ÉDITO - Législatives: "On assiste aujourd'hui à la bêtise du siècle"

  • le mois dernier
Lors du premier tour des élections législatives, le Rassemblement national est arrivé largement en tête avec plus de 33% des voix. Le Nouveau Front populaire arrive en seconde position avec près de 28% des voix. Le camp présidentiel se positionne qu'en troisième position, avec moins de 21% des suffrages. "On assiste aujourd'hui à la bétise du siècle", analyse notre éditorialiste politique Matthieu Croissandeau.

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00:00Tout de suite après les Européennes, le Président de la République avait donc dissout l'Assemblée en appelant à une clarification.
00:05C'est une clarification auquel il ne s'attendait pas, n'est-ce pas ?
00:08Il a raté son pari et de quelle manière.
00:11Le Président de la République voulait mettre fin au désordre en procédant à cette fameuse clarification.
00:15Il plonge la France dans une inconnue qui ressemble pour beaucoup de nos concitoyens à une alternative délétère.
00:20Soit installer l'extrême droite au pouvoir, soit faire un barrage électoral,
00:25mais qui risque de marcher peut-être sur le point de vue arithmétique,
00:28sur le point de vue politique, rendre la France assez ingouvernable.
00:31Emmanuel Macron, qui avait promis de tout faire pour que les Français n'aient aucune raison de voter pour les extrêmes,
00:35se retrouve aujourd'hui avec un paysage politique où ils n'ont jamais été aussi hauts.
00:39Il a assisté impuissant hier aux deux premières interventions politiques,
00:42celles de Marine Le Pen et celles de Jean-Luc Mélenchon, ses ennemis déclarés depuis sept ans.
00:47Alors il en faudra des historiens, des psychanalystes,
00:49pour essayer de comprendre les ressorts de ce suicide politique inédit dans notre histoire,
00:53qui fait penser un petit peu, je trouve, aux conservateurs britanniques avec le Brexit, vous vous souvenez.
00:59Après avoir réussi le coup du siècle, le hold-up du siècle, disait-on en 2017,
01:03on assiste aujourd'hui, j'ai envie de dire, à la bêtise du siècle,
01:07cette décision de dissolution un soir de défaite électorale.
01:11En imaginant que la gauche serait assez bête pour ne pas se réunir,
01:14et puis en imaginant que les Français pourraient changer d'avis en trois semaines,
01:17c'était du jamais vu et ça ne s'est pas vu.
01:19Parce que finalement il a plutôt ajouté de la confusion plutôt qu'apporté de la clarification.
01:23Ah oui, je trouve qu'il laisse la France politique, j'ai envie de dire,
01:26dans un état immense d'une immense confusion,
01:29qui tient d'abord à la nature du geste de la dissolution que personne au fond n'a bien compris,
01:33qui tient aussi à la confusion des rôles, j'ai envie de dire,
01:36entre le Président de la République et le Premier ministre.
01:38On a eu dans cette campagne Élise et moi, Premier ministre,
01:40qui est un Premier ministre, qui n'est pas un Premier ministre.
01:41Est-ce que c'est ça la législative ou est-ce que c'est pas plutôt de parler d'un programme d'ailleurs ?
01:45Premier ministre, est-ce que c'est un petit frère, comme l'a dit le Président ?
01:47Et le Président, est-ce que c'est un titre honorifique,
01:49comme l'a dit Marine Le Pen à propos du chef des armées ?
01:51On voit bien que les Français sont un peu confus maintenant sur la question.
01:54Je disais confusion sur les programmes aussi,
01:56avec qu'est-ce qui est finalement dans le programme, qu'est-ce qui n'y est plus ?
01:58On a passé deux semaines à en parler.
02:00Confusion aussi quand on voit la nature des programmes,
02:02où il s'agit beaucoup de défaire, que ce soit la gauche ou que ce soit le RN,
02:06plutôt que de faire.
02:07Confusion enfin sur les consignes de vote,
02:09à l'image de la confusion entretenue entre tous les camps pendant cette campagne,
02:13qui placent des signes égales entre le RN et le Nouveau Front Populaire.
02:17Du côté de la gauche, on dit qu'Emmanuel Macron était un Le Pen soft.
02:20Bref, les Français ont bien eu du mal à s'y retrouver.
02:23Et d'ailleurs, les consignes de vote du camp présidentiel hier soir ne sont pas très claires.
02:27Face au RN, l'heure est un large rassemblement clairement démocrate et républicain
02:31pour le second tour, a dit le Président.
02:32Mais c'est quoi un rassemblement clairement démocrate et républicain ?
02:35Qui est dehors, qui est dedans ?
02:36Même chez Gabriel Attal, qui a tenté d'être un peu plus clair.
02:39Cela passera par un désistement pour qui défendre, comme nous,
02:42les valeurs de la République ?
02:43Mais qui les défend, ces valeurs de la République ?
02:44Est-ce que le Président de la République va admettre que c'est une sanction personnelle ?
02:48C'est une sanction personnelle, clairement, oui.
02:51Une sanction de sa politique, de la part d'un grand nombre de Français,
02:53même si, comme d'habitude, on s'apercevra qu'il n'y avait pas de si mauvaises choses aussi dans son bilan.
02:58Il y a des choses qui ont fonctionné, mais qu'il n'a pas réussi à faire émerger,
03:02ou en tout cas à populariser.
03:04Mais il y a surtout une sanction de sa pratique du pouvoir vertical,
03:07une forme d'entêtement personnel.
03:08Il a décomposé le paysage politique à coups de débauchage,
03:11sans jamais réussir à laisser permettre quelque chose d'émerger.
03:16Et puis, on le voit bien aussi, une sanction de décision prise tout seul.
03:21Cette dissolution, c'est lui qui l'a décidée, tout seul, à l'Élysée.
03:24Combien seront-ils, ce matin, à lui en vouloir, y compris dans son propre camp ?
03:28Il y a une image qui était symbolique hier,
03:29c'était l'image du Président de la République avec cette casquette,
03:32quasi incognito, dans les rues du Touquet.
03:34Vous le voyez ici.
03:37Un président incognito, un président effacé, en tout cas,
03:42au soir de ce premier tour des élections législatives.

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