• il y a 4 mois
Pour beaucoup, le nom d'Anouk Aimée évoque l'amoureuse endeuillée du film "Un homme et une femme", de Claude Lelouch. D'autres encore revoient Lola et sa silhouette à collant ajouré dans le film de Jacques Demy, ou encore, l'évoquent, nocturne et provocante, dans le rôle de l'aristocrate libertine de la "Dolce Vita", de Fellini. Malgré sa carrière internationale et ses récompenses, Anouk Aimée avait su préserver son intimité et sa vie privée. Elle était discrète, secrète et ses confidences étaient rares. Dans ce film, la comédienne revenait sur les lieux de sa vie, comme l'arrondissement parisien où elle vivait petite fille sous l'Occupation, la bohême Saint-Germain-des-Prés, ou les planches de Deauville, en compagnie de Claude Lelouch.

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Transcription
00:00Une silhouette, une démarche assurée et cadencée, des gestes incomparables, c'est à ça que l'on pense lorsqu'on évoque le nom d'Anouk Aimé.
00:09D'un film à l'autre, elle nous donne l'impression du mystère et du familier, du proche et du distant, du rassurant et de l'enflammé.
00:18Elle dit qu'elle n'a rien décidé, pourtant au gré de ses coups de cœur et de la magie de ses rencontres,
00:23elle a traversé le cinéma et laissé son empreinte avec des films devenus cultes.
00:28Voyageuse clandestine, interprète talentueuse, elle est la femme secrète mais l'actrice lumineuse et triomphante aux récompenses multiples.
00:58Je n'ai rien décidé, c'est la vie qui a décidé pour moi.
01:02Le cinéma, on m'a demandé dans la rue, mais je n'avais jamais pensé que je voulais être danseuse classique.
01:07J'étais encore tellement jeune, je n'avais pas pensé à tout encore.
01:14C'est comme ça que ça s'est fait.
01:15On était rue du Colisée, on a été voir un film qui s'appelait « L'assurance sur la mort » avec Fred McMurray et Barbara Stanwyck, je me souviens de ça.
01:22On est sortis, il y a un monsieur qui a dit bonjour, il m'a dit « Vous voulez faire du cinéma ? »
01:27Je regardais ma mère, elle me dit « Tu veux ? »
01:31« Oui ! »
01:34« Adieu hein ? »
01:36« Bien sûr, on revient toujours mais on trouve jamais les mêmes. »
01:43« Au revoir les gars. »
01:47« Je serai encore ici moi. »
01:49« Mariée, mère de famille, tu ne me reconnaîtras même plus. »
01:56« Adieu fillette. »
02:10Mon père et ma mère étaient séparés et j'ai vécu qu'avec mes grands-parents et plus tard avec maman.
02:17Mon père était socialiste et quand j'avais 4-5 ans, il me sortait le dimanche, il me parlait de Léon Blum parce qu'il était très calé.
02:30Il me parlait toujours de ça. J'ai de très bons souvenirs de mon père mais comme ça.
02:34Je n'ai jamais eu de petit déjeuner avec mon père. Je n'ai eu que des déjeuners de temps en temps.
02:40Maman était un cas. Mon Dieu qu'elle soit bien là où elle est mais c'était un personnage.
02:46Ce n'était pas quelqu'un de facile mais pas seulement avec moi.
02:49Elle était à la fois tellement drôle mais une personnalité très forte.
03:02J'allais à l'école au Milton, je n'y suis jamais retournée.
03:05Peut-être que c'est tout changé mais je me souviens, c'était dans un coin comme ça.
03:10Je crois que c'est là. C'est là.
03:22C'est celle-là.
03:28C'était là.
03:36C'était là. Je suis...
03:41Je me souviens de ça.
03:46Parce que l'allemand il descendait de là. Je sortais et les filles elles ont dit à un allemand qui sortait là, qui venait.
03:56Un soldat allemand qui n'était pas un officier.
04:01Qui n'était pas un officier et elles ont été dire comme ça à lui là, elle est juive, elle est juive, elle est juive.
04:07Ils venaient de là. Je me souviens.
04:11Et il m'a prise par la main, je crois que je pleurais.
04:15Et puis il m'a demandé mon adresse et puis il m'a prise par la main et puis il m'a emmenée.
04:22Et je suis arrivée chez ma grand-mère.
04:27Et il a dit à ma grand-mère, je vous amène votre petite fille.
04:31Elle a eu le diabète à partir de ce jour-là parce qu'elle a eu tellement peur quand elle m'a vue comme ça à la main de l'allemand.
04:39Et il m'a raccompagnée.
04:42Mais je ne me souviens pas du tout ce qui s'est passé entre là et l'arrivée chez ma grand-mère.
04:48Je me souviens de ça.
04:52Et...
05:01...
05:17Quand j'étais petite, toute petite, j'allais à Barbesieux.
05:21Parce que j'avais un parrain et une marraine là.
05:25Parce qu'on m'a baptisée catholique parce qu'ils ont pensé que les ennuis commençaient à arriver en France.
05:33Les parents, les adultes pensaient que ça allait mal tourner.
05:38Et alors j'ai été baptisée à Barbesieux.
05:44Et puis je revenais quelquefois à Barbesieux.
05:46Je repartais, il ne fallait jamais rester longtemps au même endroit.
05:52Anoukémé, qui n'était jamais revenue sur les terres de son enfance en Charente, renoue avec cette époque pour une cérémonie en son honneur.
05:59Elle devient marraine du cinéma Le Club à Barbesieux.
06:04C'est très étrange que je sois revenue à Barbesieux comme ça.
06:08Car Barbesieux est un moment très important de ma vie.
06:14C'est un morceau de moi.
06:16Je me rends compte que j'ai appris plein de choses.
