[#Éditorial] Gabon : allô, l'opposition en voie de disparition ?
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00:00Depuis le coup d'État du 30 août 2023, le paysage politique gabonais a pris une tournure
00:06inattendue.
00:07Le Comité pour la transition et la restauration des institutions, qui s'était présenté
00:11comme un sauveteur des institutions nationales, a rapidement vu se rallier à sa cause, ce
00:17qui autrefois se posait en fervent défenseur des droits du peuple.
00:21Des présidents de partis politiques aux chefs de file de la société civile, tous semblent
00:26avoir trouvé une nouvelle personnalité auprès de laquelle faire allégeance reléguant
00:31les préoccupations des populations au second plan.
00:34A l'exception de quelques sons de cloche, à l'instar du député de la transition,
00:39Jean-Valentin Leïama, l'opposition et la société civile se sont mûrés dans un silence
00:44à la fois assourdissant et déconcertant.
00:47Les voix qui jadis s'élevaient pour dénoncer les injustices et les dérives du pouvoir
00:52déchu se sont eues, comme si les défis et les souffrances du peuple gabonais avaient
00:57subitement disparu avec le coup d'État du 30 août 2023.
01:01Pourtant, les réalités quotidiennes n'ont guère changé.
01:04L'inflation galopante, le chômage persistant, le décrochage scolaire, les bavures policières,
01:10l'insécurité grandissante malgré le régime militaire, la corruption, le nipotisme et
01:16les services publics en déclin continuent de peser lourdement sur le quotidien des Gabonais.
01:21Cette transition qui se voulait porteuse d'espoir et de renouveau risque de devenir
01:28une simple mascarade si ceux qui sont censés incarner la voix du peuple préfèrent courber
01:34les chines pour des avantages personnels.
01:36Une situation décriée par Maître Paulette Oyanondo, avocate et défenseur des droits
01:41de l'homme lors de l'interview accordée à nos confrères de l'OB dans sa parution
01:46du 2 juillet 2024.
01:48« Il faut bien reconnaître que le 30 août, j'ai poussé un ouf de soulagement.
01:52J'ai tout d'un coup mieux respiré, je n'en revenais pas.
01:55Mais hélas, la réalité a repris ses droits, une semaine après a-t-elle déploré.
02:00»
02:01Une position que partagent plusieurs compatriotes sans casquette politique ni associative.
02:06En l'absence de critique et de contre-pouvoir, le CTRI ne risque-t-il pas de plonger dans
02:11une gouvernance autoritaire ? Car comme le précisait Montesquieu, dans de l'esprit
02:16des lois, c'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté
02:21à en abuser.
02:22Le ralliement unanime à la cause du CTRI soulève des questions fondamentales sur l'intégrité
02:29et les motivations de ses anciens opposants, qui devraient pourtant aujourd'hui se positionner
02:34en contre-pouvoir.
02:35Ont-ils réellement abandonné leurs idéaux ou ont-ils simplement troqué leurs convictions
02:42pour des intérêts personnels immédiats ?
02:44Il est difficile de ne pas percevoir dans ce retournement de veste une manœuvre opportuniste,
02:50voire profito-situationniste, où l'assouvissement des ambitions et désirs personnels prennent
02:55le pas sur l'intérêt général.
02:57Comme le dit un adage populaire, « la bouche qui mange ne parle pas ».
03:01Ce qui hier ne lésinait pas sur les sorties médiatiques, déclarations de presse, lives
03:07sur les réseaux sociaux se sont mûrées aujourd'hui, derrière leur mandat de transition, dépourvues
03:12de légitimité populaire, leur titre acquis, pour certains, sur des critères copains-coquins,
03:19ont définitivement montré à la face populaire qu'ils ne défendaient aucun idéal, mais
03:23plutôt qu'ils étaient des partisans du « oh toi, que je m'y mette », du « c'est
03:28enfin notre tour ».
03:29Il est impératif de rappeler à ceux qui ont choisi la voie de la complaisance que
03:35le véritable engagement politique ne se mesure pas à l'aune des opportunités personnelles,
03:41mais à la capacité de défendre les intérêts de ceux qu'ils prétendent représenter.
03:46Le peuple gabonais a trop souffert de la trahison de leaders politiques animés de la volonté
03:51de changer leur vie, plutôt que de changer la vie de l'ensemble de leurs concitoyens.
03:56Le silence de l'opposition et de la société civile apparaît comme une trahison, une
04:01abdication du rôle de gardien de pluralisme démocratique et de la liberté d'expression.
04:07Dans un contexte de transition, les divergences d'opinion doivent participer à la construction
04:13d'un État au sein duquel les institutions restaurées sont fortes et tenues par des
04:19hommes qui savent se soumettre à la loi.
04:21L'avenir du Gabon ne peut se construire sur des renoncements et des compromis douteux.
04:26Il est temps que les véritables défenseurs du peuple se lèvent et rappellent à tous
04:31que la transition ne doit pas devenir un prétexte pour taire les injustices, mais une occasion
04:37pour les surmonter et ce, même si certains ont été récompensés par des nominations.