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Éducation
Transcription
00:00:00 [Musique]
00:00:10 Qu'est-ce que ça t'évoque si je te parle de l'Andra ?
00:00:13 Ben si tu me parles de l'Andra, ça m'évoque les déchets nucléaires chez moi.
00:00:20 Donc voilà, ça m'évoque ça.
00:00:23 [Musique]
00:00:35 Et du coup t'as confiance quand même dans le dispositif ?
00:00:38 Ouais, attends, il faut pas n'importe quoi je pense pas.
00:00:43 Ben dis-moi l'espace !
00:00:45 [Musique]
00:01:14 [Musique]
00:01:42 On sait pas à quelle heure on mange ?
00:01:45 Si, on sait à quelle heure qu'on mange.
00:01:48 Bon, tu vois ce que j'ai reçu ?
00:01:51 Oui alors...
00:01:53 T'es invité, l'Andra t'invite.
00:01:55 Oui, il m'invite. C'est visite gratuite, tu vois, accès libre, commenté.
00:02:00 Ouais, est-ce que ça t'intéresse ?
00:02:02 Tu veux bien y voir ?
00:02:03 Ouais.
00:02:04 Du coup tu lis les fascicules qu'ils t'envoient ?
00:02:06 Ouais, ouais, tout le temps.
00:02:07 T'arrives à t'y repérer avec les trucs Andra, CGO, GUL ?
00:02:10 Non, non, non, là je pige rien.
00:02:13 Entre l'Andra et CGO, là je sais pas parce que, ouais...
00:02:18 En fin de compte, CGO, si j'ai bien compris, c'est le laboratoire, c'est ça.
00:02:24 Et du coup t'as confiance quand même dans le dispositif ?
00:02:27 Ouais, attends, il faut pas n'importe quoi je pense pas.
00:02:31 Je pense pas qu'à ce niveau-là, il s'amuse à faire n'importe quoi.
00:02:34 C'est pour les films ça.
00:02:36 Tu sais quand ils volent les bidons et tout, un peu à droite à gauche, c'est pour les films.
00:02:39 Je pense que maintenant ils font plus le con avec ça.
00:02:42 Au moins j'espère.
00:02:44 Ouais, bah...
00:02:45 T'as vu ce qu'il se passe en Ukraine, je pense pas qu'ils font le con avec des centrales nucléaires.
00:02:50 C'est vrai que Bure, tout le monde connaît ça ici.
00:02:52 Tout le monde avait peur aussi au début.
00:02:54 C'est normal.
00:02:55 Et puis là maintenant ça... ça s'est normalisé ?
00:02:58 Ouais, ça s'est normalisé.
00:02:59 Maintenant plus personne n'en parle.
00:03:01 Ouais, on va peut-être pas faire les deux non plus.
00:03:04 Je sais pas ce qui est le mieux, si c'est le stockage ou si c'est le...
00:03:07 Après, moi j'ai envie de te dire, va au centre Meuse-Haute-Marne, comme ça tu verras ce qu'on te dit là-bas,
00:03:15 puis tu verras ce que je dis dans la vidéo, ça t'intéressera peut-être de voir le comparatif.
00:03:18 Tout à fait.
00:03:19 T'as même les coordonnées GPS, tu peux pas te courir.
00:03:22 Ouais, j'avais...
00:03:24 Si, regarde, t'as les coordonnées GPS, c'est pas mal quand même.
00:03:28 Parce que c'est quoi, c'est un ascenseur ?
00:03:30 Ouais, c'est un espèce de monte-charge ascenseur, puis tu descends...
00:03:34 Loin ?
00:03:35 500 mètres, je crois, 520 mètres.
00:03:37 Ah oui, quand même.
00:03:38 C'est quand même un trou, hein.
00:03:39 Et tu mets combien de temps ?
00:03:40 7 minutes, je crois, pour descendre.
00:03:41 Moi j'aime bien les ascenseurs.
00:03:43 Oh, moi j'aime pas trop les ascenseurs.
00:03:45 Salut.
00:03:52 Toutes les vidéos ont une histoire.
00:04:04 Et celle-ci commence par un hasard.
00:04:06 Celui de m'être retrouvé sur la route de l'Agence Nationale pour la gestion des déchets radioactifs.
00:04:11 L'ANDRA.
00:04:12 Cet organisme public sous tutelle des ministères chargés de la recherche, de l'énergie et de l'environnement,
00:04:16 qui existe depuis 1979,
00:04:18 a pour mission d'informer et de protéger la population des déchets radioactifs.
00:04:22 Si beaucoup découvrent à l'instant son existence, de mon côté,
00:04:25 j'en entends parler depuis longtemps.
00:04:27 Au moins depuis mon adolescence.
00:04:28 Et c'était maintenant il y a plus de la moitié de ma vie.
00:04:31 Parce que je suis né à Chaumont et que j'ai grandi en Haute-Marne,
00:04:34 département à la frontière duquel se trouve le projet de centre industriel de stockage géologique,
00:04:38 CIGEO.
00:04:40 Ce nom vous dit probablement rien, mais vous savez sûrement de quoi il s'agit.
00:04:44 C'est là où il est prévu d'enfouir les déchets radioactifs les plus dangereux.
00:04:48 Ce site, je le connais.
00:04:50 Ces paysages, je les connais aussi.
00:04:52 Je n'ai donc pas attendu que les pelleteuses et les scientifiques débarquent
00:04:55 pour entendre parler de tout ce qu'ils apportent comme interrogation.
00:04:59 J'étais encore au lycée que la question nucléaire était déjà au centre de nombreuses discussions dans ma famille,
00:05:04 avec mes amis, autour de moi.
00:05:06 Et il n'y avait pas encore eu Fukushima,
00:05:08 mais il y avait déjà eu Tchernobyl et toutes les peurs qui y sont liées.
00:05:11 Cependant, que l'on soit pro ou anti-nucléaire,
00:05:13 la problématique de l'enfouissement des déchets est finalement distincte.
00:05:17 Parce que quel que soit l'avenir énergétique de la France,
00:05:20 qu'il passe par les centrales nucléaires ou non,
00:05:22 il faut bien savoir quoi faire des déchets qui ont déjà été produits,
00:05:25 et même de tous ceux que la recherche scientifique,
00:05:27 le milieu médical, l'industrie non nucléaire ou le secteur de la défense continueront de produire.
00:05:33 Comme leur vie est extrêmement longue pour certains d'entre eux,
00:05:35 il faut aussi se demander dans quelles conditions nous devons transmettre cet héritage aux générations futures.
00:05:40 Et j'ai envie de dire que, quelque part, c'est peut-être ça, l'enjeu central.
00:05:45 [Musique]
00:06:13 - Qu'est-ce que ça t'évoque si je te parle de l'endroit ?
00:06:15 - Ben, si tu me parles de l'endroit, ça m'évoque les déchets nucléaires chez moi.
00:06:23 Donc, voilà, ça m'évoque ça.
00:06:26 A priori, je suis contre, parce que j'ai peur, parce que j'aime pas ça.
00:06:30 Maintenant, je sais pas.
00:06:32 Mais a priori, non, ça m'évoque rien de bon.
00:06:38 Si on appelait ça quand même la poubelle, on était la poubelle nucléaire.
00:06:44 Enfin, tu vois, c'est un petit peu ce qui se disait.
00:06:49 - Je sais que tu m'as parlé au téléphone, je sais pas si tu as envie d'en parler,
00:06:51 si tu veux parler de la radiothérapie ou pas.
00:06:53 - Oui, bien sûr, bien sûr.
00:06:54 Alors, voilà, moi, je suis mal placée pour être anti-nucléaire aussi,
00:06:58 parce que j'étais malade du cancer et j'ai donc été soignée par la radiothérapie.
00:07:05 J'ai été soignée par le nucléaire, voilà.
00:07:07 Justement, c'est là, peut-être à ce moment-là,
00:07:09 que j'ai commencé à être plus modérée dans mon propos,
00:07:12 à être moins anti-nuc qu'avant, quoi.
00:07:16 - Du coup, tu t'es dit que le nucléaire, c'était pas que les centrales,
00:07:19 ça pouvait être aussi autre chose, peut-être ?
00:07:20 - Oui, bah oui.
00:07:21 Les craintes que j'ai eues aussi par rapport au nucléaire,
00:07:24 c'est, à un moment donné, je me suis posé la question,
00:07:28 c'était pas tant sur les déchets,
00:07:29 mais sur la gestion de l'entretien des centrales nucléaires,
00:07:36 qui, en tout cas, forciori, ça pourra aussi se projeter sur Burr,
00:07:40 à un moment donné ou à un autre.
00:07:42 C'est la question des compétences,
00:07:45 la question de savoir si tout ça restera dans les mains de l'État ou pas,
00:07:54 parce que si ça devient une gestion privée un jour,
00:07:57 moi, j'ai peur que ça aille vers quelque chose qui doit être rentable,
00:08:03 plutôt que...
00:08:06 - La rentabilité sur la sécurité.
00:08:08 - Voilà, privilégier la rentabilité sur la sécurité.
00:08:11 - C'est vrai qu'en plus, on a un peu l'impression aujourd'hui
00:08:14 que c'est déjà le cas pour l'hôpital, c'est déjà le cas pour le ferroviaire,
00:08:17 c'est le cas pour tout un tas de secteurs.
00:08:19 - Tout à fait.
00:08:20 - Effectivement, on pourrait se dire, ça se trouve,
00:08:21 que ce sera le cas pour la gestion du parc nucléaire ou des déchets nucléaires.
00:08:25 - J'imagine aussi que tout est bien maîtrisé, quoi, et qu'il...
00:08:31 - On espère, on espère en tout cas.
00:08:33 - Ça se défend, quoi.
00:08:34 - En tout cas, pour l'instant, ils n'ont encore rien en fouille.
00:08:36 - Oui, c'est ce que tu disais.
00:08:38 Les questions qui touchent aux déchets nucléaires,
00:08:52 comme beaucoup, je me les pose depuis longtemps.
00:08:55 Quand j'ai alors appris que Landra cherchait des vidéastes
00:08:57 pour traiter de lépineuses questions de la mémoire des déchets nucléaires,
00:08:59 je dois avouer que je n'ai pas beaucoup hésité avant de leur proposer d'en faire une vidéo.
00:09:03 Parce que c'est une question que je me pose moi-même.
00:09:06 Comment informer les générations futures de ce qu'on a enfoui sous leurs pieds ?
00:09:10 Alors, je leur ai demandé carte blanche pour tenter d'y répondre,
00:09:13 et ils ont accepté.
00:09:15 Aussitôt, j'ai alors commencé à lire, à chercher, à écrire,
00:09:18 mais voilà, une question si simple n'appelle évidemment pas de réponse aussi simple.
00:09:23 [Musique]
00:09:29 La première chose que j'ai faite, c'est évidemment de me rendre sur place,
00:09:32 à cheval sur la Meuse et la Haute-Marde, entre Bar-le-Duc et Chaumont,
00:09:35 en plein dans la diagonale du vide.
00:09:38 Ce lieu n'a évidemment pas été choisi au hasard.
00:09:40 Le sol est pour en ressource.
00:09:41 Là, sous mes pieds, profondément sous terre, se trouve une couche d'argile
00:09:44 dont les caractéristiques sont intéressantes pour la perméabilité,
00:09:46 et la zone est faiblement peuplée.
00:09:48 Le choix du lieu, pour savoir pourquoi ici, pourquoi pas ailleurs, etc.,
00:09:51 c'est une question qui peut être intéressante,
00:09:53 mais c'est pas tout à fait le sujet de la vidéo, et je suis pas vraiment spécialiste.
00:09:56 Mais voilà, en tout cas, c'est ainsi que le projet CIGO décida de s'implanter
00:09:59 entre Saudron et Bure, et c'est là où je me trouve actuellement.
00:10:03 [Musique]
00:10:07 Pendant plusieurs mois, je m'y suis mal pris.
00:10:09 En fait, je dois avouer que j'étais un peu perdu,
00:10:11 parce que le sujet est titanesque, difficile, polarisant,
00:10:14 et en plus, je ne l'avais pas vraiment anticipé,
00:10:16 mais le Covid a repoussé cette vidéo jusqu'à la faire tomber
00:10:18 dans la période électorale de 2022.
00:10:20 C'est un assez mauvais moment, puisque les questions liées au nucléaire
00:10:22 orientent plus que jamais le débat public.
00:10:24 Mais surtout, je dois bien avouer,
00:10:26 l'immensité des informations à traiter est assez paralysante.
00:10:29 Difficile de trouver des pistes de réflexion dans ces conditions,
00:10:32 même si ce n'est que pour livrer des orientations globales,
00:10:34 ou tout simplement synthétiser ce que l'on sait déjà sur la mémoire collective.
00:10:37 Sans fonctionnement, c'est contraint.
00:10:39 Et comme il semble impossible de donner une réponse à la question
00:10:42 "comment assurer la mémoire du stockage profond des déchets nucléaires
00:10:45 le plus longtemps possible?",
00:10:46 eh bien il faut en circonscrire la portée en posant de nouvelles questions.
00:10:50 Moi, pour la suite de ma vidéo, j'ai vraiment besoin qu'on réponde à une question,
00:10:53 c'est "pour combien de temps on a besoin d'assurer cette mémoire?"
00:10:57 Alors l'objectif est de préserver la mémoire pour 500 ans minimum.
00:11:01 Et donc c'est 500 ans, c'est un délai qui est réfléchi, c'est arbitraire,
00:11:04 ça a été décidé comment ?
00:11:05 C'est une demande de l'autorité de sûreté nucléaire.
00:11:08 Pour autant, on n'a pas d'objectif maximal.
00:11:10 Pourquoi ? Parce qu'il y a aussi des enjeux éthiques à cette transmission mémoriale.
00:11:13 On souhaite qu'en fait que les générations futures aient à minimum
00:11:16 la conscience de l'existence du stockage
00:11:18 et autant que faire se peut le plus de connaissances détaillées possibles
00:11:21 sur le stockage, les déchets qu'il contient,
00:11:23 afin de pouvoir s'emparer de la question
00:11:26 et à leur tour décider de la transmission mémorielle ou non à l'avenir.
00:11:30 Donc là, si on parle de transmission de mémoire, à l'heure actuelle, aujourd'hui,
00:11:33 on doit l'assurer auprès de qui ?
00:11:34 Des gens qui vont travailler plus tard ici, des gens qui habitent à côté ?
00:11:38 Alors auprès de tout le monde, on la transmet à des riverains,
00:11:42 à des personnes de la société civile, à des experts.
00:11:44 On la transmet au niveau local, au niveau national, si possible au niveau international.
00:11:48 Et donc là-dessus, on va calquer aussi le périmètre d'informations qu'on va transmettre.
00:11:52 On va par exemple avoir le dossier synthétique de mémoire,
00:11:54 qui récapitule les informations essentielles sur le stockage, sur les déchets qu'il contient,
00:11:58 et le dossier détaillé de mémoire,
00:12:00 qui lui va contenir des dizaines de milliers de documents très techniques,
00:12:03 qui sera bien évidemment à destination d'un public plus d'experts.
00:12:07 Donc en fait, il y a plusieurs mémoires ?
00:12:09 Exactement, il y a plusieurs mémoires qui s'imbriquent les unes dans les autres,
00:12:12 suivant un système de gigogne, on pourrait le dire ainsi,
00:12:15 et plusieurs supports, plusieurs techniques pour essayer de transmettre cette mémoire.
00:12:19 Alors ces éléments permettent effectivement de réduire un peu le champ des possibles.
00:12:23 Demeure néanmoins que la question est vaste et vertigineuse.
00:12:26 Alors dans ces cas-là, j'ai un réflexe qui m'a sûrement été irrité de mon parcours à l'université.
00:12:30 Traiter la question sous un angle spécifique.
00:12:33 Et il y en a un que je connais ma foi assez bien, et que j'affectionne tout particulièrement.
00:12:37 [♫ Générique ♫]
00:12:42 Comme j'ai fait les études de linguistique, et qu'après tout, cette chaîne parle de linguistique à la base,
00:12:46 mon premier axe de travail a naturellement été d'envisager la mémoire
00:12:49 comme relevant strictement de la transmission de l'information par voie langagière.