06:21J'ai appris l'amour des animaux, qui est une passion.
06:26La campagne, les premiers matchs de rugby que je voyais là-bas.
06:31C'est en bas là, avec mon parrain.
06:34Ça m'ennuyait beaucoup à l'époque.
06:36Parce que j'adore le rugby maintenant.
06:38Mais tout ce qui s'est passé ici, j'ai été heureuse à Barbesieux.
06:42Malgré tous les dangers qu'il y avait.
06:44Malgré l'occupation.
06:46J'ai été protégée.
06:48Et ça me réconforte.
06:49Je suis tombée dans un beau pays quand je suis venue ici.
06:53Merci.
07:01On est partie dans le train à Villars de Lens, dans l'Isère.
07:05On a mis trois jours.
07:07On s'est cachés.
07:09On s'est arrêtés pour se cacher dans des endroits.
07:12Après, on a rebougé.
07:14Il fallait toujours bouger.
07:16D'ailleurs, je déteste partir.
07:18C'est un déchirement.
07:19J'adore arriver.
07:20Je déteste partir.
07:21Je crois que ça vient de là aussi.
07:23Quand je quittais ma mère, c'était sanglot.
07:25Mais dès que j'arrivais chez mes grands-parents, j'étais très heureuse.
07:28Je requittais mes grands-parents.
07:30C'était le sanglot.
07:31Je repartais avec mon parrain et ma marraine.
07:33J'étais contente.
07:34Je requittais.
07:35Je repleurais.
07:36Je déteste partir.
07:40On était à Marseille.
07:44C'était un samedi.
07:46Maman n'était pas là.
07:48J'avais mon beau-père, le mari de maman que j'aimais beaucoup,
07:52qui me dit « Ne vas pas à l'école.
07:55Ta mère arrive.
07:56Comme ça, n'y vas pas. »
07:57Il devait y avoir le catéchisme, le matin et la gym.
08:00Le samedi matin, généralement, c'était toujours ça.
08:03Alors, évidemment, esprit de contradiction, je dis « Non, non, je vais aller à l'école. »
08:07« Mais non, pour juste ça, ta maman… »
08:09« Non, non, je vais aller à l'école. »
08:11Je suis allée à l'école.
08:13C'était le bombardement de Marseille.
08:15Ils ont bombardé notre appartement.
08:17C'est fou, non ?
08:19Je me souviens, j'étais recueillie par les frères Guérini.
08:23Ils avaient un restaurant.
08:25Je me souviens que j'étais m'asseoir là,
08:28parce que quand je suis rentrée de l'école, il n'y avait plus de maison.
08:31Il me trouvait maigre.
08:33Il me disait « Faut qu'elle mange de la viande. »
08:35Je me souviens de ça.
08:36Je ne sais pas si c'était mémé Guérini ou l'autre,
08:39mais ils étaient adorables.
08:53Et tout d'un coup, ils sont arrivés.
08:56C'est-à-dire, « ils », c'était les tanks.
08:59Je me souviens, il y avait des glaïeuls sur les tanks.
09:02C'est les soldats de chaque côté.
09:04Et ils marchaient, comme je m'en souviens et comme je les voyais,
09:07c'était des extraterrestres pour moi.
09:09Ils avaient quatre mètres de haut pour moi.
09:11Et c'était du slow motion.
09:14J'ai l'impression qu'ils marchaient tous calmes, comme ça.
09:18Et après, tout le monde s'embrassait.
09:21Il y avait des moments incroyables.
09:23Ils embrassaient tout le monde.
09:24Alors moi, j'ai embrassé un soldat.
09:25Je suis petite, mais c'est pas grave.
09:27Et voilà, c'était ça, la libération.
09:30Enfin, comme j'ai connu.
09:32Le tournage de « La fleur de l'âge », aussi appelé « L'île des enfants perdus »,
09:35film inachevé et maudit de Marcel Carnet,
09:38Anouk, qui n'avait qu'un prénom, rencontre Jacques Prévert.
09:41Il la souhaite à nouveau pour les amants de Véronne, dont il est le scénariste.
09:45Est-ce que tu as aimé d'autres filles avant moi, Julio ?
09:48Non, mais j'ai fait semblant.
09:51Enfin, je leur ai dit, quoi.
09:53Pourquoi ?
09:54Pour leur faire plaisir.
09:56À moi aussi, tu dis ça pour me faire plaisir ?
09:59Toi, c'est pas pareil.
10:09Est-ce que vous savez pourquoi elle s'appelle ?
10:11Qui lui a donné ce nom de aimée ?
10:13Ah non, pas du tout.
10:15Alors, je vais vous donner une leçon.
10:18C'est Jacques Prévert.
10:20C'est Jacques Prévert.
10:22Parce que quand j'ai commencé, j'étais très, très, très jeune.
10:25J'ai commencé à faire du cinéma à 13 ans.
10:27Quand j'ai fait...
10:29L'île des enfants perdus, de Marcel Carnet et de Jacques Prévert.
10:33J'avais gardé le premier nom, Anouk, du premier film que j'avais fait,
10:37qui était La maison sous la mer.
10:39Et on me disait, mais enfin, tu vas pas à 40 ans,
10:41ce qui me paraissait très vieux, à cette époque-là.
10:43J'appelais Anouk tout court.
10:45Je trouvais qu'il y avait Arletty, pourquoi pas, mais enfin...
10:47Et ils ont cherché, Prévert a dit, on va t'appeler Aimée.
10:51J'ai rien dit, c'était tellement merveilleux de Prévert.
10:54Ça aurait été n'importe quoi.
10:56Et voilà, j'ai gardé Aimée.
10:58Prévert a des raisons de m'appeler comme ça,
11:00mais c'est important d'être aimée.
