• il y a 6 mois
Une équipe européenne de scientifiques étudie les climats très anciens en prélevant et analysant de très longues carottes de glace dans l’Antarctique. Alors qu'un nouveau forage européen d'une carotte de glace à plusieurs milliers de mètres de profondeur est en cours, les chercheurs et chercheuses se préparent à analyser les échantillons...

Leur travail va permettre de comprendre les mécanismes du climat, aider à anticiper les changements et à trouver la meilleure façon de s’y adapter. Ce projet vise à reconstituer l'évolution du climat sur les 1,5 million d’années passées.  Découvrez les enjeux et les défis du programme DEEPICE et remontez le temps avec les scientifiques.

Avec :

    Amaëlle Landais, glaciologue et paléoclimatologue, directrice de recherche CNRS au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, (LSCE)
    Romilly Harris-Stuart, doctorante DEEPICE au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE)
    Inès Ollivier, doctorante DEEPICE à l'Université de Bergen, Norvège
    Marie Kazeroni, ingénieure manageuse du projet DEEPICE au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE)La conférence s'est tenue 100% en ligne.

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Transcription
00:00:00Bonjour à toutes et tous et merci à la Cité des Sciences de nous accueillir en ligne ce
00:00:10soir pour cette conférence où nous allons discuter de l'étude des climats du passé,
00:00:16notamment grâce à l'analyse de glace, de glace très ancienne qui provient des régions polaires.
00:00:22Nous parlerons également du projet européen de recherche Deep Ice qui s'intéresse à cette
00:00:28thématique et dont nous faisons toutes les quatre parties aujourd'hui. Je me représente
00:00:33rapidement, je m'appelle Marie Cazeroni, je travaille au CNRS comme ingénieure et je
00:00:38m'occupe donc du management du projet Deep Ice et je vais animer cette table ronde ce soir avec,
00:00:47comme intervenante, trois scientifiques qui font partie du projet Deep Ice et qui vont
00:00:51également se présenter à leur tour. Donc on peut commencer avec Amaëlle Landais.
00:00:57Oui bonjour, je suis Amaëlle Landais, je travaille au laboratoire des sciences du
00:01:05climat et de l'environnement, je suis chercheure, je travaille sur les carottes de glace,
00:01:09plutôt les carottes de glace polaire et dans le cadre de cette conférence je coordonne avec
00:01:15Émilie Capron qui est aussi chercheure au CNRS mais à Grenoble le projet Deep Ice qui est un
00:01:20projet de formation de 15 étudiants en thèse, c'est un projet européen donc avec des
00:01:25collaborations dans différents pays européens, il y a dix partenaires. Merci. Oui bonjour,
00:01:34moi je m'appelle Inès Olivier, je suis doctorante à l'université de Bergen en Norvège et donc je
00:01:41fais partie des 15 étudiants du projet Deep Ice et je travaille sur les interactions neige
00:01:48atmosphère en Antarctique. Bonjour, je m'appelle Romélie, je viens de Royaume-Uni donc je suis
00:01:58désolée. Je suis doctorante en dernière année à LSE et je travaille avec Amaëlle. J'étudie la
00:02:07transformation de la neige en glace sur les carottes glacières de l'Antarctique. Oui,
00:02:13j'ai eu la chance d'aller en Antarctique l'année dernière donc je vais discuter plus tard. Merci
00:02:23beaucoup, merci à vous trois pour cette présentation. Donc aujourd'hui nous allons parler
00:02:29des climats anciens, des climats du passé. Donc comme vous le savez peut-être, le climat sur
00:02:34terre a connu de nombreux changements et de nombreuses variations et la période, l'époque
00:02:40dont nous allons discuter aujourd'hui est finalement relativement récente à l'histoire
00:02:44de l'échelle de la Terre puisque nous allons parler des derniers 2,6 millions d'années donc
00:02:49qu'on appelle également le quaternaire. C'est une époque, on va le voir, qui est marquée par une
00:02:55alternance au niveau du climat entre des périodes froides, des périodes glaciaires qu'on appelle
00:03:00aussi âge de glace et des périodes plus chaudes qu'on appelle les périodes interglaciaires. Donc
00:03:07vous en doutez sans doute, aujourd'hui nous sommes dans une période interglaciaire, pas dans
00:03:12une période glaciaire, qui s'appelle l'Holocène et qui a démarré il y a un peu plus de 11 000 ans.
00:03:18Donc à travers cette conférence nous allons voir comment les scientifiques arrivent à
00:03:25reconstruire l'histoire de l'évolution du climat, notamment par l'analyse de la glace. Il faut
00:03:32savoir que les scientifiques s'intéressent au climat et au fonctionnement du climat depuis
00:03:38très longtemps et on peut par exemple évoquer le fait qu'au 18e et au 19e siècle, plusieurs
00:03:45scientifiques s'interrogent par exemple sur la présence de gros rochers, qu'on appelle aussi
00:03:49des blocs ératiques, donc qui sont des gros rochers isolés qui sont situés dans des endroits sans
00:03:56lien apparent avec leur environnement. Et plusieurs scientifiques feront l'hypothèse que la présence
00:04:01de ces rochers pourrait être liée à une présence passée d'une calotte de glace,
00:04:06donc d'un important manteau de glace qui aurait couvert une partie de l'Europe. Donc ce soir,
00:04:12avec nos intervenantes, nous allons justement voir en quoi et comment l'étude de la glace permet
00:04:18d'avoir des informations sur le climat et d'expliquer les variations du climat dans le
00:04:23passé. Nous verrons aussi ce que l'étude des climats passés peut apporter comme connaissance
00:04:31et comme compréhension au regard du contexte actuel de réchauffement climatique et en quoi
00:04:36cela peut être utile également pour étudier les évolutions futures du climat et faire des
00:04:43projections de trajectoires climatiques. Donc pour démarrer cette discussion, je vais me tourner vers
00:04:50Amahel et vous demander si vous pourriez nous donner un peu plus d'informations et de
00:04:55caractéristiques quant à cette période du climat sur laquelle vous travaillez, donc les deux derniers
00:05:01millions d'années. Qu'est-ce qui explique justement ces variations entre des périodes glaciaires et
00:05:06des périodes interglaciaires ? Avec joie ! Alors donc, si on regarde un petit peu dans le passé,
00:05:13effectivement comme tu l'as dit Marie, il y a eu des alternances entre des périodes glaciaires,
00:05:18vous voyez l'image sur la gauche, qui étaient caractérisées par des grosses calottes de glace
00:05:24qui couvraient les régions continentales de l'hémisphère nord, donc l'Amérique du Nord,
00:05:28et puis le nord de l'Eurasie. Et puisqu'on avait ces énormes calottes de glace de plus de 3 km
00:05:34d'épaisseur sur le nord de l'hémisphère nord, eh bien il y avait moins d'eau dans les océans et on
00:05:38avait un niveau des océans qui était plus bas de 120 m par rapport à l'actuel. Et donc au cours
00:05:43des derniers millions d'années, on a eu ces alternances entre ces périodes glaciaires,
00:05:47ayant terminé il y a environ 20 000 ans, et des périodes interglaciaires comme aujourd'hui,
00:05:51qu'on représente sur la figure de droite. Sur des échelles plutôt longues, on est sur des
00:05:56plusieurs milliers, dizaines de milliers d'années pour passer entre des périodes glaciaires à des
00:06:02périodes interglaciaires. Alors on a ce changement de calottes de glace, on a ce changement de niveau
00:06:08de l'océan, on a des changements de température, donc globalement la température était environ 5
00:06:12degrés plus basse à l'échelle du globe pendant la dernière période glaciaire par rapport à la
00:06:16période pré-industrielle, et on a des changements importants aussi sur la répartition de la
00:06:20végétation. Donc sur cette figure, si vous regardez un peu ce qui se passe en Europe par exemple,
00:06:26vous voyez qu'actuellement on est sur des couleurs vertes, on est plutôt sur des forêts en fait,
00:06:30avant de découper, on a beaucoup de forêts tempérées. Et puis si on regarde ce qui se
00:06:35passe pendant la dernière période glaciaire, donc c'est la figure du bas, la végétation naturelle
00:06:40c'était pour plutôt des steppes et toundras, donc des gros changements aussi au niveau de la
00:06:46végétation. Là vous avez un peu les échelles de temps qui sont représentatives de ces successions
00:06:53de périodes glaciaires interglaciaires, donc les périodes glaciaires plutôt retournées en bleu sur
00:06:57l'échelle de temps entre moins 800 000 ans et aujourd'hui, et puis en rouge les périodes
00:07:02interglaciaires, vous voyez qui sont moins longues que les périodes glaciaires, avec aussi des
00:07:08températures qui ont parfois pu excéder la température qu'on connaît actuellement. Alors
00:07:14qu'est-ce qui explique ces successions de périodes glaciaires interglaciaires sur les
00:07:19derniers millions d'années ? Eh bien un paramètre très important à prendre en compte, c'est ce qu'on
00:07:26appelle les paramètres orbitaux, en fait c'est les variations de la position et de l'inclinaison de
00:07:33la Terre par rapport au Soleil au cours du temps. Donc vous savez que la Terre tourne autour du
00:07:37Soleil, ça fait une trajectoire elliptique, et par rapport à ce plan de la trajectoire elliptique,
00:07:47l'axe de rotation de la Terre, donc pôle Nord, pôle Sud, est en fait incliné d'une vingtaine de
00:07:55degrés, et cette inclinaison qui est l'obliquité de l'axe de rotation varie avec le temps. Donc en
00:08:01fait ce qui se passe c'est que même si la quantité d'énergie qu'on reçoit sur Terre depuis le Soleil
00:08:04ne varie pas tellement au cours du temps, eh bien le fait qu'on va être plus ou moins incliné au
00:08:09pôle Nord par rapport au Soleil fait que la répartition de l'énergie qu'on va recevoir
00:08:13sur Terre en fonction des latitudes et en fonction des saisons va varier, et ces variations vont
00:08:19entraîner des successions entre périodes glaciaires et interglaciaires. Alors ça c'est
00:08:24une cause, et on a aussi après plein de rétroactions dans le système Terre qui font qu'on va pouvoir
00:08:32aussi passer d'une période glaciaire à interglaciaire, et une chose très importante à
00:08:36prendre en compte, on va en parler beaucoup ce soir, c'est l'effet de serre et la concentration
00:08:41des gaz à effet de serre qu'on a dans l'atmosphère, donc le dioxyde de carbone, le méthane notamment.
