Enquête : la grande arnaque du fait maison

  • il y a 4 mois
Enquête : la grande arnaque du fait maison

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00:00 -Cuisiner de poulets entiers. Cuisiner tartare, de la crème brûlée.
00:10 Près d'un restaurateur sur sept serviraient aujourd'hui ces produits sous-vides ou lyophilisés tout droit sortis des chaînes de l'industrie alimentaire.
00:22 Une pratique contre laquelle se bat le restaurateur parisien Xavier Denamur. Il a accepté de nous donner quelques astuces pour distinguer le vrai fait maison du faux.
00:33 Et une fois encore ça commence par la lecture du menu.
00:37 -Bon on a quand même tous les classiques moelleux au chocolat, tarte fine tiramisu, la crème brûlée etc.
00:44 Pour Xavier une carte trop bien remplie c'est suspect.
00:47 -Finalement on sait pas trop il y a beaucoup de choses quand même donc est-ce que la taille de la cuisine est ce qu'on peut tout faire sur place on peut pas savoir c'est aller tester.
00:56 Notre enquête se poursuit en caméra discrète et nous passons commande.
01:01 -Bonjour. -Bonjour.
01:04 -Euh... -Je vais prendre ça.
01:06 -Je vais prendre ça, filet de bœuf du corset, pommes campagnarde.
01:08 -Allez c'est bon. -Le suprême de poulets.
01:11 -Le suprême de poulets. -Bonjour.
01:13 -Très bien. -Et voilà et puis soubirne.
01:15 -Soubirne. -T'as fait quoi monsieur ?
01:17 -C'est bien.
01:19 Alors que nous sommes en plein coup de feu de midi nos plats vont arriver à peine dix minutes plus tard.
01:24 Pour Xavier ce n'est pas une bonne nouvelle plutôt le signe que tout est préparé d'avance.
01:29 Pour en avoir le coeur net nous demandons au serveur l'origine du poulet.
01:33 -Il fait maison le poulet ?
01:35 -A la tatouille oui.
01:37 -Et le poulet ?
01:39 -Le poulet ? -C'est pas rempli d'élèves mais...
01:41 Un poulet fait maison pourtant quand Xavier le goûte il n'a plus de doute c'est un plat sous vide.
01:48 -C'est du poulet industriel donc qui a été peut-être précuit.
01:52 Vendu presque 20 euros à la carte le prix de ce poulet sous vide ne dépasserait pas 4 euros selon notre restaurateur enquêteur.
02:01 Une belle marge pour cet établissement.
02:03 Pour le dessert nous choisissons deux classiques des menus brasserie et là encore Xavier s'en fait confirmer l'origine avant de goûter.
02:10 -Je vais prendre une crème brûlée.
02:14 -Moi je vais prendre le tiramisu maison.
02:17 -Merci.
02:19 Lorsque le tiramisu arrive c'est une bonne surprise.
02:22 -Alors voilà un bouton.
02:28 -Ca c'est maison.
02:32 En revanche la crème brûlée ne le convainc pas.
02:35 -Non.
02:36 -Je fais goûter une crème brûlée que je fais moi c'est pas ça. Là on est sur un espèce de goût de flanc industriel.
02:43 Intrigué par les questions que nous posons à ses serveurs le gérant tient à savoir ce que nous reprochons à ses plats.
02:50 Et il accepte de répondre à nos questions.
02:53 -La personne à qui j'ai déjeuné elle a pris le subrême de poulet pour poulet doré minute.
02:58 -Quel genre de poulet c'est ?
03:00 -Il est cru on le poche nous même.
03:02 -Après ça peut être la manière de comment on le réchauffe.
03:04 -La manière de réchauffer.
03:06 -Parce qu'il était un peu mou.
03:08 -La crème brûlée je veux bien savoir comment vous la faites parce que moi à mon avis à mon sens simple je dis la vérité.
03:14 Je suis pas là pour que vous...
03:16 Pour moi ce n'est pas une crème brûlée qui est faite à partir d'œufs frais, de lait frais et de vanille.
03:22 C'est une crème brûlée qui est...
03:25 -C'est du lait frais ici je suis sûr des œufs frais c'est des œufs en brique mais bon c'est des œufs.
03:31 -On peut aller voir le chef, on peut poser la question au chef avec le plaisir.