00:12:53 Ce qui revient à reformuler notre question de base en une nouvelle question qui me paraît tout de suite plus abordable.
00:12:57 Comment garantir qu'un message rédigé aujourd'hui soit compris demain ?
00:13:00 Une question qui reste compliquée évidemment,
00:13:02 mais qui m'évoque aussitôt plusieurs pistes où trouver des fragments de réponses
00:13:05 qui, mis bout à bout, permettront peut-être de m'orienter vers une conclusion.
00:13:08 Tout d'abord, les langues évoluent.
00:13:10 C'est un fait indéniable, et c'est dans la nature même du fonctionnement du langage.
00:13:14 N'importe quel message écrit aujourd'hui sera alors, par la force des choses,
00:13:17 de plus en plus daté aux yeux de ceux qui le liront à mesure que le temps s'écoule en eux.
00:13:21 Et au-delà d'un certain point dans le temps qu'il est malheureusement impossible de prédire,
00:13:24 le dit message finira, irrémédiablement, par sembler totalement étranger.
00:13:29 Ce sentiment d'étrangeté vis-à-vis des évolutions linguistiques de votre propre langue,
00:13:32 vous l'avez déjà quand vous écoutez vos parents ou vos grands-parents
00:13:35 qu'utilisent encore des mots comme "frigidaire" ou "souper" pour parler du repas du soir.
00:13:39 Et pour les plus vieux qui me regardent, c'est en écoutant vos enfants parler
00:13:42 avec leurs congénères que vous vous sentez parfois en difficulté.
00:13:45 Évidemment, pour autant, vous parlez encore tous la même langue,
00:13:47 parce que vous partagez des lieux, des espaces de sociabilité,
00:13:50 et surtout, une période de l'histoire en commun.
00:13:52 Lorsque l'on remonte un peu plus loin dans le temps pour lire des auteurs
00:13:55 avec qui l'on ne partage ni l'environnement social, ni l'environnement géographique ou historique,
00:13:59 le décalage est sans doute la première chose qui nous saute aux yeux.
00:14:02 Et plus l'on remonte, plus ce décalage devient synonyme d'incompréhension,
00:14:06 voire même de langue étrangère.
00:14:08 C'est ce qui se passe pour n'importe quel francophone cherchant à lire Durablet,
00:14:11 la chanson de Roland, du Cicéron, l'Époterie de Duénonce.
00:14:14 Si vous pouvez encore percevoir le sens global des œuvres du premier,
00:14:17 en remontant plus loin, cela devient de plus en plus obscur jusqu'à tout simplement devenir inaccessible.
00:14:22 Surtout que, comme vous pouvez le voir, la langue évolue tant dans sa grammaire et sa phonologie
00:14:25 qu'elle évolue dans sa façon d'être écrite.
00:14:27 Si nous utilisons l'alphabet latin, et ce depuis plus de 2000 ans,
00:14:30 celui-ci a tellement évolué qu'il est difficile pour un néophyte de lire du latin archaïque.
00:14:34 On a l'impression d'être confronté à un autre système d'écriture, et en quelque sorte, c'est d'ailleurs le cas.
00:14:39 Et puis, rien ne garantit du tout que cette alphabet latin actuel, aussi répandue soit-il,
00:14:43 se conserve dans un futur lointain.
00:14:45 Les Égyptiens, qui ont écrit et lu les hiéroglyphes pendant 3500 ans,
00:14:48 les ont abandonnés en quelques siècles à peine.
00:14:50 Et comme c'est souvent le cas quand un peuple abandonne sa langue ou son écriture,
00:14:53 il ne peut pas se rendre compte qu'il a été abandonné.
00:14:55 Et c'est ce qui est très intéressant, c'est que les Égyptiens ont toujours été des écriteurs.
00:14:59 Ils ont toujours été des écriteurs, et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:02 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:04 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:06 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:08 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:10 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:15:12 Et ils ont toujours été des écriteurs.
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00:16:21 Et ils ont toujours été des écriteurs.
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00:16:37 Et ils ont toujours été des écriteurs.
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00:16:41 Et ils ont toujours été des écriteurs.
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00:17:07 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:17:09 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:17:11 Et ils ont toujours été des écriteurs.
00:17:13 La contrainte du choix du support ou du mode d'écriture est alors déterminante.
00:17:16 Car s'il nous faut écrire pour figer notre langue,
00:17:18 qui par définition est instantanée et immatérielle,
00:17:20 avant de se poser la question de sa compréhension par nos futurs descendants,
00:17:23 il faut d'abord garantir que le message puisse être délivré.
00:17:26 Donc là, on a plusieurs types de supports.
00:17:35 Je vois qu'on a des CD, des disques durs, d'autres choses.
00:17:38 Alors moi, j'ai déjà eu un disque dur qui a cramé.
00:17:41 Je pensais que ça arrivait à tout le monde.
00:17:43 Ça n'a pas l'air d'être super pérenne comme support.
00:17:45 Non, non. Effectivement.
00:17:47 Ce sont des supports qui sont très utiles au quotidien.
00:17:49 Évidemment, dans l'informatique, on utilise ça tous les jours.
00:17:52 Mais ce ne sont pas les supports qu'on prévoit pour le stockage,
00:17:56 pour l'archivage à long terme.
00:17:58 Pour l'archivage à long terme, on a d'autres types de supports.
00:18:00 En solution de référence, on a du papier permanent.
00:18:03 Et puis, on étudie d'autres types de supports
00:18:06 qui peuvent aller beaucoup plus loin en longtemps que le papier permanent.
00:18:09 Je vois qu'on a un disque en saphir, je crois, c'est ça ?
00:18:11 Oui, c'est un disque en saphir, effectivement.
00:18:14 Ce sont deux lames de saphir.
00:18:16 Et entre les deux lames de saphir, vous avez un texte qui a été gravé.
00:18:19 Donc là, il fait 20 cm de diamètre.
00:18:22 Et donc, ça, c'est un essai qu'on a fait.
00:18:26 Le saphir peut durer de l'ordre de 1 million d'années.
00:18:30 Donc, on est sur des échelles de temps beaucoup plus longues.
00:18:33 Et en quantité d'informations stockées, on est sur quelque chose ?
00:18:36 Alors, sur ce disque-là, on peut avoir l'équivalent de 10 000 pages à 4 de texte.
00:18:43 C'est-à-dire qu'on a une résolution de 1 micron.
00:18:46 Donc, en gros, si on comprend bien, c'est que c'est écrit en très petit ?
00:18:49 C'est écrit en très petit.
00:18:51 Ça peut être écrit en très petit.
00:18:52 Vous pouvez aussi avoir différentes tailles d'informations.
00:18:56 Ce qui permet justement de lire à l'œil nu certains textes.
00:19:00 Et puis, si on a envie d'aller un peu plus loin,
00:19:02 de prendre son microscope ou sa loupe binoculaire
00:19:05 et d'aller chercher les autres informations.
00:19:08 Ça nécessite quand même certains outils pour pouvoir être utilisé.
00:19:12 Oui, ça nécessite des outils, évidemment.
00:19:16 Mais ça reste du stockage analogique.
00:19:18 Et donc, ça, c'est une solution pour laquelle vous avez opté actuellement ?
00:19:21 Ou c'est ce qu'on parlait de prototype juste avant ?
00:19:23 Oui, c'est un prototype de démonstration.
00:19:25 Non, on n'a pas pour l'instant changé de solution de référence.
00:19:29 On reste sur le papier permanent,
00:19:31 tant qu'on n'a pas exploré vraiment à fond les différents types de supports qu'on pourrait envisager.
00:19:36 Le saphir, c'est un support très intéressant,
00:19:38 parce qu'il peut durer de l'ordre d'un million d'années.
00:19:41 Donc là, on n'a plus cette limite du matériau.
00:19:44 On a d'autres limites, mais on n'a plus la limite du matériau.
00:19:48 Mais déjà, les 5 à 10 siècles que font le papier permanent sont déjà une bonne étape.
00:19:55 Alors, juste qu'on soit d'accord,
00:19:57 si ça dure un million d'années, ce qu'on écrit dessus,
00:19:59 c'est ce qu'on écrit à l'instant T, j'imagine.
00:20:01 C'est dans la langue actuelle.
00:20:03 Est-ce qu'il y a des traductions qui sont prévues ?
00:20:05 Est-ce qu'il y a d'autres langues ?
00:20:07 Est-ce qu'il y a une diversification de ce côté-là qui est prévue ?
00:20:09 Tout ça dépend des documents qu'on va produire.
00:20:11 Sur un document qu'on destine au grand public,
00:20:14 comme le dossier synthétique de mémoire,
00:20:17 on peut effectivement l'envisager.
00:20:19 C'est même recommandé à l'international de l'écrire en plusieurs langues,
00:20:23 de façon à multiplier les indices,
00:20:25 disons, pour faciliter le travail des gens qui viendront dans le futur déchiffrer ces documents.
00:20:33 Lorsqu'il s'agit d'un jeu de documents comme le dossier détaillé de mémoire,
00:20:38 où vous avez des milliers ou des dizaines de milliers de documents,
00:20:41 à moins de faire de la traduction automatique,
00:20:43 ce qui n'est pas exclu, pour l'instant on n'a pas prévu de le faire,
00:20:46 parce que ce sont des documents qui sont produits au fur et à mesure de la vie de l'installation,
00:20:51 qui sont écrits en français, en français du moment.
00:20:54 - Ok.
00:20:55 Donc finalement, ça, les documents continuant à être rédigés dans le temps,
00:20:59 ça suit finalement logiquement l'évolution naturelle de la langue,
00:21:02 ce qui permet d'avoir une traceabilité aussi dans le temps ?
00:21:04 - Aussi, oui.
00:21:05 - Ok.
00:21:06 L'andrat doit garantir la mémoire sur une période de 500 ans au minimum.
00:21:10 Ça peut paraître peu ou beaucoup, c'est selon les cas de figure.
00:21:13 Ce délai, à moi en tout cas, il m'inspire une seconde piste.
00:21:16 Même si l'on garantit que l'on puisse transmettre le message matériellement parlant à nos descendants,
00:21:20 puis que l'on puisse le déchiffrer sans obstacle,
00:21:23 à quel point leur langue aura évolué par rapport à la nôtre ?
00:21:26 Seront-ils seulement en capacité de comprendre ce qu'ils liront ?
00:21:30 J'ai fait des études de linguistique historique, je suis fan du chrony et d'anticipation,
00:21:34 alors autant vous dire que cette autre question ouvre une nouvelle voie qui, personnellement, me passionne.
00:21:38 Premièrement, s'il y a bien une chose que la linguistique historique nous permet de savoir,
00:21:41 c'est que si toutes les langues évoluent,
00:21:43 certaines langues demeurent relativement stables durant de longues échelles de temps,
00:21:46 d'autres non, et que les phases d'évolution profondes sont entrecoupées de phases plus calmes.
00:21:50 Par exemple, et j'en avais déjà parlé, des crises comme les épidémies, les famines ou les évolutions climatiques
00:21:54 peuvent impacter l'évolution d'une langue.
00:21:56 Ce qui, d'emblée, me pousse déjà à répondre à la question que l'on a posée il y a moins d'une minute,
00:22:00 personne ne peut prévoir si un message actuel sera bien compris dans 500 ans.
00:22:04 Mais allons plus loin, sur les terres d'une technique expérimentale
00:22:07 qui, bien qu'elle ne fasse pas l'unanimité, permet de se rendre compte de ce que ça veut dire,
00:22:10 500 ans d'évolution.
00:22:11 J'ai nommé la glottochronologie.
00:22:14 À l'origine, cette technique est due à Maurice Swadesh,
00:22:16 un anthropologue et linguiste américain du deuxième tiers du XXe siècle.
00:22:20 Elle permet de mesurer la distance lexicale qui sépare deux langues,
00:22:23 qu'elle soit contemporaine-maisseur, comme l'italien et le français,
00:22:26 ou qu'il existe un écart temporel et donc une relation merfilie,
00:22:29 comme entre le latin et le français, par exemple.
00:22:31 Pour cela, Maurice Swadesh se base sur une comparaison
00:22:33 entre ce qu'on appelle aujourd'hui des listes Swadesh, de son nom,
00:22:36 qui recensent les mots les plus courants.
00:22:37 Plusieurs listes existent, il y a donc celles de 225, 215, 200 ou 100 mots,
00:22:42 mais celle qu'on utilise le plus, c'est la liste 207.
00:22:45 En comparaison, des mots de cette liste sont très intéressants,
00:22:47 car les plus courants sont aussi les plus résistants aux changements,
00:22:50 et notamment aux emprunts.
00:22:51 Par exemple, si on estime que l'anglais a globalement emprunté 50% de son lexique
00:22:54 aux langues romanes comme le français, l'italien ou le latin,
00:22:57 seuls 7% des mots de sa liste Swadesh ne sont pas d'origine germanique.
00:23:01 Les travaux de Swadesh ont permis de déduire qu'en moyenne, empiriquement,
00:23:04 une langue remplaçait 14% du lexique de son noyau dur tous les 1000 ans.
00:23:08 Si on reprend désormais le délai de 500 ans, qui est celui de l'Andra,
00:23:10 on en déduit que c'est tout de même 7% des mots qui devraient en moyenne
00:23:13 avoir changé entre le début et la fin de ce laps de temps.
00:23:16 Ils devraient céder leur place à des mots nouveaux ayant changé de sens,
00:23:19 par des emprunts, par des néologismes, et à vrai dire, peu importe.
00:23:23 C'est assez drôle, puisque l'exemple des mots courants qui disparaissent
00:23:26 d'une langue avec le temps, eh bien, il est souvent mis en parallèle
00:23:29 avec celui des atomes radioactifs qui perdent des particules avec le temps.
00:23:32 Quoi qu'il en soit, ce qu'il faut retenir, c'est que 7% des mots écrits aujourd'hui
00:23:36 risquent d'être totalement incompréhensibles d'ici 500 ans.
00:23:40 Alors me direz-vous, la glottochronologie, c'est un peu au petit bonheur la chance,
00:23:44 et surtout, c'est une moyenne un peu arbitraire.
00:23:47 L'islandais, langue insulaire ayant peu évoluée depuis l'époque des vikings,
00:23:50 n'a remplacé que 4% de son lexique le plus courant au cours du dernier millénaire.
00:23:54 Et cette situation est incomparable avec celle de l'anglais, par exemple,
00:23:56 dont on a déjà parlé, qui a été influencée par les scandinaves,
00:23:59 par les français ou encore par les celtes.
00:24:01 Tout à l'heure, je vous disais que l'anglais n'a remplacé finalement que 7%
00:24:04 de son noyau d'urge germanique par des mots d'origine romane en 1000 ans.
00:24:07 Mais ce chiffre cache une autre réalité.
00:24:10 Avec tous les changements de sens induits par le temps,
00:24:12 27% des 207 mots les plus courants en vieil anglais ont été remplacés
00:24:16 par un autre mot en anglais moderne.
00:24:18 Ainsi, les mots anglais actuels "smell", "root", "bird" ne correspondent pas
00:24:23 à la racine germanique qui servait à désigner les mêmes choses en vieil anglais,
00:24:26 puisque l'on trouvait plutôt "jästinkan", "vultruma", "fugor".
00:24:31 Tout ceci étant dit, le seul moyen d'assurer une bonne transmission
00:24:34 de l'information à travers le temps, c'est de diversifier les supports,
00:24:37 les langues et les systèmes d'écriture, y compris pour une même langue,
00:24:40 afin de maximiser ses chances. Et surtout, il faut continuer à le faire
00:24:43 continuellement, et ce, sans jamais s'arrêter, aussi longtemps qu'on le puisse.
00:24:47 La continuité est un linguistique historique, ce qui nous permet de mieux
00:24:50 comprendre l'évolution d'une langue, de ses phrases et de ses significations.
00:24:53 Le corollaire, c'est que plus un message est documenté et actualisé à travers le temps,
00:24:56 plus il a de chances d'être compris sans que l'on ait besoin de trop se pencher dessus.