00:08:47Donc là vous avez un petit schéma simple de l'effet de serre, donc l'effet de serre c'est un
00:08:51peu comme une couverture qu'on a autour de la Terre qui va garder en fait la chaleur autour
00:08:55de la Terre, et plus on va avoir de gaz à effet de serre, de dioxyde de carbone ou de méthane,
00:09:00plus on va garder la chaleur autour de la Terre, et donc on va pouvoir se réchauffer. Et au cours
00:09:05du passé, on le verra tout à l'heure, et bien les concentrations de gaz à effet de serre,
00:09:09même en période pré-entropique, donc sans l'influence humaine, ont varié. Alors on n'a pas
00:09:13atteint des niveaux au cours du quaternaire aussi important probablement que ceux qu'on a
00:09:19actuellement, pas au cours des 800 000 dernières années, mais il y a des variations naturelles qui
00:09:25ont eu lieu et qui ont joué dans les transitions glaciaires, interglaciaires. Voilà, je vais laisser
00:09:34la parole à mes collègues. Merci beaucoup Amaëlle, donc on a eu à travers vos explications quelques
00:09:44éléments de réponse pour comprendre ces successions de périodes froides, périodes glaciaires,
00:09:49périodes interglaciaires, avec d'une part l'importance, comme cela a été expliqué,
00:09:53des paramètres orbitaux, mais aussi le rôle des gaz à effet de serre, donc de la quantité de gaz à
00:09:59effet de serre dans l'atmosphère, qui ont fait se succéder ces différentes périodes. Dans
00:10:04l'introduction, on a également parlé de glace, on a dit que vous étudiez toutes les trois la glace,
00:10:09donc cette fois-ci je vais me tourner vers Romilly Inès et je vais vous demander si vous pourriez nous
00:10:15expliquer pourquoi aller en Antarctique pour récupérer de la glace, comment cette épée
00:10:20manteau de glace s'est formée en Antarctique, qu'est-ce qu'il y a de particulier et comment
00:10:26est-ce qu'on peut faire d'ailleurs pour ramener cette glace jusqu'à dans les laboratoires de
00:10:30recherche pour les analyser. Donc l'Antarctique est située au pôle sud et isolée des eaux
00:10:43de l'océan Austral. Le climat est beaucoup plus froid qu'en Grönland où c'est plutôt calo-glacier.
00:10:53Donc le calo-glacier s'est formé par l'accumulation de couches de neige pendant des centaines de
00:11:04milliers d'années, qui se compactent progressivement pour former la glace.
00:11:10Les couches les plus profondes correspondent à la glace la plus ancienne. Dans certains cas,
00:11:20on peut même voir les couches de neige associées à différentes saisons. Ces couches sont de plus
00:11:30en plus comprimées au feu et à mesure que la neige s'accumule, mais les régions intérieures
00:11:37du calo-glacier polaire ont une épaisseur de plus de 3000 mètres, soit l'équivalent de 10
00:11:45touriffères empliées les unes sur les autres. Cependant, les calo-glaciers ne peuvent pas
00:11:53s'entendre à l'infini et perdent en fait de la glace à la base en raison de l'écoulement de la
00:12:04glace vers le bord du calo-glacier et aussi parce que le socle rocheux est beaucoup plus chaud que
00:12:15la surface. Donc la glace la plus profonde est donc la plus ancienne, mais sa résolution est
00:12:27également la plus faible, car les couches de glace sont devenues très fines sur la base.
00:12:33Donc à travers ces explications que vous venez de nous apporter Romélie, on voit qu'il y a une
00:12:44masse considérable de glace qui a pu s'accumuler au fil du temps en Antarctique, vous avez dit 3000
00:12:50mètres, même dans certains endroits on peut aller jusqu'à quasiment 4000 mètres, donc c'est
00:12:54vraiment énorme. Comment est-ce qu'on peut faire Inès pour aller récupérer des échantillons dans
00:13:01ce manteau de glace ? Oui donc déjà une carotte de glace c'est un cylindre de glace d'environ 10
00:13:11centimètres de diamètre et donc on va chercher au fur et à mesure dans la calotte antarctique,
00:13:19dans le cadre antarctique, mais aussi du Groenland, et donc on va récolter cette glace avec ce qu'on
00:13:23appelle un carottier, là vous avez une image sur l'image de droite, et on récupère des sections
00:13:29d'un mètre à trois mètres dépendant du carottier, et donc on va chercher petit à petit, on va forer
00:13:35petit à petit dans la calotte antarctique ou du Groenland pour récupérer ce long cylindre de glace
00:13:41qui fait en fait en longueur l'épaisseur de la carotte de glace. Voilà donc le processus de
00:13:48forage en fait il commence avec le choix du lieu de forage et donc là sur cette image vous avez
00:13:54l'exemple de la carotte la plus vieille qui a été forée dans les années 2000 et qui a été forée
00:14:01donc au milieu de l'antarctique et donc qui commence à la surface et puis qui fait jusqu'à
00:14:08trois kilomètres de longueur, donc on récupère ce long cylindre de glace et c'est ce qu'on appelle
00:14:12la carotte de glace. Ensuite après avoir choisi ce lieu de forage donc on va établir un camp,
00:14:20un camp de base sur place sur le lieu où on va faire le forage, donc là vous avez une photo
00:14:24exemple de quoi un camp de forage peut ressembler, donc il y a plusieurs tentes de vie pour les gens
00:14:33qui vont venir forer la carotte de glace mais aussi toute une partie plus logistique de véhicules
00:14:40et puis la tente où le forage lui-même a lieu. Ensuite donc une fois que tout le camp est
00:14:49établi on commence à forer donc là vous avez deux photos sur celle de gauche on voit le carottier
00:14:54qui va faire une bascule et qui va aller descendre dans le trou de forage qu'on voit sur l'image de
00:15:01droite et qui va aller chercher petit à petit cette glace donc de plus en plus profonde en
00:15:05récupérant section par section d'un mètre à trois mètres et donc le carottier remonte avec
00:15:14ce morceau de glace qui vient de l'intérieur du continent antarctique ou du Groenland et là
00:15:22vous avez une image donc de la carotte qui ressort donc on récupère ces cylindres là de glace
00:15:28ensuite qu'on stocke sur place puis qu'on conditionne donc on les prépare et on les
00:15:35met en caisse pour préparer le retour des échantillons et de ces cylindres de glace
00:15:40vers l'Europe et ça c'est un processus qui prend aussi du temps puisque si on fait un forage au
00:15:45milieu de l'antarctique il faut ramener ces échantillons vers la côte donc on les met
00:15:49sur des tracteurs enfin sur des traîneaux qui sont tirés par des tracteurs qui sont
00:15:55emmenés ensuite à la côte puis les échantillons sont chargés dans des containers qui sont
00:15:59réfrigérés qui sont mis sur des bateaux et puis après le bateau rentre en Europe et donc tout ce
00:16:06processus a du choix de l'endroit de forage jusqu'à avoir les échantillons dans les laboratoires c'est
00:16:12un processus qui prend jusqu'à plusieurs années pour récupérer cette glace précieuse. Oui on
00:16:19voit à travers ces photos et puis vos explications que c'est une logistique qui est vraiment
00:16:24considérable qui je l'imagine demande beaucoup de temps d'investissement et d'efforts sur la
00:16:30préparation et une fois qu'on est sur place donc je crois que Romilly vous avez eu l'occasion
00:16:36justement d'aller sur le camp de forage qu'on a vu en photo tout à l'heure donc le camp de
00:16:41Little Dom C où il y a un nouveau forage qui actuellement lieu qui s'appelle Beyond Epica,
00:16:47est-ce que lorsque vous étiez sur place vous avez eu affaire à des challenges, à des difficultés
00:16:52particulières, on peut imaginer que les conditions de toute façon de base ne sont pas les plus
00:16:57faciles ? Oui c'est vrai, il est important que la glace reste à des températures proches de
00:17:08moins 50 degrés pour maintenir la bonne qualité donc lorsque nous traitons la glace il est difficile
00:17:16de maintenir cette température mais nous essayons tout de même traiter la glace à moins de 20 degrés
00:17:27mais en tout cas il est physiquement difficile de travailler dans ces conditions toute la journée,
00:17:35de plus la glace est très fragile, il faut donc prendre des précautions lors du traitement par
00:17:45exemple ne pouvons porter que des gants fins comme ça ici, ainsi les mains deviennent très froides
00:17:54quand on touche la glace, ça c'est une difficulté. Oui on voit sur la photo effectivement que vous
00:18:07êtes très chaudement habillé pour résister face à ces températures, c'est aussi une question bien
00:18:13sûr de sécurité. Donc on a parlé d'aller chercher de la glace en profondeur, on a expliqué que la
00:18:21glace en profondeur c'est une glace qui peut être très ancienne mais il faut savoir que les
00:18:26scientifiques s'intéressent aussi à ce qui se passe à la surface, donc en Antarctique ils étudient
00:18:32aussi la surface donc la neige pour comprendre un petit peu les processus qui s'y déroulent,
00:18:38donc Inès je crois que justement vous avez participé à des campagnes de mesure pour étudier
00:18:45la surface de la carotte antarctique, est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus ?
