• il y a 5 mois
Grand témoin : Anne Lauvergeon, ancienne Sherpa et secrétaire générale adjointe aux côtés de François Mitterrand et autrice de « La promesse » (Grasset)

GRAND DÉBAT / RN : prêt pour Matignon ?

« Le récap » par Bruno Donnet

À la suite de l`annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron, le Rassemblement National, gagnant des élections européennes en France, a publié ses premières promesses de campagne sous forme d'un tract. Titré « Pour un gouvernement d'union nationale, Bardella premier ministre » et axé autour de la sécurité, du pouvoir d'achat et de l'immigration, la profession de foi du RN démontre les ambitions de pouvoir et de gouvernance du parti. La liste de Jordan Bardella a réuni plus de 30% des suffrages lors des élections européennes. Les sondages estiment que le RN devrait arriver largement en tête des élections législatives du 30 juin et 7 juillet 2024. Alors que le RN n'a jamais été aussi proche de prendre le pouvoir, ses représentants sont-ils en capacité de gérer le pays ?

Invités :
- Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire et auteur de « Aux portes du pouvoir », (Michel Lafon)
- Virginie Martin, docteure en sciences politiques à Kedge Business School,
- Alexandre Devecchio, rédacteur en chef du service débats du Figaro.

GRAND ENTRETIEN / Anne Lauvergeon : 5 ans dans l'intimité de François Mitterrand à l'Elysée

Un homme aux visages multiples, curieux de tout et fidèle en amitié : c'est ainsi que l'ancienne secrétaire générale de l'Elysée Anne Lauvergeon dépeint "son" François Mitterrand dans "La Promesse". Chargée de préparer les sommets internationaux du président entre 1990 et 1995, elle raconte leurs échanges, les voyages et les rencontres avec les grands leaders de la décennie, de Georges Bush à Gorbatchev en passant par John Major. Elle décrit aussi le souvenir douloureux de la cohabitation avec Édouard Balladur, où un Mitterrand malade continue tant bien que mal d'incarner la fonction présidentielle. Décédé il y a maintenant près de 30 ans, qu'aurait-il pensé de la crise politique actuelle et de la possible accession au pouvoir de l'extrême-droite ?

Grand témoin : Anne Lauvergeon, ancienne Sherpa et secrétaire générale adjointe aux côtés de François Mitterrand et autrice de « La promesse » (Grasset)

LES AFFRANCHIS

- Vincent Hugeux, enseignant à Sciences Po et ancien grand reporter,
- Pierre-Henri Tavoillot, philosophe,
- « Campagne express » : Elsa Mondin-Gava, journaliste LCP.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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News
Transcription
00:00Générique
00:02...
00:06Bonsoir et bienvenue.
00:07Très heureuse de vous retrouver dans Savo,
00:10la cohabitation mode d'emploi avec vous,
00:12Anne Lauvergeon. Bonsoir.
00:14Merci beaucoup d'être notre grand témoin ce soir.
00:17Vous en avez vécu une, de cohabitation,
00:20de l'intérieur, Mitterrand-Baladur,
00:2393-95.
00:25Vous le racontez dans La Promesse,
00:27chez Grasset, le livre que vous avez promis d'écrire
00:30à François Mitterrand, que vous avez conseillé
00:33pendant 5 ans. On va en parler dans la 2e partie.
00:36Une cohabitation.
00:37Bardella-Macron serait-elle condamnée à la paralysie ?
00:40Vous nous le direz ce soir.
00:42Cette question dans notre grand débat ce soir.
00:45Le RN peut-il gouverner ?
00:47Le parti de Marine Le Pen jure d'avoir les ressources
00:50et la compétence nécessaires dans l'appareil d'Etat.
00:53Mais déjà, les inflexions sur son programme interrogent.
00:56On en débattra dans un instant sur ce plateau.
00:59Enfin, nos affranchis ce soir, l'international Vincent Hugeot.
01:02Quelle place pour la France dans le monde
01:05si l'extrême droite l'emportait ?
01:07Un peuple souverain a-t-il toujours raison ?
01:09C'est la question philo de Pierre-Henri Tavoyau.
01:12Enfin, votre nouveau rendez-vous,
01:14Campagne Express, J-18, avant le 1er tour.
01:17Voilà, ça vous regarde. C'est parti.
01:19On y va ? A l'auberge ? Top générique.
01:21Générique
01:22...
01:33Ils sont aux portes du pouvoir, mais sont-ils prêts à gouverner ?
01:36Longtemps, cette question a été synonyme de talon d'Achille.
01:40Pour le RN, on va se demander, ce soir,
01:42si les choses ont changé.
01:43La grande prudence,
01:44affichée depuis quelques jours par Marine Le Pen et Jordan Bardella,
01:48sur l'application de leur programme,
01:51sur leur capacité à tenir leurs promesses au pouvoir.
01:55Bonsoir, Virginie Martin.
01:56Merci d'être avec nous.
01:58Ce soir, vous êtes politologue,
02:00professeur au Kedsch Business School en sciences politiques.
02:03Bonsoir, Alexandre Lébékio.
02:05Ravie de vous retrouver sur ce plateau.
02:07Vous êtes rédacteur en chef du service Débat du Figaro.
02:10Bonsoir, Arnaud Benedetti.
02:12Bienvenue, rédacteur en chef de la revue politique
02:15et parlementaire aux portes du pouvoir chez Michel Laffont.
02:18Votre dernier ouvrage,
02:19et si la victoire du RN était inéluctable ?
02:22Vous avez le sens du timing, c'est le moins qu'on puisse dire.
02:25Arnaud Verjon, vous n'hésitez pas à intervenir.
02:28On va commencer par planter le décor.
02:30Plus il se rapproche du pouvoir et moins le RN se radicalise.
02:33Pourquoi ? C'est dans le récap de Bruno Donnet.
02:36Tout de suite.
02:39Avec un jingle, normalement, en musique,
02:42mais pourquoi il est...
02:43Voilà, exactement.
02:45Le voilà. Il est un peu capricieux, ce jingle.
02:48Bonsoir, Bruno.
02:49Bonsoir, Myriam.
02:50Dans votre récap, cette question,
02:52le RN est-il prêt à gouverner ?
02:54C'est une question un peu complexe, Myriam.
02:57Myriam, cette question est complexe
02:59parce qu'elle nécessite de définir d'abord
03:01deux notions très importantes.
03:03Un, qu'est-ce que c'est, le pouvoir ?
03:05Et deux, à quel moment le Rassemblement national
03:08doit-il être prêt ?
03:10Car si on en croit la dernière déclaration de Marine Le Pen,
03:13il n'y a pas de problème.
03:15Nous sommes prêts à le faire.
03:16Nous allons le faire avec enthousiasme
03:19et avec soulagement, car je pense qu'on fait gagner ainsi
03:22trois ans au pays.
03:24Ils sont prêts.
03:26Mais prêts à quoi, exactement ?
03:29Si on écoute maintenant très attentivement
03:31Jordan Bardella, il y a tout de même
03:33une petite subtilité.
03:35Nous sommes prêts à gouverner.
03:37Nous avons un certain nombre de textes de projet de loi
03:40qui sont prêts à entrer en vigueur.
03:42Dans le cas d'une cohabitation, on ne peut pas faire
03:45ce que la présidence de la République vous permet de faire.
03:48Le Rassemblement national est prêt dans le cadre d'une cohabitation.
03:52Qu'est-ce que ça veut dire ?
03:54Si on en croit nos confrères du Parisien,
03:56ça signifie que le parti de Marine Le Pen se prépare, en réalité,
03:59à proposer une version très édulcorée de son programme.
04:02Voilà pourquoi interroger avant-hier sur France 2
04:05Jordan Bardella est resté on ne peut plus flou.
04:08Si les Français m'accordent leur confiance
04:10et que je suis demain le chef du gouvernement,
04:13j'établirai des urgences et des priorités
04:15qui me semblent être eux-selles aujourd'hui
04:18du pouvoir d'achat, de la sécurité et de l'immigration.
04:21Flou sur les mesures précises qu'il envisage de mettre en oeuvre
04:24et pas très clair non plus sur sa position
04:27vis-à-vis des réformes en cours.
04:29Est-ce que vous abrogez la réforme des retraites ?
04:32Mais nous verrons, excusez-moi, je vais hériter,
04:35si nous avons la chance d'accéder...
04:37Je m'adresse à quelqu'un qui va être Premier ministre.
04:40Economiquement, je suis raisonnable.
04:42Le RN reviendra sur la réforme des retraites,
04:45mais raisonnablement.
04:47Qu'est-ce que ça veut dire ? On ne sait pas trop.
04:49La seule chose qu'on sait, en revanche,
04:52c'est qu'abroger la réforme des retraites,
04:54ça coûterait 22 milliards d'euros.
04:56Quelle est la stratégie dans cette édulcoration ?
04:59La stratégie, Myriam, c'est celle des petits pas.
05:02Connaissez-vous, par exemple, la priorité de Jordan Bardella ?
05:07Ma priorité, ce sera de faire baisser les factures d'électricité.
05:11Réduire les coûts de l'énergie en abaissant la TVA
05:14de 20 à 5,5 %.
05:17Bon, et pourquoi ? Et pourquoi pas des petits pas ?
05:20Pourquoi des petits pas ?
05:22Tout simplement pour éviter les faux pas.
05:24Ce qui intéresse le RN, ce n'est pas Matignon dans trois mois,
05:28c'est l'Elysée dans trois ans.
05:30Car ce n'est qu'en accédant au sommet de l'Etat
05:33que Marine Le Pen pourrait enfin s'attaquer
05:36à son grand sujet de prédilection, l'immigration.
