique classique, alors ?
39:02Non, en fait, il ne faut pas croire que l'ordinatique quantique
39:05va remplacer l'ordinatique classique.
39:08Il va être utilisé pour des calculs très spécifiques,
39:12comme dans la recherche moléculaire.
39:13Oui, mais la pollution, elle est liée à l'usage quotidien
39:17dans l'informatique, pas à l'usage de calculs particuliers ?
39:20Alors, ça, ce n'est pas, on va dire, le but de ce type d'ordinateur,
39:27mais on travaille aussi pour réduire l'impact.
39:29En fait, le sujet, c'est qu'on est tous acteurs de la problématique,
39:33aussi bien consommateurs, pouvoirs publics, fabricants,
39:37et on doit tous, effectivement, aller dans le même sens
39:40et ne pas faire croire qu'effectivement plus de technologies
39:43permettra de résoudre tous les problèmes qui sont potentiellement
39:46mis en œuvre à cause de cette technologie.
39:49Donc, c'est pour ça que le principe de sobriété, il est très important.
39:52Il n'est pas seulement sur la partie énergétique,
39:54il est sur, globalement, les équipements.
39:57Stabiliser le parc des équipements, c'est quelque chose de nécessaire,
39:59si on veut arriver à 2030, 2050, à stabiliser à peu près
40:04l'impact environnemental de ce numérique.
40:06Et répondre à la question de la sobriété,
40:09c'est répondre à la question du besoin.
40:11C'est ce que vous disiez, et c'est quelque chose de nécessaire,
40:15de pouvoir se dire, est-ce qu'on a besoin de tel ou tel usage
40:19pour continuer à bien vivre ?
40:21Pour résumer, on a plus besoin de l'IA pour détecter un cancer
40:26que de jouer à Call of Duty ou à poster sa routine beauté sur Instagram.
40:30Absolument, mais allez poser la question à la sortie d'un collège.
40:34Mais les jeunes, ils vous disent, pendant le Covid,
40:36heureusement que j'avais les réseaux sociaux pour rester en lien avec mes amis
40:38parce que sinon, je serais devenu dingue.
40:40Et là, on rentre dans un débat qui est politique.
40:42C'est là qu'on voit que la dimension fondamentale du numérique
40:45n'est pas technologique, elle est politique.
40:47Et philosophique aussi.
40:48Et philosophique et même religieuse.
40:50Vous posez une question qui est taboue.
40:53Nous sommes, avec cet outil au bout de nos doigts, des demi-dieux.
40:58Nous avons des tas d'assistants vocaux, numériques,
41:02qui déploient autour de nous...
41:04À cause desquels, d'ailleurs, on a perdu pas mal de QI.
41:06Un taxi pour nous aider.
41:07Non, mais les études le prouvent.
41:09On a perdu pas mal de QI parce qu'on ne réfléchit plus,
41:11parce que les applis réfléchissent à notre place.
41:13M. Plagé, vous le connaissez avec, peut-être ?
41:15Oui, bien sûr.
41:16Mais comme je peux, du bout de mon doigt,
41:18faire venir un taxi qui va me chercher,
41:19me ramener une pizza,
41:21trouver la femme de ma vie,
41:23ou la femme de la soirée, etc.
41:25Mais en fait, pourquoi est-ce que tout d'un coup,
41:27ce débat sur la limitation de mes besoins surgit ?
41:29J'ai pas envie d'entendre ça, moi, consommateur,
41:31puisque ce numérique, au contraire, me propose toujours
41:35de me démultiplier jusqu'à peut-être demain dans le métavers.
41:38Donc en fait, le tabou, il est avec ce mot de sobriété,
41:41auquel malheureusement je ne crois pas une demi-seconde.
41:43Parce que la sobriété, c'est quoi ?
41:44C'est l'iPhone 2, l'iPhone 3 ?
41:46Mais Guillaume Pitron, de fait...
41:47J'ai intérêt à savoir quand est-ce qu'on passe dans la presse sobriété.
41:49Guillaume Pitron, de fait, le tabou va devoir s'imposer,
41:51il va s'imposer de lui-même.