00:25:00 Mais même en poursuivant cette mission qui n'est pas anodine,
00:25:02 rien ne pourra jamais garantir que l'information sera conservée et transmise.
00:25:06 Parce que tout repose sur des présupposés sur lesquels nous n'avons aucun contrôle.
00:25:09 S'il faut qu'un message soit lu, cela suppose par exemple que nos générations futures soient alphabètes.
00:25:13 Alors ça peut sembler bête comme ça, mais le taux d'alphabétisation a fluctué
00:25:17 à travers les époques et à travers les régions.
00:25:19 Il faut également que nos systèmes d'écriture soient considérés comme tels.
00:25:23 Cela peut aussi sembler bête comme condition, mais il y a quelques siècles à peine,
00:25:26 les Européens prenaient les hiéroglyphes pour de jolis dessins,
00:25:28 parce qu'ils ont tout simplement oublié qu'il s'agissait autrefois de caractères
00:25:32 servant à écrire l'égyptien ancien.
00:25:34 Pour parler de choses plus contemporaines, le disque de Phaistos, trouvé en Crète,
00:25:37 est un artefact sur lequel des symboles apparaissent sans que l'on ne sache encore avec certitude
00:25:41 si ce sont des dessins ou des caractères d'écriture.
00:25:44 Et puis même en sachant qu'il s'agit d'un système d'écriture, il faut pouvoir le lire.
00:25:47 Les orthographes se réforment, et parfois, les systèmes en remplacent de nouveau.
00:25:51 Aujourd'hui, une bonne partie des Turcs ne maîtrisent plus l'écriture arabe,
00:25:54 qui était pourtant celle de leur langue jusqu'à les années 1920.
00:25:57 Les coups de croates ne lisent plus le cyrillique,
00:25:59 servant pourtant à écrire le serbe, une langue très proche,
00:26:01 alors qu'il était pourtant enseigné jusque dans les années 1990 dans la Yougoslavie.
00:26:05 Mais si un jour nous venons à changer ici de culture, de langue,
00:26:08 à vivre des événements conduisant la population à ne plus savoir ni lire ni écrire,
00:26:11 est-ce que la mémoire des déchets nucléaires pourra être perpétuée ?
00:26:14 Et si c'est pas le cas, est-ce que c'est grave en soi ?
00:26:18 Cette question, elle peut paraître bête ou stupide, mais on y reviendra en fin de vidéo.
00:26:22 Avant d'en finir avec cette partie linguistique, il y a un dernier point qui me semble important.
00:26:26 La compréhension d'un message dépend aussi souvent d'un contexte culturel,
00:26:29 d'un contexte historique et géographique perçu.
00:26:32 Parce que le contexte, c'est la partie du message que l'on oublie souvent mais qui a son importance.
00:26:36 Beaucoup d'erreurs d'interprétation ou de traduction de textes
00:26:38 émanent parfois d'une mauvaise compréhension du contexte,
00:26:40 même quand il s'agit de choses basiques ou scientifiques.
00:26:43 Parce que rien ne garantit non plus que ceux qui seront chargés de transmettre,
00:26:46 de traduire ou de remettre à jour tout ce que nous produisons aujourd'hui comme documents
00:26:49 seront en capacité de bien les comprendre.
00:26:51 Et rien ne garantit alors qu'un simple message comme "ne creusez pas"
00:26:54 ne soit pas compris ni transformé avec le temps en "creusez ici".
00:27:00 "Les gens qui ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe,
00:27:03 ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe,
00:27:05 car ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:07 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe,
00:27:09 car ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:11 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:13 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:15 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:17 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:19 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:21 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:23 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:25 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:27 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:29 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:31 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:33 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:35 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:37 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:39 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:41 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:43 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:45 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:47 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:49 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:51 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:53 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:55 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:57 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:27:59 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:01 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:03 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:05 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:07 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:09 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:11 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:13 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:15 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:17 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:19 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:21 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:23 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:25 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:27 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:29 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:31 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:33 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:35 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:37 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:39 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:41 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:43 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:45 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:47 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:49 Ils ne peuvent pas se rendre compte de ce qui se passe.
00:28:51 Donc là où est-ce qu'on est actuellement ?
00:28:53 Actuellement on est dans le laboratoire souterrain
00:28:55 qui exploite l'Andra, la limite de la Meuse et de la Haute-Marne.
00:28:57 Ici on est à 490 mètres de profondeur.
00:28:59 Ici on est à 490 mètres de profondeur.
00:29:01 On travaille directement au contact de cette roche
00:29:03 qui est une argilite
00:29:05 qui s'est formée ici il y a plus de 160 millions d'années
00:29:07 et qu'on étudie en vue d'y implanter
00:29:09 un stockage géologique profond
00:29:11 dans quelques années.
00:29:13 Pour enterrer les déchets nucléaires ?
00:29:15 Exactement, pour accueillir et stocker
00:29:17 les déchets les plus radioactifs
00:29:19 de la gamme de déchets radioactifs
00:29:21 qu'on a à gérer en France.
00:29:23 Donc là si j'ai bien compris, l'idée c'est un peu de faire un sarcophage,
00:29:25 c'est-à-dire on enterre tout et on scelle, on rebouche.
00:29:27 Effectivement,
00:29:29 pour CIGEO en tout cas,
00:29:31 le projet est conçu pour être fermé
00:29:33 au terme de son exploitation
00:29:35 pour amplifier sa capacité à confiner
00:29:37 les éléments radioactifs sur le long terme.
00:29:39 Et le projet est aussi conçu pour être réversible.
00:29:41 Alors la réversibilité,
00:29:43 ça comprend plusieurs choses.
00:29:45 C'est d'abord, à des moments donnés dans le projet,
00:29:47 l'analyser, le réanalyser
00:29:49 au vu de l'époque où on sera,
00:29:51 et voir si on poursuit le projet tel qu'on l'a imaginé
00:29:53 ou si on le fait évoluer.
00:29:55 Donc la réversibilité c'est ça,
00:29:57 mais c'est aussi la récupérabilité,
00:29:59 c'est-à-dire que sur toute la période d'exploitation,
00:30:01 on doit être capable
00:30:03 de récupérer les colis de déchets
00:30:05 qu'on aurait placés à l'intérieur de l'installation.
00:30:07 Donc en termes de mémoire,
00:30:09 est-ce qu'il est prévu, je ne sais pas,
00:30:11 de mettre au fond des écriteaux ?
00:30:13 Je ne sais pas, pour les gens qui arriveraient en mode "Bonjour,
00:30:15 il se passe ceci, il se passe cela",
00:30:17 où en fait, tu demandes
00:30:19 "Ce sera scellé ?", et bien ce sera scellé,
00:30:21 et salut.
00:30:22 Alors aujourd'hui, je ne sais pas répondre à cette question
00:30:24 de façon précise, puisque
00:30:26 finalement, ces choix au moment de la fermeture,
00:30:28 c'est les générations futures qui vont le faire.
00:30:30 Donc elles prendront les décisions
00:30:32 qu'elles voudront à ce moment-là.
00:30:34 Mais en tout cas, aujourd'hui,
00:30:36 nous à Landra, on a un programme qui s'appelle
00:30:38 "Mémoire pour les générations futures".
00:30:39 Ça fait maintenant plus de dix ans qu'on travaille sur ça
00:30:41 et qu'on imagine un panel
00:30:43 en fait, de techniques, de solutions
00:30:45 pour essayer de transmettre la mémoire
00:30:47 le plus longtemps possible. Alors peut-être que
00:30:49 ça passera par des marqueurs de surface,
00:30:51 peut-être par des choses directement
00:30:53 dans le laboratoire, pas forcément quelque chose
00:30:55 ici, mais là, encore une fois,
00:30:57 ce n'est pas moi qui décidera, c'est les générations futures.
00:30:59 Donc là, je pense qu'on peut quand même dire que
00:31:01 ce projet, ça
00:31:03 provoque certaines craintes.
00:31:05 Par exemple, j'ai vu dans un reportage d'Hugo Clément
00:31:07 qui était diffusé sur France 5, une crainte
00:31:09 sur les incendies, donc des incendies qu'il pourrait y avoir en sous-sol,
00:31:11 est-ce que c'est une crainte qui est fondée ?
00:31:13 Est-ce qu'il faut craindre ce genre de choses,
00:31:15 par exemple, à terme ? Est-ce que ça pourrait
00:31:17 compromettre la mémoire ?
00:31:18 Donc en tout cas, le premier dispositif
00:31:20 pour l'incendie, c'est éviter qu'il y en ait.
00:31:22 Donc, pour éviter d'avoir des incendies,
00:31:24 on peut mettre en place plein de choses,
00:31:26 notamment éviter
00:31:28 tout ce qui est combustible
00:31:30 et tout ce qui est inflammable, en fait,
00:31:32 dans la future installation. Donc, par exemple,
00:31:34 tous les engins à moteur,
00:31:36 tous les engins thermiques
00:31:38 avec des pneus, tout ça, ça sera
00:31:40 proscrit dans CIGEO, donc dans toute la partie nucléaire.
00:31:42 Malgré tout, le risque géro,
00:31:44 ça n'existe pas, et dans ce cas-là,
00:31:46 il faut mettre en place des solutions
00:31:48 pour intervenir le plus
00:31:50 rapidement possible sur un départ de feu.
00:31:52 Ça veut dire que dans CIGEO, il y aura tout un système
00:31:54 pour à la fois de détection
00:31:56 des incendies, mais aussi
00:31:58 d'arrêt de l'incendie,
00:32:00 de cloisonnement dans l'ouvrage
00:32:02 pour pouvoir fermer des zones
00:32:04 si jamais il y a un incendie qui se déclare
00:32:06 à tel endroit, donc couper cette zone
00:32:08 physiquement du reste, et puis ventiler
00:32:10 pour évacuer les fumées, etc.
00:32:12 Autre exemple, on aura sur le site des pompiers
00:32:14 comme aujourd'hui, sur le site du laboratoire,
00:32:16 qui seront là H24
00:32:18 formés pour intervenir le plus
00:32:20 rapidement possible sur
00:32:22 un incendie dans l'installation de CIGEO.
00:32:24 Est-ce qu'actuellement, là, sur le site,
00:32:26 parce que c'est une crainte, c'est une question aussi
00:32:28 que j'ai pu voir, est-ce qu'actuellement
00:32:30 il y a des déchets nucléaires ici, là où on se trouve ?
00:32:32 Est-ce qu'il y en a dans la zone ? Est-ce qu'on peut
00:32:34 nous prouver qu'il n'y en a pas ? Alors, dans le laboratoire,
00:32:36 il n'y en a pas, effectivement. Si on est autorisé
00:32:38 à faire CIGEO, c'est à ce moment-là qu'on viendrait
00:32:40 accueillir des déchets radioactifs. Donc pour l'instant, il n'y a rien
00:32:42 du tout. Ici, on essaie, on teste.
00:32:44 On teste, exactement. Alors par contre,
00:32:46 on a quand même des essais sur la diffusion
00:32:48 des éléments radioactifs à travers
00:32:50 la roche, et donc pour ça, on a
00:32:52 quelques expérimentations avec des traceurs
00:32:54 radioactifs qui reprennent
00:32:56 ce qu'on retrouve comme matière radioactive
00:32:58 à l'intérieur des déchets. Et du coup, est-ce qu'on peut voir
00:33:00 où ça se situe ? Est-ce qu'on peut mesurer à proximité
00:33:02 pour voir le taux de radioactivité ?
00:33:04 Du coup, l'expérimentation, effectivement,
00:33:06 elle est dans cette galerie. Alors j'ai pris avec moi
00:33:08 pour aujourd'hui un radio-GM,
00:33:10 ça s'appelle. En fait, c'est un compteur GGR
00:33:12 qui permet de mesurer le niveau de radioactivité.
00:33:14 Donc on a le bruit ambiant, en fait,
00:33:16 de la radioactivité, finalement, naturelle.
00:33:18 D'accord.
00:33:20 [Musique]
00:33:46 Donc à quoi ça ressemble un déchet nucléaire ?
00:33:48 Ça ressemble à ça ? Alors oui, ça ressemble
00:33:50 à ça. Alors, en tout cas, les déchets
00:33:52 radioactifs, c'est vrai que dans l'imaginaire des gens,
00:33:54 en général, on ne sait pas vraiment à quoi ça ressemble.
00:33:56 En fait, un déchet radioactif, ça peut être
00:33:58 tout et n'importe quoi à partir du moment
00:34:00 où ça a été en contact avec de la radioactivité.
00:34:02 En ce qui concerne le projet CIGEO, ce sont
00:34:04 des déchets qui seront issus du
00:34:06 recyclage des combustibles usés. Donc en gros,
00:34:08 dans les centrales, on a des barres de combustible
00:34:10 qui fournissent de l'énergie. Et puis, quand elles
00:34:12 fournissent moins d'énergie, on les recycle
00:34:14 pour utiliser la matière valorisable à l'intérieur.
00:34:16 Le reste de la matière, la barre
00:34:18 elle-même, elle n'est plus utilisable.
00:34:20 Donc elle est cisaillée, coupée en
00:34:22 petits morceaux, ce qui nous
00:34:24 donne des petits coques et embouts
00:34:26 de ce type. C'est de la matière métallique
00:34:28 qui est compactée en galettes
00:34:30 placée dans un colis, comme
00:34:32 on a devant nous, un colis en
00:34:34 inox. Donc ça, c'est ce qu'on appelle la catégorie
00:34:36 de déchets de moyenne activité vie longue.
00:34:38 L'autre catégorie qui nous concerne
00:34:40 pour CIGEO, c'est l'intérieur de la barre.
00:34:42 En fait, la matière qui n'est plus valorisable,
00:34:44 elle est calcinée en poudre,
00:34:46 coulée à une matière de verre
00:34:48 comme celle-ci, et placée également
00:34:50 dans un colis en inox. Donc ça,
00:34:52 c'est deux catégories de déchets qu'on
00:34:54 serait amenés à gérer et stocker dans
00:34:56 le projet CIGEO. Aujourd'hui, évidemment,
00:34:58 on a déjà produit ce type de déchets.
00:35:00 Par rapport à notre parc nucléaire, on estime qu'on a déjà
00:35:02 produit environ 40%
00:35:04 de nos déchets de haute activité, et
00:35:06 60% des déchets de moyenne activité
00:35:08 vie longue. - Donc ça, c'est ce pourcentage
00:35:10 par rapport à tout ce que vous pourriez accueillir ? - Voilà.
00:35:12 - Donc là, qu'est-ce qu'on est en train de regarder
00:35:14 actuellement ? - Alors là, on est
00:35:16 en train de regarder un
00:35:18 modèle taille réelle d'une
00:35:20 alvéole qui viendrait stocker
00:35:22 des déchets de moyenne activité vie longue.
00:35:24 En gros, c'est les fuits en inox qu'on a vus tout à l'heure,
00:35:26 qui sont placés, pour cette catégorie
00:35:28 de déchets, dans des
00:35:30 colis de stockage en béton,
00:35:32 placés eux-mêmes, du coup, après, en souterrain.
00:35:34 Donc il faut imaginer que cette alvéole, elle est à 500 mètres
00:35:36 sous terre, et donc
00:35:38 en face de nous, on a
00:35:40 9 mètres de diamètre d'alvéole.
00:35:42 - Et tout ça, c'est prévu pour quand ?
00:35:44 Quand est-ce qu'on va commencer vraiment à mettre des colis
00:35:46 en bas ? - Si on se place dans un
00:35:48 cas où on a l'autorisation
00:35:50 de construire, on peut imaginer un début de construction
00:35:52 de l'ouvrage autour de
00:35:54 2027. Ensuite,
00:35:56 les premiers colis stockés
00:35:58 plutôt autour de 2035,
00:36:00 2040. - Et donc, il est prévu
00:36:02 de le remplir, d'avoir fini
00:36:04 de remplir et de clôturer à quel moment ?
00:36:06 - On se projette sur une exploitation plutôt longue,
00:36:08 puisqu'on est sur plus de 100 ans d'exploitation.