11:02Moi, je sais que quand j'étais plus jeune,
11:06j'aimais être aimée par toute l'équipe du film.
11:10C'est vrai.
11:11S'il y avait quelqu'un qui ne m'aimait pas sur le plateau,
11:13j'étais pas bien.
11:15Ça, c'est vrai, je l'avoue.
11:17Je peux l'avouer aujourd'hui, maintenant, je suis plus...
11:19Mais j'avais besoin que les gens m'aiment.
11:26C'est vrai.
11:51Nico Papatakis, que j'avais rencontré dans le midi,
11:54était d'une grande beauté.
11:56Vraiment, c'est certainement l'homme le plus beau
11:59que j'ai rencontré avec Marlon Brando,
12:01qui était un grand ami.
12:03Et c'est lui qui m'a ouvert les portes de Saint-Germain-des-Prés.
12:07Parce que Nico voulait m'impressionner
12:12et que j'aille dîner avec lui.
12:14Mais je disais non, non, je ne dîne pas.
12:16J'étais très sauvage.
12:17J'étais très jeune aussi, je ne sortais pas.
12:20Alors un jour, il me dit,
12:22je vais vous présenter Jean Genet.
12:24Je dois dire qu'à l'époque, je ne savais pas qui était Jean Genet.
12:27J'ai rencontré Jean Genet, je me souviens très bien la première fois.
12:30Puis après, deux, trois jours après,
12:33Nico m'a dit, écoutez, Jacques Prévert voudrait vous voir.
12:37On va aller le voir chez Picasso.
12:39Je ris parce que la chance que j'ai eue de rencontrer tous ces gens.
12:52Quand on s'est mariés avec Nico,
12:55c'est Jean qui était témoin de Nico.
12:57Puis quand j'attendais ma fille, il était là en vacances avec nous.
13:01Et c'est certainement une des personnes les plus intelligentes que j'ai rencontrées,
13:05qui m'est beaucoup impressionnée.
13:08Même quand nous étions séparés, Nico et moi,
13:13on est toujours restés amis, Jean Genet et moi.
13:17Et puis un jour, Jean prend le bras.
13:19On s'est toujours vouvoyés avec Jean.
13:21Il me prenait le bras comme ça, très serré.
13:23C'était tout à fait Jean.
13:24Et un jour, il me dit,
13:27il me dit, vous savez pourquoi, à nous,
13:29que j'aime marcher comme ça avec vous dans la rue ?
13:31Et je regarde, je dis, non, Jean,
13:34parce que les hommes vous regardent et moi, j'ai choisi.
13:38C'était Jean tout pur.
13:52Alexandre Astruc faisait partie de Saint-Germain-des-Prés.
13:56Et moi, j'étais mariée avec Nico.
13:58Ils se connaissaient.
13:59Et c'est Nico qui m'a dit, il y a ce garçon qui veut te rencontrer.
14:04Et donc, j'ai rencontré Astruc, qui voulait faire ce…
14:07C'était un moyen métrage qui s'appelait Le Rideau aux crânes moisies.
14:11Une nouvelle d'après Barbé Dorémy.
14:14Et c'est comme ça que je l'ai rencontrée.
14:16Et ça, c'est une rencontre.
14:46Cependant, nous avions besoin de nos mains pour manger.
15:16Mais à peine sa main eut-elle quitté la mienne,
15:19que son pied vint s'appuyer sur le mien avec autorité
15:22et y rester tout le long que dura ce dîner.
15:27Je fais très mal les efforts.
15:29Quand je fais des efforts, c'est pas bien.
15:31Et alors, à ce moment-là, je cherchais pas du tout à faire carrière ou quoi que ce soit.
15:35Je laissais les choses aller.
15:37C'est un tort. C'est pas bien.
15:39Mais c'est toujours venu à moi d'une façon formidable.
15:43Tu sais, une fois que Jacques Becker me propose de faire Jeanne et Buterne avec Gérard Philippe à l'époque,
15:49tu pouvais pas souhaiter mieux.
16:03La Rose Rouge, c'était l'endroit où tout le monde venait.
16:07Juliette Gréco est venue chanter là.
16:10Là, il y avait des spectacles de Raymond Queneau,
16:15de Cocteau, de Jean-Paul Sartre, Simone Mauvoir.
16:21Tout le monde se connaissait.
16:24Avec une certaine tenue, une certaine...
16:27Il y avait une folie, mais il y avait une certaine classe.
16:30Avant de choisir Michel Legrand, c'est Quincy Jones qui était prévu par Jacques Demy pour la musique du film Lola.
17:00C'était une grande fête incroyable.
17:03Avec la nourriture, le vin, la fête.
17:06Jean-Germain Dupré avait dit que c'était son objectif.
17:09Dans la Rive Gauche.
17:12Tout le jour et toute la nuit.
17:14Et j'ai eu le meilleur moment.
17:16J'ai joué, j'ai chanté.
17:18Comme il l'a dit, j'ai oublié que c'était la première fois que j'ai reçu le respect
17:22qui est important pour toi en tant que musicien.
17:25C'était fantastique.
17:27C'est la première fois que tu as ressenti ça.
17:29Oui, le respect en tant qu'être humain.
17:43Je te donne ça pour que tu te souviennes.
17:46Quand on s'est rencontrés.
17:48Tu sais quand on s'est rencontrés ?
17:49Je me souviens maintenant.
17:51J'allais faire le film Lola.
17:54Oh mon Dieu.
17:56Oui.
17:57Et Nantes.
17:58Je suis allé à Nantes.
17:59Oui.
18:00Et tu as chanté une chanson qui n'avait pas de mélodie.
18:02Non, je sais.
18:03Je suis revenu.