03:35 Sûr de lui le gérant nous invite en cuisine.
03:40 Xavier lui n'en démord pas le poulet et la crème brûlée ne sont pas maison.
03:44 -Bonjour chef.
03:45 Mais comment le chef va-t-il nous accueillir ?
03:47 -Restaurateur.
03:48 -J'avais un doute sur le poulet.
03:49 -Le poulet qu'est ce qu'il a de quoi ?
03:51 -Le suprême de poulet.
03:52 -Oui.
03:53 -Pour moi le suprême de poulet, enfin le poulet qu'on a mangé il était, il y avait un truc de, quelque chose comme une crèche qui saoule quelque chose comme ça.
04:02 Je me trompe ou pas ?
04:04 -Non.
04:05 -Je me trompe pas.
04:06 Le chef reconnaît ne pas cuisiner son poulet alors qu'il est en train de préparer lui même des rognons.
04:12 C'est le problème de ce restaurant obligé de mélanger le frais et le touffer pour assurer sa carte.
04:18 -Tout faire soi même il y a des choses qui sont, qui pour moi sont une perte de temps.
04:22 Gêné par tant de franchises de la part de son chef, le restaurateur tente lui de trouver des circonstances atténuantes.
04:28 -Tout seul le matin jusqu'à midi et tout seul.
04:30 -Ah ouais c'est chaud ?
04:31 -Tout seul tout seul.
04:32 -Ouais parce que ?
04:33 -Parce que je peux pas me permettre d'en payer un autre.
04:34 -Alors ça c'est un problème, pourquoi vous pouvez pas vous permettre d'en payer un autre ?
04:36 -Parce que je paye trop de charges en revanche.
04:37 -Ouais.
04:38 -Et parce qu'il y a trop de charges, c'est tout.
04:40 Trop de charges à payer, difficulté à trouver du personnel, chacun avance des explications à ce fait maison qui n'en est pas.
04:48 Mais la réalité c'est que les préparations industrielles représentent un gain d'argent et de temps pour ces professionnels de la restauration.
04:56 Et notre crème brûlée n'échappe pas à cette règle.
04:59 -Alors on voulait savoir si la crème brûlée c'était vous qui l'aviez faite ou est-ce que c'était une brique ?
05:06 -Il y a des jours j'en ai toujours un peu d'avance et il y a des jours où la crème brûlée vu que ça me prend du temps.
05:11 -Ça a quand même rien à voir avec une crème brûlée qu'on fait nous même.
05:14 -Le crème brûlée l'une à côté de l'autre, je vous fais un test sur 100 personnes et vous allez voir que vous allez avoir 90 personnes qui vont trouver la vraie crème brûlée de la crème brûlée industrielle.
05:24 -Vous ne perdrez pas le pari à votre test.
05:26 Piqué au vif, le chef vient de défier Xavier qui n'entend pas en rester là.
05:31 Trois jours plus tard, Xavier revient à la brasserie.
05:38 Ses crèmes brûlées maison dans les bras.
05:41 Prouvé qu'en servant une crème brûlée industrielle, il y a bien trop pris sur la qualité, Xavier va tester les deux auprès des clients de l'établissement.
05:49 -Et voyons si les clients s'en aperçoivent ou pas.
05:51 -Alors on va prendre ceux là aussi, vas-y tu peux les défaire.
05:55 A droite celle de Xavier, à gauche celle du chef préparé grâce à cette recette industrielle.
06:03 -Dedans il y a du lait entier, de la crème, du sucre, des jaunes d'oeufs, après il y a du sirop de glucose déshydraté, de l'amidon modifié, de tapioca, arôme naturel.
06:13 Un mélange très loin d'une recette de grand mère.
06:15 -Alors là on va brûler la crème brûlée.
06:18 Au premier coup d'oeil la ressemblance est parfaite mais les clients vont-ils s'y laisser prendre ?
06:23 -Bonjour, voilà donc c'est à vous, je vous donne, vous avez une cuillère chacune.
06:28 Sous l'oeil amusé du chef, Xavier attend le résultat de son expérience.
06:33 -Vous préférez laquelle ? Celle là. Alors pourquoi vous préférez celle là ?
06:38 -Moi je trouve que c'est plus naturel.
06:40 -C'est plus naturel, d'accord.
