• il y a 6 mois
Transcription
00:00 Comment toi tu as pu le faire tout seul, bien évidemment comme on a dit c'est la population locale qui l'a fait,
00:05 mais comment est-ce que tu as pu, toi, initier ce mouvement, cet impulse,
00:09 alors que comme tu disais, je ne veux pas rentrer dans un débat ni politique, ni conspirationniste,
00:15 quoi que ce soit, mais de dire comment d'autres qui ont plus de moyens que toi,
00:19 parce que tu m'as expliqué que tu avais fonctionné en fond propre, je ne sais pas si je pouvais le dire ou non,
00:22 mais voilà, comment est-ce que d'autres ne l'ont pas fait avec plus de moyens humains et financiers ?
00:28 Enfin, si tu veux y répondre, en tout cas moi ça m'avait beaucoup interpellé en fait.
00:32 Je peux répondre, et ça peut nous amener très vite dans un débat problématique.
00:43 Il est fâche.
00:44 Donc plutôt que de vous dire pourquoi les autres ne le font pas,
00:46 je préfère vous dire pourquoi est-ce que ça a fonctionné pour moi.
00:48 Ok.
00:49 Et que vous m'avez vu parler dans la vidéo, je ne prends pas les gens pour des idiots, première chose.
00:55 Première chose, quand je vais en Afrique, je ne viens pas pour aider les gens.
00:59 Donc je suis sorti de cette mentalité néocolonialiste,
01:02 on s'imagine dans laquelle les peuples africains sont des pauvres misérables un peu idiots,
01:06 et ont besoin de l'aide de l'Europe pour aller mieux.
01:09 Ce n'est pas vrai.
01:10 Ce n'est juste pas vrai.
01:11 Et donc moi je l'ai présenté comme ça, et vous l'avez vu dans la vidéo,
01:15 moi je leur dis "non, je ne suis pas là pour vous aider, je suis là pour vous demander de l'aide".
01:18 Aujourd'hui, sans votre aide, il n'y a aucun espoir pour l'espace humain.
01:24 Si les forêts du bassin du Congo continuent à disparaître,
01:26 il n'y a aucun espoir de survie pour toute l'espèce humaine.
01:29 Il faut vraiment réaliser qu'on en est à ce niveau-là.
01:31 Et quand vous voyez un million de terrains de foot qui, chaque année, sont brûlés
01:36 pour les raisons qu'on a exprimées, c'est maintenant que c'est jamais.
01:39 Et donc je leur parle comme ça, je leur parle avec toute l'honnêteté possible et imaginable,
01:44 sans les prendre pour des idiots, sans commencer à cacher certaines vérités.
01:48 Je dis juste la vérité, en tout cas j'essaie.
01:50 Ça c'est la première chose.
01:51 La deuxième chose, ce qui m'a permis de réussir, c'est de passer beaucoup de temps
01:54 dans les communautés elles-mêmes.
01:56 Beaucoup de projets dans la coopération, nous ne allons pas tous les mettre dans le même sac,
02:01 sont créés dans des bureaux climatisés par des Européens qui ne connaissaient rien à la réalité de l'Afrique.
02:06 Je suis un Européen, je ne connaissais rien à l'Afrique.
02:09 Même si j'ai eu l'occasion, et vous le savez, de fréquenter Boum les Africains pendant très longtemps,
02:13 au final je ne connaissais rien à l'Afrique.
02:15 Et donc pendant quatre ans, la première chose que j'ai faite, c'est que j'ai appris.
02:19 La cuisine en Afrique, parce que ce n'est pas juste la réalité du Congo,
02:22 c'est la majorité de toute l'Afrique, c'est faire un barbecue tous les jours.
02:26 Mais qu'est-ce que ça veut dire quand tu es une maman, que tu dois tous les jours allumer ta braise
02:29 avec un vieux morceau de plastique que tu allumes pour que la braine prenne feu ?
02:32 Ça veut dire que tu en prends plein la figure, des fumées toxiques,
02:35 ça veut dire que tous les soirs, tu as des enfants de la taille de ce petit bonhomme-là
02:40 qui doivent partir en forêt pour aller chercher les fagots, pour aller rechercher l'eau tous les jours
02:44 avec des bidons de 25 litres jaunes qu'ils mettent sur le front, etc.
02:48 Je ne vais pas vous faire toute la description, encore une fois on pourra en discuter après.
02:52 Mais le fait est que pourquoi est-ce que j'ai réussi ?
02:54 C'est parce que j'ai appris à connaître la réalité des gens et que je les partageais.
02:58 Je ne suis jamais arrivé en 4x4, je ne suis jamais arrivé avec un t-shirt, avec une ONG, avec ce genre de choses.
03:04 Je suis arrivé pour rencontrer des gens et simplement discuter.
03:07 Et le fait de pouvoir constater que c'est la réalité de tout le monde, l'autonomie alimentaire, personne ne l'a.
03:12 Donc, en enseignant aux gens de pouvoir se nourrir 3 fois par jour, ça motive tout le monde.
03:18 Tout le monde aime manger, surtout s'ils doivent moins travailler pour l'obtenir.