18:05Il y avait 33 personnes dans mon groupe.
18:07Et ils sont partis avec l'argent.
18:09Et j'ai dû leur appeler.
18:10Je voulais le faire tellement mal.
18:12Je me souviens.
18:13Je lui ai dit qu'il y avait un autre homme qui étudiait avec moi,
18:16avec Nari Boulanger.
18:17Et qu'il pouvait faire le travail.
18:19C'était Michel Legrand.
18:27C'est moi.
18:28C'est Lola.
18:29Celle qui rit à tout propos.
18:31Celle qui dit l'amour c'est beau.
18:33Celle qui plaît sans plaisanter.
18:35Reçois sans les dédommager.
18:36Les hommages désommagés.
18:37Les bravos des braves gars.
18:38Allez oura.
18:39Allez viens avec moi.
18:40Celle qui rit de tout cela.
18:42Qui veut plaire sans tenir là.
18:44C'est moi.
18:45C'est Lola.
18:46Jacques Demy, il me voulait pour ce rôle.
18:49On lui avait proposé Sofia Loren qui était une superbe femme.
18:54Et mon personnage, j'avais toujours fait des ingénues.
18:57Sauf la Dolce Vita.
18:58Avant, c'était toujours des filles amoureuses, pures.
19:02Et il me voyait dans ce rôle.
19:05Et il a tout fait pour m'avoir.
19:07Il s'est battu pour m'avoir.
19:08Parce que les producteurs ne me voulaient pas.
19:10C'est un rôle que tu as rarement dans toute une carrière.
19:13C'est un rôle sublime.
19:15C'est un personnage qui est très vulnérable.
19:17Si vous avez aimé Lola, c'est une partie peut-être.
19:20Parce que Lola a ce côté un peu cassé.
19:23Mais moi, j'aime beaucoup chez les gens.
19:25Surtout chez les femmes.
19:27Quand une femme est un peu cassée,
19:29ou il y a quelque chose qui n'est pas sûr,
19:31je trouve que ça a beaucoup de charme.
19:33Et c'est Lola.
19:34Vous aimez Lola plus que moi, je viens de remarquer.
19:37Je trouve que vous avez énormément gagné depuis.
19:39Merci.
19:48J'étais assez sauvage.
19:50J'écoutais, j'apprenais.
19:53J'étais comme un animal.
19:55Je ne disais rien.
20:01C'est beaucoup plus tard que j'ai vraiment aimé être actrice.
20:04C'est quand j'ai rencontré Fellini.
20:06Tout d'un coup, je me suis trouvée devant quelqu'un,
20:09lui, Marcello,
20:11et même les techniciens italiens.
20:16On fait ce métier sérieusement,
20:19mais on ne se prend pas au sérieux.
20:21Et je trouvais ça formidable.
20:23Et là, j'ai dit, je crois que j'aimerais être actrice.
20:30Qu'est-ce que je pense de Fellini ?
20:32Je l'adore.
20:34De toute manière, je l'adore comme régistre,
20:36je l'adore comme homme.
20:38Un homme tant intelligent,
20:40tant bon, tant généreux.
20:43C'est comme si on disait,
20:45« Optique grande. »
20:47Tu vois ? Il ne me regarde pas comme ça.
21:13Dès que j'ai vu les yeux de Federico,
21:15j'étais séduite.
21:17Il m'a regardée comme ça, c'était fini.
21:23J'espérais que j'étais son actrice.
21:27Il a été merveilleux.
21:28Il m'a expliqué le rôle.
21:30Il m'a dit, « Vous aimez ? »
21:31J'ai dit, « Oui, vous le ferez. »
21:33Je pensais intérieurement,
21:34il y a 200 filles qui attendent en France,
21:36200 en Angleterre, 200 je ne sais pas où.
21:38Ce ne sera jamais moi, mais ce n'est pas grave.
21:40La rencontre était tellement formidable
21:42que rien que ça, c'était formidable.
21:44Et puis, il est parti.
21:46Le temps passait.
21:47Je sais qu'il faisait des essais,
21:49mais à tout le monde, en Angleterre, en Italie.
21:51Il est allé en Amérique, partout.
21:53Et un jour, à l'époque, il y avait des télégrammes.
21:56On reçoit un télégramme.
21:58Je n'ai pas fait d'essai.
22:00Elle a dit, « Elle fait le rôle, elle vient à Rome. »
22:10Il ne m'a pas fait faire d'essai.
22:12Je suis arrivée sur le plateau
22:14et je suis rentrée dans le monde de Fellini.
22:18Je n'en suis jamais ressortie.
22:28Arrive le jour du tournage.
22:30Via Veneto.
22:32Je conduisais l'immense Cadillac.
22:34Et alors, c'était,
22:36« Vali, non far scrid »
22:39Je ne comprends rien.
22:41« Va à droite, va à gauche, fais ceci. »
22:43À la fin de la soirée,
22:45parce qu'on tournait le soir,
22:47je ne comprends pas ce qu'il me dit.
23:09Je ne comprends rien.
23:39Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?
23:41On tourne, on reste.
24:10Je ne sais pas ce qu'il a fait,
24:12mais je comprenais tout ce qu'il me disait.
24:14Vraiment, j'étais rentrée dans son monde à lui.
24:17Il a fait sortir des choses de moi que j'ignorais.
24:20Je dirais ça.
24:22C'est que j'ai osé.
24:24J'étais libre.
24:26Je n'osais pas avant.
24:28Et là, j'osais.
24:30C'est un génie.
24:32Il a vu des choses en moi que j'ignorais.
24:34Il m'habillait en noir.
24:36Il voulait que je me déplace.
24:38À un moment, j'enlève mes chaussures dans la voiture.
24:41Il me dit, tu marches pieds nus.