00:18:49Oui alors en fait on s'intéresse vraiment aussi au-delà de la carotte de glace au processus
00:18:58qui se passe à la surface, donc en fait on s'y intéresse parce qu'on essaye de comprendre la
00:19:02formation de la glace mais aussi de comprendre les processus qui affectent la formation de la
00:19:06glace et ce que la glace ensuite va contenir et donc ces études-là à la surface de l'Antarctique
00:19:15ou du Groenland c'est très important pour pouvoir mieux interpréter et mieux comprendre ensuite ce
00:19:20qu'on mesure dans la glace. Donc pour cela on va sur le terrain à la surface, dans le cas de ces
00:19:29photos de l'Antarctique, et on y installe des instruments qui vont mesurer la composition de
00:19:35l'atmosphère, on cherche aussi à comprendre les conditions météorologiques donc on installe des
00:19:43stations météorologiques qui vont mesurer la température, le vent, l'humidité, toujours pour
00:19:47comprendre comment la neige finalement devient de la glace, enfin tous les processus qui se
00:19:55passent à la surface. Et puis on va aussi collecter plusieurs des échantillons de neige pour étudier
00:20:01à nouveau sa composition chimique et aussi en molécules d'eau. Voilà donc ça c'est des
00:20:08mesures qui sont sur le long terme et des échantillons qui sont collectés plusieurs fois
00:20:13par semaine tout au long de l'année et sur plusieurs années pour vraiment comprendre la formation de la
00:20:19carotte de glace à la surface, de la carotte glaciaire. Oui donc on voit bien qu'il y a à la
00:20:26fois des importants moyens qui sont mis pour l'étude justement de cette neige en surface,
00:20:32mais aussi pour aller chercher donc la glace la plus ancienne et pouvoir étudier l'ensemble de
00:20:37ces mécanismes pour faire le lien entre la neige et la glace, ces différentes étapes de
00:20:42transformation. Est-ce que du coup, une question pour toutes les trois, vous pourriez nous en dire
00:20:47un peu plus sur le lien en fait entre l'étude de la glace et l'étude du climat, comment à partir de
00:20:53cette glace qui provient de l'Antarctique vous arrivez à obtenir des informations sur le climat,
00:20:58quel type d'informations on peut avoir et pourquoi est-ce que cette glace qui est
00:21:04forée en Antarctique vous intéresse autant ? Oui alors c'est à moi je crois. Donc alors la glace,
00:21:14la carotte de glace que nous ont montré Inès et Romilly, c'est ce qu'on appelle une archive
00:21:20climatique effectivement, pour reconstruire le climat du passé. Et avant de revenir aux carottes
00:21:25de glace, en fait on peut citer beaucoup d'autres archives climatiques qui peuvent être utilisées,
00:21:31qui sont rassemblées sur ce document. Donc bien sûr il y a les chroniques historiques, mais il y a
00:21:35aussi les anneaux d'arbres, les cernes d'arbres qu'on voit très bien et qui peuvent être comptées
00:21:40année après année, qui permettent de reconstruire aussi le climat récent. On peut avoir des carottes
00:21:46au fond des lacs, au fond des océans. On va regarder aussi les croissances des spéléothènes,
00:21:53les stalagmites dans les grottes, les coraux. Tout ça, ça va nous donner des informations sur le
00:21:57climat du passé pour le reconstruire de façon globale. Après les carottes de glace, ça va
00:22:02nous donner des informations absolument uniques et complémentaires de ces autres archives. Alors
00:22:08que va-t-on pouvoir mesurer dans une carotte de glace ? On va mesurer la glace elle-même qui va
00:22:13nous donner, vous allez le voir avec Inès, des reconstructions de la température au niveau des
00:22:18pôles dans le passé. On va analyser des bulles d'air qui sont piégées dans la glace. Donc là,
00:22:22vous voyez sur la photo de gauche, en fait, plein de petits points blancs qui sont autant
00:22:27de petites bulles d'air dans un morceau de glace. Donc on a piégé l'atmosphère du passé. Donc
00:22:32Romélie fait sa thèse dessus, elle pourra en parler plus. Si on regarde maintenant avec un
00:22:39microscope, par exemple, sur une lame mince, on va pouvoir aussi voir la microstructure,
00:22:43les cristaux de la glace, comme on voit sur la figure à droite, et puis les impuretés,
00:22:47des impuretés insolubles, dont on parlera aussi plus tard, qui vont donner des informations sur
00:22:52la circulation atmosphérique du passé, les éruptions volcaniques, etc. Donc, en fait,
00:22:59on va faire toutes ces analyses sur une carotte de glace et c'est pour ça qu'une fois qu'on a
00:23:03récupéré la carotte de glace, eh bien, il va falloir la découper en plein de petites sections.
00:23:09C'est pour ça que Romélie a passé beaucoup de temps, en fait, aussi avec sa scie en Antarctique,
00:23:14pour pouvoir faire les différentes analyses, les analyses des bulles d'air piégées dans la glace,
00:23:18le gaz, les analyses de chimie pour les impuretés, les analyses d'isotopes de l'eau, dont va nous
00:23:24parler aussi Inès, et puis les analyses pour les propriétés physiques ou la microstructure
00:23:29dont je vous ai parlé. Je crois qu'après, c'est Inès. Oui, donc la glace elle-même est formée
00:23:36de molécules d'eau qui existent sous différentes formes de manière naturelle dans toutes les eaux
00:23:43sur Terre. Et donc, il y a des molécules qui sont plus lourdes et des molécules qui sont plus
00:23:46légères. Et donc, la glace qui est formée par ces molécules d'eau, quand on s'intéresse aux
00:23:51ratios entre les molécules légères et les molécules lourdes, ça va nous donner des informations sur
00:23:56les températures au site de forage dans le passé. Et cela, on peut le faire parce qu'il existe une
00:24:02relation directe entre la température locale au site de forage de la carotte de glace et le ratio
00:24:08entre les molécules lourdes et les molécules légères dans la glace elle-même, donc les
00:24:13mesures qu'on fait dans la glace. Ça, c'est ce qu'on appelle le thermomètre isotopique, parce que ces
00:24:18différentes molécules d'eau sont appelées les isotopes de l'eau. Et donc, cette relation directe
00:24:23entre isotope et température, on va l'utiliser dans une carotte de glace ou avec une carotte de
00:24:29glace pour reconstruire les températures locales dans le passé. Et donc, puisqu'il n'existe pas
00:24:37de reconstruction directe des températures dans le passé, on utilise les isotopes comme proxy ou
00:24:42comme moyen dérivé de reconstruire ces températures locales dans le passé. Oui, comme nous l'avons
00:24:54mentionné, les carottes de glace sont des archives uniques en ce sens qu'elles fournissent un
00:25:00enregistrement direct de la composition passée de l'atmosphère. Comme ça, dans les bulles ici.
00:25:07Au fil du temps, l'accumulation de neige à la surface comprime l'espace de circulation de l'air
00:25:15dans la neige. Dans son premier mètre, l'air peut encore interagir avec l'atmosphère. Mais à ce
00:25:26profondeur ici, l'air est enfermé dans les bulles qui sont piégées dans la glace. Ces bulles contiennent
00:25:36des échantillons de l'atmosphère. Ainsi, les bulles situées dans la profondeur de la glace
00:25:45contiennent de l'air qui a été piégé il y a très longtemps et qui reflète la composition de
00:25:52l'atmosphère au moment où ces bulles se sont formées. Lorsque nous extraions les carottes de glace,
00:26:02nous pouvons alors utiliser différentes techniques pour mesurer la composition de gaz dans les bulles
00:26:08Par exemple, nous pouvons mesurer le gaz à effet de serre tel que le dioxyde de carbone.
00:26:15Alors on mesure aussi les impuretés chimiques dont j'ai parlé tout à l'heure. Et là,
00:26:25vous pouvez voir sur la photo en haut à droite une couche un peu sombre qui est en fait la trace
00:26:33d'une éruption volcanique passée. Donc quand on a une grosse éruption volcanique, on va émettre
00:26:37beaucoup de choses dans l'atmosphère et notamment des petites particules qui vont retomber ensuite
00:26:42sur Terre et qui retombent aussi sur la glace. Et donc on va enregistrer ces couches de sombre,
00:26:48des éruptions volcaniques dans les carottes de glace. Toutes les éruptions volcaniques ne sont
00:26:53pas aussi identifiables, aussi facilement de façon visible. On va pouvoir en reconstruire
00:26:58beaucoup plus en regardant la concentration de sulfate dans la glace. Et à partir de ces
00:27:04concentrations de sulfate, on va avoir toute une chronique des éruptions volcaniques passées
00:27:08dans les carottes de glace. On va pouvoir faire la même chose avec d'autres espèces. On va
00:27:13pouvoir mesurer par exemple le sodium, le calcium, la poussière, qui vont nous donner des informations
00:27:17sur les étendues de glace de mer du passé, sur l'érosion dans le passé et le transport
00:27:23atmosphérique. Les carottes glaciaires nous permettent de comparer la concentration de
00:27:37CO2 mesurée dans les carottes glaciaires aux données d'observation des 75 dernières années.
00:27:45Ce chevauchement a également permis aux scientifiques d'observer que la concentration
00:27:53de CO2 est aujourd'hui beaucoup plus élevée qu'elle ne l'a été au cours des huit dernières années.
00:28:02Voici donc l'observation.
00:28:04Pour terminer sur cette séquence-là, ce qui est vraiment unique par rapport aux autres archives sur
00:28:20les carottes de glace, c'est qu'on arrive à avoir une précision temporelle vraiment très fine. On est
00:28:29capable de compter les années sur une carotte de glace en remontant très loin dans le temps,
00:28:34jusqu'à 60 ou 100 000 ans avant aujourd'hui. Comme on peut le faire sur les anneaux d'arbres,
00:28:42on va compter les cernes un par un, sur une carotte de glace on va pouvoir être capable
00:28:46aussi de compter les années une par une en remontant assez loin dans le temps,
00:28:50alors pas jusqu'à 800 000 ans, mais jusqu'à 60 ou 100 000 ans. Ça permet d'être extrêmement précis
00:28:57et de pouvoir décrire des événements climatiques qui ont eu lieu dans le passé à des échelles de
00:29:01temps très très fines. Une chose qu'on a vu dans les carottes de glace, ce graphe est peut-être un
00:29:07peu compliqué entre le Groenland et l'Antarctique, mais en haut vous voyez en fait les variations de
00:29:11température qu'on a pu extraire à partir d'une carotte de glace du Groenland et vous voyez en
00:29:15fait qu'on a des variations extrêmement abruptes. Et ces événements-là, qui montrent des
00:29:19déstabilisations vraiment très rapides du climat dans le passé, ce sont des événements qui sont
00:29:24associés à des changements de température de l'ordre de 10 à 15 degrés en 10 à 50 ans au
00:29:29Groenland. Donc des choses vraiment extrêmes qui montrent que le climat dans le passé a pu vraiment,
00:29:34et pourra dans le futur aussi malheureusement, être bouleversé très très rapidement. Donc
00:29:39en fait ces changements sont extrêmes, mais à l'époque c'était des changements vraiment régionaux
00:29:46et si vous regardez le graphe d'en haut, vous voyez qu'en fait le changement abrupt de température
00:29:50au Groenland n'est pas synchrone aux changements en Antarctique. On a une sorte de répartition de
00:29:56la chaleur entre Groenland et Antarctique qui se fait pendant ces successions abruptes du climat.