41:52Je pense qu'il y a trois choses qui vont le faire s'imposer.
41:54Il va s'imposer de force.
41:55L'environnement, sur lont on parle,
41:57la santé mentale,
41:59parce que là, on commence à réaliser
42:01l'impact des écrans sur l'attention des enfants,
42:03et la démocratie.
42:04Aujourd'hui, on veut réguler les réseaux sociaux
42:06pour protéger une valeur qu'on appelle la démocratie.
42:08Environnement, santé psychologique,
42:10et aussi physique,
42:12et la démocratie, je pense que ce sont trois limites
42:14non technologiques à cette expansion technologique.
42:17En attendant de trancher ce débat,
42:19en Europe, si on n'a pas de pétrole,
42:21on a parfois des idées pour tendre
42:23vers un numérique plus résilient et qui fait sang.
42:25C'est le cas de la société hollandaise Fairphone
42:27qui produit des téléphones portables plus équitables
42:29et surtout plus réparables.
42:31Car si le téléphone le moins polluant
42:33est reste celui qu'on ne fabrique pas,
42:35autant bichonner l'existant.
42:37Le monde de demain commence aujourd'hui
42:39comme le montre ce reportage d'Alexis Breton
42:41et Gérard Naty.
42:49Amsterdam aux Pays-Bas,
42:51ses vélos, ses canaux,
42:53mais aussi ses entreprises du numérique.
42:55Nous avons rendez-vous au siège de Fairphone.
42:57Ici, à première vue,
42:59aucune différence avec une start-up
43:01de la Silicon Valley.
43:03Il y a un open space, un podium avec de petits coussins,
43:05des plantes et même un mur d'escalade.
43:07Mais à Fairphone,
43:09on veut faire le contraire des GAFAM.
43:11L'entreprise veut fabriquer
43:13des smartphones justes et durables.
43:15Deux termes antinomiques à première vue.
43:17Nood Tilmans
43:19est le PDG de Fairphone.
43:21Entrez,
43:23bienvenue à Fairphone.
43:25Après avoir travaillé dans le développement du bioplastique,
43:27il a intégré la compagnie en 2019.
43:29On va avoir besoin d'une cinquième colonne
43:31parce qu'on vient de lancer un nouveau produit.
43:33Ce nouveau produit,
43:35c'est le Fairphone 5,
43:37un smartphone unique sur le marché.
43:39Nous avons besoin de toi,
43:41de tes doigts rapides.
43:43Krish, un des 140 employés de Fairphone,
43:45va nous montrer la spécificité de cet appareil.
43:47Il y a un téléphone si tu veux
43:49et si tu as besoin,
43:51il y a aussi des tournevis.
43:53Je peux utiliser le mien ?
43:55Oui, tu peux prendre le tien, pas de problème.
43:57Réparer, c'est un de nos principes.
43:59Nous pensons que chaque consommateur
44:01a le droit de réparer.
44:03C'est votre appareil,
44:05vous pouvez l'ouvrir et le réparer.
44:07Concevoir un téléphone
44:09dans le but de pouvoir le réparer,
44:11c'est ce qui nous distingue le plus des autres marques
44:13qui, elles, les fabriquent pour les rendre inviolables.
44:15Impossible à réparer
44:17dans le but de vous pousser à en acheter un nouveau
44:19tous les deux ou trois ans.
44:21Contrairement à un smartphone classique
44:23qui est impossible à démonter,
44:25un Fairphone peut être décomposé pièce par pièce.
44:27Une petite révolution.
44:35Voilà, j'ai retiré tous les composants.
44:37En tout, ça prend environ dix minutes.
44:39Et vous pensez que tout le monde peut le faire ?
44:41Oui, bien sûr.
44:43N'importe quel idiot peut le faire.
44:45Si vous utilisez nos tutoriaux,
44:47tout le monde peut le faire, bien sûr.
44:49Si votre téléphone est cassé,
44:51vous pouvez commander sur notre site internet
44:53les informations sur le téléphone.
44:55C'est un peu comme un appareil photo.
44:57C'est un peu comme un appareil photo.
44:59C'est un peu comme un appareil photo.
