• il y a 5 mois
Et vogue la barque catalane
Ces barques à la voile latine et aux couleurs fauves racontent l'histoire d'un petit peuple de pêcheurs venu - à la fin du XIXème siècle - coloniser ces terres marécageuses dont personne ne savait que faire. Durs à la tâche, solidaires face à l'adversité, ces hommes ont épousé la nature et se sont construit leur coin de paradis en Catalogne, comme à la lagune de Salses Leucate, à cheval entre les Pyrénées orientales et l'Aude.
La Pinasse, indispensable icône du bassin d'Arcachon
Le bassin d'Arcachon est une véritable petite mer intérieure qui court du Cap Ferret jusqu'à la Dune du Pilat, où l'eau salée de l'océan vient se mêler à l'eau douce des rivières. Lorsque les hommes s'établissent ici et développent la pêche et l'ostréiculture, ils inventent également la pinasse : un bateau à fond plat qui devient rapidement un des symboles de la ville...
Année de Production :

Category

📺
TV
Transcription
00:00Musique d'ambiance
00:23Leurs amoureuses portent parfois de drôles de noms.
00:27Il y a Marguerite, classique, mais aussi Cousine Marie, Notre-Dame de Consolation,
00:33ou encore Nopasaran, voire Jaurès.
00:37Des rebelles, comme leurs soupirants.
00:42Je crois que je réalise un rêve d'enfant. En tant qu'adulte, je réalise un rêve d'enfant.
00:46Je parle à mes barques. Je viens leur dire « Est-ce que ça va ? Est-ce qu'aujourd'hui,
00:50le mauvais temps, tu ne te perturbes pas trop ? »
00:53Ce n'est pas un objet en bois pour moi. C'est quelque chose qui a une signification.
01:00Quand je reviens, on a traversé du vent fort et que la barque a tenu le coup, je la remercie.
01:06Ça, c'est évident.
01:10Ces barques catalanes, à la voile latine et aux couleurs fauves, racontent l'histoire
01:15d'un petit peuple de pêcheurs venus à la fin du XIXe siècle coloniser ces terres marécageuses
01:21dont personne ne savait que faire.
01:25Durs à la tâche, solidaires face à l'adversité, ces hommes ont épousé la nature
01:30et se sont construits leurs coins de paradis en Catalogne.
01:34À cheval entre les Pyrénées-Orientales et l'Aude, la lagune de Sals-le-Cate était au XVIIIe siècle
01:41l'une de ces terres inhospitalières. Définition de l'enfer.
02:04Moustiques, malaria, attaques des flottes anglaises et barbaresques.
02:10Mais un siècle plus tard, après la chute de Napoléon et le retour à la paix,
02:14ceux qu'on appelle les Brassiers, littéralement ceux qui utilisent leurs bras,
02:19bâtissent tout seuls leurs refuges.
02:23Misérables, différents, issus de cette région mais rejetés par la société,
02:28ils sont qualifiés de sauvages à évangéliser par l'Église.
02:32Ils apprennent les techniques de pêche et s'endettent parfois pour construire des embarcations
02:37adaptées à leur territoire qu'ils appelleront les barques catalanes.
02:43Jean-Luc, issu de six générations de pêcheurs, porte avec émotion cette histoire familiale.
02:54L'odeur de la sardine sur le bateau, l'odeur du coltat,
02:58le coltat c'était un enduit qu'ils mettaient pour les tancherités des bateaux,
03:01tout ça c'est complètement familial.
03:03C'est cette odeur qui imprègne mes narines.
03:10Adaptés pour affronter les brises de la Méditerranée comme la violence de la Tramontane,
03:15ces barques leur ont permis de se lancer dans la pêche aux poissons bleus qui regorgent dans ces eaux.
03:22Le thon, la sardine et l'anchois.
03:26Ce n'est pas le chacun pour soi qui prévaut, mais une organisation sociale fondée sur des valeurs communes.
03:36Ils étaient organisés en communauté pêcheuse et ils réglaient leur litige entre eux.