05:39Nous préparerions d'ores et déjà
05:42l'accession à la présidence de la République,
05:45qui permettra, par exemple, de mettre en oeuvre
05:48le grand référendum sur l'immigration,
05:50pour enfin reprendre totalement la maîtrise de l'immigration.
05:53Bref, vous l'avez compris,
05:55l'urgence pour le RN est donc de ne surtout pas faire peur
05:59et d'éviter toute forme de dérapage.
06:01Le Parisien prête à Marine Le Pen une martingale
06:04qui résume merveilleusement la situation.
06:06La patronne du parti aurait déclaré
06:08que si on fait simplement du bon boulot,
06:11ça apparaîtra comme du très bon boulot.
06:13Vous le voyez, Myriam.
06:15Le RN est prêt, il est prêt surtout à patienter.
06:18Merci beaucoup. Merci, Bruno Donnet.
06:20Alexandre de Vecchio,
06:21elle vous surprend, cette stratégie des petits pas du RN ?
06:25Cette prudence,
06:26pourquoi ça doit rassurer les électeurs pour le premier tour
06:29ou tout simplement les avertir ?
06:31Les marges de manoeuvre seront trop faibles
06:33pour renverser la table, même une fois à Matignon.
06:36Non, je suis pas du tout surpris, d'abord,
06:39parce que les partis dits populistes,
06:41quand ils se rapprochent du pouvoir,
06:43ils se recentrent, c'est normal.
06:45D'ailleurs, tous les partis se recentrent
06:47quand ils se rapprochent du pouvoir.
06:49On l'a vu avec Mélanie en Italie.
06:51J'étais persuadé que Marine Le Pen ferait la même chose.
06:54Même dans le cadre d'une présidentielle,
06:57pour arriver au pouvoir, il faut des alliances
06:59et donc il faut tenir compte de ses alliés.
07:02Il y a une alliance qui se dessine avec les LR
07:04et qui n'a pas la même vision économique.
07:06Enfin, je suis d'autant moins surpris
07:09que l'accession probable du RN au pouvoir
07:12intervient dans un contexte de cohabitation
07:14qui, là, pour le coup, était inattendu.
07:16Effectivement, ça va réduire leurs marges de manoeuvre
07:20et leurs leviers.
07:21Je crois que l'une des tâches principales
07:24du RN, le coeur de leur programme,
07:26c'est quand même la lutte contre l'immigration.
07:29C'est vrai que dans un contexte de cohabitation,
07:31ce sera plus compliqué, puisque le coeur de leur programme
07:34est de faire une réforme constitutionnelle,
07:37peut-être un référendum, mais ce ne sera pas possible
07:40car ce sera entre les mains du président de la République.
07:43Pour toutes ces raisons,
07:45parce qu'on est dans un contexte budgétaire très compliqué,
07:48qu'il faut rassurer les électeurs,
07:51mais aussi les marchés financiers,
07:53pour toutes ces raisons, on assiste
07:55à un recentrage prévisible du RN,
07:59mais rien que de très normable.
08:02C'est ce qu'on a observé un peu près partout
08:04avec ce type de parti, à l'exception peut-être
08:07de Donald Trump, c'est lié à sa personnalité,
08:10mais il était chef d'un parti finalement classique.
08:13C'est un populiste qui avait pris le pouvoir
08:16dans un parti assez classique,
08:17donc ça explique peut-être cette exception.
08:20Pour le reste, voilà, on nous avait dit
08:22péril fasciste, là, on joue la musique du chaos économique.
08:26Effectivement, elle va tenter de rassurer
08:28les retraités qui ont un poids électoral
08:30très important dans ce pays.
08:32C'est la stratégie Virginie Martin,
08:34d'Emmanuel Macron, cette réforme des retraites,
08:37le retour à 60 ans, prenez au départ,
08:39il y a maintenant, on a l'impression
08:41que c'est très vieux, mais c'était simplement en 2022.
08:45Marine Le Pen mènerait le pays dans le mur, la faillite.
08:48Vous comprenez cette évolution sur l'économie aussi rapide ?
08:52On sait rien.
08:54Pour l'instant, l'évolution, elle n'est que médiatique,
08:57c'est juste des petites phrases, ici ou là.
08:59Par ailleurs, aussi, sur le recentrage,
09:01on va dire, rappelons-nous d'un certain François Hollande,
09:05qui n'est pas d'un parti populiste,
09:07à ce que je sache, qui parle un jour de l'ennemi
09:10comme de son ennemi est la finance,
09:12et quelques mois après, quelques années après,
09:14à Emmanuel Macron comme ministre de l'Economie.
09:17Je pense que, comme grand écart, ça se posait là,
09:20il n'y avait rien d'un parti populiste,
09:22puisqu'il s'agit du Parti socialiste.
09:24Il y a une prise de risque vis-à-vis des électeurs.
09:27Des intentions pour rien faire.
09:29Finalement, la retraite, ça changera pas.
09:31Je crois qu'on va un peu vite, quand même.
09:34Nous sommes mercredi, je crois, je sais même plus quel jour on est.
09:37Jeudi, tellement tout va vite, justement.
09:40Emmanuel Macron a mis cette bombe de la dissolution
09:42au milieu du paysage politique français,
09:45il y a 72 heures.
09:46Ca va très vite.
09:47N'allons pas trop vite en besogne sur ce programme, justement.
09:51Il faut aussi qu'il continue
09:52à ne pas se faire embarquer, si je puis dire,
09:55par des LR, en la personne d'Éric Ciotti
09:58et certainement, évidemment, du président des jeunes LR,
10:02dans un programme économique qui irait se couper
10:04de leur électorat extrêmement populaire,
10:07ne l'oublions pas.
10:08C'est vraiment le parti qui pénètre le mieux
10:11les électorats populaires.
10:12C'est vraiment le socle, et depuis des années et des années.
10:16Le RN, FN, n'ont jamais eu ni l'un ni l'autre
10:19d'électorat bourgeois
10:21installé, vieux, et tout cela.
10:24Contrairement au fantasme qu'on entend tous les jours.
10:27C'est incroyable,
10:30cette idée complètement fausse
10:32de penser que ce sont des vieux retraités
10:36qui votent FN depuis 30 ans.
10:38J'entendais encore tout à l'heure.
10:40Récemment, ils ont conquis les classes populaires.
10:44Non, de tout temps.
10:45De tout temps.
10:47Il faut faire très attention avec cette alliance
10:49qui peut aussi leur faire, peut-être, ici ou là,
10:52se couper de leur base électorale la plus solide.
10:55Arnaud Mélenéti, le RN anticipe, quoi,
10:57en disant qu'on ne pourra pas tout faire en cohabitation,
11:01une majorité relative.
11:03Si c'est ce scénario, il faut rester prudent,
11:05parce que là, c'est vrai que notre editing,
11:08en beau français, fait comme s'ils étaient déjà là.
11:11Il faut aller voter, il faut le rappeler.
11:13Mais quand même, il ne pourra pas faire grand-chose,
11:16Jordan Bardella, s'il a une majorité relative ?
11:18C'est la paralysie annoncée ?
11:20D'abord, le RN gère son avance,
11:22au moins dans les intentions de vote.
11:25Plus il se rapproche du pouvoir,
11:27plus il faut qu'il ait un visage rassurant.
11:30Il y a deux enjeux, mais ils ont été parfaitement résumés
11:34par Alexandre de Vécu et Virginie Martin.
11:36Il faut à la fois incarner une promesse de rupture
11:39par rapport à l'électorat, notamment des classes populaires,
11:42voire d'une partie des classes moyennes.
11:45Il faut rester solide sur les fondamentaux
11:47de cette promesse de rupture,
11:49mais en même temps, vous devez aller rassurer
11:52cet électorat bourgeois, conservateur,
11:55attaché aux problématiques économiques.
11:58On voit bien que depuis, d'ailleurs,
12:01ça ne date pas de ces dernières semaines,
12:04ça fait maintenant plusieurs mois
12:05que le RN s'efforce au moins d'avoir un visage rassurant
12:09vis-à-vis du segment électoral.
12:11Quand on discute avec des cadres du RN,
12:13qu'est-ce qu'ils vous disent ?
12:15Surtout, on ne veut pas que notre programme économique
12:18soit associé à celui de la France insoumise.
12:20Très souvent, vous avez un certain nombre de critiques,
12:23notamment des banques de la droite républicaine,
12:26qui disent que Marine Le Pen a à peu près un copier-coller
12:29sur le plan économique du programme de Jean-Luc Mélenchon.
12:32Mais pour les classes populaires,
12:34il faudra faire du social et être dépensier.
12:37C'est un parti gestionnaire soucieux des finances publiques ?
12:41Pour répondre à votre question,
12:42en effet, déjà, la situation de cohabitation,
12:45Mme Lauvergeon en parlera beaucoup mieux que nous,
12:48est une situation qui est compliquée,
12:50politiquement, institutionnellement,
12:53mais dans le cadre d'une majorité relative,
12:58vous imaginez bien qu'elle est encore plus compliquée.
13:01Elle est compliquée pour plusieurs raisons.
13:03Le président de la République dispose d'un certain nombre
13:07de prérogatives qui lui sont échues par la Constitution
13:10et qui lui permettent, à un moment donné,
13:12en fonction des circonstances, de gêner,
13:14voire d'entraver l'action d'un Premier ministre.
13:17Je rappelle que François Mitterrand refuse
13:19de signer un certain nombre d'ordonnances
13:22entre 86 et 88.
13:24Ensuite, il exerce quand même
13:26un contrôle sur un certain nombre de pouvoirs de nomination,
13:30également, donc c'est pas négligeable.