03:22 Ça c'est la promesse qu'on leur a faite, la permaculture vous permet d'obtenir plus en faisant moins.
03:26 Ça parle à tout le monde, tout le monde a envie d'apprendre à devenir paresseux.
03:29 Et je leur dis, moi je suis là pour vous apprendre à devenir des paresseux.
03:33 Ils me regardent tous avec des grands yeux parce que dans les préjugés,
03:36 à force de répéter les gens qui n'y sont pas écroires, les Africains s'imaginent être des paresseux.
03:41 Et moi je leur dis, s'il y avait un seul Européen qui essaye de vivre votre vie, il ne tient pas une semaine.
03:46 Vous travaillez comme des dingues.
03:48 Et donc, ça c'est la première chose.
03:50 Par rapport à l'énergie, le fait de pouvoir proposer, je ne sais pas où est mon ami Charles-Emmet ici,
03:54 mais le fait de pouvoir proposer des solutions énergétiques qui leur permettent d'économiser jusqu'à 5 heures par jour,
04:03 la corvée du bois c'est entre 3 et 5 heures par jour, il faut imaginer ce que ça représente pour une femme.
04:09 Parce que de nouveau c'est des femmes qui s'y font.
04:11 Le fait d'apprendre aux gens à créer des filtres à eau, à charbon actif,
04:16 que l'on peut créer avec rien, tout est disponible, avec un dollar.
04:20 Tout le monde a besoin d'eau.
04:22 Même ici, vous utilisez votre brita pour filtrer l'eau qui a déjà été filtrée 1000 fois,
04:26 alors qu'on est en Europe dans les pays les plus riches du monde.
04:29 Eux, ils boivent l'eau de la rivière.
04:31 Quand on peut leur apprendre à simplement purifier l'eau par des techniques naturelles qui ne leur coûtent rien,
04:35 ils sont tous très motivés.
04:37 Comme vous l'avez vu, on construit des maisons en superado, c'est la même chose.
04:40 Le fait qu'on puisse les enrichir par un projet de connaissance,
04:44 ça permet aux gens de créer une vision positive dans leur tête,
04:47 où ils se disent, et pour moi c'est le mot le plus essentiel, "c'est possible".
04:51 C'est possible de le faire.
04:53 Et les gens se mettent en action.
04:54 Et c'est comme ça qu'on a créé deux choses, trois, quatre.
04:59 On a créé d'abord le "Likelemba",
05:01 c'est cette cotisation communautaire où chacun met un dollar pour recevoir une sorte de tontine.
05:07 C'est totalement ça.
05:08 On a repris les structures qui existent déjà pour amener les gens à dire,
05:11 si on travaille ensemble, tout le monde reçoit les connaissances, tout le monde profite.
05:14 On dit quoi ?
05:15 Tout le monde a dit oui.
05:16 Le "Salongo", donc le "Salongo" c'était à l'époque, c'était le travail tous les samedis,
05:21 les gens se mettaient au travail pour nettoyer la ville, etc.
05:23 Nous on a appliqué ça pour faire le "Salongo de la régénération".
05:26 Mettez-vous au travail, investissez deux heures par semaine,
05:29 deux heures, votre communauté ira mieux, le pays ira mieux,
05:33 et vous allez pouvoir faire quelque chose dont vous allez pouvoir être fier.
05:37 Troisième chose qu'on a créée, et là je dois remercier Victor, je ne sais pas où il traîne,
05:40 on a créé le "Championnat de la régénération".
05:43 Et qu'est-ce qu'on a fait ?
05:44 Parce qu'à Bukavu, vous avez vu Mimi et Emmanuel, ils se sont bien trouvés ces deux-là,
05:50 eux ils ont changé tout le game.
05:53 Pourquoi ? Parce qu'en appliquant cette technique, ils ont planté un million d'euros.
05:56 Ce n'est pas moi qui ai fait ça, c'est eux.
05:59 Ils ont planté un million d'arbres avec, je ne sais pas où est Ingrid, de la cahuèle,
06:04 que je remercie chaleureusement, parce qu'après on les a récompensés en leur donnant de l'argent pour aller plus loin.
06:10 Mais au départ, c'est eux qui ont planté un million d'arbres en totale autonomie,
06:14 et qui ont créé ça.
06:15 Avec les stratégies qu'on leur a données, ils ont recruté des braconniers,
06:18 qui étaient des repris de justice en fait, qui aujourd'hui sont les meilleurs protecteurs.
06:22 Ils apprennent, ils encouragent, etc.
06:25 Donc qu'est-ce qu'on a fait ? On a repris ça,
06:28 et on a créé le championnat de la régénération, la Champion.
06:31 Qu'est-ce qu'il consiste en fait ?
06:32 C'est très simple en fait.
06:34 Bukavu pour l'instant, ils mènent le championnat, puisqu'ils sont à un million d'arbres.
06:38 Ça fait beaucoup.
06:39 Et donc qu'est-ce qu'on a été faire ? J'ai commencé ça à Goma.