00:36:10 Donc l'exploitation, c'est
00:36:12 le temps où on va remplir l'ouvrage.
00:36:14 Et donc,
00:36:16 on est sur une fermeture autour de 2150.
00:36:18 - Mon cheminement a commencé par la Haute-Marne,
00:36:36 ma terre natale. Parce que c'est peut-être ce qui
00:36:38 occupe le plus les débats autour des déchets
00:36:40 nucléaires actuellement. C'est là où l'on
00:36:42 trouvait, il y a quelques années encore, une ZAD,
00:36:44 en pleine forêt, pour lutter contre le projet.
00:36:46 Mais ce n'est pas ici où le débat sur les déchets nucléaires
00:36:48 et donc leur mémoire a débuté.
00:36:50 [Musique]
00:37:16 Pour en parler, je me rends donc à La Hague,
00:37:18 sur la pointe du Cotentin,
00:37:20 dans le département voisin de celui où j'habite
00:37:22 désormais. Parce que si CIGEO
00:37:24 représente le futur probable de nos déchets
00:37:26 et de leur stockage, le point de départ
00:37:28 pour eux se trouve dans la Manche.
00:37:30 Un point de départ à plusieurs titres.
00:37:32 C'est là où l'on entrepose aujourd'hui une partie des déchets
00:37:34 sur le site d'Orano, avant leur
00:37:36 éventuel futur transfert vers CIGEO.
00:37:38 Mais c'est aussi là, juste à côté, où l'on trouve
00:37:40 le plus ancien centre de stockage de déchets
00:37:42 radioactifs de France. Celui-ci,
00:37:44 créé en 1969, a reçu
00:37:46 des déchets essentiellement à vie courte
00:37:48 jusqu'au milieu des années 1990.
00:37:50 [Musique]
00:37:54 Donc là, je suis au-dessus, au-dessus du
00:37:56 tumulus, et ces déchets en question, ils sont
00:37:58 enterrés sous cette pelouse. Donc à peu près 1,5
00:38:00 million de colis, ça représente 500 000 m3
00:38:02 de déchets, qui sont pour la majeure partie
00:38:04 issus des centrales nucléaires, mais pas que. On trouve aussi par exemple
00:38:06 du radium, un des déchets hospitaliers, puisque
00:38:08 le radium est utilisé notamment dans
00:38:10 le traitement du cancer par radiothérapie.
00:38:12 [Musique]
00:38:14 Quand le site est arrivé à saturation,
00:38:16 c'était en 1991, on a débuté la phase de recouvrement,
00:38:18 et quand le dernier colis est arrivé,
00:38:20 en 1994, on a débuté la phase de fermeture.
00:38:22 Cette phase, elle a officiellement commencé en 2003,
00:38:24 et avec elle a débuté, de fait,
00:38:26 la phase de mémoire.
00:38:28 [Musique]
00:38:30 Donc là,
00:38:32 on est sur les déchets. Est-ce que tu peux
00:38:34 nous dire de quel type de déchets il s'agit ?
00:38:36 - Quel type de déchets il s'agit ?
00:38:38 C'est des déchets faibles et moyens d'activité,
00:38:40 qui sont principalement issus de
00:38:42 l'exploitation des installations nucléaires,
00:38:44 qui ont été produits dans les années 60, 70 et 80.
00:38:46 - Donc là, la couverture,
00:38:48 elle est constituée comment ?
00:38:50 - Elle est constituée de plusieurs couches.
00:38:52 La première couche, c'est une couche de forme
00:38:54 qui vient recouvrir directement les colis,
00:38:56 et qui donne la forme globale à ce que l'on
00:38:58 voit ici aujourd'hui. Donc une couche
00:39:00 en matériaux type roche
00:39:02 compactée, et qui stabilise
00:39:04 la forme. Ensuite,
00:39:06 au-dessus de cette couche,
00:39:08 on va disposer un lit de sable,
00:39:10 qui va assurer un drainage, une géomembrane
00:39:12 bitumineuse. Au-dessus, une nouvelle couche
00:39:14 de sable. Enfin, de nouveau,
00:39:16 des matériaux rochiers compactés,
00:39:18 là plutôt dans un
00:39:20 objectif de finaliser la forme de pente
00:39:22 et protéger contre les agressions type pénétration
00:39:24 ou autre. Et enfin, une couche de terre
00:39:26 et le massif herbeux
00:39:28 qu'on voit aujourd'hui. Pourquoi on empile ?
00:39:30 Question de surface. Si on met tout
00:39:32 à plat, il faudrait des surfaces
00:39:34 immenses pour socker ces déchets.
00:39:36 Après, l'empilement peut
00:39:38 générer des contraintes, mais permet
00:39:40 d'avoir un volume
00:39:42 plus important sur une surface plus restreinte.
00:39:44 Tu disais qu'on a ici des déchets de faible et moyenne activité.
00:39:46 Oui. Il n'y a aucun déchet de haute
00:39:48 activité ou de très haute activité ? Il n'y en a pas du tout ?
00:39:50 Il n'y a pas de déchets haute activité ou très haute
00:39:52 activité. Par contre, ce que l'on
00:39:54 a, ce qui a été vécu
00:39:56 sur ce centre, en fait, c'est que le centre a été
00:39:58 construit et s'est construit et a vécu en même temps que
00:40:00 l'évolution de la réglementation. Donc, on a
00:40:02 des éléments
00:40:04 à vie longue, notamment du plutonium,
00:40:06 qui ont élevé une centaine de kilos, qui sont répartis dans certains colis
00:40:08 dans cette zone-là,
00:40:10 la tranche 1 de l'installation.
00:40:12 On a clairement une problématique aussi liée au toxique
00:40:14 chimique, puisque en accompagnant de ces
00:40:16 déchets radioactifs,
00:40:18 ça peut être du plomb qui a été pollué
00:40:20 par de la contamination radioactive
00:40:22 ou d'autres éléments qui sont
00:40:24 liés finalement aux déchets que l'on
00:40:26 récupère ici, qui a l'aspect radioactif
00:40:28 et aussi toxique chimique, mais toxique chimique
00:40:30 au même sens qu'une
00:40:32 décharge classique
00:40:34 qui contient ce type de
00:40:36 métaux lourds par exemple ou de
00:40:38 matière. Donc la question que j'ai envie de te poser,
00:40:40 c'est très beau, ça ressemble à une
00:40:42 prairie. On pourrait presque se demander si on ne pourrait
00:40:44 pas retourner vivre ici, je ne sais pas,
00:40:46 construire des maisons, en tout cas, faire son jardin.
00:40:48 Est-ce que c'est quelque chose d'envisagé ? Est-ce qu'on pourra
00:40:50 vraiment un jour retourner vivre ici ? Alors, la question
00:40:52 reste aujourd'hui ouverte. On étudie
00:40:54 des scénarios à long terme. Donc, on a
00:40:56 différentes phases sur ces installations,
00:40:58 exploitation, fermeture, surveillance
00:41:00 et post-surveillance. Donc, la post-surveillance,
00:41:02 c'est le moment où on peut être amené
00:41:04 à relâcher le site au public.
00:41:06 Donc, on a des scénarios pour ces
00:41:08 phases-là, donc à
00:41:10 post-surveillance, type chantier
00:41:12 routier ou installation d'habitation
00:41:14 sur un site tel que le nôtre.
00:41:16 Il pourrait être mis en place des servitudes à long
00:41:18 terme pour ne pas rendre ce site
00:41:20 accessible à tout public
00:41:22 ou en faire n'importe quoi. Mais c'est aujourd'hui
00:41:24 quelque chose qui n'est pas fixé, qui va évoluer dans
00:41:26 le temps en fonction de nos évaluations et de l'impact
00:41:28 sanitaire de ce site qui, aujourd'hui,
00:41:30 est très faible. Le principe sur
00:41:32 ce type de centre de stockage,
00:41:34 c'est une phase d'exploitation qui dure
00:41:36 le temps. Donc, elle a besoin d'une phase de fermeture
00:41:38 qui nous permet de démontrer qu'on peut
00:41:40 passer en surveillance. Donc, elle a aussi une durée qui n'est
00:41:42 pas figée dans le temps. Et ensuite, la surveillance
00:41:44 est prescrite pour 300 ans. Donc, c'est un
00:41:46 couple, en fait, entre l'activité stockée sur
00:41:48 le centre et la période de dangerosité
00:41:50 de ces éléments. Mais, encore
00:41:52 une fois, du fait d'avoir stocké des éléments
00:41:54 à vie longue à l'origine de la création
00:41:56 du site, notamment,
00:41:58 cette durée pourrait potentiellement
00:42:00 être étendue ou étendue via des servitudes
00:42:02 pour limiter l'accès au site.
00:42:04 Et pourquoi 300 ans ? C'est une date arbitraire ?
00:42:06 Alors, c'est pas une date arbitraire,
00:42:08 mais c'est un mix, en fait, à la fois
00:42:10 entre quelque chose qui peut être
00:42:12 vu et suivi
00:42:14 par l'homme. Donc, typiquement, il y a 300 ans,
00:42:16 on sait globalement ce qui s'est passé en France
00:42:18 sur le territoire, sur
00:42:20 ce qui a pu être réalisé en termes d'infrastructures,
00:42:22 de bâtiments, d'évolutions
00:42:24 technologiques, enfin, l'histoire de l'homme
00:42:26 en général. Et donc, c'est quelque chose
00:42:28 qui peut être vu en perspective d'abordable.
00:42:30 En préparant cette vidéo, je me suis quand même rendu compte que notre génération
00:42:42 avait pas mal oublié les débats et les combats
00:42:44 d'antan autour de la question du nucléaire.
00:42:46 Même si c'est vrai, ça ne dûte pas non plus d'il y a très longtemps.
00:42:48 [Musique]
00:42:50 Alors, c'est vrai qu'à l'époque, on parlait
00:43:02 moins d'énergie, d'écologie,
00:43:04 de réchauffement climatique. On ne parlait pas
00:43:06 des modèles que ça impliquait à long terme,
00:43:08 on ne parlait moins des risques, on ne parlait pas
00:43:10 non plus des enjeux, on ne parlait pas de ce que ça
00:43:12 impliquait pour les générations à venir
00:43:14 ou pour les générations qui nous succéderont, nous.
00:43:16 Du coup, le moment est peut-être bien choisi pour faire
00:43:18 un petit rappel historique.
00:43:20 Dès la fin de la guerre,
00:43:26 plusieurs solutions pouvaient exister pour gérer les déchets nucléaires.
00:43:28 On avait notamment recours à l'immersion
00:43:30 en mer, totalement interdite depuis 1993.
00:43:32 Non loin de la Hague, à quelques
00:43:34 500 kilomètres à peine, on trouve d'ailleurs un site
00:43:36 marin où furent enfouis des déchets de faible et de moyenne
00:43:38 activité, mais aussi des munitions de guerre
00:43:40 et d'autres déchets toxiques. Et si on n'est pas
00:43:42 loin des côtes françaises, nous sommes en réalité
00:43:44 en territoire britannique. Ce sont alors surtout
00:43:46 des déchets belges et britanniques qui furent entreposés.
00:43:48 Dans les années 60, alors que la question
00:43:50 des déchets nucléaires nécessite que l'on y réponde par des
00:43:52 solutions pérennes, le commissariat
00:43:54 à l'énergie atomique, le CEA, crée une société
00:43:56 privée nommée Infratome, filiale
00:43:58 des mines de potasse d'Alsace, à qui est confiée
00:44:00 l'exploitation du site de stockage de la Manche, dont il est
00:44:02 décidé qu'il soit installé à la Hague.
00:44:04 Un emplacement qui ne respecterait d'ailleurs pas les
00:44:06 standards actuels, mais qui fut décidé en fonction des
00:44:08 disponibilités des terrains, des aspects géologiques
00:44:10 et hydrologiques locaux, et des avantages
00:44:12 stratégiques pour Infratome.
00:44:14 C'est le début du centre de stockage de la Manche,
00:44:16 le premier centre français
00:44:18 à être créé. Mais cette gestion privée
00:44:20 des déchets interroge, notamment en matière de
00:44:22 respect des normes et de transparence. De plus,
00:44:24 la chaîne de traitement des déchets à la Hague repose
00:44:26 à cette époque sur plusieurs acteurs différents,
00:44:28 privés et publics, ce qui complexifie
00:44:30 leur prise en charge. Les élus locaux manifestent
00:44:32 une vive opposition à ce projet, livrent leurs
00:44:34 inquiétudes et obtiennent même quelques garanties du
00:44:36 CEA qui s'engage à ne pas agrandir la
00:44:38 surface de terrain sur lequel sont entreposés les colis.
00:44:40 Durant les années qui suivent l'ouverture du site,
00:44:42 plusieurs dispositions législatives sont
00:44:44 prises afin de mieux cadrer la gestion et le
00:44:46 devenir de ces déchets. La loi du 15
00:44:48 juillet 1975 rend le producteur
00:44:50 seul responsable des déchets qu'il peut produire,
00:44:52 qu'il soit ou non radioactif,
00:44:54 c'est le principe du pollueur-payeur.
00:44:56 L'idée d'avoir un organisme unique
00:44:58 pour gérer le centre de stockage de la Manche
00:45:00 apparaît comme une nécessité de plus en plus grande,
00:45:02 en plus d'être un point de convergence
00:45:04 entre l'État, les élus locaux et les
00:45:06 opposants antinucléaires. Le CEA
00:45:08 reprend donc intégralement la gestion du site,
00:45:10 puis crée en 1979
00:45:12 l'ANDRA, dont la mission est de réfléchir
00:45:14 et dicter des directives quant à la gestion des
00:45:16 déchets nucléaires. Dès sa création, l'ANDRA
00:45:18 doit remettre tout le site de stockage en
00:45:20 conformité avec les nouvelles règles de sûreté et de
00:45:22 fonctionnement. Elle doit également reconstituer
00:45:24 toute une base de connaissances à partir des archives
00:45:26 laissées par les producteurs afin de
00:45:28 faire l'inventaire de ce qui est déjà stocké.
00:45:30 Certains colis ne respectant pas les normes
00:45:32 doivent également être listés, reconditionnés
00:45:34 ou évacués, même si, en pratique,
00:45:36 ça n'a été fait qu'exceptionnellement
00:45:38 en 1976, en 1982
00:45:40 et en 1983.
00:45:42 [Musique]
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00:45:50 [Musique]
00:45:52 Alors là, pour rentrer dans cette pièce,
00:45:54 on a franchi une porte blindée.
00:45:56 Visiblement, il fait plus frais qu'ailleurs.
00:45:58 Il a l'air d'avoir une atmosphère très contrôlée.
00:46:00 Alors effectivement, nous sommes dans les archives
00:46:02 du Centre de Stockage de la Manche.
00:46:04 Donc là, on va retrouver les archives
00:46:06 qui ont été dupliquées sur papier permanent
00:46:08 qui seront utilisées par
00:46:10 les personnes qui seront amenées à travailler
00:46:12 sur ce site d'ici quelques années.
00:46:14 Donc, on va contrôler ici
00:46:16 la température, on va
00:46:18 contrôler aussi le taux
00:46:20 d'hygrométrie, voilà, l'éclairage aussi.
00:46:22 Il faut savoir également qu'il y a
00:46:24 plusieurs fonds d'archives. Il y a
00:46:26 ce local sur site,
00:46:28 mais on a un second fonds aux archives
00:46:30 nationales de France.
00:46:32 Si le bâtiment ici prend feu,
00:46:34 admettons, je ne vous le souhaite pas, mais...
00:46:36 On ne le souhaite pas, mais s'il y avait quoi que ce soit,
00:46:38 effectivement, si le bâtiment prenait feu,
00:46:40 on aurait ce second fonds d'archives.
00:46:42 Et puis, je peux préciser aussi qu'en parallèle,
00:46:44 on a numérisé
00:46:46 les archives
00:46:48 du Centre de Stockage de la Manche.
00:46:50 La mémoire, elle est réglementée.
00:46:52 On a transmis aussi beaucoup de choses
00:46:54 à l'Autorité de Santé Nucléaire qui va apporter
00:46:56 un avis quant à cette mémoire. Donc, il y a d'abord
00:46:58 un dossier détaillé de mémoire.