13:33Et puis, il y a un autre sujet,
13:34c'est le sujet de l'administration et de la haute administration.
13:38Parce que, si vous voulez, quand vous disposez
13:40de tous les leviers, c'est-à-dire l'Elysée et Matignon,
13:44vous pouvez quand même vous assurer plus facilement
13:46du contrôle de la haute administration.
13:49Quand vous êtes dans une situation où le rapport de force
13:52est plus compliqué, ça risque d'être plus difficile.
13:55Pour que les réformes soient appliquées,
13:57autant avoir un Etat derrière, à l'oeuvre.
14:00Il y avait deux sensibilités au RN
14:02quant à cette question de la dissolution.
14:04Quand je les ai interrogées en faisant cette enquête,
14:07vous avez une sensibilité qui dit qu'il faut y aller tout de suite.
14:10Que ça se fasse le plus rapidement possible.
14:13C'était la ligne tenue par le maire de Perpignan, Louis Alliot.
14:16En même temps, vous avez une autre sensibilité qui dit
14:19que la cohabitation risque d'être difficile, compliquée,
14:22parce que ça peut être un frein, finalement,
14:24à notre accession, plus tard, à l'Elysée.
14:27Les événements étant ce qu'ils sont,
14:29la boîte de Pandore est ouverte, si je puis dire,
14:31et nous verrons ce qui se passera le 7 juillet.
14:34Alors que nous sommes en direct, le président de la République
14:37est revenu sur sa décision de dissoudre
14:40la décision la plus démocratique qui soit, vient-il de dire.
14:43Anne-Laure Erjon, nous, on a envie d'avoir votre regard,
14:46parce que vous la connaissez de l'intérieur.
14:48On a parlé de cohabitation de velours,
14:50Mitterrand-Balladur.
14:52A vous lire, c'était pas si évident que ça.
14:54A quoi pourrait ressembler ?
14:56On est dans le cadre d'une majorité relative.
14:58C'est ce que donnent les projections.
15:00Tout peut changer, bien sûr,
15:02entre Emmanuel Macron et Jordane Bardella.
15:04Je partage totalement ce que vous dites
15:07et je le trouve assez habile de la part de Marine Le Pen
15:10de donner le sentiment, finalement, qu'il y aurait...
15:13Enfin, il y aura, il y aurait deux temps.
15:15Un temps d'une cohabitation pourrait faire quelque chose,
15:18mais pas énormément de choses,
15:20et puis un deuxième temps sérieux, où moi, je serai présidente.
15:24Donc, ça, je trouve ça très habile d'installer,
15:27d'instiller cette idée,
15:28c'est-à-dire que sous cette cohabitation,
15:31on ne pourra pas faire le maximum de ce qu'on veut.
15:33Il y a une dimension qu'on n'entend pas,
15:36dont on n'entend pas beaucoup parler,
15:38du programme économique du RN,
15:39mais on voit que, là aussi,
15:41les choses sont en train d'évoluer en douceur,
15:44vers une certaine...
15:45Un système un peu plus normé.
15:48C'est la question de, ont-ils les personnes,
15:50les hommes, les femmes, pour gouverner ?
15:53Alors, je crois qu'effectivement, l'initiative d'Éric Ciotti,
15:56qui a été stoppée par les grands hiérarques hier,
16:02eh bien, en même temps, je pense que, sur le terrain,
16:05un certain nombre de maires,
16:07un certain nombre de maires LR,
16:09parce qu'on est dans des législatives
16:11qui vont être très rapides,
16:13où les programmes n'auront pas le temps
16:15de s'exprimer vraiment,
16:16il n'y aura pas de débat sur les programmes,
16:19ou très peu, un certain nombre de LR
16:22vont avoir la tentation,
16:24on ne se tue pas des présidentielles,
16:26on n'est pas dans un élan des présidentielles,
16:28de dire, pourquoi pas, moi, effectivement,
16:31je m'aligne, parce que...
16:32Il faut choisir l'alliance et ne pas avoir de candidat RN.
16:35On pourrait avoir, effectivement, pas mal de députés LR
16:38et donc un programme un peu plus mixte.
16:40Mais il y a une dimension supplémentaire,
16:43c'est celle de l'international.
16:45Une cohabitation, ça suppose, effectivement,
16:47qu'on trouve une cote mal taillée,
16:49ou bien taillée, en tout cas,
16:52qui se taille sur le plan pratique,
16:54sur la politique intérieure,
16:57et puis, il y a la politique extérieure,
16:59et c'est là où je crois que le grand écart
17:01entre le président de la République
17:04et un gouvernement qui serait animé
17:08par le Rassemblement national,
17:10c'est là où on a d'énormes problèmes.
17:13On a un énorme problème de l'Europe.
17:15Il y a quand même des visions différentes.
17:17Et puis, le deuxième sujet, c'est Russie-Ukraine.
17:20Ils n'ont absolument pas la même vision de ce qu'il faut faire.
17:24On y reviendra avec notre chroniqueur
17:26à la fin de cette émission.
17:27Une petite question, est-ce qu'on voit les divergences ?
17:30Elles sont fondamentales.
17:32Si Jordan Bardella gouverne,
17:33est-ce qu'il a les moyens d'empêcher
17:35la position française macroniste
17:38de se tenir, notamment sur la Russie,
17:40sur l'Ukraine ?
17:41Est-ce que la pression peut exister
17:43au point de changer les positions ?
17:45Le paradoxe de la cohabitation que j'ai connue,
17:48c'est que, sur le plan extérieur,
17:50il y avait une forme d'accord sur l'essentiel.
17:53Il y avait des divergences,
17:55des sensibilités un peu différentes,
17:57mais on arrivait à se mettre d'accord.
17:59Et jamais, à l'international,
18:01on s'est retrouvés à ferrailler.
18:04Là, je ne vois pas comment on fait.
18:06On y reviendra avec Vincent Eugeux,
18:08c'est l'objet de sa chronique.
18:10Avec qui ? C'est une vraie question.
18:12D'ailleurs, les Français, souvent,
18:14dans les enquêtes, quantitatives ou qualitatives,
18:17disent que oui, on veut le RN,
18:20on veut que ça change, on a tout essayé,
18:22mais sur les items de crédibilité et de compétence,
18:27souvent, le bas blesse, y compris dans les enquêtes.
18:31Il y aura suffisamment de ressources humaines,
18:35si j'ose dire, avec peut-être les maires LR
18:38pour la défense, pour le quai d'Orsay,
18:40pour l'éducation nationale ?
18:42Pour former un gouvernement,
18:44les ressources humaines, c'est jamais ça qui manque.
18:47Vous verrez qu'il y aura des gens pour se proposer.
18:49Et je pense qu'en plus,
18:51ils sont en train de nouer des alliances,
18:54et donc, on peut imaginer qu'Éric Ciotti sera, par exemple,
18:58au ministère de l'Intérieur.
19:00Du côté de Reconquête,
19:02il n'y a pas eu d'alliance vraiment nouée,
19:05mais Marion Maréchal a tendu la main
19:08et il y a beaucoup de cadres chez Reconquête.
19:11Je pense que, pour ce qui est du gouvernement,
19:13ça ne manquera pas.
19:15Maintenant, les hauts fonctionnaires,
19:17c'est autre chose, d'autant plus que dans cette histoire,
19:20il faut savoir ce qu'il y a dans la tête d'Emmanuel Macron.
19:23C'est possible qu'il ait eu une bouffée d'orgueil,
19:26de narcissisme et qu'il s'est dit qu'il avait perdu les élections
19:30et qu'il faisait une dissolution,
19:31mais c'est peut-être aussi quelque chose de plus prémédité.
19:35On peut se demander, très franchement,
19:37s'il ne souhaitait pas une cohabitation,
19:39justement, pour empêcher Marine Le Pen d'accéder à l'Elysée.
19:44Et dans ce cas-là, on peut prédire une cohabitation très, très dure,
19:48où le président de la République fera l'obstruction
19:51et mettra tout en oeuvre
19:53avec l'appareil juridico-administratif
19:56pour verrouiller l'appareil d'Etat.
19:58C'est un vrai risque.
19:59Quand on fait un budget, par exemple,
20:01la direction du Trésor, c'est très important,
20:04le patron de l'administration de Bercy, c'est très important,
20:07ces nominations-là, c'est l'Elysée.
20:09Elle n'a pas le pouvoir de...
20:11Non, pas du tout, c'est entièrement ministériel.
20:14Un ministre peut changer tous les hauts fonctionnaires
20:17qu'il souhaite.
20:18Donc, avec un gouvernement...
20:20J'essaie de comprendre.
20:21On essaie de décrypter pour essayer de voir.
20:24C'est les ressources humaines pour savoir.
20:26Aujourd'hui, quand même...
20:28C'est plus compliqué de trouver des gens...
20:30Il faut quand même bien voir que le trombinoscope du RN
20:34s'est sérieusement élargi et un petit peu renforcé.
20:37Déjà, en professionnalisation,
20:40puisque ça fait depuis 2022
20:42qu'ils ont quasiment 90 députés,
20:45donc c'est énorme, tout ça,
20:46le travail, la notabilisation, la professionnalisation,
20:49la technicité, si vous voulez, c'est très important.
20:52Il y a aussi, derrière tout ça, un arsenal d'assistances.
20:56C'est important.
20:57Il y a le collectif des hauts races.
20:59Beaucoup d'enquêtes montraient
21:01qu'il n'y avait pas forcément autant de hauts fonctionnaires
21:04dans ce collectif que prévu.
21:06Aujourd'hui, on voit très bien,
21:07et il y a plusieurs enquêtes qui le montrent,
21:10que les hauts fonctionnaires,
21:12qui commencent à arriver au RN,
21:15on le voit avec l'école
21:16qu'a monté Jérôme Sainte-Marie Le Sondeur,
21:19l'école Émera...