24:43Évidemment, on marche d'une autre façon.
24:45Tu marches tranquillement.
24:47Je ne sais pas.
24:49Je te dis, il m'a...
24:51Oui.
24:52Pygmalion.
24:54Non, mais il a vu des choses que j'ignorais
24:57et qu'il a sorties de moi.
25:09Marcel.
25:11Marcel, tu m'entends ?
25:14Tu ne m'as jamais sentie si proche.
25:18Où es-tu ?
25:20Tu m'entends ?
25:22Oui.
25:23D'où parles-tu ?
25:25De loin.
25:26De très loin.
25:28Si tu étais silence, c'est comme si tu n'existais plus.
25:32De loin.
25:33Si tu étais silence, c'est comme si tu n'existais plus.
25:41Madalena.
25:44Madalena.
25:48Madalena.
25:51Oui, je suis toujours là.
25:56Marcel.
25:58Tu me marierais.
26:02Marcelo, c'était le double de Federico,
26:05tout en étant très différent de Federico.
26:08Marcelo était très paresseux,
26:10alors il était heureux de pouvoir faire
26:13juste ce que lui demandait Federico.
26:16Ça faisait partie de son charme à Marcelo,
26:19d'être un peu comme ça, d'être poussé comme ça.
26:22Il aimait ça.
26:23Jusqu'à la fin, je crois que j'étais comme une soeur pour Marcelo.
26:27D'ailleurs, j'ai connu
26:29les femmes importantes de sa vie,
26:31et je crois que j'étais comme une soeur.
26:50Après la Dolce Vita,
26:52Fellini voulait faire 8,5,
26:54et il voulait Marcelo et moi.
26:57On a dit, vous ne pouvez pas reprendre le couple,
27:00même s'il y avait d'autres femmes dans la Dolce Vita.
27:03C'était un personnage très femme fatale,
27:06très sexy dans la Dolce Vita.
27:08Non, ce n'est pas le personnage.
27:10Oui, c'est le personnage.
27:12Un jour, il m'appelait, et il ne savait pas.
27:15Il voulait, mais il disait,
27:17non, il ne faut pas qu'elle soit maquillée.
27:20Bref, Pierro et Gherardi,
27:22qui faisaient les costumes et les décors
27:25presque de Fédéric en Fellini,
27:28il me dit, tu sais,
27:30propose-lui de faire un essai.
27:33Alors, j'ai dit, écoute, je te fais un essai.
27:36Alors, Fellini me dit, mais non,
27:38je ne peux pas te demander un essai.
27:40Je dis, je fais un essai,
27:42mais je sais ce que tu fais, je sais comment tu joues.
27:45Et le lendemain, je suis arrivée sur le plateau
27:48avec la perruque, habillée comme je devais l'être
27:51dans 8,5, et Fellini a dit,
27:53c'est ce que je fais.
28:23C'est ici.
28:54C'est Jean-Louis Trintignant qui m'a présenté Claude.
28:57Je vivais en Italie à l'époque.
28:59Il m'a dit, je vais te présenter un jeune metteur en scène
29:02qui voudrait faire un film avec nous, nous deux.
29:05Alors, Claude a raconté son film.
29:08J'ai senti que c'était...
29:11Il y avait un...
29:13Il y avait un...
29:15Il y avait un...
29:17Il y avait un...
29:19Il y avait un...
29:22C'est une question de rencontre.
29:24Tu rencontres des gens avec qui il se passe quelque chose,
29:27avec d'autres, ça se passe pas.
29:46Son nom est Claude Lelouch.
29:51En 1966, son premier film à apparaître aux Etats-Unis
29:54a gagné quatre nominations et deux awards d'Académie.
30:00Le film était Un homme et une femme.
30:22L'histoire d'amour se passe entre Paris et Deauville sur la route
30:25puisque c'est l'histoire d'un homme et d'une femme
30:28qui se rencontrent à Deauville
30:30en raccompagnant le soir leurs enfants
30:32qui se trouvent dans un pensionnat.
30:34Ils ne se connaissent absolument pas et c'est vrai qu'ils se rencontrent.
30:37Allô? Allô, mademoiselle?
30:39Je voudrais envoyer un télégramme à Montécarles.
30:41Oui, merci.
30:44Allô? Allô?
30:46Oui, à Montécarles.
30:48Monsieur Jean-Louis Duroc.
30:50Duroc. Avec un C.
30:54Oui, justement, mademoiselle, je connais pas l'adresse.
30:57Bah oui, excusez-moi, mais...
30:59Non, écoutez, c'est facile, c'est un coureur.
31:01Il fait le rallye de Montécarles.
31:03Il fait le rallye de Montécarles.
31:05Il fait le rallye de Montécarles.
31:07Il fait le rallye de Montécarles.
31:09Il fait le rallye de Montécarles.
31:11Il fait le rallye de Montécarles.
31:14Oui, vous seriez gentille.
31:18Oui, c'est ça.
31:19Si, la permanence, c'est très bien, oui.
31:23Bon, alors...
31:26Bravo.
31:28Je vous ai vu à la télé, Anne.
31:31Non, non, attendez, attendez.
31:34Bravo.
31:35Je vous aime, Anne.
31:39Oui.
31:41Oui, c'est ça, oui.
31:43Montmartre, 1540.
31:45Mademoiselle, dans combien de temps ça arrive ?
31:50Merci.
31:59Alors, nous partons en voiture dans la moustangue,
32:02parce qu'on n'était pas riches.
32:04Claude conduit, Jean-Louis est derrière.
32:07Et moi, j'ai peur en voiture, toujours, n'est-ce pas ?
32:10Et alors, il va, à mon avis, vite.
32:12A quel âge avais-tu ? 27 ans, hein ?
