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00:00On est évidemment dans un contexte dramatique, celui de l'année 1917 qui a vu les mutineries,
00:28les révolutions russes, cette Coupe de France on peut aussi la voir comme finalement une
00:34lueur d'espoir dans la guerre, avec l'idée que la guerre ne continuera pas toujours et
00:38qu'on va revenir à une situation de paix et qu'il faut préparer la diffusion du football.
00:43Alors 1917 évidemment c'est la date de la création, l'automne 1917 ce sont évidemment
00:49les premiers tours de cette compétition.
00:52Alors le contexte il est très particulier puisque c'est celui de la première guerre
00:56mondiale et la Coupe de France elle s'appelle d'abord Coupe Charles-Simon, puisqu'elle
01:02est dédiée au secrétaire général de la fédération des patronages de France, fédération
01:08gymnastique et sportive des patronages de France pour le nom en entier, qui est mort
01:13tombée pour la France devant Arras en 1915.
01:16Donc à volonté du président des patronages, le docteur Michaud, de rendre hommage à Charles-Simon
01:24autant à son oeuvre qu'à son sacrifice et au-delà au sacrifice de très nombreux
01:28poilus footballeurs qui tombent sur le front.
01:31Donc une compétition qui est inventée mais qui a aussi un regard vers le futur puisque
01:40cette compétition, ce n'est pas seulement une compétition des patronages, c'est une
01:44compétition du comité français interfédéral, le CFI en fait, qui est à l'origine de
01:50la fédération française de football.
01:52Alors c'est une histoire un petit peu compliquée, qui est propre à la France, contrairement
01:55à l'Italie, contrairement à l'Angleterre, à l'Allemagne, il n'y a pas de fédération
01:59unifiée, il y a plusieurs fédérations, l'USFSA qui est la première, qui est une fédération
02:04mini-sport mais qui regroupe aussi des tennismen, des athlètes, des rugbymen, vous avez donc
02:10la fédération des patronages de France, vous avez aussi la ligue de football association
02:15qui a été créée par un jeune dirigeant, Jules Rimet.
02:20Donc le paysage, il est très divisé, donc est créé un comité français interfédéral
02:26dans lequel viennent progressivement s'associer les différentes organisations qui patronnent
02:32le football en France.
02:34Mais la division reste quand même assez largement à l'ordre du jour, la question d'une fédération
02:41unique est une question qui est débattue dans l'avant-guerre, qui revient régulièrement,
02:47et certains considèrent qu'il faudrait peut-être une compétition, finalement, qui réunisse
02:52tout le monde, et l'objet donc de la coupe Charles-Simon, qui est aussi appelée immédiatement
02:58coupe de France, mais pour la guerre c'est la coupe Charles-Simon, parce que c'est la
03:02coupe des combattants en quelque sorte, et bien c'est aussi de regrouper tous ces footballeurs.
03:12Le contexte évidemment est extrêmement dramatique, surtout du fait de l'offensive allemande
03:19qui a été lancée, Paris est sous la menace des obus, des bombes allemandes, on combat
03:25mais la vie continue aussi, et donc ce match qui est joué sur le terrain de la Légion
03:31Saint-Michel, et bien c'est aussi une manifestation de la vie qui continue à Paris.
03:4120 ans après la plupart des pays européens, et bien continentaux, la France a finalement
03:51sa fédération de football, et cette fédération de football, donc elle a immédiatement deux
03:59très grands dirigeants, parfois un peu antagonistes, mais qui vont œuvrer pour le foot français
04:07à l'intérieur de ses frontières, mais pour son rayonnement aussi à l'étranger, c'est
04:11Henri Delonnet, donc le secrétaire général, et le président c'est Jules Rimet, tous
04:15deux viennent plus ou moins des milieux catholiques, et dans cette fédération qui naît, qui a
04:20immédiatement d'ailleurs son organe, Football Association, la coupe de France a un rôle
04:23important d'unification évidemment, de participation de toute la France du football, qui est une
04:30France masculine, même si on est à un moment aussi de premier développement du football
04:36féminin, mais la coupe de France elle va être importante aussi pour des raisons financières,
04:40parce que c'est ce qui permet évidemment à la fédération de vivre, d'avoir des salariés
04:45et de développer son activité.