03:40Quand ils avaient un problème de poser des filets à un endroit où l'homme ne voulait pas qu'ils se mettent,
03:44ils le réglaient entre eux.
03:46Et les règles par exemple des pêcheurs de l'étang de Salse n'étaient pas les mêmes
03:50que les règles des autres étangs du Languedoc.
03:54Ces communautés pêcheuses issues d'un modèle médiéval sont appelées des prud'homies.
04:00Elles organisent une gestion raisonnée des ressources et un partage équitable des zones de pêche.
04:06Sur le littoral, des milliers de cabanes en simples roseaux font leur apparition.
04:13Ils vivaient dans des baraques, on dirait biosourcés actuellement,
04:16mais c'était un habitat qui était fait avec ce qu'ils trouvaient sur place, complètement intégré dans le milieu.
04:22C'était un roseau très très très fin et qui est terminé par une plume.
04:29C'était un matériau qui était gratuit bien sûr, qu'on trouvait en bord d'étang,
04:33qu'ils coupaient et puis qu'ils laissaient sécher un certain temps.
04:36Après ils avaient du chêne qui venait très certainement des alberts à proximité.
04:42Et avec ces roseaux et ce chêne, ils construisaient ces fameuses baraques,
04:46en catalan barraque, qui ont une forme de bateau, une forme de bateau renversé.
04:53Celles qui, à l'époque de leur édification, pouvaient sembler de pauvres cabanes, ont fait leur preuve.
05:00Ce mode de vie et ce type de maison sont aujourd'hui indissociables de l'écosystème local,
05:05un héritage inestimable pour les descendants de ces pionniers.
05:12La couleur de l'eau, la couleur des montagnes, sentir le vent, l'observation des nuages, c'était le cœur de leur métier.
05:18Ils sortaient que si les conditions de météo étaient favorables ou correspondaient au passage du poisson.
05:26Dans ce mode de vie, il ne faut pas de gaspillage. On recycle, on récupère, on réutilise.
05:32Ils n'avaient pas le choix, c'était une vie quand même relativement difficile.
05:36Mais ce que je retiens et ce que j'ai entendu souvent chez mon grand-père, chez mon père,
05:41c'est qu'ils étaient heureux, ils étaient indépendants, ils étaient libres.
05:45Ils menaient la vie qu'ils avaient voulu vivre. Et donc ça, c'était fondamental pour eux.
05:53Collioure, 50 kilomètres plus au sud, le long de la Côte Vermeille, a une longue histoire commerciale et militaire.
06:02Mais elle doit sa vigueur au 19e siècle aux activités pêcheuses.
06:07Au début du 20e siècle, 700 pêcheurs et leurs 120 barques y affrontent les humeurs de la Méditerranée
06:13pour ravitailler les ateliers de salaison d'anchois et de sardines.
06:31Le va-et-vient de ces embarcations, que l'on pouvait tisser facilement sur la grève grâce à leur fond plat,
06:37rythme alors les jours et les nuits de la ville.
06:44La barque catalane, on pourrait dire que c'est une sorte d'excroissance ou de symbole de la vie de Collioure.
06:50Puisqu'effectivement, autour de la barque va graviter l'ensemble de la société colliurenque.
06:54On va avoir le pêcheur qui va partir au large pêcher,
06:57mais il va y avoir sa femme qui va être dans leur accommodage défilé, qui va aller vendre aussi les poissons.
07:02A partir de l'âge de 10 ans, les jeunes colliurens vont partir aussi au large comme des mousses.
07:06Et donc on voit que la société gravite autour de cette activité économique.
07:14L'identité de Collioure, elle ne peut se comprendre que dans l'effort.
07:18Ces barques en sont un témoignage puisque c'est un effort d'aller chercher ce poisson et de le ramener,
07:22et donc ensuite de pouvoir le vendre.
07:24On peut se dire que c'est un décor paradisiaque, c'est un lieu magnifique avec un beau soleil,
07:28mais l'homme vraiment a travaillé, a sué pour de la vie.