32:14J'avais 26 ans et demi, 27 ans.
32:16Alors, il va tout à l'heure, je lui dis...
32:18Excusez-moi, j'ai peur en voiture.
32:20Vous voulez aller plus doucement ?
32:22On va pas vite, voyons.
32:23Et l'autre derrière, qui fait des courses,
32:25qui dit, mais non, on va pas vite.
32:27Enfin, je les ai tous les deux contre moi.
32:29Alors, on arrive, on déjeune, tout est sympathique,
32:31mais il y a une mer épouvantable.
32:33Et je lui dis, oh, heureusement, on ne saura pas.
32:36Comme ça, la scène du bateau, si la mer est mauvaise.
32:39Il me dit, si, si.
32:41Moi, j'ai besoin de...
32:43J'ai besoin que ça bouge, que ça...
32:45Je dis, oui, mais on sera pas loin du bord.
32:47Ah non, non, non, parce que...
32:49Moi, j'ai besoin, il faut que la caméra tourne.
32:51Ah bon ? Mais on aura un bateau à côté.
32:53Ah non, non, non, c'est pas mon...
32:55Non, non, c'est pas ma façon de tourner, non.
32:57Je suis désolée, c'est pas mon cinéma.
32:59Moi, j'ai...
33:00Écoutez, alors, si c'est pas votre cinéma,
33:02moi, je m'en vais.
33:03Je suis allé rentrer à l'hôtel, fâché.
33:05Je suis allé parler avec Jean-Louis.
33:07Je lui ai dit, qu'est-ce que je fais avec cette emmerdeuse ?
33:09Parce que...
33:11Regarde-moi dans les yeux, là, quand je te parle.
33:13Qui c'est, la grande emmerdeuse du cinéma français ?
33:15Après toi, c'est moi.
33:17Voilà.
33:19Et donc, je vais la voir dans sa chambre.
33:21Et je lui dis, je vais vous raconter l'histoire.
33:23Alors, elle s'allonge sur le lit.
33:25Splendide, merveilleuse.
33:27Tu vois ? Et elle me dit, je vous écoute.
33:29Et là, écoutez-moi bien.
33:31Oui, c'est vrai.
33:33C'est vrai ou pas vrai ?
33:35Je peux pas dire c'est vrai.
33:37Et je commence à lui raconter l'histoire qu'elle va tourner.
33:39Et au bout de 10 minutes, elle s'endort.
33:41C'est vrai.
33:43Je peux pas dire le contraire.
33:47J'étais fatiguée.
33:49Tu racontes le film.
33:51Et elle s'endort.
33:53J'ai honte, mais c'est vrai.
33:57Alors, je sors de la chambre sur la pointe des pieds.
33:59Et je dis,
34:01il faut que je remplace cette emmerdeuse,
34:03très très vite.
34:05Et donc, entre 9h du soir
34:07et 11h du soir,
34:09j'ai appelé toutes les comédiennes
34:11qui étaient à Paris.
34:13Toutes.
34:15J'ai même appelé Annie Girardot,
34:17qui était en boîte de nuit.
34:19Tu peux la remercier.
34:21Elle était en boîte de nuit.
34:23Et donc, j'appelle à nous pour lui dire
34:25qu'on va pas faire le film.
34:27Et là, elle me dit, écoutez,
34:29si on faisait un essai demain matin,
34:31on tourne une scène,
34:33puis on voit si ça va pas.
34:35Et puis, le lendemain matin,
34:37ça a été magique.
35:01C'est vrai qu'il y a eu une méfiance au départ.
35:03C'est vrai.
35:05Elle était une star à l'époque.
35:07Moi, j'étais pas du tout connue.
35:09Elle sortait d'un film de Fellini.
35:11Elle arrive.
35:13En plus, elle voyait...
35:15Il y avait pas d'équipe technique.
35:17Il y avait 10 personnes en tout et pour tout
35:19pour faire le film.
35:21Elle voyait pas de projecteur.
35:23Elle voyait pas...
35:25Il y avait pas d'équipe technique.
35:27Il y avait pas d'équipe technique.
35:29Elle voyait pas...
35:31Il n'y avait pas les accessoires
35:33habituels du cinéma,
35:35puisqu'on a tourné ce film
35:37avec la caméra sur l'épaule
35:39et des moyens du bord.
35:41Elle est quand même tombée amoureuse
35:43de Pierre Barraud, entre-temps.
35:45Elle m'a trompé avec Pierre Barraud.
35:47Moi, j'aurais bien fait la cour.
35:49Mais je me suis retourné, puis hop...
35:51Elle a été témoin de mon mariage.
35:53J'ai été témoin au mariage.
35:59Alors, on a obtenu l'Oscar
36:01du meilleur film étranger
36:03et l'Oscar du meilleur scénario.
36:05Et puis, on a eu le Golden Globe.
36:07Golden Globe, La Palme d'Or.
36:13Le succès d'un homme et une femme
36:15est phénoménal.
36:17C'est la première fois
36:19qu'un homme et une femme
36:21se rencontrent.
36:23C'est la première fois
36:25qu'un homme et une femme
36:27se rencontrent.
36:29C'est la première fois
36:31qu'un homme et une femme
36:33se rencontrent.
36:35Le succès d'un homme et une femme
36:37est phénoménal.
36:39Il l'étourdit toute l'équipe.
36:41Annoké Mê éprouve le besoin
36:43de ralentir,
36:45malgré les rôles prestigieux
36:47qui lui sont proposés.
36:49C'est vrai qu'on avait des propositions
36:51de partout.