00:30:02Donc là on n'est plus sur les transitions glaciaire-interglaciaire dont j'ai parlé au
00:30:06début, mais sur des changements climatiques beaucoup plus abrupts qui ont été mis en
00:30:10évidence sur les carottes de glace du Groenland, mais qui sont vues aussi dans de nombreux autres
00:30:16archives climatiques dont on a parlé très rapidement tout à l'heure et qui ont eu lieu
00:30:20essentiellement pendant la dernière période glaciaire, entre moins 100 000 ans et moins 20
00:30:25000 ans avant aujourd'hui. Merci beaucoup pour ces explications, donc on en sait désormais plus sur
00:30:33la glace comme une archive naturelle du climat. On vient de voir avec vos illustrations et vos
00:30:40explications qu'on peut retrouver beaucoup d'informations sur le climat et sur l'environnement
00:30:45dans le passé, que ce soit la reconstruction des températures en étudiant les molécules d'eau,
00:30:51la proportion entre les molécules d'eau lourdes et les molécules d'eau légères, la composition
00:30:56aussi de l'atmosphère par ce mécanisme qui a fait que des petites bulles d'air du passé se
00:31:02retrouvent piégées dans la glace et qui nous permettent de reconstruire la composition de
00:31:08l'atmosphère avant les données qu'on a pu commencer à mesurer à Hawaii dans les années 1950. On peut
00:31:15remonter bien plus loin grâce à la glace et puis comme Amel vient de l'évoquer, on peut aussi
00:31:21voir des phénomènes climatiques à une échelle beaucoup plus fine avec ces changements abrupts
00:31:27sur des courtes périodes, donc il y a une multitude d'informations effectivement sur le climat qui
00:31:36peut être analysée avec la glace. Alors maintenant j'ai peut-être une question pour vous en lien avec
00:31:41ce projet européen de recherche d'E-PICE qu'on a mentionné au début de la conférence et ce
00:31:47fourrage Beyond EPICA, par rapport aux analyses de la glace que vous venez tous les trois d'évoquer,
00:31:52quels sont les objectifs particuliers du projet d'E-PICE d'un point de vue scientifique ? Est-ce
00:31:57qu'il y a des nouveautés quant aux analyses qui peuvent être faites et ce que cela peut
00:32:04nous apprendre sur le climat ? Oui alors le projet d'E-PICE il a été monté comme projet un peu
00:32:11associé en fait à un projet européen qui est le projet Beyond EPICA dont le but est de
00:32:19fourrer une carotte de glace, pas forcément plus longue que celle qu'on a actuellement mais qui
00:32:24remonte plus loin dans le temps de façon continue donc jusqu'à 1,5 millions d'années en Antarctique
00:32:29de l'Est. Donc ce projet Beyond EPICA vise à doubler en fait l'enregistrement actuellement
00:32:35disponible de 800 000 ans qu'on a sur le site d'EPICA d'OMSEE pour aller explorer en fait
00:32:41l'alternance des périodes glaciaires interglaciaires plus loin dans le passé et surtout la cause du
00:32:47changement de ces périodicités de périodes glaciaires interglaciaires. Et pour ça en fait
00:32:53on va donc avoir besoin d'analyser sur des très petites quantités de glace parce qu'on va avoir
00:32:58une carotte de glace de 2,8 kilomètres avec énormément d'informations enregistrées dans
00:33:05chaque mètre de glace en profondeur et donc pour cela on a eu besoin de développer des nouvelles
00:33:11techniques pour vraiment analyser un maximum de traceurs climatiques dans un minimum de quantité
00:33:19de glace et le projet d'EPICE est notamment tourné vers le développement d'une nouvelle
00:33:25instrumentation pour analyser les carottes de glace donc analyser, on a vu, la composition
00:33:29ésotopique, analyser les impuretés chimiques, analyser la microstructure et puis on va avoir
00:33:36aussi donc les gaz bien sûr, on va avoir aussi dans ce projet d'EPICE donc de formation d'étudiants
00:33:42mais aussi de projets scientifiques des études de caractérisation du site puisque donc le projet
00:33:48Beyond EPICA le but c'est d'aller forer, enfin c'est en cours, une carotte de glace au milieu de
00:33:53l'Antarctique de l'Est mais pour pouvoir interpréter au mieux ces données comme l'a
00:33:56déjà dit Inès tout à l'heure, on a besoin vraiment de caractériser ce qui se passe en surface de la
00:34:02calotte de glace avant de forer ou en parallèle au forage, ça c'est vraiment le coeur du travail
00:34:07d'Inès et de Romilly et puis il y a toute une partie dans le projet d'EPICE qui met aussi en
00:34:14oeuvre des méthodes scientifiques associées comme la modélisation du climat sur des longues échelles
00:34:20de temps donc la modélisation du climat passé jusqu'à 1,5 millions d'années avant aujourd'hui
00:34:25et puis la modélisation de l'écoulement de la glace puisque comme l'a montré tout à l'heure
00:34:29Romilly, la glace s'écoule de façon continuellement et cet écoulement va être différent en fonction des
00:34:36conditions climatiques. Donc tous ces outils-là, l'instrumentation, la caractérisation du site de
00:34:41surface et puis la modélisation font partie intégrante du projet d'EPICE et c'est vraiment
00:34:46sur ces outils que sont formés les différents étudiants. Oui le projet d'EPICE c'est aussi
00:34:54une collaboration européenne entre différents laboratoires européens et ça permet aussi de
00:35:01mettre en commun des savoirs et de l'expertise scientifique qui est différente dans les
00:35:08différents laboratoires. Il y a beaucoup d'échanges aussi entre les étudiants et les chercheurs du
00:35:14projet et puis une collaboration aussi étroite avec des fabricants d'instruments et puis des
00:35:21instruments qui sont développés dans les différents laboratoires et donc c'est vraiment
00:35:24un projet aussi de mise en commun du savoir et des outils, des instruments à aller
00:35:31mettre sur le terrain mais aussi comme l'a dit Amèle, des outils d'interprétation et de modélisation numérique.
00:35:37Il est également très utile d'avoir une collaboration européenne pour la logistique de
00:35:49ce projet. Se rendre en Antarctique et effectuer le travail sur le terrain demande beaucoup
00:35:55d'organisation. Il est donc vital d'avoir le soutien de plusieurs nations. Il sera très
00:36:03difficile de mener à bien ce projet sans cette collaboration.
00:36:08Donc là vous avez un peu une photo de groupe. Donc effectivement le projet Deepice, c'est des
00:36:18partenaires dans dix laboratoires différents, des partenaires non académiques, il y en a dix
00:36:25aussi, une quinzaine, donc quinze étudiants et puis tous les encadrants et les gens autour
00:36:30au niveau des laboratoires. Donc c'est un projet très riche au niveau de la recherche, aussi au
00:36:35niveau de la formation. Il y a eu plusieurs écoles d'été au niveau des
00:36:40développements. Voilà donc un projet qui se terminera l'année prochaine avec on espère toutes les thèses soutenues brillamment.
00:36:47Merci beaucoup pour cette présentation du projet Deepice qui vise à former cette nouvelle
00:36:56génération de jeunes chercheurs qui soient en mesure d'étudier ces nouveaux échantillons
00:37:02glace qui sont en train d'être forés en Antarctique. On l'a vu avec des nouveaux
00:37:07instruments, des nouveaux modèles qui sont en train d'être développés. Avec cet enjeu aussi,
00:37:12vous l'avez dit, comme la glace très ancienne est finalement très comprimée, les échantillons sont
00:37:17limités. Donc cet enjeu de faire la meilleure utilisation possible de ces échantillons très
00:37:23précieux. Donc on imagine aussi le challenge scientifique et technique que ça peut représenter.
00:37:29Mais Beyond EPICA, ce n'est pas le premier forage de carottes de glace. Il y en a eu d'autres dans
00:37:35le passé, donc au Groenland et en Antarctique. Donc j'aimerais vous demander si vous pourriez
00:37:42nous faire un petit résumé des découvertes scientifiques qui ont pu être faites jusqu'à
00:37:48présent grâce à l'étude justement de précédentes carottes de glace qui ont été forées dans ce
00:37:54ces régions-là. Est-ce que ça a pu nous apprendre sur le climat ?
00:37:56Oui, alors les forages de glace ont démarré après la seconde guerre mondiale, donc dans les années 50,
00:38:07au niveau du Groenland, sur une base militaire, la base de Camp Suntory, avec un forage déjà qui a
00:38:14atteint plus d'un kilomètre de profondeur, un kilomètre trois. Et puis ça a enchaîné ensuite
00:38:20avec un forage dans ce qu'on appelle la partie antarctique de l'ouest, où il y a la petite
00:38:24péninsule qui va vers la Patagonie, sur le forage de Bird, avec de fortes logistiques américaines.
00:38:32Donc il y a eu ensuite différents forages, vous voyez plein de petits points là au Groenland et
00:38:38en Antarctique. Un forage assez connu, c'est le forage de Vostok, qui est donc sur la partie
00:38:44antarctique de l'est, donc c'est une base russe permanente qui est installée là-bas. Et où il y a
00:38:53eu, dans un contexte un peu de guerre froide, un forage très emblématique avec une belle
00:38:58collaboration scientifique entre les Russes, les Français et les Américains, qui a permis d'avoir
00:39:05des enregistrements climatiques qui remontent jusqu'à 400 000 ans avant aujourd'hui et qui
00:39:10sont longtemps restés comme la référence en termes de carottes de glace. Donc après il y a eu
00:39:16d'autres forages, notamment celui de Domsé que vous voyez ici, qui remonte actuellement à 800
00:39:21000 ans, et puis d'autres dont on pourra parler par la suite, notamment celui de Little Domsé dans
00:39:27le programme Bayon d'Epica pour remonter jusqu'à 1,5 million d'années. Donc les découvertes à
00:39:34partir des carottes de glace, comme l'a expliqué tout à l'heure Inès, à partir de la mesure des
00:39:39isotopes de l'eau, il a été possible de reconstruire les variations des températures. Donc là on voit
00:39:44la courbe sur les derniers 250 000 ans sur la carotte de Vostok, donc là ça n'est pas jusqu'à
00:39:50400 000 ans encore, mais après le forage a continué. Et donc on a vu les premières successions
00:39:55glaciaires interglaciaires sur cette carotte antarctique de Vostok, et puis à partir du
00:40:01moment où on a été capable d'extraire et de mesurer ce qu'il y avait dans les bulles d'air,
00:40:06donc reconstruire l'atmosphère du passé, on a pu ajouter à ces variations de températures
00:40:11reconstruites dans les carottes de glace, les variations de dioxyde de carbone que vous voyez
00:40:15dans la courbe en haut en vert, et puis les variations de concentration de méthane sur la
00:40:21courbe en bleu en bas dans l'atmosphère. Et vous voyez qu'en fait on a vraiment ce parallélisme
00:40:29entre le changement de température antarctique dans le passé et puis ce changement de concentration
00:40:35en gaz à effet de serre, donc dioxyde de carbone et méthane, mais comme on l'a vu tout à l'heure
00:40:39avec Romilly, sur des concentrations qui restent significativement plus basses que ce qu'on a
00:40:45actuellement dans l'atmosphère. L'autre chose, j'en ai parlé tout à l'heure, qu'on a vu dans
00:40:57les carottes de glace, et cette fois-ci c'est plutôt au Groenland, c'est le fait qu'on a ces
00:41:01variations très importantes de température dans des temps très courts, donc là on n'est plus dans
00:41:06les transitions glaciaires interglaciaires, mais on est sur des échelles vraiment de quelques
00:41:10dizaines d'années où on va avoir des augmentations de plus de 10 degrés au Groenland, et puis une
00:41:16variabilité un peu plus lente, mais associée en fait en Antarctique comme on le voit sur cette
00:41:22figure. Donc vraiment là on voit qu'on commence à lever un peu les questions du mécanisme
00:41:29climatique à partir de l'étude des carottes de glace. Alors maintenant le nouveau défi,
00:41:37puisque là on a reconstruit jusqu'à 800 000 ans d'archives climatiques, donc de
00:41:42succession de périodes glaciaires interglaciaires et de concentration en gaz à effet de serre,
00:41:46c'est de remonter plus loin dans le temps, donc au-delà du dernier million d'années,
00:41:50puisque si vous regardez la figure que vous avez ici, en fait on a une diminution lente de la
00:41:59température et puis un changement dans l'alternance des cycles glaciaires interglaciaires au cours des
00:42:05derniers millions d'années. Et là la question se pose du pourquoi. Pourquoi est-ce qu'on va
00:42:10avoir des transitions glaciaires interglaciaires qui étaient différentes avant un million d'années,
00:42:15avant aujourd'hui, par rapport à ce qu'on a actuellement, alors que le forçage orbital,
00:42:20donc cette trajectoire de la Terre autour du Soleil ou son inclinaison, n'a pas vraiment changé.