07:35Coincé entre la mer et la montagne schisteuse, Collioure ne s'en remet pas qu'à la pêche.
07:41A partir de l'automne, il se tourne vers la montagne, vers ces Pyrénées, ces terres de feu qu'il a fallu dompter,
07:47qu'il a fallu sculpter pour pouvoir y installer de la vigne et travailler cette terre pour en tirer ses fruits et ses récoltes.
07:57Un été change à jamais le destin de Collioure et celui de ses colliures.
08:02L'été 1905, où Matisse convie son ami Derain à le rejoindre pour profiter de la lumière dorée de ce petit port,
08:09qu'il peigne avec ses barques catalanes.
08:12Ensemble, ils inventent le fauvisme et rendent Collioure mondialement célèbre.
08:20Ils sont en tous les sens les meilleurs artistes de l'Histoire.
08:25Ils sont enthousiasmés par la libération des couleurs des barques qui elles font partie d'une invention,
08:30d'une sorte de récupération, de recyclage, de réemploi de la peinture que faisaient les pêcheurs.
08:35Ils achetaient des bidons de peinture pour peindre leurs huisseries, leurs fenêtres, leurs volets.
08:40Et quand il y avait un fond de peau, ils allaient peindre et surligner toutes les menuiseries qu'on pouvait avoir sur ces barques-là.
08:46Et inversement, ils peignaient les barques.
08:49Et donc forcément, cette liberté, cette utilisation en fait de tons francs, vifs, sur une architecture,
08:56ça donne une vie, une force et un charme coloré qui a forcément séduit les artistes.
09:01Regardez donc cette barque dans l'eau et regardez ce qu'il y a dedans.
09:05C'est un peu comme si on allait dans un jardin et qu'il y avait un jardin.
09:08C'est un peu comme si on allait dans un jardin et qu'il y avait un jardin.
09:12C'est un peu comme si on allait dans un jardin et qu'il y avait un jardin.
09:17Regardez donc cette barque dans l'eau et ses reflets se démultiplier,
09:21comme on a à l'arrivée de Derain et de Matisse,
09:24donc à essayer de juxtaposer des touches de couleur, des rouges violents sur du bleu outre-mer.
09:29Et on voit effectivement apparaître ces contrastes très forts
09:32et peu à peu rendre ces couleurs autonomes, libres, souveraines,
09:37et passer à ce qui va être la révolution du fauvisme, c'est-à-dire la plaque colorée,
09:41comme on retrouve sur la coque d'une barque catalane.
09:47Mais au tournant des années 60, sous la pression de la pêche industrielle,
09:53les pêcheurs brûlent leurs barques.
09:56Ils les remplacent par des bateaux modernes.
09:59L'esprit catalan semble s'évanouir.
10:10Mais en Catalogne, comme dans d'autres régions françaises,
10:14les années 70 voient fleurir un grand besoin de réappropriation culturelle.
10:22Et ici, c'est la barque qui est l'objet d'un retour de passion.
10:26Des acharnés de ce patrimoine maritime travaillent à sa restauration,
10:31comme dans cet atelier installé dans l'ancienne dynamiterie Nobel, tout près de Collioure.
10:45L'objectif est que ces bateaux renaviguent afin de conserver un patrimoine vivant.
10:50Mais à travers vraiment tout ce travail de restauration,
10:53il y a aussi un volet scientifique d'études de ces constructions,
10:57savoir comment travaillaient les charpentiers de marine au siècle passé.
11:00Ça passe à travers le catalan.
11:02Tout le vocabulaire à bord du bateau est encore en catalan.
11:05Et c'est plus que des souvenirs familiaux,
11:07c'est aussi la volonté de transmettre un héritage patrimonial, culturel,
11:12de faire découvrir aux générations futures
11:15quelle était la vie sur ce littoral,
11:17que les hommes ont souffert aussi à bord de ces bateaux.
11:20C'est tout ce passé qui fait la richesse du peuple catalan.
11:25Un passé ressuscité par les trobades,
11:28des régates de barques catalanes organisées chaque année sur le littoral des villages catalans.