21:20-...qui est d'ailleurs
21:21candidat aux législatives sur la bannière RN.
21:24-...dans les Hautes-Alpes, si mes souvenirs sont bons.
21:27On voit bien que là, il y a beaucoup, beaucoup d'anonymes
21:31qui écrivent dans cette école
21:33et qui sont généralement, justement,
21:35des hauts fonctionnaires, des énarques, etc.
21:38Pour l'instant, c'est beaucoup d'anonymats,
21:40mais une fois que le pouvoir est acquis,
21:42les anonymes se réveillent.
21:44Ils ont pris aussi dans leur filet, quand même, pour les Européennes,
21:48des gens comme Malika Sorel,
21:50quand même relativement à une figure intellectuelle.
21:53-...comme vous.
21:54-...et une intellectuelle.
21:55-...Fabrice Légery.
21:57-...Fabrice Légery, j'allais y venir,
21:59l'ancien de Frontex,
22:01des gens comme M. Vallée, commissaire.
22:04Vous voyez, c'est pas rien.
22:06Et puis, il y a des expériences,
22:07j'en parlais à l'Assemblée,
22:09mais il y a aussi l'expérience municipale.
22:11Louis Alliot, aujourd'hui,
22:13qui est vice-président de l'agglomération de communes...
22:18-...l'EOPR.
22:19-...autour de Perpignan.
22:20C'est aussi des choses importantes.
22:22Il y a des Sébastien Chenu, des Julien Sanchez.
22:25Vous voyez ? Et puis,
22:27il y a aussi un précédent, on l'oublie,
22:29le précédent d'Emmanuel Macron,
22:31même s'il est allé farfouiller ici ou là,
22:34mais il y avait combien de députés qui n'avaient jamais siégé ?
22:38Ils ne savaient même pas l'adresse de l'Assemblée.
22:41Non, mais j'y viens.
22:43Et des ministres, quand même, aussi.
22:45Vous voyez ? Donc, ça aussi.
22:47Aujourd'hui, les ruptures...
22:49Les ruptures et les disruptions...
22:51-...des trois ans à l'Assemblée, ça crée des compétences.
22:54-...ça crée du vivier.
22:55On est habitués, depuis Macron,
22:57à ce que ça soit une disruption de plus ou pas.
23:00Arnaud Benedetti, le collectif des Horaces,
23:02c'est du sérieux ?
23:03C'est vraiment la locomotive
23:05de fonctionnaires qui sont prêts à s'engager ?
23:07Le collectif des Horaces a été monté
23:09par un ancien membre de cabinet ministériel
23:12de ministre de Jacques Chirac, André Rouget,
23:15qui a travaillé pour Dominique Perbène,
23:17qui a travaillé également pour Bernard Pont,
23:20en son temps, et ce collectif vise, en effet,
23:22à faire venir un certain nombre d'experts
23:25de la haute fonction publique,
23:27voire parfois du monde de l'entreprise,
23:29voire de l'université, qui sont chargés de deux choses.
23:32D'abord, de plancher sur le programme
23:34du Rassemblement national, c'est une question essentielle.
23:37J'en ai parlé en début d'émission.
23:39Ensuite, de cartographier, si vous voulez,
23:42tous les postes qui leur semblent clés
23:44dans l'appareil d'Etat,
23:45et d'identifier des ressources humaines
23:47qui seraient susceptibles, le moment venu,
23:50au sein même de la haute administration,
23:52de pouvoir occuper ces postes.
23:54Voilà la mission des Horaces.
23:56Il y a une comparaison qu'on pourrait faire,
23:58mais qui n'est pas bonne,
23:59c'est la comparaison de l'arrivée du PS au pouvoir en 1981.
24:03Je me souviens, à l'époque, on tenait un discours,
24:05que ces gens-là ne seraient pas capables
24:08de tenir les rênes du pouvoir.
24:09Il y avait une différence fondamentale,
24:12c'est que François Mitterrand avait exercé
24:14des responsabilités ministérielles nombreuses et multiples
24:17sous la 4e République, qu'il avait autour de lui
24:20des gens avec lesquels il avait été membre de la 4e République,
24:23et que le Parti socialiste disposait, indéniablement,
24:26d'un vivier d'experts, de hauts fonctionnaires
24:29beaucoup plus visible.
24:30C'est vrai qu'aujourd'hui, ils ont élargi ce vivier,
24:33mais la grande différence,
24:35c'est que, si vous voulez, le Parti socialiste
24:37avait l'expérience très forte de l'exercice du pouvoir,
24:40par les figures qui le conduisaient,
24:42par le fait qu'il disposait de grandes mairies,
24:45par le fait qu'il disposait de compétences
24:47dans les départements,
24:49il y avait beaucoup de présidents de conseils,
24:51mais il y avait autre chose,
24:53c'est que la différence fondamentale
24:55avec le RN, c'est que le RN est innocent,
24:57si je puis dire, vierge de tout exercice du pouvoir,
25:00mis à part les quelques mairies dont on a parlé,
25:02ça fait une quinzaine de mairies, en tout et pour tout.
25:05C'est une différence fondamentale,
25:07mais je crois que ça ne fait pas peur.
25:09Le problème, c'est que ça ne fait pas peur aux Français.
25:13La grande force du RN, c'est, d'une certaine manière,
25:17d'avoir capté un sentiment très anti-système,
25:20qui considère que toutes les élites sont dans le même sac,
25:24qu'elles soient administratives, économiques, politiques,
25:27et je crois que c'est ce qui fait la motricité
25:29de sa performance électorale.
25:31Vous avez raison, il faudra exercer le pouvoir.
25:34Je ne fais pas du tout partie de ceux qui veulent faire peur,
25:37c'est une rhétorique usée jusqu'à la corde,
25:39mais je crois que l'une des raisons, justement,
25:42de la persuade du RN,
25:43c'est un sentiment de dépossession économique,
25:46de dépossession culturelle,
25:48mais aussi de dépossession démocratique,
25:50parce que, précisément, cet appareil juridico-administratif,
25:54et j'insiste sur le juridico,
25:56il n'y a pas que la haute fonction publique,
25:58il y a le Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat,
26:01le Conseil européen,
26:02toute cette superstructure, qu'on appelle Etat de droit,
26:06qui a pris beaucoup de place et qui empiète sur la souveraineté,
26:09dépossède, justement, les citoyens de leur pouvoir
26:13et réduit les hommes politiques à une certaine impuissance,
26:16parfois une impuissance voulue,
26:18parce que beaucoup d'hommes politiques
26:20sont issus de ce milieu-là et sont parfois contents
26:23de se décharger sur les contre-pouvoirs.
26:26L'un des buts du RN, c'est justement de récupérer ce pouvoir-là,
26:29ce qui sera beaucoup plus difficile
26:31avec un Emmanuel Macron à l'Elysée.
26:33On parlait de politique internationale,
26:36en politique européenne, par exemple,
26:38ça va être compliqué.
26:39On parlait de pouvoir de nomination.
26:41Il me semble que les nominations au Conseil d'Etat,
26:44au Conseil constitutionnel, c'est du ressort de présidents,
26:48elles ont déjà été faites,
26:49et les personnes qui sont à la tête de ces institutions
26:53ne bougeront pas.
26:54Je pense que ça va être compliqué.
26:56...qui est la pierre angulaire du projet.
26:58Tout ça ne pourra pas être appliqué tout de suite.
27:01Ils arrivent au pouvoir.
27:02Tout ça ne pourra pas être appliqué tout de suite.
27:05Mais ça ne veut pas dire que ça va être
27:07une catastrophe économique ou un chaos,
27:10mais ça veut dire qu'il va y avoir un match démocratique
27:13entre deux visions de la démocratie,
27:15une vision qui pense que la démocratie,
27:17c'est l'Etat de droit d'abord,
27:19et une vision qui pense que c'est la souveraineté populaire
27:22et que c'est la volonté populaire.
27:24On est allés dans la Nièvre,
27:26terre d'élections.
27:27Vous veniez nous voir, on a pensé à Nevers,
27:30la terre d'élections de François Mitterrand.
27:32On va les entendre, ces électeurs, ces dépossédés,
27:35comme vous dites, Alexandre Devecchio.
27:37Reportage d'Argo Borgogno, Yvan Hanavion, regardez.
27:40Musique douce
27:42...
27:47Pour la première fois en tête à Nevers,
27:49le score du RN a laissé certains sous le choc.
27:52On est quand même un département, à la base, qui était socialiste.
27:56Enfin, du moins, à Nevers, c'était le Parti socialiste
28:00qui a toujours été en tête chez nous,
28:02donc là, on prend quand même une grosse claque.
28:05Pour Philippe, agent des travaux publics,
28:07il est temps de leur laisser une chance.
28:09Mon père était socialiste.
28:11Il m'a dit que le jour où la droite apparaît,
28:13ça sera la guerre. On a eu Giscard, on a eu Chirac,
28:16on n'a pas eu la guerre pour autant.
28:18Mais tout de suite, on fait reposer le spectre de la guerre
28:21et on verra. Il faut leur donner leur chance.
28:24Nevers, avec ses 30 000 habitants, abandonnés par l'Etat,
28:27c'est pour certains l'un des arguments
28:29pour expliquer cette montée du RN.
28:31Nous sommes dans la désertification.
28:33Il n'y a plus d'emplois, on n'a plus de médecins.
28:36Voyez-vous, il y a tout un tas de trucs comme ça.
28:39Les usines ferment, c'est le désert médical.
28:43Nous sommes en ruralité.
28:44La vie des gens est très dure.
28:48La vie des gens est dure à la campagne.