00:42:25Donc là c'est l'objet du programme Bayon d'Epica, donc d'aller plus loin qu'à 800 000 ans,
00:42:31d'aller jusqu'à 1,5 million d'années et de voir si la concentration atmosphérique en dioxyde de
00:42:36carbone a changé et pourrait expliquer le fait qu'on a quelque chose de différent dans la
00:42:42dynamique climatique. Donc ça c'est une façon de faire. Et une autre chose qui est assez innovante,
00:42:47qui a lieu actuellement aussi en Antarctique de l'Est avec le programme Alan Higgs par les
00:42:55Américains, c'est d'essayer de récupérer de la glace encore plus ancienne que 1,5 million d'années,
00:43:00mais par morceaux, donc juste comme ça un petit morceau de glace de par exemple 2 ou 6 millions
00:43:07d'années, à partir de glace qui s'écoule de façon un peu particulière. Donc je ne sais pas si le
00:43:12schéma est facile à voir en bas à droite, mais si on se place sur ce site de Alan Higgs, vous
00:43:17voyez peut-être les petites lignes grises qui sont sur le schéma en bas à droite, qui sont en fait
00:43:23des lignes qu'on appelle isochrones, donc qui ont le même âge. Et vous voyez qu'en fait ces lignes
00:43:30grises elles remontent à la surface sur la partie droite du schéma, ce qui veut dire qu'en fait on a
00:43:37de la glace très ancienne qui à cause de l'écoulement va affleurer à la surface. Et en
00:43:42allant fourrer de la glace là, pas forcément profond, on peut être juste sur la centaine de
00:43:47mètres, eh bien on va pouvoir avoir directement accès à de la glace très ancienne qui est remontée
00:43:52là par écoulement. Et si on analyse cette glace très ancienne, eh bien on va être capable d'avoir
00:43:57des petits images en fait de la concentration de dioxyde de carbone dans le passé. Et c'est ce que
00:44:07vous voyez en fait avec les petits points bleus sur ce schéma ici, vous avez donc des morceaux
00:44:13de glace qui ont été datés à 1,5 million d'années, 2 millions d'années et 2,5 millions d'années qui
00:44:19montrent des concentrations de dioxyde de carbone qui finalement sont très en deçà des plus de
00:44:24400 ppm que nous avons actuellement. Donc vous venez juste de dire le mot datation, c'est peut-être
00:44:31quelque chose qu'on n'a pas encore abordé mais que le public s'interroge peut-être là-dessus. Donc
00:44:36on a expliqué qu'on arrivait à reconstituer des données comme la température, comme les gaz à
00:44:40effet de serre. Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots sur la manière avec laquelle on peut
00:44:47attribuer une date, un âge à ces données, à la glace, au bulle d'air ? Certes, ça peut être très
00:44:59long. J'avais mentionné tout à l'heure le fait qu'on pouvait compter des couches de glace jusqu'à
00:45:06environ 100 000 ans, donc ça c'est bien, on peut le faire. Après quand on est sur de la glace avec
00:45:13une stratigraphie plus compliquée, il va devenir plus difficile de dater la glace. Donc on va
00:45:18modéliser l'écoulement de la glace, ça va nous aider à dater la glace. On va faire des tas de
00:45:22mesures de traceurs dans les bulles d'air, dans la glace elle-même, pour essayer de dater la glace.
00:45:27Alors je vais pas aller dans les détails parce que ça peut être très long, on va mettre tout. Voilà,
00:45:32on a plein de traceurs qu'on va développer, des traceurs radioactifs comme le carbone 14,
00:45:40on va pas trouver de carbone 14 tellement dans nos carottes de glace, mais on va utiliser par
00:45:43exemple le krypton 80, qui va aussi avoir une demi-vie plus importante que le carbone 14,
00:45:49on va être plutôt sur une demi-vie de plusieurs centaines de milliers d'années. Et donc voilà,
00:45:53en faisant des mesures dans les bulles d'air, on va pouvoir attribuer un âge à ces bulles d'air.
00:46:00Ok, donc on comprend que c'est par une combinaison de différentes méthodes d'analyse à la fois au
00:46:06niveau de la glace et des bulles d'air qu'on va réussir à reconstruire la chronologie de ces
00:46:11échantillons de glace, voilà. C'est un domaine en soi, de dater la glace. Mais voilà, j'ai eu
00:46:17quelques questions passées sur ce sujet, il m'a permis d'aborder ce point-là. Et donc,
00:46:24en introduction de la conférence, j'évoquais aussi le fait que ces travaux de recherche sur
00:46:28les climats du passé sont aussi très utiles à la communauté de chercheurs qui travaillent sur la
00:46:34modélisation du climat, notamment pour prédire les évolutions du climat dans le futur. Est-ce
00:46:40que vous pourriez nous dire quelques mots sur ces liens, en fait, entre le passé, le présent et le
00:46:44futur du point de vue du climat et l'apport de ces glaces que vous analysez en ce sens ?
00:46:49Oui, donc Romilly, on a déjà parlé. Donc voilà, on essaye d'utiliser nos données du passé pour
00:47:00essayer de voir si on peut essayer de mieux prédire ce qui se passe actuellement et ce qui
00:47:05va se passer dans le futur. Alors, a priori, ce n'est pas forcément évident, parce qu'on voit
00:47:09sur ce graphe que le niveau de dioxyde de carbone dans l'atmosphère actuellement, il est beaucoup
00:47:15plus élevé que celui qu'on a connu au cours des 800 000 dernières années. Il n'empêche que si on
00:47:21arrive à comprendre quand même comment une déglaciation s'est faite, quels sont les
00:47:25mécanismes de rétroaction entre le changement climatique, le changement de dioxyde de carbone
00:47:29dans l'atmosphère, les changements d'évolution des calottes de glace, si on comprend ça, si on
00:47:34comprend à quelle vitesse par exemple une calotte de glace a pu disparaître dans le passé, et bien
00:47:39ça va nous aider à savoir ce qui nous attend dans le futur. Donc là, de même, je montre sur cette
00:47:48figure que si on remonte suffisamment loin dans le passé, on peut aussi espérer retrouver des
00:47:54périodes avec des concentrations en dioxyde de carbone qui étaient comparables à celles qu'on a
00:48:01actuellement, et donc aller plus loin dans le passé peut nous aider à mieux comprendre un peu ce qui
00:48:06se passe actuellement. Et puis, ça c'est juste un schéma qui est pris du rapport du GIEC qui montre
00:48:19que le dernier rapport du GIEC a essayé d'intégrer pour la première fois des contraintes issues du
00:48:27paléoclimat pour essayer d'affiner les prévisions pour le futur. Donc on a vu un peu que dans le
00:48:36passé on a eu ces périodes interglaciaires qui pouvaient être aussi chaudes, plus chaudes que
00:48:41l'actuel, on peut les utiliser comme autant de sortes de bancs d'essais pour les modèles de climat,
00:48:46pour voir si ces modèles de climat qui sont utilisés pour prédire le climat futur sont
00:48:50capables de reproduire ces périodes interglaciaires passées, s'ils sont capables de reproduire le
00:48:56climat, la végétation qu'on avait à cette époque-là, la variabilité climatique, et puis on peut bien
00:49:04sûr utiliser ces longs enregistrements, comme je l'ai dit, pour regarder aussi la dynamique des
00:49:09calottes de glace. On peut se poser la question mais voilà si notre trajectoire de réchauffement
00:49:14climatique continue ainsi, à quelle vitesse les calottes de glace du Groenland et de l'Antarctique
00:49:19vont disparaître ? Ce n'est pas une question facile, c'est une question difficile, on ne sait
00:49:27pas encore vraiment y répondre, et c'est en regardant dans le passé notamment les calottes
00:49:31de glace qu'on va pouvoir avoir une idée de la vitesse à laquelle les calottes ont pu évoluer
00:49:37dans le passé en lien avec les changements de température et les changements de concentration
00:49:42en gaz à effet de serre. Et puis il y a aussi toujours l'idée du point de bascule, donc on a vu
00:49:47que dans le passé on avait eu des événements un peu extrêmes en quelques dizaines
00:49:52d'années qui montrent que le climat peut basculer d'un mode à l'autre de façon très rapide, et c'est
00:49:58uniquement en comprenant ce qui s'est passé dans le passé, comment les choses se sont enchaînées
00:50:03entre les variations Groenland, les autres latitudes, qu'on va pouvoir essayer de mieux
00:50:07prédire si ces tels points de bascule sont possibles dans le futur en observant bien sûr
00:50:14ce qui est en train de se passer actuellement. Merci beaucoup pour ces précisions sur comment
00:50:24l'étude des climats du passé sert aujourd'hui à modéliser le climat futur et à nous aider à
00:50:33faire des prédictions les plus précises possibles. Je vais maintenant m'adresser à Inès et Romilly,
00:50:40maintenant qu'on a dressé ce large panorama de toute la recherche qui peut être réalisée sur
00:50:47les carottes de glace et sur l'étude du climat à partir des carottes, est-ce que vous pourriez
00:50:51chacune nous dire quelques mots plus précisément sur votre sujet-thèse et comment vous, à travers
00:50:57votre thèse, vous contribuez justement à l'ensemble de ces recherches ? Oui, alors moi j'évoquais
00:51:06tout à l'heure l'importance de comprendre ce qui se passe à la surface d'une carotte glaciaire,
00:51:11donc pour comprendre comment une carotte de glace se forme et comment on interprète ensuite ce
00:51:17qu'on mesure dans une carotte de glace. Donc moi dans ma thèse je m'intéresse justement ça au
00:51:21processus ou au phénomène qui se passe à la surface de l'Antarctique et aux échanges des
00:51:27molécules d'eau, donc des isotopes de l'eau, entre l'atmosphère et la neige pour comprendre
00:51:32mieux comment les isotopes de l'eau sont enregistrés dans la neige et donc plus tard dans la glace et
00:51:38mieux comprendre cette relation qui existe entre la température locale en Antarctique et la quantité
00:51:44d'isotopes ou le ratio des isotopes de l'eau qu'on trouve dans la neige. Et donc voilà, l'objectif
00:51:50aussi plus global c'est de mieux pouvoir interpréter les isotopes de l'eau dans une carotte de glace
00:51:56et reconstruire les températures plus finement dans le passé. Pour moi je m'intéresse à la zone
00:52:04de transition entre la neige et la glace dans le 100 premier mètre de carotte glaciaire et
00:52:11aussi la zone où les boules d'air vont progressivement être piégées. J'étudie les différents mécanismes
00:52:20et les lieux pour mieux interpréter ensuite les données et aussi pour les dater correctement.