11:38Elles ont quelque chose de magique sur le plan de la navigabilité.
11:42C'est quelque chose d'extraordinaire,
11:44c'est quelque chose d'extraordinaire,
11:46c'est quelque chose d'extraordinaire,
11:48c'est quelque chose d'extraordinaire,
11:51Elles ont quelque chose de magique sur le plan de la navigabilité,
11:55sur le plan de la difficulté de manœuvre.
11:58Ce sont des barques assez exceptionnelles.
12:01Imaginez qu'une barque de 10 mètres,
12:03son pont au maître beau est à peu près à 25 cm au-dessus de l'eau
12:09et que la barque va marcher à 9 nœuds
12:11avec une voile de 60 mètres carrés qui va craquer dans tous les sens,
12:15ses mains obliques qui vont vers le ciel, etc.
12:18Ses voiles rondes et profondes dans lesquelles un vent de fou va s'engouffrer.
12:22Il y a quelque chose d'audacieux et d'absolument extraordinaire.
12:25Et si les Catalans sont considérés comme des gens qui sont durs,
12:28qui sont des travailleurs, qui affrontent les difficultés,
12:31et bien imaginez ces bateaux avec des tramontanes
12:35qui montent à 40 nœuds ou 50 nœuds,
12:37il y a quelque chose d'audacieux là-dedans.
12:39Et pourtant, ce sont d'abord des barques de travail.
12:43J'ai eu une barque catalane de 10 mètres
12:46achetée à Collioure par mon grand-père.
12:49Donc, un bien familial dont j'étais amoureux, l'abbé Grégoire.
12:54Donc, en fait, c'est de la nostalgie.
12:56Comment retrouver les gestes et l'admiration que j'ai
13:01pour ces gens de peu, qui, avec rien du tout, ont construit des cabanes,
13:06ont protégé leur famille de la pluie et du vent,
13:09ont réussi à affronter la mer et le mauvais temps,
13:12ont ramené du poisson, alors que c'est miraculeux,
13:15ils ont réussi à s'amuser.
13:25Les Catalans ont la tête dure.
13:26Ce sont des gens qui ont beaucoup de caractère, etc.
13:29Mais quand il s'agit de parler de mer et de solidarité maritime,
13:33la jalousie s'est écrasée.
13:35Et ici, c'est parmi les gens les plus pauvres
13:37que l'on assiste à la plus grande solidarité.
13:46Musique douce
13:50Musique douce
14:14Entre terre et océan, entre sable et lande,
14:17le bassin d'Arcachon est un monde aquatique
14:20en partie fermé par la dune du Pila,
14:23cette dune la plus haute d'Europe.
14:29Ici, où l'eau salée de la mer
14:31vient se mêler à l'eau douce des rivières,
14:34le vent et les marées ont su créer un décor unique.
14:39Lorsque les hommes s'y établissent,
14:41ils y développent la pêche et l'austréiculture
14:44Pour ce faire, invente Lapinas,
14:46la plus belle expression de l'exploration du bassin,
14:49un simple bateau à fond plat,
14:52devenu aujourd'hui son icône.
14:55Ce n'est pas un bateau pour dire je vais du point A au point B.
14:58Lapinas, ce n'est pas ça.
15:00Ce n'est pas combien de temps on va mettre pour aller là.
15:02Non, c'est un voyage, donc c'est un parcours.
15:04Ce qui compte, c'est le parcours.
15:06Le voyage, ici, c'est une baie.
15:08On peut partir d'Arcachon, faire le tour de l'île aux oiseaux,
15:11faire une promenade, de balade. C'est l'art de vivre.
15:14Le meilleur moyen pour découvrir cette petite mer intérieure,
15:18délimitée par 85 km de côtes et de dunes boisées.
15:27Avant d'être un navire d'agrément,
15:30Lapinas est d'abord un outil qui offre aux hommes
15:32de quoi s'implanter sur le bassin.
15:35A partir du XVIIe siècle,
15:37on utilise cette embarcation pour aller pêcher la sardine,
15:40ou ramasser les huîtres sauvages.