00:47:00 Donc, ça concerne ces archives
00:47:02 qui, elles,
00:47:04 vont servir aux futurs exploitants,
00:47:06 donc aux personnes qui seront amenées à travailler
00:47:08 sur ce site dans les
00:47:10 années et siècles à venir.
00:47:12 Et puis, on a en parallèle un dossier
00:47:14 synthétique de mémoire. Donc, comme son nom l'indique,
00:47:16 c'est un résumé. Et cette mémoire,
00:47:18 elle sera destinée aux riverains,
00:47:20 aux populations locales. Et là,
00:47:22 elle sera diffusée dans différents lieux
00:47:24 publics, à savoir
00:47:26 les mairies, les offices notariés,
00:47:28 les archives départementales.
00:47:30 Une question qui me vient directement en tête, parce que moi, j'ai fait
00:47:32 de la linguistique historique, donc je sais que les langues évoluent.
00:47:34 Et comme vous parlez d'une durée de 300 ans et qu'il faut notamment
00:47:36 pouvoir assurer la mémoire, y compris des gens
00:47:38 qui exploiteront le site, est-ce qu'il est prévu
00:47:40 de remettre à jour ces documents, de les traduire ?
00:47:42 Est-ce qu'il y a des choses qui ont été prévues
00:47:44 de ce côté-là ? Alors, aujourd'hui, il n'y a pas de traduction
00:47:46 effective en tant que telle,
00:47:48 je dirais, mais c'est
00:47:50 quelque chose qui est en projet. Il y a des
00:47:52 études qui sont en cours aujourd'hui
00:47:54 quant à une traduction possible de
00:47:56 ces données. Donc là, je vais vous présenter
00:47:58 une boîte d'archives qui est
00:48:00 constituée également
00:48:02 à base de papier permanent.
00:48:04 Voilà. Donc là,
00:48:06 on va voir les caractéristiques
00:48:08 de ce papier. On l'a
00:48:10 choisi, pourquoi ? Parce que
00:48:12 il n'est pas acide, en fait, on va
00:48:14 dire. Il va d'autant
00:48:16 plus se conserver dans le temps. Donc là, vous avez
00:48:18 sur cette fiche d'information
00:48:20 toutes les
00:48:22 différentes caractéristiques. Je vais mettre
00:48:24 des gants. Les gants sont obligatoires
00:48:26 pour consulter les archives.
00:48:28 Donc là, en l'occurrence, on va avoir
00:48:30 des informations qui vont
00:48:34 concerner le suivi floristique de la couverture.
00:48:36 Donc, vous voyez, là, ça date de mars
00:48:38 2012, donc on a
00:48:40 plus de dix années.
00:48:42 Et ça concerne
00:48:44 les campagnes
00:48:46 qui ont été menées sur la couverture
00:48:48 à cette période-là. Et comme je le
00:48:50 disais précédemment,
00:48:52 mémoire détaillée
00:48:54 à destination des générations
00:48:56 et des exploitants futurs
00:48:58 sur le site.
00:49:00 En 1991,
00:49:06 le site entame sa phase de clôture en débutant
00:49:08 la couverture. Cette même année, par la loi
00:49:10 bataille du 30 décembre, l'Andra devient
00:49:12 un établissement public à caractère industriel et commercial.
00:49:14 Elle devient alors, dans le même temps,
00:49:16 totalement indépendante des producteurs d'énergie
00:49:18 nucléaire et du CEA, qui produisait par
00:49:20 ailleurs lui-même des déchets nucléaires pour ses activités
00:49:22 de recherche scientifique. Mais cette phase
00:49:24 de clôture ne plaît pas à tout le monde. Elle passe
00:49:26 pour une dissimulation des problèmes ou des manquements.
00:49:28 Suite à la sollicitation des écologistes,
00:49:30 la Cour d'appel de Caen fait interrompre
00:49:32 le recouvrement en 1995.
00:49:34 Et elle conclut que l'Andra remplit bien
00:49:36 sa mission et que la clôture est non seulement
00:49:38 nécessaire, mais elle aurait même dû débuter plus tôt,
00:49:40 alors que les déchets avaient pour certains passé
00:49:42 20 ans à l'air libre, exposés aux vents et aux
00:49:44 intempéries. Mais la commission explique aussi dans
00:49:46 son rapport, page 21, qu'il y a eu un défaut
00:49:48 d'information ou de consultation des populations
00:49:50 locales de l'Andra. Non pas par envie de
00:49:52 dissimuler une quelconque vérité, mais plutôt
00:49:54 par un défaut de transmission ou de vulgarisation.
00:49:56 Les informations étaient bien communiquées,
00:49:58 mais de manière très, voire
00:50:00 trop détaillée, pas toujours quand
00:50:02 la population le demandait, car pas toujours en droit
00:50:04 de le faire, et logiquement, un climat
00:50:06 de méfiance était installé. Afin
00:50:08 de tirer tout ça au clair, une commission indépendante,
00:50:10 la commission Turpin, est constituée.
00:50:12 La commission Turpin est un tournant
00:50:14 dans la gestion des déchets en France.
00:50:16 Outre la non-banalisation du site
00:50:18 et 300 ans de surveillance assurés au minimum,
00:50:20 on y propose également, dans son rapport, la création
00:50:22 d'une commission locale de surveillance réunissant
00:50:24 l'Andra, les représentants locaux
00:50:26 des ministères concernés, et les représentants
00:50:28 de la population locale, qui constitueraient
00:50:30 la moitié du total.
00:50:32 [Musique]
00:50:37 Alors, c'est quoi ces commissions locales
00:50:39 d'information ? Alors déjà, ces commissions
00:50:41 locales d'information, elles ont été
00:50:43 créées en 2008, et
00:50:45 elles émanent de la loi sur la transparence
00:50:47 nucléaire de 2006.
00:50:49 Elles ont pour but de
00:50:51 relayer l'information
00:50:53 qui concerne
00:50:55 les activités des installations nucléaires
00:50:57 locales. Et qui est-ce qu'on trouve dans ces
00:50:59 commissions locales d'information ? Alors déjà,
00:51:01 la commission locale d'information
00:51:03 est présidée par le
00:51:05 président du conseil départemental,
00:51:07 donc en l'occurrence de la Manche, et on va avoir
00:51:09 plusieurs collèges. Donc, un collège des
00:51:11 élus, un collège
00:51:13 des associations environnementales,
00:51:15 qu'elles soient pour ou contre le nucléaire,
00:51:17 un collège d'experts,
00:51:19 et un collège
00:51:21 qui représente
00:51:23 les syndicats.
00:51:25 Donc là, vous avez parlé d'associations pro-antinucléaires, mais est-ce qu'on va
00:51:27 trouver par exemple le CRILAN,
00:51:29 que je connais, qui est l'association locale peut-être
00:51:31 la plus connue antinucléaire,
00:51:33 ou Greenpeace, qui est plus connue nationalement ?
00:51:35 Effectivement, on va retrouver
00:51:37 des associations locales
00:51:39 comme le CRILAN, qui est le comité
00:51:41 de réflexion d'information et de lutte
00:51:43 antinucléaire. On a
00:51:45 aussi l'ACRO, qui est
00:51:47 basé près de Caen,
00:51:49 donc pas très loin.
00:51:51 C'est l'association pour le contrôle de la radioactivité
00:51:53 dans l'Ouest, et effectivement,
00:51:55 on a des représentants de Greenpeace
00:51:57 qui siègent aussi à la CLI.
00:51:59 Alors, attention, la CLI,
00:52:01 effectivement, elle a un rôle
00:52:03 auprès des populations locales, mais
00:52:05 ce n'est pas la même chose que l'émission
00:52:07 que peut avoir le groupe Mémoire. Le groupe Mémoire,
00:52:09 lui, il a été créé par
00:52:11 Landra en 2012,
00:52:13 et ses objectifs,
00:52:15 c'est de nous aider
00:52:17 à réfléchir collectivement
00:52:19 sur comment on va conserver
00:52:21 et transmettre la mémoire de ces sites
00:52:23 aux générations futures. Donc, voilà, ce sont
00:52:25 deux entités différentes,
00:52:27 mais qui peuvent, je dirais,
00:52:29 qui peuvent se compléter
00:52:31 parce que, par exemple, en CLI,
00:52:33 la CLI peut demander,
00:52:35 peut demander à Landra de présenter
00:52:37 les travaux en lien
00:52:39 avec la mémoire. Il y a même
00:52:41 une période où on nous a demandé de présenter
00:52:43 l'émission du groupe Mémoire.
00:52:45 Et le lien que
00:52:47 je ferai également, c'est que
00:52:49 dans cette CLI, on retrouve
00:52:51 des membres de la CLI qui sont également
00:52:53 membres de notre groupe Mémoire.
00:52:55 Mais ce sont vraiment, voilà, deux choses,
00:52:57 deux entités distinctes.
00:52:59 Et concernant la CLI, du coup, est-ce qu'elle a
00:53:01 un pouvoir de proposition, puisqu'elle peut
00:53:03 vous demander ? Alors, complètement.
00:53:05 La CLI, elle a
00:53:07 ce pouvoir de
00:53:09 de demander
00:53:11 des précisions sur des sujets, voire
00:53:13 de demander
00:53:15 à ce qu'il y ait des expertises qui soient menées.
00:53:17 Ça a été le cas, concernant
00:53:19 notre site, puisque en
00:53:21 2012, il y a eu une expertise qui a été faite sur
00:53:23 le tritium, et sur
00:53:25 le tritium qui
00:53:27 était mesuré dans la nappe phréatique,
00:53:29 donc sur le site et à l'extérieur du site. Et là,
00:53:31 suite à un cahier des charges qui avait
00:53:33 été établi par la CLI,
00:53:35 il s'est trouvé que c'est l'ACRO, dont
00:53:37 j'ai parlé plus avant,
00:53:39 qui a réalisé
00:53:41 cette expertise pour le compte de la CLI.
00:53:43 Et il y a eu tout un rapport qui a été
00:53:45 fait, et qui a été
00:53:47 présenté ensuite, lors d'une
00:53:49 assemblée générale en CLI.
00:53:51 Donc, elle a vraiment effectivement ce rôle
00:53:53 de demander
00:53:55 à tout moment des précisions
00:53:57 sur des sujets particuliers.
00:54:01 Alors bonjour, est-ce que je peux vous demander de vous présenter ?
00:54:03 Bonjour, je m'appelle
00:54:05 Jean-Pierre Dufresnoir, je suis
00:54:07 un ancien salarié
00:54:09 du groupe Arriva,
00:54:11 aujourd'hui Orano. Et vous êtes
00:54:13 actuellement membre du groupe Mémoire ?
00:54:15 Oui, j'ai intégré le groupe Mémoire en
00:54:17 2014.
00:54:19 Et vous êtes combien actuellement ? On est
00:54:21 environ une quinzaine de personnes,
00:54:23 et on se réunit pour discuter
00:54:25 de la transmission
00:54:27 du site
00:54:29 aux générations futures,
00:54:31 la mémoire du site.
00:54:33 Vous avez des exemples ? Déjà,
00:54:35 comment conserver
00:54:37 la masse documentaire qui était
00:54:39 présente, ou la stocker ?
00:54:41 Consulter les archives
00:54:43 du journal local, de
00:54:45 manière à y retrouver tous les articles
00:54:47 concernant le site de l'endroit,
00:54:49 et plus largement
00:54:51 de la filière nucléaire dans la région.
00:54:53 Et puis, on a numérisé
00:54:55 tout ce qui concernait
00:54:57 l'industrie nucléaire
00:54:59 jusqu'à
00:55:01 l'arrivée de l'endroit.
00:55:03 Dans ce groupe Mémoire, vous êtes tous
00:55:05 ce que vous disiez, que vous veniez
00:55:07 vous de la filière nucléaire, visiblement.
00:55:09 Vous êtes tous des gens liés au nucléaire d'avant ?
00:55:11 Non, pas forcément.
00:55:13 On a eu des gens qui venaient d'horizons différents,
00:55:15 qui ne
00:55:17 connaissaient pas le nucléaire. Donc c'était vraiment
00:55:19 intéressé par la mémoire ? Oui.
00:55:21 Et le fait d'associer des gens qui n'ont pas
00:55:23 de connaissances nucléaires,
00:55:25 contribue peut-être à diffuser
00:55:27 plus largement
00:55:29 l'information. Quand on parle de l'endroit,
00:55:31 il y a une majorité de gens
00:55:33 qui ne connaissent pas. Peut-être qu'il n'y a
00:55:35 pas assez
00:55:37 de publicité, ou les gens
00:55:39 n'accrochent pas à la publicité
00:55:41 qui pourrait être faite.
00:55:43 Donc il y a encore un défaut d'information
00:55:45 quelque part ?
00:55:47 Ou en tout cas un besoin de continuer, de peut-être plus s'informer ?
00:55:49 Peut-être, oui.
00:55:51 C'est difficile de parler de mémoire
00:55:53 parce qu'il y a une notion de long terme
00:55:55 que les gens doivent aussi
00:55:59 acquérir.
00:56:01 Est-ce que c'est un problème, ça, vraiment ?
00:56:03 Disons que
00:56:05 si on ne dit pas que
00:56:07 dans
00:56:09 des dizaines, des centaines
00:56:11 d'années, le site restera
00:56:13 quand même
00:56:15 inaccessible,
00:56:17 il faut que les gens le comprennent, ça.
00:56:19 Et pourquoi ?
00:56:21 En partenariat
00:56:23 avec un institut de sondage chaque année,
00:56:25 des enquêtes sont effectuées auprès de la population pour savoir
00:56:27 quel est leur retour ou leur perception
00:56:29 des activités de l'endroit.
00:56:31 Paradoxalement, la population à moins de 15 km
00:56:33 de Cigeo en Meuse-Haute-Marne fait confiance
00:56:35 à 80% à l'endroit pour la gestion
00:56:37 des déchets, alors que ce chiffre chute
00:56:39 à 66% pour la population située
00:56:41 à plus de 30 km. Dans le cas du centre
00:56:43 de stockage de la Manche de la Hague,
00:56:45 la population à moins de 15 km du site montre un indice
00:56:47 de confiance de 85%,
00:56:49 tandis que la population située à plus de 30 km
00:56:51 montre un indice de confiance de 75%.
00:56:53 Conclusion, plus les personnes
00:56:55 sont proches du site, et moins elles sont inquiètes
00:56:57 de sa présence. Alors avant de repartir
00:56:59 chez moi, tout ça m'a inspiré de nouvelles questions
00:57:01 et nous sommes retournés, une dernière fois,
00:57:03 sur le tumulus. Il me restait des questions
00:57:05 et c'était l'occasion de les poser, notamment concernant
00:57:07 le futur du site, sa surveillance, sa transparence
00:57:09 ou sa pérennité. Donc aujourd'hui en France
00:57:11 on a quand même pas mal de banques nucléaires,
00:57:13 des gens qui ont peur,
00:57:15 qui militent contre le nucléaire.