00:52:28Merci, donc vous contribuez aussi à ces fameuses méthodes de datation qu'on évoquait tout à l'heure.
00:52:38Et est-ce que je peux cette fois-ci vous demander ce qui vous a motivé à l'idée de travailler sur
00:52:45cette thématique de recherche et le fait de rejoindre le projet d'EPICE? Et comme vous êtes
00:52:50en troisième année de thèse, est-ce que vous savez ce que vous auriez envie de faire à l'issue
00:52:55de cette thèse? J'ai toujours été fascinée par les glaciers et leur interaction avec le
00:53:07système climatique. C'est vraiment grâce à cet intérêt que j'ai réussi à travailler avec des
00:53:14caractéristiques. J'ai eu la chance de travailler sur le terrain pendant ma licence et pour moi ce
00:53:20sont les meilleures expériences. Dans un avenir proche, j'espère continuer à travailler dans ce domaine.
00:53:29Oui, moi de mon côté c'est un petit peu comme Romilly, j'ai toujours été intéressée par
00:53:40les paysages autour de moi, notamment dans la région où j'ai grandi, dans les Alpes. Et puis
00:53:46après c'est pendant mes études de géosciences et des sciences de l'atmosphère et du climat que
00:53:51j'ai découvert le travail sur le terrain et le travail de glaciologie, nivologie, sciences du
00:53:57climat. Et donc c'est dans mes études que j'ai découvert tout ce travail-là. Et puis petit à
00:54:05petit j'ai découvert aussi l'Antarctique et c'est un peu ce qui m'a motivée à prendre part,
00:54:10enfin à participer au projet d'EPICE. Et puis après pour la suite j'aimerais continuer aussi
00:54:16comme Romilly, à travailler dans ce domaine, sur l'Antarctique, comprendre les changements
00:54:21présents et futurs de l'Antarctique. Merci beaucoup pour ces témoignages. Peut-être
00:54:28une dernière question à toutes les trois avant de clôturer cette discussion et de laisser place
00:54:35aux questions du public. Mais j'aurais aimé vous demander si au cours de votre parcours de
00:54:41chercheuse, de vos travaux de recherche, est-ce qu'il y a quelque chose qui vous a particulièrement
00:54:45marquée, étonnée, fascinée ? Voilà, si vous avez une petite anecdote personnelle à nous partager.
00:54:54Je crois que la dynamique du groupe est très importante lorsque l'on travaille sur le terrain.
00:55:07Cela peut-être être un défi car nous n'étions que 13 personnes à vivre ensemble pendant près
00:55:16de trois mois. Donc il est très important d'avoir une bonne ambiance au sein de l'équipe. Donc pour
00:55:23moi, le moment le plus fort a été de se retrouver autour d'une pizza à l'endroit de chaque semaine,
00:55:31dans le terrain, pardon, après avoir travaillé deux ou trois fois. Donc pour moi, c'est une bonne expérience.
00:55:40Alors moi, j'ai eu la chance avant de commencer ma thèse dans le projet d'E-PACE de partir un an
00:55:50en Antarctique pour travailler comme technicienne de recherche. Donc j'étais là-bas pour maintenir
00:55:56des instruments, prélever des échantillons pendant un an. Et donc j'ai vécu la nuit polaire en Antarctique
00:56:02et vraiment c'est une expérience incroyable et qui a beaucoup marqué mon parcours puis qui m'aide
00:56:07aussi maintenant dans mon travail de recherche actuel pendant ma thèse. Comme Romil l'a dit
00:56:12aussi, c'est une expérience qui était hyper forte et aussi partagée avec onze autres personnes
00:56:19pendant un an sur place. Donc voilà, c'est une année qui a beaucoup marqué mon parcours
00:56:23de recherche et encore actuellement dans ma recherche actuelle.
00:56:27Ah, je crois qu'on n'entend pas Amahel.
00:56:37Oui, alors moi j'ai moins de jolies photos. Moi ce qui m'a beaucoup plu aussi, c'est tout ce qui est
00:56:45le travail de recherche en fait lui-même. Donc pendant ma thèse, j'avais travaillé un peu
00:56:52à essayer de dater en fait ce qui se passe dans la partie la plus profonde des carottes de glace
00:56:58du Groenland pour savoir en fait quand est-ce que la calotte s'était construite,
00:57:05quand est-ce qu'elle avait pu disparaître peut-être. Voilà, en sachant que la dernière période
00:57:09interglaciaire, il y a un peu plus de 120 000 ans avant aujourd'hui, était plus chaude que l'actuelle
00:57:15au Groenland. Donc à chaque fois en fait j'ai analysé pour les dater les fonds de carottes
00:57:21du Groenland et à chaque fois c'était un peu émouvant d'avoir cette glace plus ou moins ancienne
00:57:26entre les mains et puis de faire les mesures pour dater cette glace. Et après vraiment voilà,
00:57:32on a une date, on apprend des choses vraiment sur la science et à chaque fois cette curiosité.
00:57:37Donc on a cet échantillon très précieux, la curiosité de savoir qu'est-ce qu'on va mesurer,
00:57:42qu'est-ce qu'on va obtenir, qu'est-ce qu'on va apprendre, de suivre ça d'un forage à l'autre,
00:57:47et en fait cette quête elle est toujours en cours. Et voilà, c'est des choses qui me passionnent,
00:57:52qui continuent à me passionner. Merci beaucoup pour vos témoignages et puis pour toutes ces
00:57:58explications que vous nous avez apportées sur l'étude des climats du passé grâce à la glace.
00:58:04Là je m'adresse cette fois-ci au public, si vous souhaitez en savoir plus sur ce domaine de
00:58:10recherche, donc l'étude des carottes de glace, à travers le projet DeepEyes, on vient de publier
00:58:15une série de courtes vidéos pédagogiques, donc des vidéos 3 minutes, qui sont disponibles sur
00:58:20notre chaîne YouTube, donc vous en avez 15. Elles sont en anglais mais également avec des sous-titres
00:58:24en français. Donc voilà, c'est des vidéos qu'on en a produit avec l'objectif que ça puisse aussi
00:58:30utiliser par les enseignants, notamment en lycée, mais aussi le grand public qui souhaite en apprendre
00:58:37plus sur ce thème. Donc je crois qu'on a maintenant un petit peu de temps pour répondre
00:58:42éventuellement aux questions du public, je crois qu'il y en a eu pas mal. Alors tout d'abord je
00:58:49voudrais juste reprendre les mots d'une personne au tout début du chat, donc vraiment un grand
00:58:55merci Diaporama, pédagogique éclair, un travail de vulgarisation super, donc merci à vous. Donc
00:59:04et finir sur les anecdotes, c'était une belle idée. Donc il y a eu beaucoup de questions, un grand
00:59:10merci au public. Nous n'allons pas pouvoir toutes les poser parce que certaines, de toute façon,
00:59:16vous y avez répondu en suivant et donc on va essayer de vous les poser pour que vous puissiez
00:59:23répondre à toutes. Désolée encore pour celles qui auraient été un petit peu, voilà, reniées,
00:59:29mais donc mon collègue va vous les poser tout de suite. Merci à vous. Bonjour, j'espère que vous
00:59:37m'entendez bien. J'ai juste un petit problème de caméra. Alors on va commencer par les premières
00:59:42questions. Les premières questions, Cheryl, demandez si le fait de transporter ces cylindres
00:59:50de glace sur des longs trajets n'altère pas les analyses effectuées par la suite.
00:59:54Je vais faire, je vais répondre. Ok, alors effectivement, transporter des carottes de glace,
01:00:05c'est comme l'ont dit Inès et Romilly, c'est extrêmement compliqué si on ne veut pas
01:00:11effectivement affecter, voilà, ce qu'on veut analyser par la suite. Donc au début, sur les
01:00:18premiers forages dont j'ai parlé, quand j'étais même pas née, en fait on ne faisait pas tellement
01:00:22attention à ça et la glace, elle était gardée gelée, mais sans plus. Et puis au cours des années,
01:00:27on s'est aperçu que la glace, c'était beaucoup mieux de la garder à moins 50 degrés et c'est
01:00:32ce que Romilly a dit, sinon on allait affecter en fait la composition de l'atmosphère qui est
01:00:38piégée dans la glace, dans les bulles d'air. Donc voilà, il faut qu'on fasse, qu'on prenne
01:00:43énormément de précautions sur la température, sur la façon de transporter aussi la glace.
