Djamani Tshiabu

  • il y a 4 mois

Category

📚
Learning
Transcript
00:00 Je suis médecin généraliste.
00:02 Alors, pour ma petite histoire, à la base, moi j'ai toujours été intéressée par l'esprit humain.
00:07 C'est vraiment quelque chose qui me fascinait depuis petite et donc je m'étais dit
00:11 j'allais faire la psychologie.
00:12 Quand je suis née et que j'ai grandi en Afrique,
00:15 et on m'a dit "bah non, ça sert à rien,
00:18 et non, tu ne vas pas chez le psychologue, tu n'auras pas de travail, enfin bon, ok."
00:21 Et puis du coup, je me suis tournée vers la formation d'infirmière
00:26 parce que j'avais lu un bouquin qui m'avait inspirée,
00:28 j'étais vraiment très motivée.
00:30 Et la même personne, ma grande sœur, m'a dit "mais non, ça sert à rien,
00:34 infirmière, elle fait tout le boulot et c'est le médecin qui a la droite,
00:36 si tu veux, fais médecine."
00:37 Du coup, j'ai fait médecine.
00:39 Et pour la petite histoire, je trouve que quand je pense à mes patients aujourd'hui,
00:43 à l'époque, je ne me suis pas posé trop de questions.
00:45 "Pourquoi pas, fais médecine."
00:46 Je ne me suis pas dit combien de temps ça dure,
00:48 je ne me suis pas dit est-ce que je suis capable ou pas, enfin voilà.
00:51 Et donc, j'ai fait des études secondaires orientées vers ça.
00:56 Je suis arrivée à 18 ans en Belgique pour faire mes études de médecine
00:59 et j'ai choisi la médecine générale
01:02 parce que ça me plaisait beaucoup cet esprit de globalité,
01:05 dans la prise en charge, de continuité des soins et tout ça.
01:08 Et je me suis rendue compte dans mon travail de médecine générale
01:11 que je faisais beaucoup de psychothérapie malgré tout.
01:13 J'ai terminé en 2002 et en 2014, je me suis formée en psychothérapie familiale et systémique,
01:22 donc de 2014 à 2018.
01:24 Et c'était vraiment, j'ai envie de dire, une révélation de faire cette formation.
01:28 J'ai vraiment eu beaucoup de plaisir à faire cette formation.
01:31 J'ai vraiment senti que c'était quelque chose, un appel que j'avais
01:34 et que j'ai vraiment été très très heureuse de pouvoir faire.
01:37 Et encore aujourd'hui, j'ai toujours beaucoup de plaisir à faire ce travail de psychothérapie.
01:41 Du coup, j'ai deux casquettes, une casquette de médecin généraliste,
01:44 je travaille dans une maison médicale,
01:45 et la psychothérapie c'est dans un cabinet à part que je le fais.
01:48 J'avais un copain de formation belge,
01:52 il avait toute sa rue qui faisait le pied de rue pour dire "ouais, si tu veux un cobet, je suis là".
01:56 Et moi, je suppliais les gens "mais s'il te plaît, laisse-moi faire un essai".
02:00 Et les gens ne voulaient pas.
02:02 Il y en a même qui se fâchaient contre moi pour dire "mais pourquoi tu veux faire ça ?
02:05 Pourquoi tu veux entrer dans mon esprit ou quoi ?"
02:07 Enfin, des trucs de fou.
02:08 Donc c'était très très difficile.
02:10 Et donc je disais "surtout si on est croyant,
02:13 parce que si on est croyant, Dieu est là, Dieu va faire,
02:16 et donc on ne doit pas aller chez un être humain pour vous aider".
02:19 Alors ça c'est quand même assez compliqué.
02:21 C'est en train d'évoluer, mais ça reste encore parfois compliqué.
02:25 Et vraiment, moi je suis en train d'essayer de sensibiliser pour dire
02:29 "vous avez mal aux dents, vous ne priez pas le Seigneur, vous allez chez le dentiste".
02:33 Donc vous n'êtes pas bien, certainement il faut prier,
02:36 je suis quand même croyante,
02:37 mais il faut prendre tout ce qui est là pour pouvoir vous aider.
02:40 Je peux dire une passion, une aspiration personnelle,
02:42 c'est vraiment quelque chose qui me parle, ça me fait du bien.
02:46 Je suis là pour accompagner, pour aider l'autre,
02:48 mais ça me fait du bien à moi aussi.
02:50 Et donc rien que ça, déjà je continue.
02:53 Je crois qu'il y a aussi une évolution des mentalités qui est là,
02:56 où les gens recherchent un thérapeute qui leur ressemble,
03:01 où les gens ont fait certaines expériences.
03:03 Je prends un exemple assez fou,
03:05 j'ai une patiente qui est venue,
03:07 parce que de base elle est mariée à un européen,
03:09 elle n'a pas de soucis,
03:10 elle va chez une thérapeute européenne sans problème,
03:13 et la thérapeute se lève apparemment au milieu de la séance,
03:16 et commence à danser.
03:17 Parce qu'elle dit "mais vous, vous aimez bien danser les Africains".
03:20 Mais bon, elle a quitté sa maison,
03:22 elle paye des honoraires,
03:25 c'est pas pour qu'elle voie la thérapeute danser.
03:28 Et donc ça c'est déjà un peu un espèce de raccourci,
03:31 un amalgame, elle s'est dit "ok c'est bon".
03:33 Puisqu'elle a une image, enfin ils ont, c'est une génération,
03:36 mais une image comme ça de nous,
03:38 on aime danser, on aime le poulet, je ne sais pas très bien quoi,
03:40 on va aller entre nous, au moins on va se comprendre.
03:43 Pour conclure, moi j'avais envie, en venant ici,
03:46 je ne m'y décrivais pas psychologiquement,
03:48 de vous laisser aller avec trois messages.
03:54 Le premier c'était de pouvoir vraiment être connecté
03:58 à ses aspirations personnelles,
04:00 de ne pas les abandonner en chemin,
04:02 quel que soit l'âge je crois.
04:04 On a toujours voulu être je ne sais pas très bien quoi,
04:06 on a dû faire autre chose en chemin,
04:08 ne pas perdre ça de vue.
04:10 La deuxième chose c'est l'équilibre.
04:12 Je rencontre pas mal de femmes,
04:14 surtout les femmes, en burn-out.
04:16 Le burn-out c'est une pathologie du déséquilibre justement,
04:19 trouver son équilibre entre le professionnel, le privé,
04:22 entre son corps, son esprit, l'équilibre.
04:26 Et en dernier, ne pas oublier qu'on a le choix.
04:29 Je dis souvent aux patients qu'on a toujours le choix,
04:32 même si parfois ils ne sont pas d'accord,
04:34 parce que j'estime que même s'il est très minime,
04:36 c'est quand même un choix.
04:38 On dit souvent choisir entre la peste et le choléra,
04:40 on ne veut ni l'un ni l'autre,
04:42 mais je pense qu'on peut quand même choisir malgré tout
04:44 pour savoir à quelle source on va être manqué.
04:46 Donc voilà, c'était mes trois petits messages,
04:48 et merci pour l'invitation.