15:43Les plus solides d'entre elles partent même en pleine mer,
15:46alors qu'elles ne sont que de fragiles embarcations.
15:51Les membres de l'association Luz Barbo Pinacer,
15:54de la petite ville de Gujan-Mestras,
15:57continuent d'entretenir une flotte de pinaces à voile.
16:01Ensemble, ils partent naviguer sur ces bateaux
16:04particulièrement étroits et instables.
16:08Longs d'une dizaine de mètres,
16:10ils sont parfaitement adaptés aux eaux peu profondes du bassin.
16:17Comme les pêcheurs d'antan,
16:19ces hommes savent déjouer les pièges des bancs de sable
16:22qui se déplacent au gré des marées.
16:25Embarqués dans ces frêles esquifs,
16:27les marins des villes de la teste de Buche ou de Gujan-Mestras
16:31ont non seulement pu coloniser toutes l'étendue d'eau,
16:35mais aussi le pourtour du Cap-Ferret.
16:39Ce bateau a une forme plat.
16:41Il permettait aux pêcheurs et aux agriculteurs
16:44de s'approcher beaucoup plus près des terres,
16:47notamment des parcs à huîtres.
16:50Et c'est avec les matériaux locaux comme le bois
16:53prélevés dans le massif des Landes, tout proches,
16:56que les charpentiers de marine
16:58donnent naissance aux courbes élancées de la petite reine du bassin.
17:03Les premières pinas étaient construites pratiquement qu'en pin
17:07et d'où le nom bateau fabriqué en pin.
17:10On pense que le mot pinas vient effectivement du pin maritime.
17:15Les pêcheurs aiment se retrouver avec leur bateau,
17:18toute voile bordée, pour s'affronter.
17:21Des marins qui se livrent à des régates à l'occasion de fêtes locales
17:25ou pour être les premiers à débarquer leur pêche.
17:28Un esprit de compétition souffle alors
17:31entre les différents villages.
17:33Mon grand-père avait une pinasse.
17:35Il faisait aussi à l'époque des régates.
17:37C'était des régates qui étaient courues, acharnées, entre les ports.
17:40A l'époque, ce n'étaient que les insécuteurs
17:42qui se servaient de leur propre pinasse de travail
17:45pour après faire la régate.
17:47Et ils s'en servaient.
17:48Il y avait de grandes régates qui étaient très suivies.
17:51Pour dire qu'à l'époque, il n'y avait pas grand-chose
17:53sur le bassin comme animation.
17:56Pas grand-chose, voire presque rien.
17:59Car les petits villages en bordure du bassin
18:01sont encore isolés de tout et difficilement accessibles.
18:09Mais en 1841,
18:11l'arrivée du train à la teste de bûches en provenance de Bordeaux
18:15va métamorphoser la vie dans la lagune.
18:20Cette ligne de chemin de fer va nous amener les premiers touristes.
18:23Jusque-là, on en avait quelques-uns qui venaient.
18:26Mais il fallait plus de 10 heures sur une route cabossée
18:29dans les marécages, dans les landes,
18:31pour venir jusque sur le bassin.
18:33Et grâce à la ligne de chemin de fer,
18:36qui s'arrêtait à ce moment-là, à la teste.
18:39Car Arcachon n'existe pas encore à ce moment-là.
18:46Tout de suite en sortant de la gare,
18:48hier comme aujourd'hui,
18:50les voyageurs peuvent tarpenter le port
18:52et s'enthousiasmer à la vue de son animation.
18:56Le tour de pêche, l'activité du chantier naval
18:59et, amarré au ponton, l'épinasse colorée.
19:04Sur les ports de Gujan et la teste, c'est toujours vivant.
19:07Les chantiers de construction navale sont toujours en activité,
19:10et on voit les mises à l'eau, les bateaux qui entrent, qui sortent.
19:13Donc on voit que ce n'est pas figé,
19:15que ce n'est pas resté un endroit
19:17qui restait dans le 19e, début du 20e siècle.
