Pour son 100e jour à Matignon, Gabriel Attal a prononcé un «discours sur l'autorité au cœur de la République» ce jeudi. Voici ce qu'il faut retenir des annonces du Premier ministre.
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00:00 Mesdames et messieurs, notre pays est continuellement traversé par des débats, des opinions contraires,
00:07 parfois des divisions profondes sur des choix de société.
00:11 Mais il reste, je le crois très profondément, rassemblés derrière des valeurs.
00:18 Ces valeurs, elles tiennent en des mots simples le civisme, la règle commune, les droits et les devoirs,
00:26 le respect de l'autorité. J'ai toujours assumé ma méthode, dire la vérité, y compris quand ça fait mal,
00:34 y compris quand ça ne va pas. Or, que voit-on aujourd'hui ?
00:39 L'autorité et la règle commune sont trop souvent défiées par certains jeunes.
00:45 Cela nous rappelle à ce sentiment qu'une partie de nos adolescents glisse lentement
00:50 vers une forme d'isolement, d'individualisme, et parfois même, vers le pire, vers une forme de violence déchaînée, morbide, sans règles.
00:59 Je dis bien une partie de nos adolescents, et une partie seulement,
01:03 car c'est bien une minorité d'adolescents que les Français ne comprennent plus.
01:08 Cette part, cette minorité de jeunes et d'adolescents que les Français ont le sentiment de trop voir dans le poste,
01:14 rimée avec perte de repères, contestation des règles les plus élémentaires et parfois même déchaînement de violence.
01:21 Ces mots, déchaînement de violence, je les assume.
01:26 Je les assume d'autant plus ici, à Viry-Châtillon, ici même, où un jeune de 15 ans, Shams Eddin,
01:33 a été roué de coups et tué par d'autres jeunes à peine plus vieux que lui.
01:38 Car dans un premier temps, c'est de toute notre société, de tout notre pays, c'est des Français que je voudrais parler.
01:44 Parce qu'il faut les comprendre, les Français, lorsqu'ils observent que les règles qui sont faites pour être respectées
01:50 sont trop souvent remises en cause.
01:53 Il faut les entendre, les Français, lorsqu'ils voient qu'à l'école, l'autorité du professeur est contestée jusque par les parents.
01:59 Et ce, alors que l'autorité est la condition de l'émancipation de nos jeunes.
02:04 Et il faut les entendre, même lorsqu'on a le sentiment qu'ils ne disent rien, alors qu'au fond, ils n'en pensent pas moins.
02:11 Car oui, parfois, le silence est un cri.
02:14 Je le sais, on fait rarement grève contre l'incivilité.
02:18 On ne fait pas souvent de grandes manifs pour l'autorité à l'école.
02:22 On ne fait pas de mouvements sociaux contre la violence.
02:24 Et pourtant, je le dis, les Français ne supportent pas, ou plutôt ne supportent plus,
02:29 qu'on puisse s'affranchir de la règle commune, ils ne le comprennent pas.
02:33 Comment accepter qu'on puisse remettre en cause les règles les plus élémentaires de notre République ?
02:38 Comment accepter, comment comprendre, comment expliquer ce glissement d'une partie de notre jeunesse ?
02:44 Comment accepter qu'on s'en prenne à un proviseur, à un jeune garçon parce qu'il parle avec une fille,
02:49 à des professeurs, à des policiers, à des pompiers, à des fonctionnaires, à des écoles, à des équipements publics, à des lieux de culture ?
02:56 Comment accepter qu'on touche, qu'on salisse, qu'on s'en prenne à ce qu'il y a de plus sacré en République ?
03:02 Comment accepter cette spirale, ce déferlement, cette addiction d'une partie de nos adolescents à la violence ?
03:08 Oui, je parle de spirale. Oui, je parle de déferlement. Oui, je parle d'addiction. Et non, on ne peut pas l'excuser.
03:18 Mais on peut tenter en revanche de comprendre comment on en est arrivé là.
03:22 Comment on en est arrivé à la remise en cause d'enseignement, au coup de boutoir contre la laïcité, au questionnement de la règle commune ?
03:28 Comment on en est arrivé à une situation où, alors qu'ils représentent un Français sur vingt,
03:34 les adolescents de 13 à 17 ans représentent un mise en cause sur dix pour coups et blessures,
03:39 un sur cinq dans les trafics de drogue, un sur trois dans les vols avec arme.
03:44 En synthèse, il y a deux fois plus d'adolescents impliqués dans les coups et blessures,
03:49 quatre fois plus pour trafic de drogue et sept fois plus dans les vols avec arme que dans la population générale.
03:55 La violence n'attend donc clairement pas le nombre des années. Il est là le vrai scandale.
04:02 Parce que la jeunesse de France, mesdames et messieurs, ce n'est pas ça. Ce n'est surtout pas ça.