45:01C'est un peu comme un appareil photo.
45:03Vous pouvez commander sur notre site internet
45:05les composants que vous voyez ici sur la table.
45:07Nous vous les expédions et vous pouvez facilement
45:09les intégrer à votre téléphone.
45:11En moyenne aujourd'hui,
45:13nous changeons de téléphone tous les deux ans.
45:15Avec ce concept de réparabilité,
45:17Fairphone nous assure
45:19qu'il est possible d'utiliser son portable
45:21pendant au moins sept ans,
45:23garder son appareil le plus longtemps possible.
45:25Cela signifie moins de déchets électroniques,
45:27mais aussi moins d'extractions de métaux
45:29et de terres rares.
45:31C'est d'ailleurs le deuxième objectif de Fairphone.
45:33Travailler sur les matériaux
45:35présents dans le téléphone
45:37pour diminuer ses impacts.
45:41Nous disons souvent aux consommateurs
45:43le changement est dans vos mains.
45:47Avec le smartphone que vous avez dans vos mains,
45:49vous avez aussi le pouvoir
45:51de changer l'ensemble de l'industrie.
45:55Vos téléphones, ce sont des métaux précieux,
45:57mais il y a aussi une histoire derrière ces métaux.
45:59Le cobalt, par exemple,
46:01est produit dans des mines artisanales au Congo.
46:03Des enfants y travaillent
46:05avec des pratiques très dangereuses
46:07pour des salaires ridicules.
46:11Et nous, nous menons des projets
46:13pour améliorer les conditions de travail
46:15dans ces mines.
46:17En 2020, Fairphone a lancé l'alliance
46:19du cobalt équitable,
46:21dans le but d'éradiquer le travail des enfants
46:23et d'améliorer les conditions dans les mines,
46:25en offrant par exemple des salaires décents.
46:27Malgré tous ces coûts supplémentaires,
46:29son dernier modèle coûte 699 euros,
46:31soit environ la moitié
46:33du prix d'un smartphone dernier cri,
46:35notamment en économisant
46:37sur les frais de marketing
46:39et de communication.
46:41Avec celui-là,
46:43même pas besoin de tournevis.
46:45C'est facile à démonter.
46:49Et voilà.
46:51Quelle est la prochaine étape ?
46:53C'est une bonne question.
46:55Comme une petite entreprise,
46:57nous devons sélectionner avec précaution
46:59notre prochain projet.
47:01Ça pourrait être une tablette,
47:03un ordinateur portable,
47:05une enceinte Bluetooth.
47:07Continuez à nous suivre
47:09et vous verrez.
47:11Mais si les produits Fairphone
47:13sont plus durables et équitables,
47:15l'objectif de la marque reste tout de même
47:17de vendre, paradoxe éternel,
47:19dans ces entreprises vertes.
47:21Depuis sa création, il y a 10 ans,
47:23Fairphone a vendu plus de 600 000 téléphones.
47:25Une goutte d'eau au regard
47:27du milliard et demi de smartphones
47:29vendus dans le monde chaque année.
47:31On l'aura compris,
47:33pour diminuer notre preinte,
47:35nous allons devoir revoir nos usages individuels.
47:37Mais par où commencer concrètement ?
47:39J'imagine que se priver de regarder une vidéo
47:41c'est un peu la version 2.0 du pipi sous la douche.
47:43En revanche, acheter du reconditionné
47:45ou des modèles résilients, c'est un bon début.
47:47Tout à fait.
47:49On permet d'allonger la durée de vie
47:51d'un appareil construit,
47:53et on évite la construction d'un nouvel appareil.
47:55Si on tire la ploie jusqu'au bout,
47:57c'est l'objectif de limiter
47:59la fabrication de nouveaux appareils
48:01et donc d'aller chercher de nouvelles ressources
48:03pour la fabrication de ces nouveaux appareils.
48:05Sheila Ouara, que faites-vous chez IBM
48:07pour lutter contre l'obsolescence programmée ?
48:09Depuis 1991,
48:11on a un système en place
48:13de recyclage
48:15et réutilisation des machines
48:17qui sont récupérées de chez nos clients.