19:20Ça évolue, l'activité évolue,
19:22et surtout, on continue à vivre de tout ce qui a fait
19:25les caractéristiques de la vie sur le bassin d'Arcachon.
19:34Après l'arrivée du train à la teste,
19:36et celle des premiers touristes,
19:38il faut attendre encore 10 ans
19:40et le décret impérial de Napoléon III en 1857
19:44pour que la station balnéaire d'Arcachon
19:47prenne son véritable essor.
19:50Sur les hauteurs, les frères Peyrère,
19:52des financiers amis de l'empereur,
19:54lotissent la ville d'Hiver.
19:57300 gigantesques demeures sortent de terre
20:00et les premiers grands hôtels attirent une clientèle aisée,
20:04toujours plus nombreuse à être grisée
20:06par la découverte du littoral
20:08et des plaisirs balnéaires naissants.
20:20Le tourisme à Arcachon, c'est véritablement
20:22l'histoire de la mode des bains de mer dans un premier temps,
20:25puisque c'est véritablement la raison
20:27pour laquelle les gens vont venir à Arcachon,
20:30mais il va y avoir autre chose,
20:32il va y avoir beaucoup de divertissements,
20:34casinos, spectacles, etc.
20:38Alors, les mois durant lesquels la chaleur
20:41rend impossible le transport des coquillages,
20:44les austréiculteurs délaissent leur parc à huîtres
20:47et se réinventent une activité.
20:49Ils deviennent les gondoliers du bassin,
20:52guidant les visiteurs en dimanché
20:54en expédition sur la baie d'Arcachon.
21:02Une fois qu'Arcachon est créé et qu'elle se développe,
21:05les visiteurs vont beaucoup venir
21:07et l'un des points forts, ça va être l'attrait de ce bassin,
21:10pouvoir y naviguer, pouvoir se promener dessus.
21:13Et là, ils vont emprunter l'épinasse
21:16des pêcheurs, des austréiculteurs,
21:18qui en juillet et août vont profiter de leur venue
21:22pour un petit peu agrémenter leur travail.
21:25Et ils vont faire comme nous aujourd'hui,
21:28venir vers l'île aux oiseaux,
21:30vers les fameuses cabanes chanquées.
21:35Longer les petits villages austréicoles.
21:42Aller jusqu'au Cap Ferré,
21:44voir la dune du Pilat, le ban d'Arguin.
21:49Quelque part, on fait exactement la même chose
21:52que les touristes du 19e siècle.
21:57Aujourd'hui encore, des bâteliers proposent aux visiteurs
22:01d'embarquer pour la journée sur une pinasse à moteur.
22:04Après 1909, on affale les voiles d'épinasse
22:08et l'icône flottante se modernise.
22:11Elle passe de la voile au pétrole.
22:14Dotée d'un moteur, elle se voit propulsée
22:17dans la révolution industrielle.
22:19Elle s'embourgeoise et se fait de plaisance.
22:22Les premiers touristes viennent s'offrir
22:25des promenades payantes en pinasse,
22:27car les yachts de luxe et leurs quilles
22:30sont inadaptés à la lagune.
22:34Seul à être capable de naviguer dans 20 cm d'eau,
22:38la pinasse sait se rendre indispensable.
22:43J'essaye effectivement de continuer cette activité
22:47en pensant aux anciens qui, l'été,
22:49qui étaient la plupart des ostriculteurs,
22:51laissaient un peu leur parc de côté
22:53et prenaient leur pinasse et allaient promener la hôte
22:56l'été pour leur faire découvrir les sites.
22:59Donc j'essaye de faire une continuité de tout ça.
23:09Musique douce
23:14Dans la ville de Gujan-Mestras,
23:17qui abrite 7 ports tournés vers le bassin,
23:20des charpentiers de marine font eux aussi vivre cet héritage.
23:28Depuis le début du XIXe siècle,
23:30au chantier du Bourdieu,
23:32un des plus anciens chantiers navals de France,
23:35on fabrique des pinasses dans les règles de l'art.