00:57:17 Si demain, je sais pas, on avait un mouvement
00:57:19 très très anti-nucléaire qui arrivait au pouvoir et qui disait
00:57:21 "Bon bah maintenant c'est fini le nucléaire en France, c'est fini le nucléaire
00:57:23 civil, on arrête les centrales nucléaires",
00:57:25 qu'est-ce que ça changerait pour vous ? Est-ce que vraiment ça aurait
00:57:27 un impact ? Nous sur ce centre-là,
00:57:29 pas directement, parce qu'il est fermé,
00:57:31 on ne reçoit plus de colis. Si on
00:57:33 arrête toutes les centrales aujourd'hui, on aura
00:57:35 quand même le démantèlement à faire, on aura quand même les
00:57:37 combustibles usagés à traiter ou à
00:57:39 gérer. Mais par contre, si
00:57:41 on fait un stop en 2025,
00:57:43 tout ce qui aurait été
00:57:45 produit après 2025 ne serait plus à
00:57:47 prendre en charge ou à gérer. En fait, ça réduirait
00:57:49 l'inventaire pour l'Andra, mais fondamentalement,
00:57:51 on aurait quand même des choses,
00:57:53 beaucoup de volume à gérer
00:57:55 sur l'existant. Typiquement, le démantèlement
00:57:57 des réacteurs, le démantèlement des usines
00:57:59 seraient toutes,
00:58:01 encore à gérer dans cette
00:58:03 situation. A l'Andra, on parle des grands
00:58:05 producteurs, donc EDF, Orano,
00:58:07 CEA, qui sont les principaux
00:58:09 "fournisseurs" de déchets radioactifs,
00:58:11 mais après on a plus de 1000 petits
00:58:13 producteurs, que sont les hôpitaux,
00:58:15 les industries, notamment
00:58:17 ceux qui réalisent des
00:58:19 gamagraphies, des choses
00:58:21 comme ça, ont des sources, ont des
00:58:23 déchets radioactifs, et ça aussi, ça fait partie de l'activité
00:58:25 de l'Andra, de récupérer ces déchets pour les
00:58:27 gérer. Si par contre, demain, on disait
00:58:29 "ouais, bon, c'est bien, c'est pas tout ça, mais l'Andra,
00:58:31 c'est fini, on coupe les financements,
00:58:33 on n'a plus besoin de vous", ce serait potentiellement dangereux
00:58:35 d'abandonner ?
00:58:37 Aujourd'hui, ce serait dangereux de l'abandonner,
00:58:39 parce que typiquement, on laisse l'accès à n'importe qui
00:58:41 sur ce site qui vient s'installer, creuser dans le
00:58:43 sous-sol, clairement, c'est des déchets radioactifs, c'est des déchets
00:58:45 dangereux, donc aujourd'hui, ce serait pas
00:58:47 viable de laisser ce site à l'abandon
00:58:49 et de s'installer, enfin d'aller
00:58:51 creuser un parking sur cette installation,
00:58:53 par exemple. Concrètement, comment ça se passe ?
00:58:55 Comment vous le mesurez, en fait, tout ce que vous relâchez,
00:58:57 ce qui pourrait se passer ici ?
00:58:59 Bah typiquement, sur nos réseaux défluants,
00:59:01 donc on rejette
00:59:03 l'eau de pluie qu'on récupère ici
00:59:05 vers un réseau pluvial, donc celui-ci est contrôlé,
00:59:07 sur ce site, on récolte les eaux
00:59:09 qui ont été marquées par l'activité
00:59:11 du site, en périphérie du
00:59:13 stockage, et celles-ci sont
00:59:15 traitées spécifiquement
00:59:17 parce qu'elles sont envoyées chez Orano et rejetées en mer,
00:59:19 donc on suit ces réseaux, en premier lieu, et après
00:59:21 on suit aussi l'environnement. On a un réseau de piézomètres
00:59:23 qui sont installés tout autour du site
00:59:25 et principalement au nord,
00:59:27 puisque c'est l'aval hydraulique du site,
00:59:29 et donc là, on va suivre les eaux
00:59:31 souterraines, donc vérifier que ce qui est en amont
00:59:33 n'est pas marqué, ce qui est autour du site
00:59:35 peut être marqué, mais reste dans les
00:59:37 limites de ce que l'on
00:59:39 a démontré, et suivre
00:59:41 ensuite ce qui s'écoule
00:59:43 depuis la nappe sous le site, et les écoulements
00:59:45 issus du site, dans le réseau
00:59:47 de piézomètres, dans les ruisseaux
00:59:49 qui sont au nombre de trois
00:59:51 à proximité de l'installation. - Et est-ce que sur
00:59:53 la couverture elle-même, sur la flore
00:59:55 qu'on voit autour de nous, sur les plantes, est-ce que vous faites aussi
00:59:57 du contrôle, est-ce qu'il y a quelque chose qui permet quand même de contrôler
00:59:59 s'il y a un impact sur la nature ? - Oui,
01:00:01 on fait des prélèvements de végétaux
01:00:03 régulièrement, donc on prélève sur
01:00:05 une surface donnée
01:00:07 des végétaux pour aller contrôler ce qui est
01:00:09 présent dedans. On a aussi du contrôle
01:00:11 sur des poussières atmosphériques, et les
01:00:13 contrôles de l'air, donc on va aller mesurer
01:00:15 l'eutritium, et ensuite
01:00:17 sur les poussières, les contaminants éventuels
01:00:19 alpha ou bêta global,
01:00:21 qui pourraient être amenés par le site. Alors aujourd'hui, le site n'a
01:00:23 pas d'exutoire direct de rejet
01:00:25 atmosphérique, c'est plus du rejet diffus,
01:00:27 donc on va mesurer
01:00:29 notre rejet diffus, et aussi
01:00:31 on capte le rejet de
01:00:33 notre voisin, principalement, parce qu'il y a des autorisations de rejet
01:00:35 quand même un peu plus élevées que
01:00:37 ce qu'on peut avoir. - Donc, si je comprends bien,
01:00:39 c'est qu'ici, en contrôlant ce que vous faites ici,
01:00:41 vous arrivez à savoir ce que font vos voisins ?
01:00:43 - On arrive à, ouais, on voit ce que font nos voisins,
01:00:45 ouais. En fait, on fait aussi pas mal de contrôles
01:00:47 croisés, parce que nous, on va
01:00:49 aller prélever dans les piézomètres
01:00:51 que gèrent au rhano,
01:00:53 eux vont nous demander aussi nos résultats,
01:00:55 justement en termes de comparaison, et pour
01:00:57 augmenter le panel de mesures,
01:00:59 et de résultats qu'on peut avoir. - Est-ce que
01:01:01 le fait de contrôler la nature,
01:01:03 les plantes, la biodiversité, ici, ça vous a permis
01:01:05 quand même de découvrir des choses qui n'ont pas forcément
01:01:07 de rapport avec, je sais pas, des nouvelles
01:01:09 espèces, des évolutions,
01:01:11 enfin un impact sur la biodiversité qui pourrait être aussi un impact
01:01:13 disons positif, hein ?
01:01:15 Je sais pas si c'est le mot adéquat.
01:01:17 - Positif ? Je saurais
01:01:19 pas dire si on a un impact positif.
01:01:21 On n'a pas d'impact négatif, en tout cas,
01:01:23 aujourd'hui prouvé, et donc on a découvert que
01:01:25 finalement, de laisser ce site,
01:01:27 enfin, aujourd'hui, en surveillance, sans
01:01:29 activités, hormis de la tonte
01:01:31 régulière, on a des espèces protégées
01:01:33 qui sont installées, au début c'était que de l'herbe, et ça évolue
01:01:35 en fait dans le temps, et c'est quelque chose que l'on
01:01:37 suit aussi pour le très long terme,
01:01:39 on a notamment découvert des espèces protégées
01:01:41 qui sont installées sur le site.
01:01:43 Vous l'aurez compris,
01:01:55 notre exigence en matière d'information ou de transparence
01:01:57 envers la filière en charge de gérer les déchets
01:01:59 nucléaires est très haute.
01:02:01 C'est d'ailleurs, on peut le dire, la filière industrielle
01:02:03 où on trouve le plus haut niveau d'exigence.
01:02:05 Ces exigences, elles conduisent
01:02:07 à une production titanesque d'informations.
01:02:09 Et ça, je vous l'assure,
01:02:11 je l'ai bien vu en préparant cette vidéo.
01:02:13 Des centaines de milliers de pages archivées,
01:02:15 des supports ou des maquettes,
01:02:17 des données qui concernent les déchets mais aussi le site,
01:02:19 son évolution, aussi bien sur le plan
01:02:21 de la sécurité que de sa conception, de la nature
01:02:23 qui l'entoure par des centaines de
01:02:25 données qui sont relevées sur le terrain, dans les forêts,
01:02:27 dans les ruisseaux, en sous-sol.
01:02:29 Il y a de quoi se sentir écrasé, se sentir perdu.
01:02:31 Et en même temps, en tant que citoyen
01:02:33 qui ne travaille pas dans cette filière,
01:02:35 il y a de quoi avoir l'impression de ne pas savoir
01:02:37 par quel bout commencer lorsqu'on s'y intéresse.
01:02:39 Toutes ces informations, on doit en assurer le stockage
01:02:41 et la transmission dans le futur autant que faire se peut.
01:02:43 Et sans garantie qu'on puisse y arriver,
01:02:45 comme nous l'avons déjà évoqué.
01:02:47 Mais au moins, à ce stade, j'ai pu me rendre compte
01:02:49 que la question de la mémoire est complexe parce qu'il n'existe pas
01:02:51 qu'une seule mémoire.
01:02:53 Chacune des mémoires a une fonction spécifique.
01:02:55 On va donc trouver une mémoire axée sur le fonctionnement même
01:02:57 du site, son historique, afin qu'un éventuel
01:02:59 nouvel exploitant futur puisse avoir
01:03:01 toutes les clés en main pour continuer sa mission de surveillance.
01:03:03 On va avoir une mémoire générale, synthétique,
01:03:05 afin d'informer dans les grandes lignes le maximum de personnes.
01:03:07 Et on pourrait même l'opposer à une mémoire
01:03:09 qui serait plus locale, dont on a parlé
01:03:11 juste avant et qui repose en partie sur l'implication
01:03:13 directe des riverains.
01:03:15 Et pour finir, on va également trouver une mémoire à destination
01:03:17 du futur lointain, très lointain, qui occupe
01:03:19 en ce moment même des artistes, des groupes de réflexion
01:03:21 ou des scientifiques. Ce type de mémoire
01:03:23 occupe souvent tous les doutes et toutes les intentions,
01:03:25 et c'est même ce par quoi j'ai commencé cette vidéo.
01:03:27 Et d'ailleurs, à la base, je comptais m'y cantonner,
01:03:29 comme si ça suffisait pour englober tout le sujet.
01:03:31 Mon plan était alors le suivant,
01:03:33 évoquer grossièrement ce qu'est la mémoire collective,
01:03:35 comment la mettre en place en citant quelques
01:03:37 exemples comparatifs à travers l'histoire,
01:03:39 et apporter moi-même quelques pistes en tant que
01:03:41 vulgarisateur ayant étudié la linguistique.
01:03:43 Mais voilà ! Comme souvent, lorsque l'on
01:03:45 écrit une vidéo, notre point de départ ne mène
01:03:47 pas au cheminement que l'on imaginait à l'origine.
01:03:49 Et dans mon cas, ce cheminement est constitué
01:03:51 de plusieurs réflexions, de plusieurs questionnements
01:03:53 qui ne visent pas cette date de 300 ou de 500 ans
01:03:55 dans le futur. Ils concernent le présent,
01:03:57 notre société actuelle,
01:03:59 qui est finalement la fondation sur laquelle la mémoire
01:04:01 future sera construite.
01:04:03 Une question assez simple que je me pose actuellement,
01:04:05 par exemple, c'est comment garantir
01:04:07 que l'on puisse transmettre au futur un message
01:04:09 qui peine déjà à s'imposer dans le présent.
01:04:11 Parce que tout le monde aujourd'hui est censé avoir
01:04:13 son avis plus ou moins éclairé sur le nucléaire, ses déchets,
01:04:15 leur avenir. C'est un thème de plus en plus prégnant
01:04:17 dans le débat politique, dans le débat écologique,
01:04:19 et c'est l'un des plus clivants. Mais c'est
01:04:21 un sujet sur lequel les gens sont en réalité
01:04:23 très peu armés. La différence entre une centrale
01:04:25 et un déchet, le fonctionnement de la radioactivité,
01:04:27 quel risque réel représente une dose,
01:04:29 ces questions sont pour la majeure partie de la population
01:04:31 sans réponse. De fait, la population
01:04:33 n'a d'autre choix que d'avoir confiance
01:04:35 sur la question du nucléaire. Et cette confiance ne porte
01:04:37 même pas tant sur les données brutes que produit l'Andra
01:04:39 que sur l'interprétation de ces données.
01:04:41 Alors cette confiance, elle peut être placée dans l'Andra
01:04:43 ou dans l'industrie nucléaire elle-même,
01:04:45 elle peut aussi l'être chez des scientifiques ou chez des ingénieurs
01:04:47 du milieu, mais elle l'est aussi souvent
01:04:49 davantage chez les politiques, chez des journalistes
01:04:51 ou chez des militants qui se sont apparés de la question
01:04:53 pour défendre ou pour combattre l'énergie atomique.
01:04:55 Il se trouve que dans les sondages
01:04:57 réalisés autour des installations de l'Andra,
01:04:59 dans les zones des 15 premiers kilomètres,
01:05:01 4 personnes sur 5 ont une assez bonne confiance
01:05:03 dans les informations qui leur sont communiquées.
01:05:05 Cette confiance est déplacée dans les élus locaux,
01:05:07 dans l'Andra elle-même ou même dans la commission locale
01:05:09 d'information. Au-delà des 30 kilomètres, en revanche,
01:05:11 la confiance recule. Seule 1
01:05:13 personne sur 2 y considère que l'Andra
01:05:15 communique clairement sur ses activités.
01:05:17 Cette situation a de nombreuses explications.
01:05:19 Mais pour rester sur le sujet de la mémoire
01:05:21 et donc sur la transmission de l'information, on pourrait
01:05:23 notamment avancer que si des tonnes de données sont
01:05:25 produites par l'Andra, par le CEA
01:05:27 et même par les commissions indépendantes qui viennent
01:05:29 en contrôler le travail, ce ne sont pas des
01:05:31 acteurs médiatiques importants en dehors des zones
01:05:33 géographiques où ils opèrent. Les informations
01:05:35 qu'ils livrent à l'échelle nationale ne se confrontent alors pas
01:05:37 à d'autres faits, mais à d'autres récits,
01:05:39 plus massivement diffusés où le rapport de force est
01:05:41 différent. Ce que cela veut aussi dire,
01:05:43 c'est qu'à la mémoire que l'Andra vise à constituer
01:05:45 et à transmettre s'oppose aussi d'autres mémoires
01:05:47 qui se constituent ailleurs, parfois en dehors
01:05:49 de tout contrôle institutionnel ou scientifique.
01:05:51 Et quelque part, je suis moi-même
01:05:53 né dans cette autre mémoire.
01:05:55 J'étais dans un rayon situé de 50 à 100
01:05:57 kilomètres autour du futur centre de stockage
01:05:59 de Meuse-Haute-Marne, et le récit autour de ce projet
01:06:01 était alors chez moi basé sur des rumeurs
01:06:03 et des peurs. Pour d'autres, elle sera basée
01:06:05 sur une histoire personnelle, une méfiance profonde
01:06:07 envers les discours du officiel, ou tout
01:06:09 simplement sur un autre choix de société. Bref,
01:06:11 tout ça pour dire que la transmission de l'information
01:06:13 à destination du futur passe évidemment
01:06:15 par la bonne transmission de l'information aujourd'hui,
01:06:17 par sa bonne compréhension, par la population
01:06:19 locale qui peut alors, en tout état de
01:06:21 cause, en cohérence avec ses envies,
01:06:23 avec ses projets ou ses idéaux de société,
01:06:25 se forger un avis propre sur la question des déchets
01:06:27 nucléaires. Car après tout, dans un monde
01:06:29 où tout le monde serait armé intellectuellement sur tous les
01:06:31 sujets, la seule production de données suffirait.
01:06:33 Mais voilà, un tel monde n'existera
01:06:35 probablement jamais. Tout le monde ne peut
01:06:37 pas être informé de tout, tout le temps,
01:06:39 sur tous les sujets, même les plus importants.
01:06:41 Et ce qui provoque le plus de discussions,
01:06:43 ce qui occupe le plus les débats ou les espaces
01:06:45 médiatiques, c'est souvent ce qui retient le plus
01:06:47 l'attention, au détriment du reste. Et l'exemple des déchets
01:06:49 nucléaires est, ma foi, en France assez symptomatique
01:06:51 de ce que je viens de décrire. Parce qu'ils alimentent toutes les
01:06:53 peurs, alors qu'en France, aujourd'hui, le principal risque
01:06:55 de décès ou de maladies induites par une
01:06:57 exposition à la radioactivité, ce n'est pas
01:06:59 celui que l'on croit.