28:50Autre élément récurrent, le pouvoir d'achat.
28:53Dans la Nièvre, c'est un des pays où on gagne le moins d'argent.
28:57Tout arment, comme on voulait.
28:59Les gens pauvres, les gens...
29:01Qu'est-ce que... Dans une ville comme ça...
29:05Qu'est-ce qu'ils veulent faire ?
29:06Ils ne peuvent même pas venir au café avant, il était plein.
29:09Là-bas, c'était plein. Aujourd'hui, il n'y a personne.
29:12Sur la terrasse d'en face, Eva, télévendeuse de 21 ans,
29:16compte bien revoter pour le parti de Jordane Bardella
29:19aux législatives.
29:20Pour moi, c'est un réel enjeu d'avenir pour la France entière.
29:23Aucun de mes amis n'était de gauche.
29:26Ils m'ont tous, quand on en a parlé entre nous,
29:29dit que pour nous, c'était la meilleure solution, le RN,
29:32et que Bardella passe aux élections.
29:35Dès qu'on voit un TikTok de lui passer,
29:38on s'envoie un petit message et on met...
29:41On identifie quelqu'un et on met Tonton B.
29:44Pourquoi Tonton B ?
29:45C'est un surnom qu'on lui a donné.
29:47Pour se reconnaître, sans dire le mot exact, Bardella.
29:50On l'appelle Tonton B.
29:51-"Le dernier politique surnommé Tonton à Nevers
29:54était François Mitterrand."
29:56Voilà des images de Marion de Vauchelle.
29:59Une réaction, ça vous...
30:00C'est un sourire amer ? C'est quoi ?
30:03J'ai récupéré la maison familiale d'Artisan dans la Nièvre.
30:08C'est la réalité qui est décrite, là, c'est exactement ça.
30:12La disparition de tous les services publics.
30:14Il faut se faire soigner.
30:16Je suis dans le nord de la Nièvre,
30:18il fallait aller à Nevers, c'est une heure de route.
30:21Maintenant, c'est Dijon.
30:22Tout est à l'avenant.
30:23Je comprends très bien le sentiment d'abandon.
30:26Il est profond et il n'y a jamais eu de réponse.
30:29C'est l'échec de qui ?
30:31Je pense que c'est une vision très parisienne,
30:35très métropole du monde.
30:37Les grandes villes, ça compte, etc.
30:40Et puis, les territoires, ben... Voilà.
30:42Une réaction rapide pour terminer ce débat ?
30:45Tour de table, Virginie Martin ?
30:47Par rapport à ce que vous venez de dire,
30:49ce qui est intéressant, c'est de voir à quel point
30:52le réel est nié par les responsables politiques.
30:54On vient de voir ça, tout de suite, vous confirmez, ça existe.
30:58Eux, ils vous expliquent que ça n'existe pas.
31:00On explique, nous, en tant que politologue, sociologue,
31:04on fait du terrain depuis 10 ans, 20 ans, 30 ans,
31:06on travaille, on essaie de comprendre
31:08les motivations des électeurs RN, FN, par le passé,
31:11et quand on leur livre les travaux,
31:13ils disent que c'est pas tout à fait ça,
31:15alors qu'on n'arrive véritablement pas d'un seul terrain
31:18un dimanche matin de marcher, vous voyez ?
31:21C'est vraiment des travaux de longue haleine,
31:24et je suis contente qu'Anneau-Vergent
31:26ne nie pas...
31:28Nos dirigeants, le pouvoir, pour vous,
31:30est soumis aux réalités du terrain.
31:32Comment vous les soignez un problème
31:34quand vous niez le diagnostic ?
31:35Des grands débats, des conventions,
31:37il y en a eu énormément avec Emmanuel Macron.
31:40Franchement, la France n'a pas les moyens de réparer.
31:44Je pose la question.
31:45Emmanuel Macron dit que ça va arriver,
31:47mais les maisons France Service...
31:49C'est une marée montante qu'on va revenir depuis très longtemps.
31:53Je me souviens de la carte électorale de 1992,
31:55au moment du traité de Maastricht.
31:57Vous retrouvez à peu près les mêmes zones d'implantation électorale
32:02du RN, dans le nom, ce qui sont celles d'aujourd'hui,
32:05dans le nom à Maastricht.
32:07Au contraire, ça s'est encore amplifié,
32:09vous voyez l'ouest de la France qui votait oui à Maastricht
32:12à voter majoritairement pour le RN.
32:14C'est un phénomène qui vient de très loin.
32:16Ca s'inscrit dans la durée.
32:18On n'a pas été capables, en effet, de répondre.
32:21On n'a pas été capables de répondre.
32:23Il n'y a plus de politique d'aménagement du territoire.
32:26Je vous donne le mot de la fin.
32:27Vous vous dites que la vague va être telle
32:30que la majorité absolue est atteignable.
32:32La marche n'est pas trop haute.
32:34Pour terminer.
32:35Il suffit de regarder les chiffres,
32:37de projeter les chiffres des Européennes
32:39sur ces législatives.
32:41On verra qu'il y a, dans la plupart des cas,
32:43des duels entre le RN et le fameux Fonds populaire.
32:46Je pense que le réflexe de fonds républicains
32:48va jouer, cette fois-ci, en faveur du RN.
32:51Mais juste pour rester sur le fond,
32:53est-ce que... Je crois que les hommes politiques
32:56se sont entêtés à défendre un modèle centré
32:59sur les grandes métropoles, un modèle technocratique
33:02qui donnait des bons indicateurs macroéconomiques,
33:05mais qui laissait hors des radars
33:06toute une partie de la France ?
33:08C'est leur volonté de ne pas changer,
33:11de rester sur une adaptation à la mondialisation,
33:15à l'Europe marchande,
33:16qui fait qu'aujourd'hui, les gens se révolent
33:18parce qu'ils ont le sentiment de ne pas être écoutés.
33:21C'est pas seulement que nous n'avons pas les moyens,
33:24c'est que nous sommes restés sur un modèle qui ne fonctionne pas.
33:28Il y a encore un tour, puis deux tours,
33:30le 30 juin, le 7 juillet, rien n'est fait.
33:33C'était important, quand même,
33:34de comprendre comment on en est arrivés là.
33:37Restez avec moi, c'est notre nouveau rendez-vous.
33:39Campagne express, Elisabeth Dengueva.
33:41Générique
33:44...
33:48Bonsoir, Elsa.
33:49Le reste de cette campagne législative
33:51incarnée ce soir commence par la droite.
33:54Je vais commencer par les Républicains.
33:56Pour le plaisir de vous montrer cette vidéo publiée
33:59sur X, anciennement Twitter,
34:02Eric Ciotti, dans son bureau, au travail,
34:05c'est ce qu'il écrit sur le réseau social.
34:07Il n'est pas très entouré, il n'y a pas beaucoup de dossiers
34:10sur le bureau. Ensuite, Eric Ciotti,
34:12qui va même faire un petit salut aux journalistes dehors,
34:16décidément, il ne fait comme si de rien n'était,
34:18comme s'il était toujours président d'un parti,
34:21alors que l'extrême majorité des cadres l'ont désavoué,
34:24lui et son accord avec le Rassemblement national.
34:27La grosse actu du jour, c'est la gauche.
34:29Bien sûr, sur ce nouveau front populaire.
34:31Il a déjà fallu s'entendre sur cette volonté d'union.
34:34Ca, c'est fait assez vite.
34:36Sur le nombre de circonscriptions
34:38qu'héritaient chacun des partis, ça, ça a été,
34:40mais ensuite, les discussions ont continué
34:43et ont été plus compliquées.
34:45Sur les circonscriptions, il y a la quantité et la qualité,
34:48celles qui sont gagnables.
34:49A gauche, c'est important.
34:51Il y a eu des négociations âpres sur le programme.
34:54Trouver les mots qui conviennent à tout le monde
34:56pour qualifier le Hamas,
34:58c'est clair sur l'antisémitisme,
35:00mais pour ceux qui veulent de ce nouveau front populaire,
35:03rassurez-vous, pas de panique.
35:05Écoutez Marine Tondelier.
35:07Ca avance non-stop depuis quatre jours.
35:10J'ai toujours dit que tous les feux allaient passer au vert.
35:13Y a rien qui bloque ?
35:14Non. Et vous, y a-t-il des choses qui vous bloquent ?
35:17Non. Rien ne bloque.
35:18Si on avait écrit un programme pour la France en deux heures,
35:22vous auriez eu raison.
35:23On prend le temps qu'il faut pour faire les choses bien.
35:26On annonçait une conférence de presse ce soir.
35:29Ce sera finalement demain matin, normalement.
35:31Puis un invité scruté par la gauche ce soir,
35:34François Hollande s'exprime.
35:36La campagne législative, c'est synonyme de grands débats.
35:39Les médias font déjà des propositions ?
35:41Oui, et pourquoi pas un débat entre Gabriel Attal,
35:44Jordan Bardella et Jean-Luc Mélenchon,
35:46tous trois Premiers ministrables, selon les médias.
35:49Le Premier ministre y est favorable.
35:51Si débat, il y a, il doit être entre ceux qui ont
35:55été plus ou moins identifiés
35:57comme potentiellement Premier ministre
35:59à l'issue de ces élections législatives.
36:02Et donc, issus de formations politiques
36:04qui ont une capacité à obtenir une majorité à l'Assemblée demain.
36:08Effectivement, avec M. Bardella pour l'extrême droite et ses alliés,
36:12M. Mélenchon pour l'extrême gauche et ses alliés,
36:15et puis moi-même pour ce bloc progressiste.