04:541923 c'est un partenariat important qui est signé avec le petit parisien, qui est le
04:59premier quotidien français qui tire à plus d'un million d'exemplaires, qui peut-être
05:04place la coupe de France au même niveau que le tour de France, en tout cas, l'intérêt
05:10du petit parisien montre que le football se popularise, passionne les foules, et qu'un
05:16grand titre comme le petit parisien ne peut pas s'y désintéresser, doit obtenir une
05:21forme d'exclusivité, ou en tout cas, voir son nom associé.
05:241924 c'est la première finale et le premier titre de l'Olympique de Marseille, c'est
05:40évidemment intéressant, pour quelles raisons, c'est que ça montre évidemment que la coupe
05:44de France est devenue véritablement nationale, puisque jusque là, ce sont des clubs de
05:51la région parisienne qui l'ont remporté, le Red Star, l'Olympique Pantin, le CASG,
05:59donc ça laissait à croire que c'était un titre réservé aux parisiens, et bien non.
06:03Alors c'est pas tout à fait nouveau, puisqu'il faut se rappeler quand même que le club,
06:08l'un des grands clubs de l'avant-guerre, c'était le Stade Helvétique, qui a remporté
06:12plusieurs titres du championnat de France USA, mais c'était un club composé de joueurs
06:18essentiellement suisses, de Suisses allémaniques avec des non-germaniques, ce qui d'ailleurs
06:22suscitait un certain nombre de débats avec l'Olympique de Marseille, on a un club véritablement
06:28marseillais, c'est-à-dire avec des joueurs d'origines diverses, provençales mais aussi
06:34autres, on a une grande ville, on n'est pas du tout dans la rivalité Paris-Marseille
06:41évidemment d'aujourd'hui, mais ce sont les provinciaux qui montent, et puis c'est
06:47avec l'Olympique de Marseille, on a un club aussi qui commence à pratiquer l'amateurisme
06:51marron, et ce qui donne évidemment du relief à ces finales, et notamment deux finales
06:57en 1926-1927, les Marseillais vont battre les ouvriers de Valentinier, qui sont originaires
07:05du pays de Montbéliard, qui font partie des entreprises Peugeot, et puis vous avez en
07:121927 la finale contre l'US-Queville, donc les chantiers navals qui sont situés près
07:18de Rouen, ce qui fait que là on entre véritablement dans cette mythologie, et on se rapproche
07:24aussi de ce qui se passe en Angleterre, ce ne sont pas les ouvriers qui ont été bourgeois
07:29mais ce sont les ouvriers, les travailleurs contre des amateurs marrons, en tout cas évidemment
07:36la présence de Marseille, puis de Montpellier, puis de CET, et les coupes remportées, permettent
07:44finalement de renforcer cette dimension qui est une dimension nationale.
07:50La coupe d'Angleterre a eu aussi son succès parce qu'elle a bénéficié de très grands
08:00stades.
08:01Avant la première guerre mondiale, la finale était disputée dans le stade de Crystal Palace
08:04qui pouvait accueillir 110.000 spectateurs, c'est là où Georges V, le premier souverain
08:10anglais à venir assister à une finale, vient assister à sa première finale de FA Cup.
08:17En 1923, c'est l'inauguration du stade de Wembley, d'ailleurs il y a plus de 160.000
08:23spectateurs qui viennent pour 126.000 places.
08:25Donc ce qui manque un petit peu au début de la Coupe de France, c'est un stade, on
08:31va à Berger, on va à Pershing, où Pershing a été construit assez vite pour accueillir
08:37les Jeux Interalliés en 1919.
08:38Donc il manque finalement un stade qui représenterait un lieu où on va chaque année, et un lieu
08:46relativement grand.
08:47Et en fait, c'est la construction du stade de Colombe en 1924, qui est achevé pour les
08:58Jeux de 1924, qui permet d'avoir cet enceinte, puisque pour à l'époque les contenances
09:02elles sont assez élastiques.