01:07:00 J'ai eu beau me rendre au laboratoire souterrain
01:07:02 de Meuse-Haute-Marne, j'ai eu beau me rendre au centre
01:07:04 de stockage de la Manche, c'est en rentrant chez moi
01:07:06 que je me suis le plus exposé à la radioactivité
01:07:08 et aux risques que cela comporte.
01:07:10 Alors il y a évidemment le soleil, l'avion
01:07:12 ou les radios médicales qui représentent de bonnes sources
01:07:14 de rayonnement, mais il y a également une autre source
01:07:16 dont je n'avais jamais entendu parler avant
01:07:18 de préparer cette vidéo. Et cette source,
01:07:20 elle est même naturelle.
01:07:22 Je l'ai appris récemment, en emménageant
01:07:24 puis en achetant une maison en Bretagne.
01:07:26 C'est une obligation légale, le notaire doit vous informer
01:07:28 lors de la lecture du compromis des zones
01:07:30 à risque dans lesquelles vous vous trouvez, et donc
01:07:32 j'ai appris que je me situais en zone où le potentiel radon
01:07:34 est de catégorie 3, la plus haute
01:07:36 dans le système de catégorie en France.
01:07:38 Alors débutait pour moi une quête des informations
01:07:40 sur ce qu'est le radon, comment il fonctionne
01:07:42 et ce que ce risque représente.
01:07:44 Le radon, c'est un gaz radioactif
01:07:46 naturel qui en tant que tel n'est pas particulièrement
01:07:48 dangereux. Et voilà, comme tous les atomes
01:07:50 radioactifs, ils se désintègrent.
01:07:52 Par exemple, le radon 222 se désintègre
01:07:54 en polonium 218, qui lui-même
01:07:56 donne du plomb 214,
01:07:58 puis du bismuth 214, du polonium
01:08:00 214 et finalement du plomb
01:08:02 210. Ces derniers peuvent pénétrer
01:08:04 dans les voies respiratoires, se fixer
01:08:06 dans le poumon et poursuivent là, tranquillement,
01:08:08 leur cycle de désintégration en devenant du bismuth
01:08:10 210, du polonium 210
01:08:12 et puis du plomb 216.
01:08:14 Chaque désintégration émet alors un rayonnement
01:08:16 alpha ou bêta qui
01:08:18 irradie les tissus voisins. Pour ces raisons,
01:08:20 le radon est un cancérigène certain.
01:08:22 Après la cigarette, ce serait même la
01:08:24 première cause de décès par cancer
01:08:26 du poumon en France. Et ce radon,
01:08:28 on le trouve surtout dans les régions dites "uranifères",
01:08:30 c'est-à-dire où l'on trouve le plus d'uranium,
01:08:32 puisque le radon se forme par la désintégration
01:08:34 d'un autre atome, le radium,
01:08:36 qui se trouve lui-même dans la chaîne de désintégration
01:08:38 de l'uranium. Or, cet uranium,
01:08:40 le même qui est à la base de nos centrales nucléaires,
01:08:42 se trouve dans la roche et notamment dans les régions
01:08:44 volcaniques à Fortonheur en granit.
01:08:46 Alors, la Bretagne en fait partie, mais aussi le Limousin
01:08:48 et plus généralement le Massif Central.
01:08:50 Et c'est pour cela que l'on y trouvait d'ailleurs les
01:08:52 mines d'uranium françaises qui ont été exploitées jusqu'à
01:08:54 dans les années 2000. Le radon est donc un gaz
01:08:56 radioactif émis par la roche elle-même, celle qui
01:08:58 constitue nos dallages ou nos voiries,
01:09:00 mais surtout, dans les régions que j'ai citées,
01:09:02 nos maisons et les murs
01:09:04 de nos caves. Et c'est pour cela qu'il est très
01:09:06 important d'aller chercher soi et en particulier
01:09:08 les sous-sols. Bien que ce soit le plus gros danger
01:09:10 radioactif auquel la population française est exposée,
01:09:12 et bien que ce danger soit quotidien
01:09:14 et nécessite d'être informé, il est très
01:09:16 largement ignoré ou sous-estimé.
01:09:18 Seuls 2 Français sur 10
01:09:20 savent ce qu'est le radon et ce à quoi
01:09:22 il expose. Parmi les risques perçus comme
01:09:24 étant les moins élevés par les Français, selon le
01:09:26 baromètre IRSN de 2020, on trouve
01:09:28 précisément le radon et les accidents
01:09:30 de radiothérapie médicales
01:09:32 qui sont pourtant ceux qui exposent le plus la
01:09:34 population à la radioactivité. Les centrales
01:09:36 nucléaires et les déchets radioactifs inquiètent
01:09:38 paradoxalement beaucoup plus.
01:09:40 Alors évidemment, on pourrait se dire que Fukushima et Tchernobyl
01:09:42 n'y sont pas pour rien. Ce sont des accidents impressionnants
01:09:44 qui ont marqué l'histoire. Mais en lisant
01:09:46 cette enquête de l'IRSN sur la perception des risques,
01:09:48 j'ai été étonné de voir que l'explosion de l'usine
01:09:50 Lubrizol fin 2019 n'a pas particulièrement
01:09:52 augmenté la peur des accidents industriels
01:09:54 chez les Français, qui demeurent toujours plus
01:09:56 basses que la peur de déchets nucléaires. Et c'est
01:09:58 alors qu'à ce moment-là, je me suis rappelé de la signature
01:10:00 de notre compromis de vente, où, chez le notaire,
01:10:02 j'achetais ma maison en
01:10:04 Bretagne. Il se trouve que, et je
01:10:06 m'en suis sauvenu au moment d'écrire cette vidéo,
01:10:08 je suis situé à quelques kilomètres à peine
01:10:10 d'une usine Cébézo, sans
01:10:12 savoir ce dont il s'agit réellement.
01:10:14 Si, comme moi, vous ignoriez de quoi il s'agit, eh bien
01:10:16 voici la réponse. Un site classé Cébézo
01:10:18 est un établissement qui présente des risques
01:10:20 d'accidents majeurs résultant de la fabrication,
01:10:22 de la manipulation, du stockage
01:10:24 ou de l'utilisation de substances
01:10:26 dangereuses. Ce nom vient d'une catastrophe
01:10:28 industrielle italienne, ayant conduit
01:10:30 à une série de directives européennes
01:10:32 pour encadrer ces établissements. La France
01:10:34 a elle-même connu quelques accidents industriels au cours
01:10:36 des 20 dernières années, le plus connu étant
01:10:38 probablement l'explosion de l'usine AZF
01:10:40 de Toulouse en 2001. La peur
01:10:42 serait finalement plus associée à la médiatisation
01:10:44 qu'à un risque réel. Et ça, ce que je décris,
01:10:46 c'est un phénomène que le secteur aérien connaît bien,
01:10:48 puisque si les accidents sont rarissimes,
01:10:50 ils sont très impressionnants et fortement médiatisés.
01:10:52 Les accidents de voiture ou de vélo,
01:10:54 qui sont plus courants et pour lesquels le risque de décès
01:10:56 par kilomètre ou par heure de trajet parcouru
01:10:58 est bien plus haut, n'inquiètent pas autant.
01:11:00 Et ça, justement, eh bien ça me rappelle une question
01:11:02 que j'avais posée lors de ma visite du site de la Manche.
01:11:04 Est-ce que...
01:11:06 Est-ce que c'est pas la peur du nucléaire, quelque part,
01:11:08 qui a conduit à ce qu'il y ait autant de règles,
01:11:10 autant de contrôles, et...
01:11:12 d'avoir un débat qui reste toujours
01:11:14 vif et très ouvert sur la question des déchets nucléaires ?
01:11:16 La peur a certainement alimenté une part
01:11:18 de la réglementation, mais c'est pas le fondement.
01:11:20 Clairement, le fondement de l'évolution de la réglementation
01:11:22 sur le nucléaire, c'est un peu comme dans toute industrie.
01:11:24 Et aujourd'hui, ces dernières années,
01:11:26 notamment, on le voit avec l'amiante, avec le pétrole,
01:11:28 avec tout un tas de produits chimiques.
01:11:30 La réglementation empile
01:11:32 un tout un tas de choses dessus, parce qu'en fait,
01:11:34 c'est le retour d'expérience sur l'usage
01:11:36 du nucléaire, de l'amiante,
01:11:38 de toutes les matières qui peuvent
01:11:40 être nocives pour l'homme et l'environnement,
01:11:42 qui apportent de la réglementation.
01:11:44 Le nucléaire en particulier, parce que ça vient
01:11:46 clairement, ça vient des bombes,
01:11:48 Hiroshima, Nagasaki,
01:11:50 tout le développement et la peur qui a suivi derrière.
01:11:52 Donc ça a certainement pu contraindre
01:11:54 aussi certaines choses. Mais clairement, on le voit
01:11:56 avec ce site-là, la réglementation
01:11:58 s'est faite avec l'usage et le retour d'expérience
01:12:00 des installations, que ce soit
01:12:02 les nôtres ou les usines.
01:12:04 Cette réglementation, notamment sur
01:12:06 la mémoire, sur la contrainte
01:12:08 de conserver un site comme ça
01:12:10 300 ans, est-ce que
01:12:12 c'est pas quelque chose qui contribue aussi
01:12:14 peut-être à faire avancer la recherche du côté
01:12:16 de la mémoire, du côté
01:12:18 même de la recherche ? - Alors ça peut
01:12:20 amener beaucoup de sujets de recherche.
01:12:22 Il y a des thèses, il y a des développements.
01:12:24 Au sein de l'ANDRA, on a des équipes qui travaillent
01:12:26 réellement, directement sur la mémoire, puisque garder en
01:12:28 surveillance un site pendant 300 ans ou plus,
01:12:30 garder la mémoire de ce qui s'est passé pendant l'exploitation
01:12:32 et ensuite dans la
01:12:34 phase de surveillance, c'est un sujet
01:12:36 qui aujourd'hui n'est pas totalement ficelé,
01:12:38 défini. Donc ça passe par des équipes ANDRA qui travaillent
01:12:40 dessus, des groupes mémoires aussi qui sont avec,
01:12:42 des personnes qui ont vécu autour de ces sites et qui peuvent
01:12:44 amener beaucoup sur les développements,
01:12:46 les réflexions et éventuellement les développements
01:12:48 technologiques ou de recherche sur ces sujets.
01:12:50 Avant de conclure cette
01:12:52 vidéo, je me suis quand même demandé justement comment
01:12:54 on faisait pour assurer la mémoire de la présence
01:12:56 des autres déchets en France. Et je me suis souvenu
01:12:58 par exemple que dans mon village, lorsque j'étais jeune,
01:13:00 il existait un champ, contre-haut, vers le cimetière
01:13:02 qui faisait office de décharge. Il fallait alors
01:13:04 aller choper la clé à la mairie et chacun pouvait
01:13:06 s'y défaire de tous ses déchets verts et inertes.
01:13:08 Mais vu que la déchetterie existe à Chalendres, la ville d'à côté,
01:13:10 eh bien cette décharge a été abandonnée
01:13:12 il y a quelques années. Surprise, elle a été
01:13:14 réaménagée en parc.
01:13:16 Donc là on est dans l'ancienne décharge du village. Moi je me souviens
01:13:30 quand j'étais jeune, là c'était clôturé, il fallait rentrer
01:13:32 avec une clé, puis on venait jeter
01:13:34 des végétaux, de la pierre, des inertes,
01:13:36 ce genre de choses. Et là actuellement,
01:13:38 c'est tout beau, il y a du gazon,
01:13:40 il y a des arbres, il y a une petite aire de repos.
01:13:42 Alors, qu'est-ce qui s'est passé ? Où est-ce que tout
01:13:44 est passé ? Est-ce que ça a été déplacé ?
01:13:46 Depuis quand ça a été refait ?
01:13:48 Je n'ai pas de date en tête. J'habite ici depuis
01:13:50 1990. J'ai connu aussi
01:13:52 ce que tu viens de me dire, donc la clôture.
01:13:54 On allait chercher à la mairie
01:13:56 la clé du cadenas pour rentrer, mettre ses produits
01:13:58 inertes, c'est-à-dire de la terre, des végétaux, c'est tout.
01:14:00 Les anciens m'ont quand même dit que c'était une ancienne décharge
01:14:02 d'ordures ménagères. Elle a été recouverte
01:14:04 par la municipalité, c'était remise
01:14:06 à propre, des végétaux plantés,
01:14:08 suite aux nouvelles règles, maintenant,
01:14:10 les ordures ménagères, c'est un syndicat qui les ramasse.
01:14:12 Donc du coup, ça a été reterracé,
01:14:14 est-ce que ça a été déplacé, ou c'est en dessous
01:14:16 là actuellement ? Ah ben, à ma connaissance, tout est resté
01:14:18 en dessous. Donc là, on s'est... C'était remblayé simplement.
01:14:20 Ok. À part de la terre, suite à des travaux,
01:14:22 comme je te dis. Et c'est tout.
01:14:24 Et la commune a fait une petite aire d'invivialité,
01:14:26 a planté des arbres, mis un banc, tout ça.
01:14:28 Donc là, il y a peut-être des ordures ménagères,
01:14:30 puis en dessous, il y a peut-être aussi de l'amiante, du plomb, on sait pas ?
01:14:32 Je sais pas ce qu'il y a dessous. Je sais pas du tout,
01:14:34 j'ai aucune traçabilité. Donc il y a pas de...
01:14:36 Il y a pas à la mairie des archives
01:14:38 qui sont tenues par rapport à tout ça ?
01:14:40 Tout ça, tout ce que tu me racontes, c'est parce qu'en fait, c'est sa mémoire d'homme, quoi.
01:14:42 C'est sa mémoire d'homme, tout à fait. Les anciens
01:14:44 m'ont raconté, voilà. Et donc du coup, tu sais,
01:14:46 si t'as, en parlant avec d'autres gens, d'autres anciens
01:14:48 du village, s'il y a d'autres sites, d'autres décharges, d'autres endroits ?
01:14:50 Après les renseignements, oui, il y a eu une décharge
01:14:52 aussi, auparavant, encore avant celle-là.
01:14:54 Aujourd'hui, c'est un lagunage qui a été refait dessus.
01:14:56 Donc là, au bas du village ? Au bas du village, voilà.
01:14:58 C'est des bassins de rétention, maintenant ?
01:15:00 Voilà, c'est ça, oui, tout à fait, un lagunage, ouais. Et donc ça, tu l'as appris
01:15:02 en parlant avec les gens, quoi ? Je l'ai appris, voilà, en discutant dans le village.
01:15:04 C'est pas parce que t'es mère, t'aurais retrouvé des documents,
01:15:06 quoi que ce soit ? J'ai pas fouillé non plus, hein.
01:15:08 Ouais. Mais y'a aucun document. Petite anecdote, un jour, on a retrouvé un cheval,
01:15:10 mort, juste dans le talus, là, mais bon...
01:15:12 Et ça faisait partie des ordures, du coup ?
01:15:14 C'était un cadavre qui avait été mis là ?
01:15:16 C'était un cadavre, mais après les travaux,
01:15:18 après la terre, hein,
01:15:20 qui avait été remise en place, hein.
01:15:22 C'est un habitant du village qui a vu
01:15:24 un animal mort, là,
01:15:26 il était venu mourir là, après, voilà.
01:15:28 Alors qu'est-ce qu'il y a en dessous, je sais pas.
01:15:30 [musique]
01:15:44 La question des décharges locales ne sort pas de nulle part,
01:15:46 car régulièrement, dans la presse, on a des informations
01:15:48 comme celle-ci. Elle achète une maison
01:15:50 et en creusant, elle découvre une décharge dans son jardin,
01:15:52 ou alors, il achète un terrain en vue de construire une maison
01:15:54 et il découvre une décharge publique.
01:15:56 [musique]
01:16:04 Parfois, les sites ne sont pourtant pas vieux,
01:16:06 une cinquantaine d'années à peine,
01:16:08 mais cinquante années qui suffisent à la collectivité
01:16:10 et aux riverains pour oublier qu'à tel endroit
01:16:12 se trouvait le dépotoir du village,
01:16:14 dont personne ne s'est jamais soucié de la pollution induite
01:16:16 ou des risques induits sur la population locale.