36:53Surtout, j'avais rencontré
36:55d'erreur. C'est idiot de ma part. Tu sais, j'avais tellement de propositions que je ne savais plus,
36:59je perdais la tête là. Je disais, attends, attends, je vais faire n'importe quoi. J'avais peur de
37:02rentrer dans un système qui m'échappait. Je ne pouvais plus diriger les choses. J'ai eu peur,
37:09je dis, je vais me perdre. C'est pour ça que j'ai refusé ce film-là. Finalement,
37:15elle préfère tourner un film intimiste et fantastique, Un soir, un train d'André Delvaux
37:19avec Yves Montand. Quelques temps après, Anne Aukémé s'unit à Albert Finet, immense acteur
37:32britannique, héros du film Tom Jones, de Tony Richardson. Le couple s'installe à Londres.
37:37Moi, j'ai toujours travaillé, j'ai commencé à travailler, j'avais 13-14 ans. Je ne me suis
37:43jamais arrêtée. Je rencontre Albert Finet. Tout d'un coup, je m'étais mariée. Je me dis,
37:49bon, je vais vivre une vie de femme. Je vais faire le rôle d'une femme mariée. Et voilà,
38:00je me suis arrêtée de travailler. C'est là où on m'a proposé le conformiste. C'est la raison
38:05pour laquelle j'ai refusé. Parce que d'ici, je commence à accepter. Je repars, je continue. Je
38:13voulais m'arrêter un moment. Au bout de sept ans, le couple se sépare. Anouk a très envie de
38:18travailler. Claude Lelouch, qui veut la faire tourner à nouveau, vient la chercher en Angleterre.
38:22Elle revient à Paris. Je l'appelle et j'ai eu vraiment le sentiment que je parlais à quelqu'un
38:30pour la première fois. Il fallait qu'à nouveau, je puisse la séduire, la reconquérir, l'enthousiasmer.
38:37Je me suis dit, on reprend tout à zéro. Et à la fin du repas, j'avais quand même des clés,
38:45des connexions. J'ai réussi à la convaincre. Je lui ai expliqué, je pense qu'il y a deux femmes
38:51extraordinaires dans le cinéma français, qui sont à mon avis les modèles de la France.
38:57J'avais vraiment le sentiment et je lui ai dit, ça m'amuserait que ces deux femmes qui symbolisent
39:02la France soient dans le même film. Anouk Aimé, c'est un événement, ce film. Vous revenez à
39:08l'écran après quelques années d'absence. Je voudrais savoir quelle impression ça vous fait
39:12de retrouver tous ceux qui vous ont mitraillé pendant plusieurs semaines, il y a dix ans, à
39:16l'occasion d'un homme et une femme. Vous êtes maintenant à la une de tous les magazines et
39:19puis on reparle de vous comme il y a dix ans. Quelle impression ça vous fait, tout ça, de voir
39:22tout ce monde qui s'agite autour de vous depuis quinze jours ? C'est très agréable. C'est agréable,
39:27oui. C'est agréable, c'est bien, c'est très positif comme sensation. C'est vrai que Claude m'a fait
39:34comprendre qu'en fin de compte, j'étais une actrice, j'avais besoin. Je ne pouvais pas faire
39:40que la cuisine et j'avais beaucoup de plaisir à rester chez moi puisque je ne l'avais jamais fait.
39:45Mais il m'a fait comprendre que j'aimais le cinéma. Elie Chouraki, rencontré sur le tournage de
39:52Si c'était à refaire, devient son compagnon. Ensemble, ils coproduisent Mon premier amour,
39:58qu'Anouk interprète avec Richard Berry, moi-même. Tu t'intéresses aux états d'âme de Fabienne,
40:05ou c'est pour m'emmerder ? Richard, je t'ai expliqué déjà que je n'étais pas ton petit
40:09copain. Non, pardonne-moi maman, mais tu sais, je suis un peu... Mais toi aussi, on ne peut rien dire
40:16sans que ça t'énerve. En plus, on s'est un peu disputé, elle appelait pour s'excuser. Ce rapport
40:23mère-fils, c'est un rapport pour vous tout à fait plausible ? Vous avez l'impression que ça peut
40:28arriver ? Ah bah écoutez, ah oui, oui, mais dans ce film particulièrement, je veux dire, j'aurais
40:32peut-être pas pensé que ça aurait été possible dans un autre contexte, mais dans Mon premier amour,
40:35je veux dire, c'est évident. Oui, il y a des rapports entre cette mère et ce fils qui doivent
40:42se passer très très souvent dans la vie. Anouk Aimé, quand je vous ai eu au téléphone il y a deux jours,
40:48pour vous donner ce rendez-vous, vous m'avez dit, quelle aventure, je veux dire, tourner un film,
40:52le produire, le monter, c'est vraiment quelque chose d'épuisant, car l'aventure, le travail,
40:59ne s'arrête pas une fois le dernier plan. Non, ça je dois dire, c'est la première fois que ça m'arrive,
41:04mais enfin c'est Téli et moi qui avons, nous avons dû avoir une production pour pouvoir produire le
41:14film. Elle est vraiment à la base de tout, c'est-à-dire que c'est elle qui avait lu le livre
41:17il y a trois ans, je crois, Jacques Hanin lui avait amené, c'était à une époque où elle ne voulait
41:22pas trop faire de cinéma, et puis elle est revenue en France pour faire Cité à refaire, et elle m'a
41:27fait lire le livre, et puis bon, tout a démarré comme ça. L'Italie s'offre à nouveau à Anouk,
41:33le réalisateur des Points dans les poches et de La marche triomphale, Marco Bellocchio,
41:37lui propose l'un des deux rôles principaux dans Le saut dans le vide. Le saut dans le vide de Marco
41:44Bellocchio est un film très très important pour moi, j'ai adoré faire ce film, c'était très nouveau
41:50pour moi, Marco est quelqu'un de très rare, on a vraiment fait ce film qui n'était pas facile à
41:58faire, et quand même il s'est passé une chose, Michel Piccoli a eu le prix d'interprétation à
42:05Cannes, j'ai eu le prix d'interprétation à Cannes, c'est jamais arrivé, pas que ça fait
42:10beaucoup d'argent, mais c'était quand même très, c'est un grand compliment.
