Bernard Reviriego, invité du 6/9 de France Bleu Périgord

  • il y a 4 mois

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00:00 Il mène une conférence ce soir à 18h à l'espace culturel François Mitterrand,
00:04 à 18h à Périgueux, sur les grandes opérations militaires allemandes contre les maquis de Dordogne en 1944.
00:10 Votre invité est écrivain, historien et spécialiste de la Seconde Guerre Mondiale, Thibault.
00:15 Bonjour Bernard Revillé-Régaud.
00:16 Bonjour.
00:17 Merci d'être avec nous.
00:18 Ce matin, on s'apprête à vivre une semaine assez exceptionnelle,
00:21 le 80e anniversaire du débarquement sur les plages de Normandie.
00:25 À l'époque, les informations sont diffusées beaucoup plus lentement,
00:29 l'état de la presse n'est pas le même.
00:30 Est-ce qu'on sait comment en Dordogne on a appris le débarquement ?
00:34 C'est une bonne question.
00:37 Personnellement, je dirais que mes recherches s'arrêtent quasiment à la libération.
00:42 Moi, je me suis intéressé beaucoup à la répression, aux victimes.
00:45 Donc c'est vrai que ce que je peux supposer, c'est que la presse étant sous contrôle,
00:50 c'est une bonne question de savoir comment officiellement on a rendu compte de cet événement
00:55 qui n'a pas pu ne pas être transmis.
00:57 Je ne sais pas, franchement, il faudrait ouvrir les journaux de l'époque.
01:01 Mais voilà, je ne l'ai pas fait.
01:03 Vous, vous êtes concentré, vos recherches se sont concentrées sur la fin de cette guerre ici en Dordogne
01:08 avec trois interventions, trois divisions qui ont traversé le département pour des rafles assez violentes.
01:16 C'est sur ces trois interventions que vous allez vous concentrer ce soir ?
01:23 Oui, c'est ça. Mon grand sujet depuis toujours, ça a été une histoire au plus près des gens,
01:30 et au plus près de la rue, du coin de la rue, c'est une histoire appliquée, je dirais.
01:34 Et dans ce dernier livre que j'ai publié en 2023,
01:40 je me suis intéressé au bilan des victimes hors déportation,
01:44 c'est-à-dire des victimes civiles abattues et des résistants à bras au combat.
01:48 Il s'avère qu'il y en a eu beaucoup, 1114, je suis précis,
01:52 parce que c'est une à une que je les repêche, si vous voulez,
01:55 et il y aura sans doute quelques autres,
01:57 mais le corollaire de ce bilan, c'est la répression.
02:01 Donc je me suis intéressé à savoir comment et dans quel contexte ces victimes étaient tombées.
02:06 Ça débouche ensuite sur des marqueurs forts de l'histoire du Périgord.
02:11 C'est pour cela que j'en suis venu à m'intéresser au passage de ces trois divisions,
02:15 puisque ces trois divisions qui se succèdent uniquement en 1944
02:19 sont responsables de plus de la moitié du bilan de ces victimes sur une période de temps très proche.
02:25 Bremer, c'est même pas 8 jours, 9 jours.
02:29 Ensuite la Das Reich, c'est une semaine pour la Dordogne, j'entends bien.
02:32 Et ensuite la 11e division qui est envoyée en soutien et en remplacement de la Das Reich,
02:37 à qui on a fixé d'autres objectifs, ne reste que 15 jours.
02:41 Donc c'est-à-dire qu'en trois semaines, on a la moitié des victimes, donc près de 580 victimes.
02:49 Votre travail de recherche continue encore aujourd'hui,
02:53 parce que ces victimes n'ont pas toutes été identifiées,
02:56 et encore actuellement, en ce moment, vous participez à mettre des noms
03:01 sur des victimes encore anonymes de cette période.
03:04 Oui, c'est quelque chose à quoi je suis très attaché,
03:08 c'est-à-dire l'histoire familiale, de par ma formation.
03:11 J'ai été d'abord documentaliste, puis je suis devenu archiviste.
03:14 Je suis resté longtemps archiviste, donc l'archiviste ou le documentaliste,
03:17 il a affaire à des utilisateurs, ou à des chercheurs, donc des individus qui cherchent.
03:22 C'est ce point de vue-là qui m'a intéressé.