01:00:48Donc la glace, en fait, il y a aussi toujours une zone un peu fragile de la glace, de la carotte de
01:00:54glace à un certain niveau de profondeur. Donc quand la glace sort de la calotte elle-même, en fait,
01:00:59on a une relaxation mécanique puisqu'on a moins de pression autour et ça, ça peut la rendre plus
01:01:05fragile. Donc quelquefois, on va aussi laisser la glace se reposer, justement la forer, on la
01:01:09laisse se reposer en Antarctique pendant un an et c'est seulement au bout d'un an qu'on va la
01:01:13transporter et on la transporte à moins 50 degrés pour qu'on garde toutes les informations. Donc je
01:01:19vous laisse imaginer, en fait, toute la complexité de la logistique pour assurer ce transport de ces
01:01:26archives extrêmement fragile et c'est pour ça que, vous voyez, on fait un forage à la fois et on se
01:01:32met à beaucoup de pays ensemble pour faire ça au mieux. Tout à l'heure aussi, sur la photo qu'on
01:01:37a vue de l'échantillon de glace qui était découpée en plusieurs sections pour les différentes
01:01:43analyses, on a vu le mot archive. Donc ça, je crois que c'était aussi en lien avec des questions
01:01:48qui ont pu être posées. Est-ce que vous pouvez nous expliquer, en fait, ce que ça veut dire que
01:01:52ces morceaux de glace qu'on appelle les archives, je crois qu'il y a un enjeu de garder de la glace,
01:01:57en fait, pour les générations futures quand on fait des forages ? Oui, alors une archive déjà,
01:02:03oui, donc à chaque fois que, voilà, sur le terrain, on va toujours garder une partie de la section de
01:02:09la carotte qu'on va garder sur le terrain parce qu'en Antarctique, on est sûr que, au moins pour
01:02:14les années à venir, ça ne va pas fondre. Comme ça, au moins, même s'il y a un problème au cours
01:02:19du transport, il en reste une partie de la carotte de glace déjà en Antarctique. Et effectivement,
01:02:24on essaye de garder cette archive le plus longtemps possible, donc des dizaines d'années après le
01:02:31forage pour les générations futures. Donc effectivement, actuellement, par exemple au
01:02:35laboratoire, on est encore en train d'analyser de la glace qui a été forée dans les années 80,
01:02:412000, etc. parce qu'on a développé des nouvelles techniques d'analyse, des nouvelles techniques de
01:02:47datation de la glace. Donc c'est toujours bien de garder une archive pour les générations futures
01:02:52qui pourront sans doute faire un usage encore meilleur que celui qu'on fait actuellement de ces
01:02:58archives très précieuses. Alors il y a d'autres questions. Donc Julie, alors je vais mélanger
01:03:06plusieurs questions qui se recoupent, Julie et Bastien. Combien de temps dure une campagne de
01:03:12mesures ? Alors là, on englobe tout dans la question. Temps du voyage, établissement du
01:03:16campement, temps de réalisation des carottages, temps de préparation, d'expédition, etc. Et au
01:03:22vu de la longue durée et de la logistique complexe nécessaire pour rapatrier les échantillons de glace
01:03:27jusqu'en métropole, a-t-il été envisagé de faire des analyses sur place ? Je vais continuer. Alors,
01:03:37ça peut durer, ça va durer effectivement longtemps. Donc une chose qu'on n'a pas détaillée aujourd'hui,
01:03:43c'est qu'avant de faire le forage lui-même, on va pendant plusieurs années essayer de trouver
01:03:49l'endroit où le forage doit être fait. Parce que ça n'a pas été fait dans les premiers forages,
01:03:54c'était plutôt des forages d'opportunité. Mais maintenant, on essaye, comme la logistique est
01:04:00compliquée, d'aller à un endroit où vraiment on va faire une carotte de glace parfaite. Donc,
01:04:03il y a tout un travail préparatoire qui peut prendre plusieurs années où on va faire des
01:04:08survols radars par exemple, où on va essayer de voir quel est l'endroit le plus approprié. Donc
01:04:13ensuite, effectivement, il va falloir construire le camp pour faire le forage. Donc ça, ça va
01:04:20pouvoir prendre sans doute une saison. Donc en général, on va plutôt travailler l'été en
01:04:24Antarctique, donc les trois mois d'été dont on parlait Romilly, sauf pour certaines choses où
01:04:28on va avoir des hivernants comme ce qu'a fait Inès. Mais pour le forage de glace, on y va
01:04:32uniquement l'été. Et on va effectivement avoir une saison pour préparer le camp, une saison pour
01:04:38faire les 100 premiers mètres. Et puis après, ça va s'enchaîner un peu plus rapidement. Mais il
01:04:42faut bien prévoir 4 ou 5 saisons, donc 4 ou 5 années de forage pour avoir toute la carotte de
01:04:48glace pour atteindre jusqu'au socle rocheux. Après donc, chaque année, voilà, on la découpe sur
01:04:52place, on ramène les échantillons. Donc là, pour vous dire, en fait, demain on va recevoir des
01:04:56échantillons qui ont été forés la dernière saison, donc l'hiver dernier en France, mais l'été en
01:05:03Antarctique au laboratoire. Donc ça, voilà, ça prend beaucoup de temps. Et après, il y a tout
01:05:08le temps de l'analyse elle-même au laboratoire. Et puis là, ça s'étale aussi sur des années. Donc
01:05:13pour vous dire, actuellement, on est encore en train d'analyser la carotte Epicadomsae dont le
01:05:18forage s'est terminé en janvier 2004. Donc vous voyez qu'une carotte de glace, effectivement,
01:05:24c'est un travail de plusieurs... On travaille sur plusieurs dizaines d'années pour en extraire le
01:05:31maximum d'informations climatiques. Après, je peux rajouter peut-être quelque chose sur la
01:05:38question. Il y a eu aussi une question sur est-ce qu'on peut faire des analyses sur place ? Donc
01:05:42il y a quelques analyses qui sont faites sur place avec des instruments qui sont déplaçables en
01:05:47fait en Antarctique ou sur le terrain en général. Après, il y a des analyses qu'on ne peut pas faire
01:05:52sur place parce que les instruments, on ne peut pas les transporter et puis il faut du personnel
01:05:57pour pouvoir les opérer. Donc voilà, il y a certaines analyses, mais très limitées, qui sont
01:06:02faites sur place. Puis après, la glace est rentrée, est rapatriée en Europe pour pouvoir faire le reste
01:06:08des analyses et comme l'a dit Amaël, qui s'attèle sur plusieurs années. Alors ensuite, il y a aussi
01:06:15une question. Alors, quels isotopes analysez-vous avec ces reconstructions climatiques ? Et certains
01:06:23radionucléides font-ils également partie de vos analyses ? Alors, on fait pas mal d'isotopes
01:06:34stables. Donc pour les isotopes de l'eau, on va regarder surtout les isotopes stables, parce que
01:06:40son eutricium, ça disparaît assez vite avec une demi-vie de 12 ans. Donc voilà, pour les isotopes
01:06:50de l'eau, des isotopes stables. Dans les bulles d'air, on va regarder aussi beaucoup d'isotopes
01:06:55stables, comme le carbone 13, du CO2, les isotopes du dioxygène. On a parlé par contre du krypton 80,
01:07:11qui lui n'est pas un isotope stable, avec une demi-vie de 200 000 ans, qui va permettre donc
01:07:15de dater la glace. Et voilà, on peut faire aussi des analyses de carbone 14,
01:07:26en rassemblant énormément de glace pour avoir suffisamment de dioxyde de carbone pour faire ce
01:07:30genre d'analyse. Mais ça, c'est vraiment un peu de façon, je ne vais pas dire anecdotique, parce que
01:07:36c'est beaucoup de travail, mais ça n'apporte pas tellement à la datation de la glace elle-même,
01:07:41puisque le carbone 14, en fait, on ne va pas pouvoir être capable de dater plus ancien que
01:07:4550 000 ans avant aujourd'hui. Voilà, il y a d'autres mesures, beryllium 10 par exemple,
01:07:55chlore 36, qui vont être aussi étudiées à des fins notamment de datation.
01:08:01D'accord, donc la question suivante s'adresse surtout à Inès Olivier. Alors Inès Olivier a
01:08:10beaucoup insisté sur le fait que les mesures de température sont locales. Est-ce que les
01:08:14delta T mesurées en Antarctique sur les dernières dizaines, centaines de milliers d'années sont
01:08:19confirmées avec d'autres mesures hors Antarctique ? Peut-être Amel, tu peux m'aider sur cette
01:08:27question. Mais oui, quand on utilise les isotopes de l'eau, c'est vraiment une température locale
01:08:33qu'on reconstruit avec les isotopes de l'eau dans une carotte de glace. Après, il y a d'autres
01:08:37proxys, enfin de manières de reconstruire des températures ailleurs sur le globe et dans
01:08:44d'autres archives. Mais alors sur le delta des températures, peut-être Amel, tu peux...
01:08:48Effectivement, c'est, Inès a très bien dit, ça va être une température locale. Et en fait,
01:08:56si on regarde au global, on ne va pas avoir le même changement de température. Donc par exemple,
01:09:01si on regarde la dernière déglaciation, notre dernier maximum glaciaire est l'actuel,
01:09:04on va trouver au centre du Groenland un changement de température de 20 degrés. Si on regarde la
01:09:09même chose en Antarctique, on va trouver un changement de température de plutôt 8 degrés.
01:09:14Et si on essaie d'avoir une reconstruction un peu plus globale du changement de température
01:09:18entre le dernier maximum glaciaire et l'actuel, on va être plutôt sur 5 degrés. Donc voilà,
01:09:23ce qu'on a en Antarctique, ça reste local au niveau de l'Antarctique. Ce qu'on a au Groenland,
01:09:28ça reste local au niveau du Groenland. Et si on veut vraiment reconstruire ce qui se passe au
01:09:31niveau du globe entier, eh bien, il va falloir combiner ça avec les autres archives dont on
01:09:36a parlé, notamment les sédiments marins. Une autre question d'Antoine. Y a-t-il des
01:09:45mesures similaires effectuées sur les glaciers montagneux type mer de glace, Aletsch ou Mont Rose?