48:19On a aussi
48:21un programme d'éco-conception
48:23pour l'environnement
48:25qui va prendre en compte
48:27plusieurs aspects
48:29des ordinateurs
48:31plus économes,
48:33qui utilisent un contenu recyclé
48:35et qui sont pensés
48:37pour comment on va
48:39les démanteler à la fin.
48:41Et les réparer ?
48:43Les réparer ou réutiliser
48:45les pièces dans des nouvelles machines.
48:47On essaie de standardiser
48:49les caisses
48:51qui entourent les machines
48:53pour les réutiliser dans des versions futures.
48:55Et vous incitez vos clients
48:57à rendre leurs vieux ordinateurs ?
48:59En attendant, en France,
49:01plus de 8 millions de téléphones
49:03ont été vendus par les opérateurs,
49:05dont seulement 4 % de reconditionnés.
49:07C'est même très marginal par rapport au marché français
49:09qui, hors opérateur, c'est 15 %.
49:11C'est fou ?
49:13C'est fou, mais le marché du reconditionné
49:15est très structuré.
49:17Donner confiance aussi aux consommateurs,
49:19montrer qu'il y a des garanties derrière.
49:21Il y a d'ailleurs des garanties légales.
49:23Mais les garanties de Fairphone sont
49:25beaucoup plus importantes que ceux des opérateurs aujourd'hui.
49:27Par rapport à la réparabilité, bien sûr.
49:29Là, ce qui est intéressant,
49:31c'est que le modèle,
49:33c'est de dire qu'on continue à produire des téléphones,
49:35mais on les produit différemment pour qu'ils durent
49:37le plus longtemps possible et que la casse
49:39ne soit pas un problème pour changer.
49:41Par contre, le souci, finalement,
49:43c'est que la plupart des téléphones
49:45qui sont changés fonctionnent
49:47encore très bien.
49:4980 % des personnes qui changent
49:51leur téléphone, ce n'est pas parce qu'il y a un problème matériel.
49:53En une semaine, j'ai reçu à peu près
49:55une dizaine d'incitations pour changer
49:57mon téléphone, qui va très bien.
49:59C'est un problème commercial. C'est difficile de réguler
50:01quelque chose qui est commercial.
50:03Par contre, l'obsolescence programmée
50:05est effectivement punie.
50:07Par contre, elle est très difficile à prouver.
50:09Aujourd'hui, il y a plus de problèmes
50:11d'obsolescence logicielle, d'obsolescence culturelle,
50:13que de vraie obsolescence programmée.
50:15Parce que finalement,
50:17le téléphone qu'on voit sur la photo là,
50:19derrière nous, il fonctionne très bien
50:21au bout de huit ans.
50:23C'est juste qu'on a envie de le changer
50:25parce qu'il y a un nouveau modèle qui est apparu.
50:27Au niveau des logiciels, peut-il y avoir des petites...
50:29Au bout de huit ans,
50:31toutes les mises à jour...
50:33Et même des appuis, d'ailleurs.
50:35On en parlait.
50:37Mon téléphone, qui a sept ans,
50:39va avoir toutes les mises à jour logicielles.
50:41Je me dis que peut-être que dans un an ou deux,
50:43j'aurai du mal à utiliser toutes mes applications.
50:45J'ai acheté mon téléphone
50:47sur une plateforme de revente en ligne.
50:49Il était d'occasion. Je l'ai acheté il y a trois ans.
50:51Déjà d'occasion. Je l'ai réparé dix fois.
50:53J'ai cassé l'écran.
50:55La batterie était morte.
50:57J'ai cassé le bouton. Il lui est tout arrivé.
50:59Mais in fine,
51:01il marche. Il est impeccable.
51:03Je ne dis pas qu'il n'y a pas des petits problèmes
51:05de temps en temps, que quelquefois la touche...
51:07Je m'énerve un peu dessus.
51:09Mais je me suis...
51:11C'est vraiment devenu une obsession.
51:13J'essaie de garder ce téléphone le plus longtemps possible.
51:15Vous avez travaillé à des scénarii d'impact
51:17pour précisément
51:19Aladème ?