42:26Moi je pensais que je faisais couple avec Michel Piccoli, alors je croyais que je n'allais pas
42:32avoir à parler, et je vous remercie, c'est un peu banal ce que je dis, mais jusqu'à présent
42:38j'ai jamais eu de la pâle, j'ai jamais eu à parler alors.
42:47Ma relation avec Michel Piccoli était formidable, elle l'est toujours, mais on s'était rencontré au
42:53seul cours d'art et de diction où j'avais été chez Boer Theron, il était là lui, les deux stars
43:02c'était lui et Maria Cazaresse, je me souviens, et puis Michel, on a retourné ensemble après,
43:09puis Michel a tourné avec Nico Papataki, on est très amis, il était très ami avec Marcello aussi,
43:15on se voyait beaucoup tous.
43:22Je suis plutôt très amie avec les hommes que j'ai connus, ils font partie de ma vie,
43:30ce sont des, pas tous, mais la majorité oui, ce sont des grands amis, et généralement je
43:37m'entends très bien avec leurs femmes, et souvent je, ils sont comme des frères,
43:45et je m'entends très bien avec mes belles soeurs.
44:00J'ai rencontré Emmanuel et Ongaro, et qui m'ont proposé de faire la publicité pour Ongaro,
44:12ça m'a beaucoup plu, j'ai fait des photos avec Helmut Newton, avec Guy Bourdin,
44:16et pour moi c'est comme si je jouais un rôle.
44:30Anouk déambule dans ce théâtre de l'Athénée, qui fut dirigé par son grand-oncle Lucien Rosenberg,
44:58où il fit ses débuts de comédienne dans Sud, de Julien Grine.
45:01Des années plus tard, elle jouera Love Letters, de Guernée,
45:06à la Comédie des Champs-Élysées, puis au Théâtre de la Madeleine.
45:15Cheminant dans sa mémoire, Anouk retrouve dans le livre de l'acteur Paul Meurisse,
45:20des lignes qui honorent la mémoire de son père.
45:22Il écrit comment le responsable allemand des théâtres parisiens
45:26sauva des Juifs de la déportation, et parmi eux, le père d'Anouk, Henri Dreyfus,
45:32dit Henri Meurais, comédien juif et résistant.
45:36Avant la guerre, l'allemand Bernard Rademacher, trompettiste de jazz,
45:41vivait à Paris et était une connaissance de ma compagne Michelle Alpha.
45:46Au moment de l'occupation, il fut nommé responsable de la section théâtre et cinéma
45:50à la propagande allemande à Paris.
45:52C'est ce même Rademacher qui, ayant une enquête à faire sur un acteur présumé juif,
45:59posa la question à Michelle Alpha qui lui répondit avec assurance par la négative.
46:04Rademacher décréta l'enquête close et renvoya le dossier à la police allemande
46:08avec la mention « non juif ».
46:11Quand on sait que l'acteur en question s'appelait Dreyfus
46:15et qu'il passe toute la durée de l'occupation à Paris et en province
46:19à jouer et monter des spectacles sous le nom de Meurais, on croit rêver.
46:25Quand on sait que ce dossier avait été constitué à la suite de 71 lettres de dénonciation
46:31qui n'étaient pas allemandes.
46:33En 1954, une délégation française se rendit à Hambourg
46:39où, au cours d'une réception, on remit à Bernard Rademacher la médaille de la reconnaissance française.
46:45Cette délégation était conduite par le Dreyfus dont j'ai parlé précédemment
46:49qui, dès 1941, était rentré dans la résistance.
46:53Son nom d'acteur était Henri Meurais
46:55et était et est toujours le père de la merveilleuse comédienne Anouk Aimé.
47:02Oui, non, je savais qu'il y avait des choses.
47:10Marceline Loridan, rescapée des camps, réalisatrice,
47:14lui propose de l'incarner dans le film La Petite Prairie au Boulot.
47:17J'ai hésité à faire La Petite Prairie au Boulot, mais c'est mon agent Dominique Besnien
47:21qui m'a dit tu dois le faire.
47:23C'est important pour la mémoire.
47:44C'est important pour la mémoire.
48:14Quand nous sommes arrivés à Birkenau, il se passe des choses.
48:21Vraiment, je crois que là...
48:25Et c'est vrai qu'on a beaucoup ri, parce que comme ça on cachait un peu nos angoisses,
48:32mais tout le monde, toute l'équipe,
48:34on a beaucoup ri, parce que comme ça on cachait un peu nos angoisses,
48:39mais tout le monde, toute l'équipe,
48:41et en revenant, j'étais très choquée.
48:49J'ai été très protégée, moi.
48:51Je crois beaucoup à ces choses-là, j'ai été très protégée.
48:55J'ai quand même eu beaucoup de chance.
48:58Beaucoup de chance, dix millions de fois.
49:00Beaucoup de chance que l'Allemand m'ait ramenée chez mes grands-parents,
49:04m'ait amenée ailleurs.
49:06Beaucoup de chance que j'étais pas là quand on a bombardé chez moi.
49:10Beaucoup de chance que j'ai des gangsters qui me nourrissaient,
49:16parce qu'il n'y avait pas de viande.
49:19Beaucoup de chance, mes rencontres, ça a été formidable.
49:23J'ai eu prévers, j'ai eu beaucoup de chance.
49:36Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
50:36Dans un instant...

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