09:04On peut presque aller jusqu'à 60.000 en se serrant à Colombe.
09:08C'est pas un stade qui finalement est un stade particulièrement moderne, ou en tout
09:16cas, marquant dans l'histoire de l'architecture sportive.
09:18C'est un stade qui a été fait par un architecte sportif lui-même, Fort Dujarric, qui sera
09:23aussi l'architecte de Roland-Garros, mais son cahier des charges était essentiellement
09:28faire un stade qui ne coûtait pas très cher.
09:30Donc il y a évidemment des avantages, des poteaux en acier, mais l'intérêt surtout
09:37c'est qu'on peut y accueillir au moins 40.000 spectateurs.
09:43Et puis surtout, Colombe, c'est relié par le chemin de fer à la guerre Saint-Lazare.
09:49Donc certes c'est en banlieue, mais c'est aussi finalement assez facile d'accès.
09:55Par ailleurs, ça rend aussi bien compte de ce contexte du football qui est assez lié
10:01à l'industrie à ce moment-là.
10:02Donc on est dans des banlieues ouvrières, populaires, industrielles.
10:07Et ce qui fait que cette Coupe de France, elle va être très largement pour sa finale
10:13organisée à Colombe, qui sera aussi d'ailleurs le lieu de la finale de la Coupe du Monde
10:17en 1938, avant que finalement au début des années 70, l'un des autres grands lieux
10:23de la Coupe de France, emblématique de Vienne, le Parc des Princes, et puis aujourd'hui
10:29le Stade de France.
10:36Puis 1927, c'est peut-être la date la plus importante comme consécration, puisque c'est
10:42la première fois qu'est inaugurée cette tradition non écrite, mais qu'on voit dans
10:48les archives, qui est quand même fixée par un protocole, c'est la présence du président
10:54de la République à la finale de la Coupe de France.
10:57Il y a cette double dimension, montrer finalement le caractère utile, patriotique du football,
11:03suivre le modèle anglais.
11:05Alors comment on y arrive progressivement ? À la fin des années 1920, les finales
11:10qui sont disputées à Colombes, elles sont suivies par 30 000 spectateurs, ce qui en
11:15fait évidemment un événement de masse.
11:17Ce n'est pas évidemment les 120 000 spectateurs qui suivent la finale de la FA Cup à Wembley
11:23au même moment, mais on avance.
11:25Là, on a véritablement une tradition qui est inventée à ce moment-là et qui n'est
11:30pas remise en cause jusqu'à aujourd'hui, avec un rituel, un protocole, le président
11:36qui est accueilli à l'entrée du stade, qui va aller sur la pelouse, on lui présente
11:41les joueurs, la marseillaise, et puis le point d'orgue, c'est le président, le garant
11:49de la République, des valeurs républicaines, qui donne la coupe au capitaine de l'équipe
11:55vainqueur et une coupe, en quelque sorte, qui vient reconnaître les mérites sportifs,
12:03mais aussi toutes les valeurs de méritocratie, d'égalité, qui sont portées par cette compétition.
12:15C'est tout à fait évidemment un objet pour historiens et les historiens s'intéressent
12:20beaucoup aujourd'hui à ce qu'on appelle la culture matérielle, les objets, parce
12:24que les objets finalement nous disent beaucoup de choses.
12:29Sur une époque, on a un objet ici qui est tout à fait élégant, qui d'ailleurs va
12:37être un petit peu malmené par les joueurs qui l'emportent, qui vont boire du champagne,
12:43qui la secouent, etc.
12:46Avec aussi la mémoire, puisqu'on voit le nom de Charles Simon, ce grand dirigeant
12:55des footballs français, mort pour la patrie, et lorsque la guerre éclate en 1939, la Coupe
13:01de France redevient Coupe Charles Simon d'ailleurs, mais surtout au travers d'un objet on peut
13:06raconter l'histoire à la fois du foot français au XXe siècle, mais tout simplement l'histoire
13:12de la France dans ses moments tragiques et dans ses moments de bonheur et de joie.
13:25Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org