51:21Oui, tout à fait. On a fait une étude avec l'ARCEP
51:23sur plusieurs points,
51:25notamment l'état des lieux.
51:27Les chiffres ont été cités plusieurs fois
51:29dans les reportages,
51:31qui nous ont permis de déterminer que 2,5%
51:33de l'empreinte carbone était liée au numérique,
51:35ce qu'on n'a pas entendu,
51:37c'est que 62 millions de tonnes
51:39de ressources par an étaient nécessaires
51:41pour utiliser le numérique en France.
51:4362 millions de tonnes qui sont liées
51:45à l'exploitation des ressources minières.
51:47Et effectivement, des perspectives
51:492030 et 2050
51:51pour voir comment ça pouvait évoluer
51:53selon des scénarios.
51:55Sans trop de surprises, un scénario très
51:57technophile, à l'échéance
51:592050, montre que
52:01on fait complètement exploser les émissions
52:03des effets de serre et la pression sur les ressources.
52:05À l'inverse,
52:07des scénarios dits de sobriété, désolé pour le terme,
52:09permettent
52:11de limiter,
52:13voire de réduire cet impact
52:15même par rapport à 2020.
52:17La sobriété passe par quoi ?
52:19Si on met tous les leviers,
52:21il y a ces questions
52:23de régulation,
52:25mais il y a déjà une forte sensibilisation
52:27qui permettrait de stabiliser
52:29le parc de terminaux.
52:31C'est de pouvoir augmenter
52:33la durée de vie des équipements, on l'a dit,
52:35par la réparation, par le réemploi.
52:37Il y a des fonds qui existent,
52:39notamment le fonds de réparation,
52:41qui a été mis en œuvre suite à la loi
52:43anti-gaspillage pour une économie circulaire.
52:45Qui, pour l'instant, est très peu utilisée.
52:47Et on espère que ça va monter,
52:49mais en tout cas, c'est des outils
52:51qui sont mis en place
52:53qui vont dans ce sens.
52:55C'est aussi l'éco-conception,
52:57sur l'ensemble des briques, que ce soit
52:59la centre, réseau,
53:01pour diminuer l'impact unitaire
53:03et donc augmenter l'efficacité.
53:05Et puis, encore une fois,
53:07j'y reviens, c'est encourager
53:09la sobriété dans les usages,
53:11qui passent par cette éducation,
53:13qui passent aussi par des changements
53:15de modèle économique, qui aujourd'hui
53:17sont tous basés quasiment sur des volumes
53:19de ventes importants, et donc réussir
53:21à changer un peu ce paradigme
53:23et d'aller sur quelque chose
53:25qui soit plus proche de la fonctionnalité
53:27et de diminuer, in fine,
53:29le besoin de continuer
53:31à produire en masse.
53:33La France est plutôt en avance sur ces sujets-là.
53:35Les pays scandinaves sont assez en avance,
53:37notamment la Suède. L'Allemagne,
53:39en Allemagne, ils sont assez conscients,
53:41mais la France, je ne le dis pas parce que nous sommes ici,
53:43mais vraiment, est largement
53:45en avance par rapport à des pays comme aux Etats-Unis,
53:47par exemple, et c'est d'ailleurs assez étonnant
53:49qu'il y ait eu cette loi en 2021, la loi
53:51pour la réduction de l'empreinte environnementale
53:53du numérique, qui est la première loi au monde
53:55qui, globalement, s'attaque à ce sujet
53:57qu'on appelle la pollution numérique.
53:59Donc, on n'est pas parfait, mais comparativement
54:01à d'autres, il faut quand même inciter sur le fait
54:03que cette prise de conscience est plus
54:05forte chez nous. C'est peut-être pour ça qu'on est chez vous, d'ailleurs.
54:07Alors, en tout cas,
54:09oui, dites-moi. Juste un petit rajout, parce que sinon
54:11je vais l'oublier. À partir de 2024,
54:13c'est demain, un indice
54:15de durabilité, qui va avoir le jour aussi,
54:17qui va remplacer progressivement
54:19l'indice de réparabilité, vous connaissez déjà tous,
54:21et qui va justement prendre en compte
54:23les éléments sur la fiabilité
54:25des appareils, et donc encore
54:27mieux guider le consommateur
54:29si vraiment il doit acheter du neuf.