06:43 -Celui-ci le bruit ça change un peu, donc je sais pas il y a un parfum...
06:47 Le parfum qui semble déranger la cliente, c'est l'arôme de la brique industrielle que le restaurateur pose sur la table.
06:54 -C'est fait avec ça.
06:57 -C'est pour ça.
06:59 -C'est pour ça quoi ?
07:00 -C'est meilleur.
07:01 -Ah oui, donc vous voyez bien la différence, donc chef, en tout cas ce premier coup il y a pas photo.
07:06 Un premier succès pour Xavier mais il n'entend pas en rester là.
07:11 -Et voilà messieurs, deux crèmes brûlées à tester, testez dans le sens que vous voulez.
07:17 -Je préfère celle-ci.
07:25 -Parce que moi je trouve ça beaucoup plus léger celle-ci.
07:28 -Je préfère celle-là.
07:29 -Vous préférez celle-là, alors pourquoi vous préférez celle-ci ?
07:32 Celui qui préfère celle-là, il a mangé une crème brûlée avec de la crème en fleurette, des oeufs bio, du sucre et de la vanille.
07:40 -Et vous, vous ce que vous préférez c'est une crème brûlée toute faite industrielle mais on a le choix d'aimer...
07:47 Cette fois la démonstration de Xavier n'est pas probante, la recette industrielle a un adepte.
07:52 Mais le test prouve au moins une chose, l'appellation fait maison fait vendre.
07:57 -D'accord.
07:58 -Si vous aviez eu l'information sur crème brûlée industrielle, est-ce que vous l'auriez pris ou crème brûlée maison vous auriez choisi quoi ?
08:05 -J'aurais choisi celle-ci.
08:06 -Sans même avoir goûté, même que vous préférez pourtant l'industriel en fait.
08:11 Paris finalement gagné pour Xavier, sur 4 clients, un seul a préféré le dessert industriel.
08:17 Ce qui n'empêche pas le chef de ce restaurant de continuer à servir de temps en temps ses crèmes brûlées en briques.
08:24 Il faut dire que pour tous les cuisiniers et les restaurateurs, la tentation est grande de céder à la facilité.
08:33 Surtout quand ils reçoivent tous ces catalogues de produits alimentaires industriels.
08:38 -Ah bah tiens, c'est drôle ça. Oui apparemment ils vendent des omelettes.
08:42 Pour fendeur de ce genre de gastronomie, Xavier est toujours surpris de découvrir certaines des 3000 références proposées.
08:50 -Poulet, les pintades, les poissons, marmite de poisson bouillabaisse, vous avez tout, tout est prêt.
08:57 Meringue généreusement allochée à la main, tatin de légumes et sa qualité du fait maison, carottes maraîchères comme à la maison.
09:05 Ce qui énerve Xavier, ce sont toutes ces appellations avec lesquelles joue ses catalogues pour séduire les cuisiniers.
09:12 -Eux ils le vendent comme ça, le restaurateur il le sait. La tromperie elle est quand le restaurateur le présente comme si c'est lui qui l'avait fait.
09:20 -Quand ils font les photos vous avez les vrais fruits tout ça à côté. C'est beau, c'est authentique et tout.
09:24 -Moi ce que je veux voir c'est derrière tous les produits. Qu'est ce qu'ils ont vraiment mis dedans.
09:28 -Et quand vous l'avez le vrai sachet et vous le retournez, vous allez percevoir qu'il y a plein d'additifs, plein de colorants et tout.
09:32 -Et puis c'est pas bon, souvent ça a pas de goût.
09:34 Alors comment et par qui ces recettes sont-elles réalisées ? Dans la restauration le sujet reste tabou.
09:41 Côté industrie alimentaire, aucun des fabricants que nous avons contactés n'a accepté de nous recevoir.
09:49 Comme dit hier par téléphone, je me suis entretenu avec ma direction et nous ne donnerons malheureusement pas une suite favorable à votre demande.
09:57 Notre enquête nous conduit finalement en Corrèze. Cette entreprise est la seule à avoir accepté de nous livrer ses secrets de fabrication.
10:05 Ici les desserts sont surgelés et approvisionnent les restaurants à commencer par cette charlotte aux poires présentée sur catalogue.
10:15 Le patron des lieux s'appelle Gilles. Cette usine, il la dirige depuis 20 ans. Malgré une opération du larynx qui l'empêche d'articuler, il est très fier de nous parler de ses desserts particulièrement alléchants.
10:28 Un vrai savoir-faire.
10:30 -Traditionnellement comme partout nous trouvons des profiteroles. Nous avons également des entremets individuels, des alimettes, fraises de bois, croustillants au chocolat ou au chocolat grand marnier.
10:40 -Petit carré ambassadeur aux poires ou aux pêches.
10:45 Fondant Profiterole Paris-Brest, ce pâtissier de métier s'est spécialisé dans les classiques de notre gastronomie. Et ce n'est pas par hasard.
10:54 -C'est la grande mode de retour aux sources aussi. C'est le produit aussi coup de coeur qui rappellera notre enfance.
11:02 Pour surfer sur cette tendance, selon lui certains de ses concurrents n'hésiteraient pas à jouer sur les détails qui font la différence.
11:10 -Je sais que certains fabricants de tartes ont mis justement le doigt là-dessus au fond exprès de faire des tartes un peu irrégulières et qui ne se ressemblent pas justement pour rappeler l'esprit fait maison.
11:22 Un fait maison qui se fabrique ici en blouse et en masque stérile. Pour nous montrer comment sont réalisés ses desserts, Gilles doit se soumettre à des conditions d'hygiène draconiennes.
11:32 -Le premier nettoyage les mêmes avec du savon de bactéries ici qui pue à peu près à 98% toutes les bactéries.
11:39 Mais la véritable obsession de Gilles ce sont ses coûts de production. Pour les faire baisser, ce patron a trouvé des astuces. Il nous amène dans un entrepôt à coller à son laboratoire, sa caverne d'Ali Baba.
11:54 Derrière ce rideau en plastique est stocké un trésor. Toutes ses matières premières. Sur ses palettes et dans ses sacs, des tonnes de sucre, de farine et de chocolat.
12:07 -Le fait de prendre des matières premières en grande quantité nous permet d'avoir un coût bien inférieur à celui d'un artisan. Quand nous prenons du sucre nous en prenons 80 à 100 tonnes par an.
12:20 Étonnamment pour un fabricant de pâtisserie, ici aucun produit frais que des conserves ou des aliments lyophilisés. L'autre secret de Gilles pour réduire les coûts. Mais celui là il préférait ne pas les bruter.
12:34 -Ca va quelques ingrédients en poudre de lait ? -C'est quoi ? -Ils vont me dire poudre de lait c'est dégueulasse ils vont m'utiliser du lait. -C'est quoi la poudre de lait ? -Bah c'est du lait déshydraté.
12:46 -Mais pourquoi vous utilisez ça ? -Parce que c'est moins cher et plus pratique.
12:50 A côté de ces matières premières, notre regard est attiré par une série d'étiquettes. Acide citrique, arôme, émulsifiant, tout ça fait plus penser à un laboratoire chimique qu'à une pâtisserie. Et Gilles va livrer un de ses secrets de fabrication.
13:07 -C'est quoi ? -C'est l'émulsifiant. -C'est faux pas dire. Tu fais une chantilly traditionnelle à la maison, de ça tu développes ça, tu m'appelles émulsifiant, tu développes comme ça, ça met de l'air.
13:20 De l'air au prix de la chantilly.
13:25 Retour dans le laboratoire de Gilles. Quotidiennement 15 000 desserts sortent de ces chaînes de fabrication. Et chaque jour c'est un gâteau différent. Cette fois ci la charlotte aux poires.
13:38 Et tout commence ici dans cette grande cuve où sont jetés tous les ingrédients de la recette de cette charlotte industrielle.
13:50 -De l'émulsifiant, de l'arôme poire et de la purée de poire et de la faraille au lait. La faraille c'est un mélange de lait, de sucre et de gélatine.
14:00 Ensuite 20 personnes se relayeront pour assembler le biscuit avec la préparation. Jusqu'à la touche finale, les poires en conserve, le nappage pour l'aspect gourmand et les amandes pour le fait maison.
14:13 Le tout fabriqué en 20 minutes. Ces desserts seront ensuite congelés avant d'être expédiés. Et c'est comme cela que ces charlottes aux poires se retrouveront peut-être un jour sur la carte de votre restaurant préféré.
14:28 ...

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