36:18Jean-Luc Mélenchon qui remercie pour l'invitation,
36:22Jean-Luc Mélenchon qui remercie pour l'invitation,
36:25mais précise que le Front populaire ne s'est pas encore mis d'accord
36:29pour une candidature à Matigny.
36:31Pour terminer, une photo qui rentrera sûrement dans l'histoire.
36:34Elle a été publiée hier sur le compte Twitter de Soazic de la Moissonnière,
36:38la photographe officielle du président.
36:40C'est l'annonce de la dissolution.
36:42Regardez les têtes de celles qui étaient présidentes
36:45de l'Assemblée nationale, Yael Brune-Pivet et Gabriel Attal.
36:48Ils ne sont pas franchement emballés par la situation.
36:51Tout à l'heure, Gabriel Attal,
36:53on lui a demandé comment le président lui avait annoncé.
36:56De but en blanc, il dit, et il n'a pas voulu raconter
36:59ses échanges entre les deux têtes de l'exécutif.
37:02Pour terminer, vous avez un podium à donner.
37:04C'est un pronostic. Première force, deuxième force, troisième force.
37:08Arnaud Bédéliti, très vite.
37:09On sort du premier tour, la première force, le RN,
37:12le Front populaire et la troisième force, la majorité.
37:15Je pense que le Front populaire peut faire des remontées intéressantes.
37:19Alexandre de Vécu.
37:20La même chose, RN, Front populaire et la majorité, loin derrière.
37:24C'est dit. Allez, on se retrouvera sûrement
37:27d'ici le 7 juillet.
37:28Vous restez avec moi, Anne Lauvergeon.
37:31On va à présent parler de votre livre,
37:33La promesse, et de ses résonances avec l'actualité.
37:36C'est chez Grasset, cette promesse que vous avez faite
37:39à François Mitterrand, couché sur le papier,
37:41vos conversations et vos échanges
37:43avec celui que vous avez conseillé de 1990 à 1995.
37:46Regardez, c'est dans l'invitation de Marion Becker,
37:48interview juste après.
37:54Si on vous invite, Anne Lauvergeon,
37:56en cette période de Big Bang politique
37:58qui pourrait déboucher sur une cohabitation,
38:00c'est parce que vous avez vécu de l'intérieur
38:03cette période singulière,
38:05aux côtés du président socialiste François Mitterrand
38:08lorsqu'il a nommé le RPR Edouard Balladur
38:11comme Premier ministre.
38:13En élisant une majorité nouvelle,
38:16très importante,
38:18à l'Assemblée nationale,
38:20vous avez marqué votre volonté
38:23d'une autre politique.
38:26Cette volonté sera scrupuleusement respectée.
38:32Je confie, dès ce soir,
38:34la charge de Premier ministre
38:37à M. Edouard Balladur.
38:39Vous étiez son oreille, sa conseillère.
38:42Vous êtes la secrétaire adjointe de l'Elysée.
38:45Vous êtes le Sherpa ou la Sherpa du président ?
38:47Le Sherpa.
38:49Le représentant personnel.
38:51Car Anne Lauvergeon,
38:52avant d'être la puissante patronne d'Areva pendant 10 ans
38:55et l'une des femmes les plus influentes du monde,
38:58selon le Time magazine,
38:59vous devenez, à 31 ans, secrétaire adjointe de l'Elysée,
39:03installée dans le bureau voisin de François Mitterrand.
39:06Vous racontez dans votre livre La promesse
39:08comment, dès 1990,
39:11le président en voyage à l'île Maurice
39:13prédisait déjà la défaite au législatif de 1993.
39:17Puis comment l'entourage de François Mitterrand
39:20la pressait de choisir un Premier ministre
39:22compatible en la personne d'Edouard Balladur.
39:26Dans un contexte de lutte fratricide à gauche,
39:29de Balladuromania dans le pays,
39:31vous dépeignez en fine observatrice
39:34les coulisses de cette cohabitation de velours
39:37pendant deux ans,
39:38qui contrastaient avec la cohabitation plus rude
39:41avec Jacques Chirac, quelques années plus tôt, en 1986.
39:44Je vous renvoie à Saint-Thomas.
39:46Voyez. Peut-être que je vous ai ajouté quelque chose ?
39:49Je crois que Saint-Thomas dit
39:51voyez et touchez.
39:54Une cohabitation courtoise
39:56pendant laquelle vous dressez le portrait
39:58d'un François Mitterrand, plus président que jamais,
40:01qui marque son territoire.
40:03Les appels étrangers sont parmi les fonctions
40:06qui sont les miennes,
40:08parmi les plus importantes
40:09et les plus clairement définies par la Constitution.
40:13Dans La Promesse, vous décrivez votre relation avec lui.
40:16Au fil des pages se dessine la confiance qu'il place en vous
40:19et votre fidélité à ce président au crépuscule de son règne.
40:24Alors, on a une question pour vous, Anne Lauvergeon.
40:27Selon vous, quel regard porterait-il
40:29sur la crise politique actuelle ?
40:32Alors, réponse ?
40:34Oh, ben, je pense qu'il...
40:38C'est impossible de faire parler quelqu'un qui est mort.
40:42Mais je pense d'abord qu'il n'aurait pas compris
40:44la nomination du nouveau Premier ministre...
40:48Gabriel Attal.
40:49...Gabriel Attal, avant les Européennes,
40:51parce que, par définition,
40:53il ne pouvait pas changer des Européennes
40:56qui allaient être perdues.
40:57C'était écrit, il n'y peut rien.
40:59Et aujourd'hui, donc, après les Européennes perdues,
41:03que faire ?
41:04Dissoudre.
41:05C'est quand même un acte incroyablement fort,
41:08et d'autant plus fort qu'on est juste avant les Jeux olympiques.
41:12Donc, à un moment donné...
41:14Ce qu'on percutait de plein fouet, vous pensez,
41:16c'est une fête gâchée ?
41:18On va avoir des nouveaux ministres, on va avoir...
41:20On a quand même besoin d'une organisation
41:23extrêmement forte.
41:24Donc, je pense qu'il eût mieux valu réserver Gabriel Attal
41:28pour l'après-Européenne.
41:29Et je crois qu'effectivement,
41:31on est devant une situation
41:33où on risque soit une chambre ingouvernable...
41:37Emmanuel Macron, d'ailleurs, depuis les poules.
41:39...soit une majorité qui ne sera pas celle de Renaissance.
41:43Donc, je ne comprends pas très bien cet acte
41:46quand même assez destructeur.
41:47Le plus démocratique qui soit Emmanuel Macron depuis l'Italie.
41:51Vous dressez le portrait d'un président qui cloisonne,
41:54qui compartimente sa vie plus qu'aucun autre.
41:57Il avait ce culte du secret.
41:59Si on doit essayer de trouver une ligne directrice,
42:03une vie, il y a plusieurs mitterrands,
42:05mais qu'est-ce qui crée ce fil rouge
42:09d'une vie complète ?
42:10Il y a plusieurs fils rouges.
42:12Il y a un fil rouge, d'abord,
42:14qui est une conviction européenne extraordinairement forte.
42:17Il a connu la Seconde Guerre mondiale
42:20et la paix en Europe,
42:22la construction d'un système
42:24qui permette aussi de faire face
42:26aux grands mammouths politiques,
42:29les Etats-Unis,
42:31l'URSS à l'époque, puis la Russie, la Chine.
42:34Il faut que l'Europe se constitue.
42:36C'était une Europe qui n'était pas tout le continent.
42:39C'était une Europe plus petite.
42:41La deuxième conviction forte,
42:43c'est un amour immodéré de la France,
42:46de ses paysages, de ses terroirs,
42:48de ses hommes, de ses femmes.
42:50Une connaissance très intime
42:53des élus, des problématiques pratiques.
42:57Le secret, c'est plutôt une méthode.
43:00C'est-à-dire, c'est...
43:02Dans sa vie personnelle,
43:06et aussi, quelque part, dans la vie politique,
43:09c'est ne pas tout dire,
43:10c'est-à-dire organiser les choses en caisson.
43:13Après tout, moi, je l'ai rarement vu mentir,
43:16mais je l'ai vu très souvent se taire.
43:19C'est ça. Vous dites qu'il avait des silences
43:22absolument assourdissants.
43:24Il parlait très peu.
43:26Il parlait très peu et, effectivement,
43:30il écoutait beaucoup.
43:31Les gens très bavards l'énervaient plutôt,
43:34parce que... Bon, mais il n'en faisait pas la remarque.
43:37Il attendait que ça se passe.
43:39Donc, oui, il était assez...
43:41Oui, assez silencieux.
43:43Des silences qui, parfois, voulaient dire beaucoup de choses.
43:46Il fallait décrypter les silences.
43:48Dans certains cas, ils étaient agaçants,
43:50parce qu'on avait envie d'avoir des réponses.
43:53Cette promesse, il vous l'a arrachée.
43:55Le pire, pour François Mitterrand, c'était l'oubli.
43:59Et donc, il vous tient la main par le bras, l'avant-bras.
44:02Vous racontez cette scène et il vous dit qu'il faudra écrire.
44:05Là. Ca, c'est quelque chose qui me touche beaucoup,
44:08parce que c'était le geste qu'avait mon grand-père maternel,
44:12que j'aimais beaucoup, Roger Martelierre.
44:14Il me tenait par l'avant-bras.
44:16François Mitterrand avait le même, avec des mains paysannes.
44:19Pour lui, c'était un signe d'affection.
44:21Voilà, il vous serrait la...
44:24Oui, il souhaitait qu'effectivement, je le fasse.
44:27Moi, j'avais pas du tout envie, parce que faire un livre comme ça,
44:32juste après la fin de son mandat,
44:35un nouveau Mitterrand et moi,
44:37ou moi et Mitterrand, moi, moi, moi...