23:41Je ressens la forme, le biais, la courbe.
23:44Et je sens s'il y a des bosses ou des creux.
23:47Ça se ressent, on satisfait les mains
23:50avant de satisfaire les yeux.
23:52C'est primordial, c'est vraiment sentir l'élément filant.
23:55L'eau qui va passer, ma main, c'est comme de l'eau.
23:59Le travail de ces artisans a permis au chantier
24:02d'obtenir le prestigieux label
24:05Entreprise du patrimoine vivant,
24:07qui distingue des entreprises françaises
24:10aux savoir-faire artisanaux d'excellence.
24:15Ici, ce qui est bien chez nous,
24:17c'est qu'on fabrique un bateau de A à Z.
24:20On part du début, de l'acquis,
24:22de la bille de bois qui est dehors, à la base.
24:25L'année prochaine, les bateaux sont à plat par terre.
24:28C'est vraiment de faire de tout de A à Z.
24:32Avec le savoir-faire d'un vieux chantier
24:35qui a dessus une histoire, un savoir,
24:38qu'on se passe toujours de génération de charpentier
24:41en génération de charpentier.
24:43On dit des petits secrets entre nous,
24:45mais c'est juste un savoir-faire.
24:47Ils savaient faire, du coup, ils nous ont appris.
24:50On sait faire et on apprend encore aux autres.
24:53Charpentier, peintre, mécanicien, décorateur,
24:56s'affairent autour du pont de construction
24:59et travaillent les bois exotiques,
25:01comme le teck et la cajou.
25:04Il faut 9 mois pour faire naître un bateau.
25:12Emmanuel Martin a repris la barre de ce chantier prestigieux
25:16après avoir longtemps travaillé dans le négoce des vins de Bordeaux,
25:20l'autre richesse de la région.
25:22Quand je suis venu et que j'ai vu ces squelettes de dinosaures,
25:26ces charpentes en bois, ça m'a interpellé.
25:28J'ai essayé de me calmer, mais j'étais accroché.
25:32C'est un coup de coeur.
25:34Autrefois, on calculait la taille des bateaux en tonneaux,
25:38indiquant le nombre de récipients que la coque pouvait contenir,
25:42comme un éternel lien entre le travail de la vigne et celui du bois.
25:48Le vin, vous travaillez la vigne
25:50pour qu'elle vous donne une certaine qualité.
25:52Vous allez assembler différentes cuves pour faire un produit final.
25:55Moi, ce que j'aime, c'est créer.
25:57Dans le vin, on assemble les cuves, et là, on assemble les éléments.
26:00Et j'aime ça, en fait.
26:04Elles semblent loin, les pinasses d'origine.
26:07Aujourd'hui, les designers ont transformé l'humble embarcation
26:11des travailleurs de la lagune en de puissantes chaloupes.
26:16Le bateau s'est agrandi et élargi,
26:18mais les côtes sont toujours les côtes d'une pinasse,
26:20entre 10 et 12 m. C'était ça, une pinasse.
26:22Donc c'est la pinasse réinterprétée.
26:28Je le monte à 3 000.
26:30Allez, vas-y.
26:36La pinasse, il y a une tradition des jolis bateaux.
26:40C'est ce que j'essaie de faire perdurer le yachting de la belle époque.
26:43C'est ça qu'on cherche, voilà.
26:46Ainsi, la pinasse se réinvente,
26:49devenant toujours plus chic,
26:51séduisante une bourgeoisie en quête de discrétion.
26:54Elle a su gagner ses lettres de noblesse
26:56et prendre sa revanche.
26:59La pinasse, historiquement,
27:01on la retrouve quasiment que sur le bassin.
27:03Avec ce modèle-là,
27:05on a voulu avoir une carène un petit peu tout en,
27:07on appelle ça hauturier,
27:09pour aller un peu sur toutes les mers.
27:11Ces héritières sont aptes
27:13à naviguer bien au-delà de la baie d'Arcachon
27:16et peuvent partir jusqu'en haute mer.
27:24Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations