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00:007h46, vous avez la parole dès maintenant ce matin. On parle donc de la prise en charge des personnes
00:05autistes ou atteintes d'autres troubles du développement Théo.
00:08Prise en charge très compliquée parfois, c'est en tout cas le sentiment de notre invité ce matin. Bonjour Hicham Khebdou.
00:14Bonjour.
00:14Merci d'être avec nous ce matin en studio. Vous avez un fils de 19 ans, Iones, qui souffre d'autisme sévère.
00:21Vous avez fondé une association, la saisie pas, et vous dénoncez un manque de prise en charge en la matière
00:26à tel point que vous avez racheté une ancienne école à Saint-Martin-d'Erre que vous voulez
00:31réhabiliter pour en faire un centre d'accueil spécialisé.
00:34Qu'est-ce qui vous a poussé à faire cela ?
00:37Comme vous avez dit, c'est parce que j'ai un enfant autiste et quand il a été diagnostiqué, il y a maintenant 17 ans,
00:45on est livré à nous-mêmes, c'est-à-dire qu'on ne sait pas quoi faire. Et là je mets au défi tout le monde.
00:50Imaginez-vous un instant que vous avez un enfant autiste. Qu'est-ce que vous faites ? Vers qui vous vous dirigez ?
00:55Vous voyez, c'est toutes ces démarches-là qui sont compliquées.
00:58Et sachez que quand vous arrivez à trouver toutes les démarches, il faut déjà un minimum un an et demi pour avoir un diagnostic.
01:05Et lorsque vous avez une notification qui vous permet d'aller dans des instituts médico-éducatifs, ce qu'on appelle les IME,
01:12il y a à peu près cinq ans d'attente.
01:15C'est très compliqué pour nous, donc c'est pour cette raison-là que je me suis dit qu'il serait temps d'ouvrir une association,
01:22d'échanger avec les familles.
01:24Parce que des familles qui sont nombreuses, j'ai lu sur votre site, vous estimez en tout cas que sur Grenoble il y a presque
01:29600 familles qui attendent une prise en charge, c'est énorme ? C'est ça, au fait, si vous préférez, il y a 700 000
01:35personnes qui ont été diagnostiquées, sur les 700 000 en France,
01:39il y a 100 000 enfants et sur 100 000 enfants il y a 52 000
01:44enfants qui sont en attente d'une structure, et dont en Isère, c'est à peu près 580 familles qui attendent.
01:51On parle ce matin de la prise en charge des personnes autistes, les enfants notamment, mais pas qu'eux,
01:56Younes, on l'a dit, à 19 ans aujourd'hui, et on a des appels aux standards de France Bleu d'Isère, Mathieu.
02:01Oui, Marie est avec nous justement pour parler peut-être aussi des structures. Bonjour Marie.
02:06Oui bonjour.
02:07Alors Marie, vous êtes directrice de centre de loisirs et d'accueil périscolaire,
02:11et vous voulez réagir justement sur la situation des enfants autistes.
02:15Oui, je voulais juste indiquer que je suis à la retraite actuellement, mais que j'étais directrice d'accueil périscolaire
02:20et de centre de loisirs, et je me suis aperçue que l'accueil des enfants en situation de handicap, aussi bien
02:28autistes que qu'autres troubles, était très compliqué par manque de moyens humains et financiers.
02:35C'est-à-dire, moi, par exemple, Marie, quand j'étais élève, j'avais un autre élève dans ma classe qui était autiste,
02:41qui avait une aide de vie scolaire qui s'occupait de lui.
02:43Est-ce qu'aujourd'hui c'est toujours le cas ? Est-ce qu'il y en a assez, sans doute pas ?
02:47Non, il en manque énormément, parce que les AVS, je crois que c'est l'éducation nationale
02:54qui les forme, il me semble, et elles n'ont pas d'heures suffisantes pour pouvoir s'occuper de tous les enfants
03:00en situation de handicap. Et en plus, elles sont souvent obligées de changer d'établissement
03:07dans la semaine, plutôt
03:09deux ou trois établissements dans la même semaine, et elles ne peuvent consacrer que quelques heures à chaque enfant, et c'est largement insuffisant.
03:16Ça veut dire que vous, Marie, en tant que directrice de centre de loisirs ou d'accueil périscolaire, vous avez eu à
03:23refuser parfois des places pour des enfants autistes ?
03:27Je n'ai pas refusé de place, mais j'ai fait des réunions d'information avec mon personnel
03:33et avec les parents des enfants, parce qu'il y a une grande crainte, en fait, en face de ces enfants en situation d'handicap,
03:41il n'y a pas beaucoup de bienveillance,
03:44et le personnel manque de formation.
03:46Et dernière question, Marie Rapide, je ne sais pas quand vous avez arrêté d'exercer, mais est-ce que vous avez trouvé que durant votre carrière, ça s'est
03:54amélioré ou dégradé ?
03:57Non, ça ne s'est pas amélioré pas assez vite, on va dire ça comme ça, voilà.
04:02Merci beaucoup, Marie.
04:04J'étais simplement en activité il y a deux ans, donc ça fait seulement deux ans que je suis à la retraite.
04:09Très bien, merci beaucoup Marie.
04:11Vous pouvez faire comme Marie et nous appeler au 0476 46 45 45
04:16pour, pourquoi pas, vous aussi témoigner de votre expérience, que vous soyez parent, que vous soyez personne qui a autour d'elle
04:23une personne atteinte d'autisme ou que vous ayez envie aussi d'exprimer votre
04:27soutien, soit-y que des messages sur la page Facebook.
04:30Je vais vous citer celui de Joss notamment, qui nous écrit, il faudrait plus de structures pour les enfants autistes
04:36qui ont besoin d'être entourés et de pouvoir évoluer selon leurs possibilités, selon Joss.
04:41Et notre invité Hicham Khebdou est avec nous en studio ce matin
04:45avec un fils, on le disait, de 19 ans, Younes, qui souffre d'autisme sévère.
04:49Marie, tout à l'heure, nous parlait de l'accueil en centre de loisirs ou même à l'école.
04:54Younes, il a 19 ans, comment ça s'est passé, sa scolarité ?
04:57Alors, Younes,
04:59quand il a été diagnostiqué, effectivement, on parlait à l'époque de autistes sévères,
05:04automutilation, non-verbal, déficience intellectuelle.
05:06Donc, quand un enfant a une déficience intellectuelle, on ne va pas lui imposer l'école parce que ça va être compliqué.
05:13Là, il faut qu'aussi les familles puissent comprendre. Par contre, rien ne nous empêche de lui apprendre les bases
05:20qui, plus tard, quand il pourra travailler, il sera capable, dans une entreprise,
05:25de pouvoir identifier. Ça, c'est ce qu'on recherche le plus.
05:29On va dire qu'on a été quelque part chanceux. Voilà, je dis vraiment chanceux parce que quand on a su qu'il a été
05:35diagnostiqué, je me suis battu pour essayer de lui trouver un centre.
05:38Et ça nous a pas mal facilité le fait de bien bouger. Mais ça, des familles comme nous, il n'y en a pas énormément
05:45qui ont eu cette chance d'avoir à chaque fois une structure. Cependant, Younes,
05:49il se retrouve là dans une situation où il a 19 ans et ce n'est plus adapté pour lui.
05:55Donc voilà, il faut essayer de lui trouver une structure. Ça veut dire que lui, comme il ne peut pas partir,
06:00un enfant ne peut pas rentrer, c'est-à-dire un nouvel entrant.
06:06Donc, vous voyez, c'est un peu compliqué. Et quand j'ai entendu parler des AESH, parce qu'on parle aussi d'inclusion scolaire,
06:14le souci...
06:15Des personnels qui aident à l'intégration des personnes en situation de handicap dans les écoles.
06:19Oui, c'est anciennement AVS, aujourd'hui on les appelle les AESH.
06:23Alors, les AESH, c'est quelque chose d'assez aussi précaire. C'est-à-dire que si elles ne travaillent que 10 heures,
06:27elles ne seront pas payées les 35 heures.
06:29Vous savez qu'il y a beaucoup de mal à les recruter.
06:31Voilà, exactement.
06:32Les former, c'est pratiquement une mission impossible.
06:35Pourtant, nous, on a dans cette démarche, auprès des écoles, pour leur dire qu'on est prêt à les former.
06:40Et elles sont passées de AESH individuels à mutualiser.
06:43C'est-à-dire qu'elles peuvent avoir des fois...
06:45Travailler dans différentes écoles.
06:46Non, c'est-à-dire qu'elles peuvent avoir deux enfants
06:49avec un handicap et elles doivent gérer les deux.
06:53C'est plus possible.
06:54Ça devient plus de la garderie.
06:56Et c'est pour ça, on va dire, les premières victimes, c'est quand même les enseignants.
06:59C'est l'équipe pédagogique qui sont démunis.
07:01Et moi, à chaque fois, j'essaie, quand j'interviens dans les écoles,
07:04j'essaie de trouver une solution dans les deux côtés.
07:07C'est-à-dire aussi bien l'équipe pédagogique pour dire comment travailler avec un enfant autiste,
07:11et puis les familles de dire, attends, il faut qu'on arrive à temporiser,
07:14il faut qu'on arrive à comprendre aussi la situation
07:16et il ne faut pas que ça soit l'enfant qui soit au milieu et qui subisse.
07:21Et puis, si on regarde le verre à moitié plein, tout de même, Michem Kebdou,
07:24il y a des choses qui vont bien aussi en Isère.
07:27Alors, la prise en charge de l'autisme, vous l'expliquez bien,
07:30est défaillante par moments.
07:32En revanche, il y a peut-être un domaine où en Isère, on est particulièrement bon,
07:35c'est la détection de l'autisme.
07:37Écoutez Isabelle Palacios, elle est médecin-pédopsychiatre
07:40au centre hospitalier Alpizère, à Saint-Égrève.
07:44Auparavant, une famille qui s'inquiétait pour son enfant,
07:46il y avait une injustice sociale.
07:48C'est-à-dire que les parents qui avaient le plus de moyens,
07:51ils pouvaient payer un bilan chez une psychologue, ça coûte 300 euros,
07:54un bilan chez une psychomotricienne, ça coûte environ 100 euros.
07:57La plateforme de coordination et d'orientation a permis
08:00de mettre en avant un parcours de soins gratuits pour les parents.
08:03Ça a eu un tel succès que maintenant, ça va être élargi jusqu'à 12 ans
08:06pour tous ses enfants.
08:08Isabelle Palacios qui nous explique, les choses se sont plutôt améliorées
08:11et effectivement, à Saint-Égrève, il y a un grand pôle de détection de l'autisme
08:14qui a été salué par exemple par Emmanuel Macron il y a 3 ans.
08:17Donc, il y a tout de même dans ce domaine-là des progrès, peut-être vous diriez ça ?
08:20Je ne dis pas qu'on régresse, il y a des progrès mais ça ne va pas vite.
08:24C'est trop lent, on voit la souffrance auprès des familles
08:28parce qu'on a tendance à oublier qu'il y a aussi bien l'enfant
08:32à qui on essaie de trouver justement un centre pour qu'il soit pris en charge
08:37mais on a tendance à oublier les parents.
08:39Les parents, ils sont là, ils ont besoin un peu de répit.
08:42Voilà, ils n'ont pas de répit et puis les enfants,
08:47enfin les fratries, papa, maman, ok j'ai un frère ou une sœur autiste,
08:50elle est où ma place ?
08:51C'est vraiment toute la famille qu'il faut prendre en compte.
08:54On a tendance à croire qu'une fois qu'on est arrivé plus ou moins
08:57à trouver une structure pour l'enfant, tout va bien.
08:59C'est réglé, ce n'est pas le cas.
09:00Ce n'est pas le cas du tout, il y a à peu près 80% de divorces.
09:03Et on a pas mal de témoignages en ce sens au standard de France Bleu.
09:07Exactement, justement, on va discuter avec un accompagnant,
09:11Geneviève qui est avec nous, qui nous appelle de Volna-Véleo.
09:14Bonjour Geneviève.
09:15Oui, bonjour.
09:16Vous, vous êtes maman d'un adulte handicapé.
09:18Alors, moi je suis maman d'un adulte handicapé,
09:20il n'est pas autiste, il est asthme moteur cérébral et sourds profonds,
09:24avec troubles du comportement.
09:26Il a 34 ans, nous on s'est battus, pareil pendant des années,
09:29parce que le seul centre pour accueillir le handicap de notre fils
09:32était dans la région parisienne.
09:34Donc notre fils est parti pendant 20 ans dans la région parisienne,
09:38ensuite ils ont été refusés par les départements des Hauts-de-Seine
09:41qui ne voulaient plus prendre les enfants qui étaient hors département.
09:44Donc on a monté une association
09:46pour pouvoir trouver un foyer de vie sur l'ISER.
09:50Donc là, on s'est battus, on y est arrivés,
09:53on a un foyer de vie super sur ISO.
09:55Tout le personnel s'est formé à la langue des signes,
09:58donc ça c'est génial.
09:59Donc ça, de ce côté-là, on a eu de la chance,
10:01mais bon, ça a été le parcours du combattant.
10:03Mais il a fallu que tout le monde s'adapte en fait,
10:05il n'y avait pas de structure prête déjà à l'accueillir.
10:07Ah non, non, ça n'existe pas.
10:09Par rapport au multi-handicap, par rapport à l'absurdité
10:12et le handicap associé.
10:14Et à côté de ça, moi je suis à ESH,
10:18enfin j'ai arrêté l'année dernière.
10:20Et pour dire que l'accueil des enfants handicapés
10:24ou autistes en école, c'est beau, c'est bien,
10:29mais les enseignants ne sont pas du tout formés
10:31à accueillir des enfants avec certains handicaps.
10:35Et l'inclusion à tout prix, moi je ne suis pas pour.
10:38Alors le problème, c'est que les IME,
10:40comme on en parlait tout à l'heure...
10:42Les instituts médico-éducatifs.
10:44Voilà, les instituts médico-éducatifs, fermes.
10:46Et comme il y en a de moins en moins de places,
10:48tous les enfants, on les met en milieu scolaire ordinaire.
10:51C'est par défaut du coup.
10:53Et il y a des mobilisations en ISER régulièrement
10:55effectivement liées à ces IME.
10:58Et du coup, nous, en tant qu'AESH ou même enseignants,
11:02on est des fois démunis par rapport à l'accueil de ces enfants
11:05pour les prendre en charge correctement.
11:07Parce que ça demande une prise en charge vraiment adaptée
11:10et on n'est pas formés pour.
11:12Même si on a eu quelques heures de formation en tant qu'AESH,
11:15les enseignants n'ont pas de formation.
11:17À moins d'être en classe ULIS,
11:19c'est-à-dire des classes d'inclusion spécialisée.
11:21C'est compliqué.
11:23Les syndicats d'enseignants le dénoncent aussi.
11:25Merci beaucoup Geneviève d'avoir témoigné ce matin.
11:28Bon courage à tout le monde,
11:30parce que c'est vraiment le parcours du combattant pour nos enfants.
11:33Hicham Kebdou, notre invité ce matin,
11:36président de l'association Saisypa.
11:39Rapidement, en novembre dernier,
11:41le gouvernement a lancé un plan pour débloquer quasiment 700 millions d'euros
11:44entre 2023 et 2027
11:46pour améliorer la prise en charge des troubles du développement,
11:50notamment l'autisme.
11:52Est-ce que ça vous rassure ou est-ce que vous n'y croyez plus ?
11:57On va garder l'espoir.
11:59Votre hésitation peut-être en dit beaucoup.
12:01On va garder l'espoir.
12:04Après cette enveloppe de 700 millions,
12:06on a l'impression que c'est quelque chose d'énorme.
12:08Mais quand c'est 700 millions, c'est sur 5 ans.
12:10Après, c'est quand on divise sur 5.
12:12Vers qui cette enveloppe va être dirigée ?
12:14Qui va gérer ?
12:16Est-ce que ça va suffire pour tout le monde ?
12:18Ça, ça m'étonnerait.
12:19À surveiller donc.
12:20Exactement.
12:21Oui, c'est sûr.
12:23Sachez qu'on a 40 ans de retard en France.
12:2940 ans ?
12:3140 ans sur la prise en charge.
12:33Et la France a été condamnée à 4 reprises par l'Europe,
12:38par l'Union Européenne, sur la maltraitance.
12:40Il ne faut pas oublier.
12:42Ça veut dire qu'on a encore du travail à faire.
12:44Et vous l'appelez ce matin de vos voeux.
12:46Effectivement.
12:47Je rappelle aussi que vous avez ce projet
12:49d'ancienne école à Saint-Martin d'Aire
12:51que vous souhaitez rénover.
12:52Vous avez lancé une cagnotte.
12:54On mettra le lien sur francebleu.fr.
12:56Merci beaucoup d'avoir été notre invité ce matin.
12:58Merci.
12:59Belle journée.