01:16:18 Là, je suis chez des amis
01:16:20 qui ont acheté ce terrain, qui ont acheté ce domaine,
01:16:22 et en creusant, ils se sont rendus compte que
01:16:24 l'intégralité de leur terrain,
01:16:26 l'intégralité de leur bois,
01:16:28 était couvert par cette bâche noire.
01:16:30 [musique]
01:16:36 Si les décharges locales sont souvent assez
01:16:38 peu étendues et représentent en réalité un faible risque
01:16:40 de pollution, le défaut d'informations
01:16:42 ou de mémoire est pourtant bien présent.
01:16:44 Il l'est également d'une manière générale sur les quelques
01:16:46 250 sites en France qui servent encore
01:16:48 de décharges ordures ménagères, ou encore
01:16:50 sur les sites de traitement ou de tri de déchets.
01:16:52 Pourtant, les désagréments qu'elles provoquent sont là aussi
01:16:54 de long terme. Le grand public les redécouvre
01:16:56 parfois, comme quand des incendies s'y déclarent,
01:16:58 et ils durent plusieurs jours, polluant l'air
01:17:00 et le site. Par ailleurs, en France,
01:17:02 la gestion des déchets ultimes, qui représente un risque
01:17:04 durable d'un point de vue sanitaire ou environnemental,
01:17:06 est assez peu connue du grand public
01:17:08 si on met les déchets nucléaires de côté.
01:17:10 La gestion de l'amiante, de l'arsenic, des pesticides,
01:17:12 des déchets à base de plomb, de chrome, de mercure,
01:17:14 ou plus généralement des éléments toxiques et mutagènes,
01:17:16 ce n'est pas vraiment un sujet de société.
01:17:18 Et pourtant, certains de ces déchets
01:17:20 ont une durée de vie potentiellement plus longue que celle du soleil
01:17:22 lui-même, et leur toxicité ne décroît
01:17:24 pas avec le temps. On trouve de tels
01:17:26 déchets, par exemple, sur le site de Stokamine,
01:17:28 qui était aussi, comme la société
01:17:30 Infratome dont on parlait au début de cette vidéo,
01:17:32 une filiale de la Société des
01:17:34 Mines de Potasse d'Alsace. Un site qui a été
01:17:36 fermé en 2004 suite à un incendie de déchets
01:17:38 toxiques ayant mis deux mois à être maîtrisé,
01:17:40 et qui, depuis, doit être
01:17:42 confiné. Si la nature des déchets
01:17:44 que l'on trouve dans un site comme Stokamine est évidemment différente,
01:17:46 leur gestion pose néanmoins
01:17:48 les mêmes questions que celle des déchets radioactifs.
01:17:50 Pourtant, le devoir de mémoire n'y est
01:17:52 pas vraiment présent. Mis à part des informations
01:17:54 à destination des populations locales,
01:17:56 ce qui est exigé par la loi, je n'ai rien
01:17:58 trouvé concernant la mémoire pérenne
01:18:00 des déchets amiantés, chromiques,
01:18:02 nitratés, mercuriels, plombés...
01:18:04 Et d'ailleurs, à part en Alsace,
01:18:06 autour du site Stokamine, c'est un sujet
01:18:08 dont on ne parle pas, ou presque,
01:18:10 dans les médias. En tout cas, pas dans les mêmes
01:18:12 proportions que le sujet des déchets nucléaires.
01:18:14 Et qui, de fait, n'inquiète pas vraiment.
01:18:16 *Musique*
01:18:30 Avant de finir cette vidéo
01:18:32 en parlant de l'oubli probable et de ses conséquences,
01:18:34 laissez-moi refaire une synthèse de tout
01:18:36 ce qu'on a pu aborder, parce qu'on a
01:18:38 quand même abordé tout un tas de choses.
01:18:40 J'ai commencé cette vidéo
01:18:42 en traitant la question de la mémoire des déchets nucléaires
01:18:44 d'un point de vue purement linguistique et rationnel,
01:18:46 mais c'était probablement une erreur.
01:18:48 Une erreur que nous commettons tous,
01:18:50 puisqu'elle comporte de gros angles morts,
01:18:52 et parce qu'elle envisage ce problème sous un aspect purement pratique.
01:18:54 Tout d'abord, je vais revenir sur ce qui
01:18:56 m'a le plus surpris. La question des déchets
01:18:58 nucléaires est toujours traitée à part de celle
01:19:00 des autres déchets. Et pourtant, leur problématique
01:19:02 n'est pas très éloignée de celle des autres
01:19:04 déchets ultimes, c'est-à-dire les déchets non-recyclables,
01:19:06 non-valorisables,
01:19:08 eux aussi dangereux à très long terme,
01:19:10 et dont on ne peut finalement rien faire,
01:19:12 que par les entreposer, les isoler, les confiner
01:19:14 ou les enterrer. Imposer le maximum
01:19:16 de garantie aux déchets radioactifs sans l'imposer
01:19:18 aux déchets ultimes est difficile à comprendre.
01:19:20 Alors peut-être que cette mémoire existe, ou qu'elle est prévue,
01:19:22 mais en l'état, je n'ai pas trouvé beaucoup d'informations.
01:19:24 C'est à peine si j'ai trouvé l'emplacement
01:19:26 où ces déchets étaient entreposés.
01:19:28 Et je ne parle ici même pas des déchets ménagers,
01:19:30 qui pourtant génèrent du gaz, des odeurs et des
01:19:32 lixivias, c'est-à-dire des jus de décharge,
01:19:34 qui peuvent être dangereux pour l'homme.
01:19:36 Si désormais ces déchets sont gérés dans des centres
01:19:38 de stockage de déchets qui sont de véritables
01:19:40 sites industriels encadrés et surveillés,
01:19:42 ce n'était pas le cas il y a encore quelques décennies.
01:19:44 En effet, il y a 20 ans, la France
01:19:46 comptait 1100 décharges pour ordures ménagères,
01:19:48 et la moitié des déchets municipaux
01:19:50 du pays finissaient dans de tels endroits.
01:19:52 Des décharges pour lesquelles la mémoire
01:19:54 n'a globalement pas été assurée,
01:19:56 et dont l'emplacement n'est souvent pas connu du grand public.
01:19:58 Pour cette vidéo, je me suis alors
01:20:00 renseigné. J'ai appris qu'en Ille-et-Vilaine,
01:20:02 le département où je vis, beaucoup de déchets sont
01:20:04 a priori envoyés dans le département voisin de la Mayenne,
01:20:06 et que 7 anciennes décharges vont
01:20:08 accueillir des panneaux solaires, mais pour être honnête,
01:20:10 j'en ai pas appris beaucoup plus.
01:20:12 Et si désormais je me renseigne pour mon département
01:20:14 de naissance, en tapant sur Google par exemple
01:20:16 "enfouissement déchets Haute-Marne",
01:20:18 eh bien tous les résultats concernent
01:20:20 les déchets radioactifs, et cela uniquement,
01:20:22 si bien qu'il est difficile, voire impossible
01:20:24 de trouver des informations sur les autres
01:20:26 types de déchets. Ensuite, il demeure évidemment
01:20:28 que la question des déchets nucléaires n'est pas seulement
01:20:30 pratique. C'est une question de société
01:20:32 qui produit alors son lot de débats,
01:20:34 d'interrogations, de peurs, et donc aussi
01:20:36 de lois. Et c'est précisément parce que
01:20:38 c'est une question de société d'ailleurs que la question
01:20:40 de la mémoire s'est imposée, et que des exigences
01:20:42 ont été formulées par les pouvoirs publics.
01:20:44 Et c'est, à mon humble avis, une bonne chose.
01:20:46 Au-delà de la faisabilité
01:20:48 même du projet de mémoire sur 300
01:20:50 ou sur 500 ans, le fait d'en parler
01:20:52 contribue justement à perpétuer
01:20:54 et à construire la mémoire en question.
01:20:56 On pourrait même aller plus loin,
01:20:58 en disant que les peurs qu'induisent les déchets nucléaires
01:21:00 sont en réalité bénéfiques pour la mémoire.
01:21:02 Parce que ces peurs, elles maintiennent le souvenir
01:21:04 même de leur présence et de leur dangerosité.
01:21:06 Et comme la mémoire que cherche à construire l'endrave
01:21:08 vit surtout à éviter une intrusion sur les sites
01:21:10 après leur fermeture, eh bien on peut se dire
01:21:12 que la peur joue bien ce rôle.
01:21:14 Mais il ne faudrait pas non plus le sanctuariser.
01:21:16 Parce que conserver la mémoire d'un risque
01:21:18 ou un danger, ce n'est pas conserver la peur
01:21:20 qui est associée. Exemple que vous
01:21:22 connaissez peut-être, mais le Japon est couvert de
01:21:24 telles informations que les populations locales ont construites
01:21:26 pour informer sur le risque d'un tsunami,
01:21:28 et au-delà desquelles, c'est écrit dessus
01:21:30 "Il ne faut pas construire".
01:21:32 Eh bien, figurez-vous que ça n'a pas dissuadé grand monde
01:21:34 et que les maisons ont continué de fleurir autour.
01:21:36 Le Vésuve, quant à lui, dans la dernière
01:21:38 éruption en 1944 avait laissé
01:21:40 26 personnes sans-abri, représente un risque
01:21:42 connu dans toute l'Italie. Autour de ce
01:21:44 volcan, qui a quand même de bonnes chances de rentrer
01:21:46 à nouveau en éruption au cours de ce siècle, au cours du
01:21:48 siècle suivant, eh bien ce sont quand même
01:21:50 quelques 600 000 personnes qui vivent
01:21:52 dans la zone rouge. Parce que les peurs d'une époque
01:21:54 ne sont plus forcément celles des époques qui suivent.
01:21:56 Et rien ne dit que même si la mémoire
01:21:58 est parfaitement entretenue, que même si
01:22:00 la population est parfaitement informée du danger que représente
01:22:02 une dose radioactive, certains ne
01:22:04 tenteront pas, malgré tout, de s'introduire.
01:22:06 Pour revenir à la radioactivité,
01:22:08 on pourrait dans le même temps déplorer qu'à contrario,
01:22:10 le radon ou l'utilisation de la radioactivité
01:22:12 en milieu médical n'inquiète pas
01:22:14 ou peu. Pourtant, les dangers avérés
01:22:16 qu'il représente en cas de surexposition sont
01:22:18 très largement minorés et la population
01:22:20 en est très peu informée. De manière générale,
01:22:22 on se rend bien compte que ce qui est familier ou peu
01:22:24 médiatisé ne représente pas, aux yeux des Français,
01:22:26 de très gros risques. Et finalement,
01:22:28 ce qui n'est pas connu n'engendre aucune peur
01:22:30 ni aucune convoitise. Si le risque
01:22:32 principal est celui d'une intrusion sur le site de
01:22:34 Meuse-Haute-Marne, un site situé à plus de
01:22:36 500 mètres sous la surface de la Terre,
01:22:38 on pourrait se demander si en oublier la localisation
01:22:40 ou même l'existence ne serait finalement pas
01:22:42 la solution la plus simple et la plus durable.
01:22:44 Mais la question de l'oubli, là aussi, a deux angles d'approche.
01:22:46 Il y a tout d'abord un angle purement
01:22:48 cartésien, c'est-à-dire que 15 km²
01:22:50 de galerie à 500 mètres sous terre,
01:22:52 ça représente finalement une très faible surface
01:22:54 si on compare ça à un pays, à une région ou même à un département.
01:22:56 Si on décidait d'y creuser n'importe
01:22:58 où un trou aussi profond, les chances
01:23:00 de tomber sur autre chose, que ce soit d'origine
01:23:02 anthropologique ou naturelle, seraient bien
01:23:04 plus grandes. Une nappe phréatique, une grotte,
01:23:06 une poche de gaz, un coup de grisou,
01:23:08 un gisement de quoi que ce soit,
01:23:10 ou même, comme on a pu le voir, une décharge abandonnée,
01:23:12 un ancien site industriel, des ruines
01:23:14 archéologiques. Et surtout,
01:23:16 une technologie nous permettant d'aller à 500 mètres
01:23:18 sous terre supposerait probablement que l'on ait
01:23:20 également la technologie pour y détecter la présence
01:23:22 de ces galeries. Bref, les chances seraient
01:23:24 minimes, et si le sol regorgeait
01:23:26 de surprises ou de richesses, et bien sachez
01:23:28 qu'il n'y a aucune ressource exceptionnelle sur le
01:23:30 site où le centre de stockage Meuse-Haute-Marne verra
01:23:32 le jour. En tout cas, rien que l'on ne puisse
01:23:34 aussi trouver à côté. Je rappelle
01:23:36 que c'est d'ailleurs précisément l'une des raisons
01:23:38 pour laquelle cet emplacement fut choisi.
01:23:40 Mais tout ça, c'est faire abstraction, encore une fois,
01:23:42 du choix de société qu'on veut faire. Certains pays,
01:23:44 comme la Finlande, ont plutôt décidé d'aller dans ce sens,
01:23:46 le sens de l'oubli, alors qu'en France,
01:23:48 au contraire, on a opté pour une mémoire active
01:23:50 et passive. Et il y a de toute façon
01:23:52 autre chose à prendre en compte, c'est que l'oubli,
01:23:54 eh bien ça ne se décrète pas. On ne choisit
01:23:56 pas l'amnésie collective, on ne l'impose pas
01:23:58 non plus, et si une mémoire résiduelle devait de toute
01:24:00 façon persister, alors autant qu'elle soit la plus
01:24:02 solide, la plus fiable, et la plus durable
01:24:04 possible. Ceci étant dit, si demain,
01:24:06 nous venions à subir des catastrophes, des grands
01:24:08 changements, des bouleversements sociaux, du même
01:24:10 type de ceux qui nous font oublier nos langues et nos archives,
01:24:12 eh bien maintenir cette mémoire deviendrait probablement
01:24:14 le cadet de nos soucis. La question à se poser est
01:24:16 alors peut-être la suivante.
01:24:18 Est-ce que c'est grave d'oublier ? Nous oublions
01:24:20 déjà en réalité. Combien de sites
01:24:22 qui polluent ou qui ont pollué durablement
01:24:24 le sol, l'air, l'environnement ont été
01:24:26 oubliés ? Et combien le seront encore dans
01:24:28 les années à venir ?
01:24:30 Quitte à oublier, ne vaut-il pas mieux finalement
01:24:32 que ce soit ce qui est profondément enfoui ?
01:24:34 En tout cas, ce qui me paraît évident à l'issue de cette vidéo,
01:24:36 c'est que la question de la mémoire des déchets nucléaires
01:24:38 n'a pas une seule réponse.
01:24:40 Mais elle pose plutôt tout un tas d'autres questions qui
01:24:42 touchent tout le monde. Celles-ci mobilisent alors
01:24:44 tous les pans de la société, que ce soit du côté de la recherche
01:24:46 scientifique en impliquant à la fois les sciences formelles
01:24:48 et les sciences humaines et sociales, ou que ce soit du côté
01:24:50 de la société civile en impliquant des élus ou des riverains
01:24:52 dans le processus de réflexion, de recherche
01:24:54 ou de décision. Bref, ça nous concerne
01:24:56 tous. L'objet de cette vidéo n'était
01:24:58 évidemment pas d'apporter de réponses en fait.
01:25:00 J'en ai pas. Et il n'en existe
01:25:02 de toute façon pas de toute faite. Cette vidéo
01:25:04 elle visait plutôt à vous relayer tout ce que ce sujet
01:25:06 soulève comme interrogation afin que vous vous
01:25:08 questionniez vous-même sur ce que tout ça implique.
01:25:10 Et c'est aussi comme ça que la mémoire se construit.
01:25:12 Lorsque chacun cherche
01:25:14 à comprendre, ou lorsque
01:25:16 chacun cherche à se renseigner.
01:25:18 [Musique]
01:25:20 [Musique]
01:25:22 [Musique]
01:25:42 [Musique]

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