06:43 Et qu'est-ce qu'à Goma ? Je leur ai dit, je leur ai dit,
06:45 "Les gars, vous savez qu'à Bukavu, ils vont planter un million d'arbres.
06:49 Vous êtes sérieux ? Vous allez laisser faire ?
06:51 Non, on ne veut pas, nous on va faire un million et un."
06:54 Je fais, "OK, parfait."
06:56 J'étais à Idjwi, qui est l'île, la plus grande île de la custre d'Afrique.
07:00 Et je leur ai dit, "Vous savez que là-bas et là-bas, ils vont faire quoi ?
07:03 Non, pas possible."
07:04 C'est pour ça que vous avez vu Papa Gilbert qui dit, "Objectif là, maintenant, tout de suite, un million d'arbres."
07:09 En fait, c'est de la compétition et c'est de la...
07:12 Il n'y a pas de perdant, en Chine. C'est impossible.
07:15 Mais l'idée en fait, c'est de transformer un problème dans une fête.
07:20 Comme je l'ai dit sur les réseaux sociaux,
07:22 le fait d'être ici aujourd'hui avec vous, de partager sur ces sujets,
07:25 de vous montrer l'engouement de ces gens et tout ce qu'ils font,
07:28 pour moi, c'est une fête absolue.
07:29 Qu'est-ce qui peut être plus amusant que de régénérer la planète ?
07:33 Ma fille, Lya, me disait, "Moi, ça me touche, parrain.
07:37 Parce que chaque arbre qu'on détruit, ça me touche personnellement,
07:41 parce que je suis lié à la nature."
07:43 Et pareil, elle m'a dit, "Chaque arbre que tu plantes, je le ressens aussi."
07:47 Et qu'à un moment donné, vous avez tous été des enfants et vous savez de quoi on parle.
07:51 Notre objectif, en fait, c'est que ces gens soient récompensés,
07:55 pas simplement avec de l'argent, mais avec de la fierté.
07:59 Pourquoi ? Parce que la fierté, c'est la base de tout.
08:01 Là où il y a de l'estime de soi, il y a de la fierté, il y a de la confiance.
08:04 Et de nouveau, les mots essentiels reviennent dans la tête des gens.
08:06 C'est possible, je peux le faire.
08:08 Et que fondamentalement, tout ce qu'on essaye de faire en Afrique
08:11 a été de créer ce sentiment de possibilité, de fierté.
08:15 Pourquoi ? Parce qu'on espérait pouvoir vous inspirer, vous.
08:19 Au Congo, dans les pays...
08:21 Enfin, vous avez vu, dans une région où les gens se font massacrer,
08:26 des millions de gens sont morts.
08:28 Encore aujourd'hui, ça continue.
08:30 Ces gens se mobilisent pour régénérer la planète.
08:33 Et ils le font pas juste pour eux, ils le font pour le monde.
08:36 C'est quoi notre excuse à nous ?
08:39 Si eux peuvent investir de l'argent, un euro par semaine, par mois, ou même par an,
08:46 et qu'avec ça, ils arrivent à planter des millions d'arbres.
08:49 Imaginez si demain...
08:51 On doit être environ à 200 ici.
08:53 Imaginez si demain, Edson, tu me mets un euro par mois.
08:58 C'est même pas une gaufre.
09:01 Mais si on arrive à faire monter le mouvement, tous ensemble, à une grande échelle,
09:05 c'est des milliards d'arbres qu'on va planter.
09:08 Et donc, pourquoi est-ce qu'on a fait ce film ?
09:10 (Applaudissements)
09:17 Pourquoi est-ce qu'on a fait ce film ?
09:19 Parce que c'était une promesse que j'avais faite aux champions du mouvement.
09:22 Je leur avais promis que votre effort va être vu.
09:26 Vous allez exister.
09:28 Votre effort va inspirer le monde.
09:30 Pour la première fois, c'est l'Afrique qui va inspirer l'Europe, et pas dans l'autre sens.
09:34 Et c'est pour ça que ça fonctionne.
09:36 Parce qu'on est parti des besoins de base, la nourriture, les habitations,
09:41 et les besoins plus essentiels encore pour moi, les besoins psychologiques.
09:45 Rendre de la fierté, de la dignité à des gens qui se battent tous les jours,
09:49 dans des conditions où on ne survivrait pas une semaine.
09:52 Pour ceux qui me connaissent et qui m'ont fréquenté ces dernières années,
09:55 vous le savez, à chaque fois que je reviens de là-bas, j'ai perdu 10 kilos,
09:57 et je les desserre, et j'ai encore moins de cheveux.
10:00 Et c'est vraiment ça. Eux, c'est leur quotidien.
10:03 Et mon but, c'est vraiment ça, c'est de mettre de la lumière sur eux,
10:06 et de créer un pont entre les champions d'Europe,
10:10 et pour moi, vous êtes tous des champions, vous vous êtes déplacés,
10:13 alors que c'était à court terme, il y en a qui ont annulé, etc.
10:15 De créer un pont direct entre ceux qui veulent un vrai changement,
10:19 et ceux qui font le job sur le terrain.
10:21 Ça, c'est vraiment l'objectif de tout ce qu'on a.