54:31Il faudra d'abord penser
54:33aux reconditionnés, bien sûr.
54:35Mais s'il veut acheter du neuf, cet indice de durabilité
54:37donnera aussi un bon conseil.
54:39Alors, on ne le répétera en tout cas
54:41jamais assez. Le passé est un bon indicateur
54:43de l'avenir, comme chaque mois. Charlotte Eppal
54:45est allée fouiller dans les archives de l'INA
54:47et nous a exhumé ceci, hier encore.
54:49C'est notre coup d'œil dans le rétro, et c'est
54:51maintenant.
54:59Je crois que nous allons voir dans les années qui viennent
55:01d'une part avec le satellite
55:03de radiodiffusion directe, d'autre part
55:05avec le développement du câble,
55:07un changement total
55:09de la structure
55:11des organismes de radiodiffusion
55:13et un changement total
55:15dans la circulation des images
55:17et des sons.
55:21C'est déjà un fait,
55:23la télévision peut apporter
55:25l'enseignement programmé à domicile.
55:31Demain, elle offrira
55:33sur un écran de taille illimitée
55:35des programmes choisis à la carte.
55:41Même seule chez soi,
55:43on pourra préférer les jeux de société
55:45aux jeux de patience,
55:47en prenant comme partenaire soit un ami lointain,
55:49soit un ordinateur.
55:53La télévision sera le super catalogue
55:55des ventes par correspondance.
55:57Mieux encore,
55:59le simple geste d'un doigt sur un bouton
56:01fera connaître le choix de la cliente
56:03et tiendra lieu de commande.
56:05Journaux, lettres, télégrammes,
56:07contraventions apparaîtront ainsi
56:09sans retard.
56:11Les textes pourront
56:13à volonté être reproduits sur papier
56:15pour être consultés et conservés.
56:19En fait, on peut se demander
56:21si le mot télévision, et bien celui qui correspond
56:23à cette circulation extraordinaire,
56:25nouvelle, libre,
56:27des images et des sons
56:29que l'on peut envisager pour l'avenir.
56:31Au fond,
56:33la télévision,
56:35c'est la télévision
56:37de l'avenir.
56:39La télévision,
56:41c'est la télévision
56:43de l'avenir.
56:45La télévision,
56:47c'est la télévision
56:49que l'on peut envisager pour l'avenir.
56:51Au fond, on ne trouve pas de mot.
56:53Audiovisuel, matériel audiovisuel
56:55ne marche pas.
56:57J'attends que des professionnels de la langue
56:59trouvent un mot.
57:01Mais à mon avis, c'est ce mot nouveau
57:03qui définira très bien
57:05les possibilités extraordinaires
57:07de circulation des images et des sons.
57:09On le connaît ce mot nouveau.
57:11C'est une pitié, c'est visionnaire quand même.
57:13C'est surprenant.
57:15Une autre enquête, Guillaume Pitron.
57:17L'enfer du numérique voyage au bout d'un like
57:19aux éditions des liens qui libèrent.
57:21C'est très fouillé, documenté
57:23et pour le moins glaçant.
57:25L'archipel des GAFA manifeste
57:27pour un numérique responsable de Vincent Courboulet
57:29chez Actes Sud.
57:31Dans la collection Je passe à l'acte,
57:33toujours chez Actes Sud, tendre vers
57:35la sobriété numérique.
57:37Et puis vous pouvez lire Inès Léonard du ZI.
57:39C'est très pédago.
57:41Réparer le futur
57:43du numérique à l'écologie
57:45aux éditions de l'Observatoire.
57:47Vous savez ce qu'il vous reste à faire.
57:49S'il est difficile de remettre le génie numérique
57:51dans sa bouteille, rien ne nous empêche
57:53d'utiliser ces outils de façon plus responsable.
57:55On se retrouve le mois prochain autour d'une autre thématique
57:57qui nous concerne tous, la voiture.
57:59D'ici là, soyez heureux.
58:13Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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