01:09:50Donc oui, il y a aussi des mesures, des conditions météorologiques ou aussi des
01:10:00prélèvements qui sont faits sur des glaciers alpins, on va dire, non polaires. Puis après,
01:10:07il y a aussi des carottes de glace qui sont faites sur les glaciers en Europe, mais aussi dans les
01:10:11Andes ou en Himalaya. Et là, on ne va pas reconstruire les mêmes choses que dans les
01:10:15carottes. On ne va pas reconstruire les mêmes choses et les mêmes paramètres que ce qu'on
01:10:20mesure dans les carottes polaires. On va pouvoir reconstruire, par exemple, du climat plus local,
01:10:25ou par exemple, tracer les sources de pollution en Europe ou ailleurs. Donc on ne reconstruit pas
01:10:32les mêmes choses, mais oui, il y a des mesures qui sont faites aussi sur les glaciers en Europe
01:10:36et ailleurs dans d'autres chaînes montagneuses. Alors après, une question de Thomas. La glace,
01:10:46alors c'est sur les archives, la glace s'était découpée en blocs et dans les archives. La
01:10:53question c'est, celles-ci sont bloquées en France. Alors je ne suis pas sûr que la question soit
01:10:57complète. Je pense que ça fait référence à ce qu'on voyait sur la photo tout à l'heure de la glace.
01:11:06On voyait qu'il y avait différentes sections qui étaient découpées pour différentes analyses et
01:11:10ce qu'on a mentionné tout à l'heure. Donc il y a des sections qu'on appelle des archives. Donc
01:11:14cette glace qu'on conserve et qu'on garde, comme l'expliquait Amel, pour différentes raisons. Donc
01:11:19ces archives restent plutôt en Antarctique. Ensuite, une fois que la glace est rapatriée
01:11:24en Europe, nos échantillons sont stockés dans des grands entrepôts frigorifiques mutualisés. Et
01:11:33ensuite, chaque laboratoire va venir chercher ces petits échantillons pour faire ces analyses plus
01:11:40précises. La question suivante, donc de Brigitte, peut-on faire des analyses microbiologiques ou
01:11:48d'extraction génomique ? Je vais faire rapidement. Ce n'est pas du tout notre spécialité, à nous
01:12:03quatre. En revanche, il y a effectivement des gens qui font des analyses microbiologiques dans
01:12:10certains morceaux de glace. Je sais qu'il y a quelques études qui sont faites sur la glace de
01:12:21Vostock, puisqu'en dessous de la carotte de glace, en fait, on a un lac sous glaciaire. Et donc il y
01:12:25a la question de savoir s'il y a de la vie ou pas dans ce lac sous glaciaire. Et puis ce sont
01:12:31des choses qui peuvent se faire certainement aussi au niveau du Groenland. Ensuite, une question de
01:12:38Capucine. Que faites-vous des carottes une fois étudiées ? Donc sont-elles archivées ? Si oui,
01:12:43pendant combien de temps ? Les carottes, alors on a beaucoup d'analyses qui malheureusement sont
01:12:54destructives. Donc il y a une partie de la glace qu'on ne pourra pas analyser dans le futur. C'est
01:12:59pour ça qu'on garde toujours une archive. Alors l'archive qui va être sur le terrain. Et puis
01:13:03sinon, pour les forages un peu emblématiques dont on a parlé, comme Suntory, Vostock,
01:13:09Epica-Domsee, etc., on garde autant que possible la glace qui n'a pas été détruite par les analyses,
01:13:16soit sur le terrain, soit dans des grands entrepôts frigorifiques dans les différents pays. Et on ne
01:13:24la jette jamais, en fait, parce que c'est extrêmement précieux. Du coup, toujours sur
01:13:31sur ces archives, est-ce qu'on retrouve des résultats équivalents en cas de réanalyse ? Donc
01:13:38réanalyse de ces archives. Et les carottes sont hors de leur milieu, de leur couche de glace
01:13:44d'origine. Est-ce que cela a un impact dans les analyses ? Je continue ? Oui. Alors oui,
01:13:58effectivement, on remesure, on vérifie ce qui a été fait précédemment. Et puis comme on a
01:14:03aussi plusieurs carottes de glace en Antarctique, des carottes de glace longues, pour décrire les
01:14:07cycles glaciaires, interglaciaires, on peut vérifier qu'on retrouve quand même des choses
01:14:11similaires entre les différentes carottes, ce qui est quand même rassurant, avec aussi des disparités
01:14:16régionales. Ensuite, comme je l'ai dit tout à l'heure, effectivement, quand on fore la glace
01:14:23et qu'on la transporte, on peut affecter un petit peu les traceurs qui sont enregistrés. Donc,
01:14:28on essaye de prendre un maximum de précautions pour ne pas avoir ces effets-là, ne pas être
01:14:35biaisé lors de l'analyse. Et puis, si on sait qu'on a des effets possibles, on essaye de les
01:14:43étudier pour pouvoir effectivement les corriger. Voilà. Donc, ce sont des choses qui sont
01:14:51effectivement documentées, la perte d'information qu'on peut avoir entre le moment où on fore la
01:14:55glace et le moment où on va l'analyser. Ce sont des choses qu'on étudie aussi pour avoir le moins
01:15:01de biais possible sur nos analyses. J'ai une question de Bastien. À partir des graphiques
01:15:07comparant les variations de température au Groenland et en Antarctique, pourrait-on en
01:15:12déduire que l'hémisphère sud réagit aux variations de température plus lentement que l'hémisphère
01:15:16nord ? En fait, tout cela est très régional. Je continue. Vous n'hésitez pas à me dire. Alors,
01:15:27en fait, on voit qu'effectivement, au Groenland, c'est extrêmement abrupt. Ça peut être lié
01:15:31notamment à la présence de glace de mer autour du Groenland qui peut disparaître très vite,
01:15:38par exemple. C'est un des points de bascule qui peut être intéressant. Et les graphes que j'ai
01:15:43montrés qui viennent du milieu de l'Antarctique, voilà, ils sont au milieu de l'Antarctique. Donc,
01:15:47on peut effectivement avoir eu un peu, en fait, voilà, on a l'océan Austral qui est autour de
01:15:54l'Antarctique qui peut avoir, en quelque sorte, atténué le signal. Donc, en fait, chaque région
01:16:05va répondre de façon différente. Certaines régions peuvent répondre de façon très rapide et d'autres
01:16:12régions, peut-être plus sous une influence océanique, par exemple, avec des réservoirs de
01:16:17chaleur dans l'océan, choses comme ça, vont réagir de façon plus lente. Et c'est tout l'intérêt,
01:16:22en fait, d'aller maintenant avec des modèles de climat, des modèles de climat qui incluent
01:16:29les spécificités régionales pour voir si on est capable de reproduire, justement,
01:16:32cette dynamique différente en fonction des différentes régions pour aussi pouvoir prévoir
01:16:38ce qui va se passer dans le futur. Mais, effectivement. Et donc là, on arrive à la
01:16:46fin des questions. Une dernière question de Cheryl. Est-ce que les analyses peuvent servir
01:16:51dans d'autres domaines, dans des domaines autres que le climat ? Inès ? Non, toujours pas. Oui,
01:17:04bien sûr, les analyses. Il y a beaucoup d'instruments que nous avons et notamment des
01:17:10instruments qui vont être utilisés dans le cadre du projet d'E-PICE, qui ne sont pas à la base,
01:17:14forcément, des instruments qui sont dédiés à des analyses pour la reconstruction du climat passé.
01:17:22Il y a beaucoup d'instruments qui vont être là pour mesurer, par exemple, des éléments
01:17:26traces qui peuvent être utilisés pour des analyses de pollution, par exemple,
01:17:30des analyses environnementales. Je pense qu'Inès pourrait parler aussi de différentes analyses
01:17:36qui sont faites sur les carottes de glace qui peuvent être utilisées vraiment en glaciologie,
01:17:40en suivi peut-être des avalanches, des choses comme ça. Peut-être au niveau des Alpes, il y a
01:17:45peut-être des choses qu'on retrouve comme ça dans le suivi des risques. Effectivement, toutes
01:17:53les machines qu'on va utiliser, tous les instruments qu'on va utiliser ne sont pas du
01:17:57tout spécialement des instruments sur lesquels on ne peut faire que des analyses de carottes de
01:18:02glace. C'est beaucoup plus large, donc beaucoup d'applications au niveau de l'environnement,
01:18:11mais ça peut aussi aller au-dessus et au-delà, pardon, et les différentes techniques qu'on
01:18:15peut développer ne se limitent pas à des applications environnementales non plus.
01:18:25En fait, il y avait quand même une autre question que j'avais oubliée. Combien de temps le projet
01:18:30Beyond EPICA va-t-il durer ? Y a-t-il une limite de temps et des rapports ou des comptes à rendre
01:18:36à un moment donné ? Il y a plein de comptes à rendre, mais Marie, peut-être que tu... Non,
01:18:42tu ne veux pas nous le dire ? Beyond EPICA, comme dit Pays, ce sont des projets qui sont
01:18:50financés par l'Union européenne, donc à partir de là, il y a forcément des attentes sur
01:18:56l'utilisation de ces fonds publics. Donc on s'engage en fait sur un certain nombre de ce
01:19:02qu'on appelle des livrades, donc c'est-à-dire des rapports scientifiques et techniques pour
01:19:06montrer les connaissances qu'on a pu développer grâce au financement et au soutien sur ces
01:19:12projets-là. Donc tout ça, c'est scruté de très près. On est en lien étroit avec les services de
01:19:18la Commission européenne qui nous suivent et qui nous financent. Sur la durée du projet,
01:19:24je ne voudrais pas dire de bêtises, peut-être que Romilly ou Inès pourront me corriger,
01:19:27mais il me semble qu'il reste au moins deux saisons de forage. En tout cas,
01:19:30lors de la dernière saison, le forage a bien avancé. C'est toujours difficile de donner un
01:19:36chiffre exact parce qu'on n'est pas à l'abri des aléas. Par exemple, parfois il y a des petits
01:19:41problèmes sur les carottiers, des réparations à faire qui peuvent prendre plus ou moins de temps,
01:19:45mais je crois que c'est ça un petit peu l'ordre de grandeur. Romilly, est-ce que tu confirmes ?
01:19:49Oui, c'est bien. Idéalement l'année prochaine, mais sans doute l'année d'après. Donc encore
01:20:03sans doute deux saisons ou deux campagnes d'été sur le terrain avant d'avoir la carotte de glace
01:20:10entière et la glace la plus vieille qui est au bout du socle rocheux. On espère la saison prochaine,
01:20:15mais on verra. Merci pour les questions, là c'est terminé. Merci beaucoup pour vos réponses.
01:20:23Merci à tout le monde, merci au public de nous avoir écoutés.

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