44:39Je ne voulais pas. Je l'ai dit dans 25 ans.
44:41Voilà, de témoignages.
44:43C'est un livre qu'on pourrait qualifier d'ageographique.
44:46Vous l'aimez, vous le reconnaissez.
44:48Pas ageographique, parce que je reconnais aussi...
44:52C'est part d'ombre.
44:54Pardon ?
44:55C'est part d'ombre.
44:56Oui, et puis, il y a des tas de choses que je ne comprends pas.
44:59C'est vrai qu'on a 40 ans de différence.
45:02Moi, j'ai une formation, une vision assez différente.
45:06J'ai beaucoup appris avec lui.
45:08C'est vrai que je l'aime beaucoup,
45:10mais en même temps, je ne suis pas agéographique du tout.
45:13Mais je crois, et je continue de croire,
45:15que c'était un grand président,
45:18et un président où il y avait un gouvernement
45:20avec des forces personnelles fortes,
45:22avec des gens en cohabitation,
45:24mais même en dehors de la cohabitation,
45:27des gens qui savaient s'opposer, dire non...
45:29On a perdu cette qualité de personnalité politique ?
45:32Je trouve que oui, on a tendance à faire des gouvernements
45:36de gens qui sont...
45:37Ben...
45:39Si on était durs, je dirais un peu bénis, oui.
45:41Il y a une géographie de l'Elysée.
45:43Votre bureau jouxte celui du président
45:45et que tous ses visiteurs passent à travers votre bureau,
45:49ce qui est quand même incroyable, quand on y réfléchit.
45:52C'est pas facile, hein, toujours, parce que vous êtes interrompus,
45:55parce que...
45:56Les gens qui sortent du bureau du président,
45:59dans un certain nombre de cas, ils ont envie de parler,
46:02et vous, vous avez autre chose à faire.
46:04C'est compliqué.
46:05Les pages sur la maladie, son cancer, ses souffrances
46:08sont saisissantes, vous racontez tout, sans phare.
46:11Il vous disait, d'ailleurs, ce qui se passait pour lui.
46:14Il a été extrêmement stoïque.
46:16Est-ce que c'est ça, surtout, que vous les racontez ?
46:19Parce que c'est vrai qu'on peut s'étonner
46:21que d'un certain nombre de pages de l'histoire,
46:24je pense au Rwanda, je pense à Bousquet,
46:26ne sont pas abordées.
46:27Vous parlez de Bousquet.
46:29Vous parlez plus de Bousquet...
46:31Comme, au fond, son silence,
46:33son incapacité à répondre, après le livre de Pierre Péan,
46:37sur sa jeunesse, à tous ceux qui l'enjoignaient,
46:39de parler.
46:41Oui et non.
46:42C'est-à-dire qu'il avait une sorte de code de conduite
46:47qui était, pour moi, un petit peu énigmatique,
46:49et je le dis toujours.
46:51Bousquet avait été assassiné.
46:55Il avait été jugé, deux fois, à la libération.
46:58C'était pas à lui de refaire une condamnation publique.
47:02Bon, moi, je trouvais qu'il fallait le faire.
47:04On a eu beaucoup d'échanges là-dessus.
47:06Et il me disait que Bousquet, en même temps,
47:09il le trouvait arrogant, orgueilleux...
47:13Bon, mais c'était, en même temps,
47:15il était secrétaire général de la Dépêche du Midi,
47:18le seul journal qui l'avait aidé pendant la campagne de 65.
47:21Pour lui, l'amitié était sacrée.
47:23C'est ce qu'on retrouve dans les fils rouges de sa vie.
47:26Ah, mais l'amitié, c'est quelque chose...
47:28La fidélité, chez lui, est presque...
47:31Enfin, c'est étonnant de voir à quel point c'est...
47:36Alors, c'est très rassurant dans le monde politique,
47:39parce qu'en général, c'est plutôt l'opposé.
47:42C'est-à-dire, vous avez un problème,
47:44on vous abandonne dans le no-man's land
47:46entre les deux lignes de front,
47:49et vous êtes abandonné à votre sort.
47:52Jamais. Il y avait une forme, quand même,
47:54de solidarité stupéfiante.
47:56Un mot sur l'atmosphère d'une cohabitation,
47:59parce qu'on a parlé, et on va en reparler avec Vincent Eugeux,
48:02de ces questions de compatibilité
48:04sur le domaine réservé, l'international.
48:06Mais l'atmosphère à l'Elysée, quand vous avez Balladur,
48:10racontez-nous, il veut vous débaucher.
48:13Il vous dit, Edouard Balladur,
48:14travaillez pour moi.
48:16Il m'explique que oui,
48:18il faut que je sois quelqu'un qui a beaucoup de talent,
48:21et bien évidemment, ce talent doit être mis au service de l'avenir
48:25et pas du passé.
48:26A ce moment-là, c'est crépiculaire.
48:28Je ne comprendrai pas.
48:30Vous n'avez pas hésité ?
48:32Du tout. Moi, la fidélité, j'ai peut-être ça aussi
48:35comme défaut.
48:36Bien sûr.
48:37Non, moi, aller acheter quelque chose comme ça,
48:40pour moi, non.
48:42J'étais là pour servir la France,
48:44j'étais avec le président de la République,
48:46il n'y avait aucun doute sur le sujet.
48:48La cohabitation, oui.
48:49Ce qui est très intéressant, c'est qu'à l'Elysée,
48:52vous avez énormément d'activités, je dirais,
48:56et puis, vous avez un Premier ministre, une cohabitation,
48:59je peux vous assurer que les téléphones ne sonnent plus.
49:02Vous êtes tout d'un coup...
49:04C'est pour ça que nos chroniqueurs donnaient le sentiment
49:07que, finalement, ça allait être dur pour un Premier ministre,
49:11avec...
49:12C'est très dur pour le président.
49:14Le président, il se retrouve,
49:16c'est le tout petit village gaulois qui résiste,
49:19dans un monde où vous êtes minoritaire
49:23à l'Assemblée nationale,
49:25vous êtes après une défaite,
49:27donc, je veux dire, les gens ne sont pas très gentils,
49:30et puis, les hauts fonctionnaires ont totalement oublié
49:33même par qui ils ont été nommés.
49:35Je me souviens d'un haut fonctionnaire
49:37qui m'avait donné rendez-vous, à ma demande,
49:40dans l'arrière-salle d'un bistrot parisien,
49:43et qui m'a dit, c'est la dernière fois,
49:46c'est beaucoup trop dangereux pour moi.
49:48Vous êtes devenu radioactif, vous savez, c'est vraiment...
49:51Donc...
49:54Une cohabitation, c'est pas une partie de plaisir
49:57pour le président.
49:58-"Ce livre", qui est paru il y a quelques mois,
50:00est une forme d'avertissement dans la période que nous traversons.
50:04C'est chez Grasset, vous ne l'avez pas fait ?
50:06En tout cas, c'est à lire.
50:08C'est Grasset, et on comprend aussi pourquoi
50:11sept ans, c'est mieux que cinq ans,
50:13on découvre ça dans le livre.
50:15Et la gauche et la droite, c'est pas mal non plus,
50:17plutôt que l'extrême gauche et l'extrême droite, peut-être.
50:21Merci, Anne Lauvergeon.
50:22On termine avec nos affranchis.
50:24On vous fait réagir, on les accueille tout de suite.
50:35Pierre-Henri Tavoyeau du Collège de philosophie,
50:38bonsoir à vous et Vincent Hugeot.
50:39On a beaucoup parlé de votre chronique,
50:42qu'on a un peu déflorée, mais on connaît votre talent.
50:45Avant cela, vous nous parlez d'Emmanuel Macron
50:47et de l'implication sur les questions internationales
50:50de cette dissolution.
50:52On écoute le chef de l'Etat, depuis le G7, dans les pouilles.
50:55Est-il, oui ou non, affaibli sur la scène internationale ?
50:58C'était la question qui lui était posée.
51:00-"Affaibli", il dit.
51:01Je ne crois pas, mais mes interlocuteurs
51:04sont tous des élus démocratiques, ils ont tous dit que c'est courageux.
51:08Ils disent tous que c'est courageux.
51:10Voilà, ils disent tous que c'est courageux.
51:12Est-ce que vous êtes du même avis, mon cher Vincent ?
51:16Pas vraiment.
51:17L'aura d'une puissance serait-elle soluble
51:19dans l'acide de l'aventurisme politique ?
51:21Hélas, oui.
51:23A l'heure où s'ouvre dans les pouilles,
51:25sur les terres d'une Georgia-Melanie triomphante,
51:28un sommet du G7, la parole de la France
51:30et son rayonnement pâtissent d'une inexorable dévaluation.
51:33Seul et encore, peut-il remédier à un miracle
51:36qu'accomplirait le pape François,
51:38convié lui aussi à ce barnum planétaire ?
51:40Pour le reste, la messe est dite,
51:42le Kremlin jubile et les poètes de cour de la Poutinie
51:45ne touchent plus terre,
51:47étreint les patriotes de Gieffe,
51:49guettés par un triple péril électoral.
51:51Comme si le spectre d'un retour de Donald Trump
51:53à la Maison-Blanche ne suffisait pas,
51:56voici que leurs deux alliés européens les plus pugnaces
51:59jouent leur avenir à la roulette russe.
52:01Tout indique que le scrutin législatif anticipé,
52:04convoqué pour le 4 juillet par le Britannique Rishi Sunak,
52:07lui sera fatal, et on voit mal comment Emmanuel Macron,
52:10premier de cordée sur le front des instructeurs, des Mirages
52:13ou du Neil Obstat aux frappes ukrainiennes
52:16en territoire ennemi,
52:17échapperait au traquenard de la cohabitation.