03:25 Donc effectivement, à la fin de la guerre, il y avait 120 victimes inconnues
03:31 dans les renseignements généraux.
03:32 On sait qu'en décembre 1944, 120 corps n'étaient pas identifiés.
03:35 Au cours de mes recherches, j'en ai identifié une cinquantaine.
03:39 C'est-à-dire que les actes de décès, quand ils existent,
03:43 parce qu'il n'y avait pas d'actes de décès pour tous les décès,
03:46 il est difficile de faire un acte de décès pour un résistant mort au combat,
03:49 j'en ai relevé une cinquantaine.
03:52 Donc c'est à partir de ces actes de décès qu'on peut parfois identifier d'autres gens.
03:58 Donc j'en ai identifié plusieurs au cours de mes recherches,
04:02 dont un, effectivement, le plus récent, c'est celui de Cantillac,
04:05 c'est un inconnu, qui est mort du fait de la décision de Bremer, précisément le 27 mars.
04:10 Et le corps a été bien sûr trouvé, et il y a une descriptif précise,
04:16 à la fois physique, blond, etc., la taille, mais aussi les vêtements,
04:20 et il indiquait qu'il portait une chevalière avec les initiales "RS".
04:24 Donc ça, c'est merci à l'officier de l'état civil,
04:28 moi ça m'a permis ensuite, en comparaison, c'est l'intérêt aussi,
04:32 de travailler sur des corps plus importants, je suis tombé sur un résistant,
04:36 on ne savait pas où il était mort, il s'appelait Roger Staven,
04:39 donc inspecteur gadget, et effectivement j'ai retrouvé ensuite la famille,
04:43 il était originaire des Ardennes, et la famille ignorait depuis cette époque-là,
04:48 ce qui était devenu l'oncle, actuellement c'était l'oncle,
04:52 puisqu'il y a un descendant, donc dans les familles, il y a des chamboulements énormes,
04:55 il se pose la question de savoir ce que l'on peut faire, comme acte officiel,
04:59 donc ça c'est l'intérêt, c'est de l'histoire appliquée.
05:01 - Donc il est enterré en Dordogne en fait ?
05:03 - Ah oui, il est toujours enterré à Cantillac, il y a une tombe avec dessus, inconnue,
05:07 donc sa tombe est honorée chaque année par la municipalité,
05:11 mais il y a deux ans, le neveu est venu, il était derrière la tombe,
05:15 il avait ses trois frères qui avaient trois chevalières,
05:19 et c'était la même chevalière qui est dans la sépulture,
05:22 mais tout ça il faut le prouver, donc il faut le prouver éventuellement par des analyses ADN,
05:26 ça c'est la continuité de l'histoire qui me passionne.
05:29 - Et l'enjeu sera donc pour vous, officiellement, de le reconnaître,
05:32 que cette victime soit officiellement reconnue avec ce nom,
05:35 et que la famille pourra peut-être récupérer des effets ?
05:39 - Oh des effets non !
05:40 - L'alliance en question peut-être ?
05:42 - Ah l'alliance oui, bien sûr, ce sera l'élément déterminant,
05:45 voir l'alliance y est, donc ils ont d'autres alliances,
05:48 enfin ça c'est des histoires presque policières.
05:50 Dans tous les cas similaires, il y en a d'autres.
05:52 - A vous tout seul, c'est quand même 50 que vous avez ?
05:55 - Non, alors j'ai relevé 50, ça veut dire qu'il y a eu 50 signalements d'inconnus,
05:59 mais sur ces 50, non non, je ne les ai malheureusement pas identifiés,
06:02 certains ont été identifiés depuis, mais par exemple,
06:04 j'en ai identifié 5 à Sainte-Marie-de-Chignac,
06:06 il y a deux familles qui pensaient que leur grand-père était mort à Auschwitz,
06:12 et non, il a été fusillé en Dordogne.
06:14 - Merci beaucoup Bernard Riego d'avoir été avec nous ce matin,
06:18 vous tenez donc ce soir une conférence à 18h à l'espace culturel
06:21 François Mitterrand à Perigueux sur ses grandes opérations militaires allemandes
06:26 contre les maquis en Dordogne en 1944.
06:28 Merci d'avoir été avec nous.
06:29 - Je vous remercie.
06:30 L'interview a écouté dès à présent sur francebleu.fr

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