52:19Vous utilisez le mot de traquenard ?
52:21Oui. Les enjeux internationaux relèvent
52:23du domaine réservé du président, par ailleurs chef des armées.
52:27Il n'empêche, si l'on en juge à l'aune des trois unions bancales,
52:30scellées depuis 1986, Mitterrand-Chirac,
52:33Mitterrand-Baladur, en plus d'Urban,
52:35puis Chirac-Jospin, il y a de la dissonance,
52:37voire du Toubouu dans l'air,
52:39qu'on se souvienne des couacs suscités par les otages du Liban,
52:42la suspension des essais nucléaires
52:44ou les raids de l'OTAN en ex-USAV.
52:46Stéphane Séjourné claironne qu'il exercera ses fonctions
52:50de ministre des Affaires étrangères.
52:52Le hic, c'est que lui est aussi, et surtout par les temps qui boitent,
52:55le patron du parti Renaissance,
52:57pleinement engagé à l'entendre dans la campagne éclair amorcée.
53:01Peut-on rester au quai sans rester hacké ?
53:03Une évidence. Comme son homologue aux armées,
53:06Sébastien Lecornu, Séjourné rendra son marocain
53:08dans moins d'un mois.
53:10L'extrême-droite et Jordan Bardella arrivent à Matignon ?
53:13L'histoire de ce cher et vieux pays nous l'enseigne.
53:16Quand l'orage gronde, on ne manque jamais de diplomates
53:19ou de hauts fonctionnaires prêts à voler au secours de la victoire,
53:22à faire don au nouveau maître de leur expertise et de leur réseau.
53:26Qu'ils soient mûs par une conviction sincère
53:28ou par les attraits frelatés du pouvoir.
53:30Si je devais parier à l'instant T, je miserais une pièce
53:34sur Xavier Driancourt, naguère ambassadeur à Alger,
53:36conseiller de l'ombre de la coterie lupéniste,
53:39un des deux fléaux migratoires.
53:41Mais cet arbre, si vénérable soit-il,
53:43ne saurait cacher la forêt.
53:44Quelle forêt ?
53:46Celle touffue, sombre et piégeuse de l'incompétence de l'amateurisme.
53:49Dans l'arène mondiale, deux dangers mortels menacent.
53:52L'excès de certitude et l'ignorance.
53:54Or, le très jeune Jordan Bardella, qui a si peu vécu
53:57et si souvent flotté, allie ces deux travers
54:00en un cocktail toxique.
54:01Sur les enjeux extérieurs aussi, on le sent incertain,
54:04hésitant, versatile.
54:06Donc perméable aux invariances idéologiques de ses mentors,
54:09le RN déploie des efforts colossaux
54:11pour occulter son tropisme russophile.
54:13Comme disent les marins bretons, l'image plaira chez les Le Pen,
54:17la caque sent toujours le harangue.
54:19Marine n'a jamais renié la trouble fascination
54:21que lui inspire Vladimir Poutine,
54:23ni dénoncé ses appétits colonialistes.
54:26Au fait, qui, donc, figurait au 9e rang de sa liste européenne ?
54:30Le sortant Thierry Mariani,
54:31crème linolatre impénitent
54:33et Thierry Ferrer, du criminel de guerre syrien Bachar al-Assad,
54:37avec un RN aux manettes.
54:38La voix de la France serait cacophonique,
54:41donc inaudible.
54:42D'accord avec l'analyse. En deux mots, rapidement.
54:45Très dur, mais vous avez tout à fait raison.
54:47Il y aura toujours des gens pour aller à la brevoire.
54:51Merci beaucoup. Merci, Anneau-Vergon.
54:54Et on enchaîne avec vous.
54:56Cette question, Pierre-Henri Tavoyau,
54:58le peuple souverain a-t-il toujours raison ?
55:00Dans son allocution de dimanche soir,
55:02le président en a appelé pour justifier la dissolution
55:06au peuple souverain, justement.
55:07Il y avait quatre objectifs, que je rappelle rapidement.
55:11Il disait qu'il fallait sortir des arrangements,
55:13produire une clarification, assurer l'unité
55:16et ne pas céder aux démagogies.
55:18Trois jours après, on peut dire que le pari est plutôt mitigé.
55:21En matière d'arrangements, il y en a beaucoup.
55:24Une unité qui est vraiment en péril,
55:26une clarification qui reste incertaine
55:28et une démagogie en pleine forme.
55:30On verra si ça améliore.
55:31Je voudrais revenir sur les éléments de certitude,
55:34cette question de souveraineté.
55:36C'est un concept qu'on utilise beaucoup
55:38et qui n'est pas si facile que ça.
55:40Souveraineté, histoire de la philosophie politique.
55:43L'inventeur du concept, c'est Jean Bodin,
55:45le conseiller du bon roi Henri IV,
55:47qui disait la chose suivante,
55:49le souverain, c'est celui qui est au-dessus de tout.
55:52Il est, disait-il même, absous des lois,
55:54de la puissance des lois.
55:56Il peut changer les lois qu'il a faites
55:58parce qu'il les a faites,
56:00il peut changer les lois qu'il n'a pas faites
56:02parce qu'il ne les a pas faites.
56:04C'est un tyran, ce souverain ? Pas du tout.
56:06Le souverain, qui a tous les droits,
56:08peut tout faire, sauf cesser d'être souverain.
56:11En vérité, le fait d'être souverain,
56:13ça engage beaucoup.
56:14Ainsi, dans la monarchie absolue,
56:16le souverain n'a pas le droit de changer
56:19les règles de succession du royaume,
56:21il n'a pas le droit d'aligner le domaine royal,
56:23il n'a pas le droit de changer de religion.
56:25Il n'a même pas le droit de lever des impôts,
56:28dit Jean Baudin.
56:29En termes de souverain,
56:31cette puissance est singulièrement limitée.
56:33Qu'est-ce que ça donne si on transpose ces règles
56:36dans la démocratie ?
56:37On change de support, c'est ce que fait 1789.
56:40Le souverain, c'est plus le roi, c'est le peuple.
56:43Mais la contrainte reste la même.
56:45La contrainte reste la même.
56:46Le peuple a tous les droits,
56:48sauf celui de cesser d'être peuple.
56:50Et c'est dans cet esprit
56:52qu'il y a trois dispositifs
56:54qui viennent limiter cette souveraineté du peuple.
56:56D'abord, les droits de l'homme.
56:58C'est vraiment l'idée que le peuple doit rester un peuple.
57:02Pour cela, il doit respecter la liberté des membres du peuple,
57:05l'égalité entre les membres du peuple.
57:07Il doit éviter de permettre qu'une majorité opprime une minorité,
57:11sinon le peuple disparaît.
57:12Il doit aussi éviter qu'une minorité opprime une majorité,
57:16parce qu'il n'y a plus de peuple.
57:18Le deuxième élément, c'est la Constitution.
57:20Le mot est intéressant, c'est ce qui constitue le peuple.
57:23Le peuple se donne à lui-même ses propres règles.
57:26Il a le droit de les changer,
57:28il n'a jamais le droit de les transgresser.
57:30Troisièmement, c'est le fait que le peuple doit être fidèle
57:34à sa parole, et ça, c'est le Conseil constitutionnel,
57:37le contrôle constitutionnel, qui le surveille,
57:39c'est-à-dire de veiller à ce que le peuple respecte
57:42les traités et les engagements internationaux.
57:45C'est quoi ? C'est la crise de la souveraineté,
57:48qui expliquerait le succès du RN ?
57:50Oui, je pense que c'est vraiment la raison qui exprime
57:53cette idée d'une crise de la souveraineté,
57:55cette idée que le peuple n'est plus souverain,
57:58concurrencé par trois autres souverainetés.
58:00Une souveraineté qui, parfois, tend à sortir de sa casque,
58:04c'est la souveraineté du droit, paradoxalement,
58:07des juges qui, bien souvent, excèdent un peu leur rôle strict
58:11de gardien de la souveraineté du peuple.
58:13Ca, c'est la première concurrence, la nomocratie, je l'appelle.
58:17Deuxième concurrence, c'est la bureaucratie,
58:19c'est quand la politique oublie qu'elle doit faire de la politique
58:22devant l'administration, y compris au niveau européen.
58:25Une troisième souveraineté, c'est l'égocratie,
58:28c'est quand le souverain, c'est mon nombril,
58:30mon intérêt particulier, et c'est ça qui prime.
58:33Je suis loin d'être convaincu que les réponses du RN
58:36soient à la mesure de résoudre cette crise profonde,
58:39mais, en revanche, je suis à peu près certain
58:42que c'en est la cause.
58:43Merci beaucoup. Vous voulez réagir ?
58:45D'un mot, c'est vraiment la fin de l'émission.
58:48D'un mot, Emmanuel Macron a été élu, en 2017,
58:50sur le dégagisme, et je crains qu'il ne soit victime
58:54du mouvement qu'il a amené.
58:56Merci.
58:57On s'arrête là. Merci beaucoup.
59:00Merci, Anne Le Vergeant, d'avoir été notre grand témoin.
59:03À très vite, Vincent Hugeot, Pierre-Henri Tavoyau.
59:06Je rappelle le titre de votre livre,
59:08La promesse, c'est-à-dire chez Grasset.
59:10Dernière information, un accord a été trouvé
59:13par le Front populaire, cette alliance électorale
59:16entre les socialistes, les communistes, les écologistes
59:19et les socialistes soumis.
59:20Pour ce tour d'horizon, il reste 16 jours
59:23avant le premier tour. Il faudra aller voter.
59:25A demain, même mieux, même heure.
59:27SOUS-TITRAGE STP

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