04:07 Ce n'est pas la remise en cause de l'autorité, ce n'est pas la violence, ce n'est pas le manque de respect, ce n'est pas le déchaînement.
04:13 Jamais et sous aucun prétexte. Je crois que nous devons davantage nous préoccuper de la question des parents et des familles.
04:20 Ce sont les cellules de base de notre société et ils sont le terreau au sein duquel grandissent nos enfants et nos adolescents.
04:27 Bien sûr, c'est dur d'être parent, c'est dur et nous le reconnaissons.
04:31 La France a d'ailleurs l'une des politiques familiales les plus ambitieuses parmi nos voisins et nous devons poursuivre dans cette voie.
04:37 Oui, il y a des parents sincèrement débordés et on doit les aider.
04:42 Mais tous les acteurs de terrain vous le diront, au premier rang desquels les maires de nos communes qui y sont confrontés.
04:48 Il y a aussi des parents qui ne tiennent pas leurs enfants, qui n'assument pas leurs responsabilités, qui laissent prospérer la spirale de la violence.
04:55 Le cadre familial doit être un cadre, un vrai et nous devons y veiller.
05:00 Enfin, les arrangements avec la réalité, une forme de pas de vague généralisée a pu conduire à une impression de dissolution de l'autorité.
05:09 Comme si nous avions le sentiment que l'autorité n'était plus au milieu du village, qu'il suffisait de la provoquer pour s'en affranchir
05:15 et que la faiblesse de nos réponses passées témoignait d'une forme d'abandon et de renoncement à la faire respecter.
05:22 Voilà, je crois, certaines des raisons de ce glissement.
05:25 Rôle des parents, addiction aux écrans, entrisme d'idéologie ennemie de la République, repli sur soi et perte d'autorité
05:32 sont les défis auxquels nous devons répondre, au risque, je le dis, de ne plus être en mesure de renouer avec la concorde au sein de notre nation.
05:40 Mesdames et Messieurs, aujourd'hui, c'est la République qui contre-attaque.
05:46 C'est cela que nous sommes venus lancer aujourd'hui depuis Viry-Châtillon.
05:50 La mobilisation générale de la nation pour renouer avec ses adolescents, juguler la violence, réaffirmer notre projet d'une jeunesse libre et émancipée,
05:59 reconquérir le droit à la France tranquille, confiante dans l'avenir et sereine dans sa vie.
06:04 La République contre-attaque, mais elle ne pourra pas le faire seule.
06:08 Nous ne pourrons pas le faire seule. Nous aurons besoin de toutes les bonnes volontés, de la société civile, des familles, des maires, des élus, des parlementaires, de la majorité comme de l'opposition.
06:17 Je l'ai dit, je ne crois pas que la France soit fondamentalement divisée sur ce sujet.
06:22 Il n'est pas question qu'une idéologie religieuse vienne contester la loi dans des quartiers.
06:27 Pas question qu'une jeune fille ne soit pas libre de s'y promener sans voile si elle le souhaite.
06:31 Pas question qu'un jeune garçon ne puisse pas manger ce qu'il souhaite quand il le souhaite.
06:35 Partout en France, la seule loi qui s'applique, c'est celle de la République.
06:40 Alors que chez beaucoup de jeunes, le repli identitaire mène à une forme de radicalisation, là aussi, la République contre-attaque.
06:48 Elle contre-attaque contre le séparatisme.
06:50 Depuis le vote de la loi contre le séparatisme, des associations ont été dissoutes, des mosquées où l'on professait la haine ont été fermées,
06:56 des imams qui ne respectaient pas nos valeurs ont été renvoyés et depuis 2017, 760 étrangers radicalisés ont été reconduits à la frontière.
07:05 Cela va continuer.
07:07 Avec Gérald Darmanin, nous serons présents partout, nous serons vigilants partout, notamment dans les écoles, notamment dans les clubs de sport.
07:13 Nous serons intraitables.
07:15 Et que ceux qui pensent pouvoir contester facilement les valeurs de la République, endoctriner la jeunesse, le sachent, nous les trouverons et nous les empêcherons.
07:24 Aujourd'hui, quand on agresse quelqu'un à raison de sa religion, c'est une circonstance aggravante et c'est bien normal.
07:31 Alors quand on agresse quelqu'un en raison du non-respect de principes religieux, cela doit aussi être reconnu comme une circonstance aggravante.
07:40 J'ai donc demandé à Eric Dupond-Moretti, au garde des Sceaux, de prendre les mesures qui s'imposent, y compris par une circulaire pénale, pour que cela soit rigoureusement appliqué.
07:49 Lutter contre la dérive d'une partie de notre jeunesse, c'est lutter contre le trafic de drogue.
07:54 La drogue, c'est la mère de toutes les délinquances, c'est ce qui pousse de nombreux jeunes à sombrer.
07:59 C'est ce qui mine des familles et des quartiers entiers.
08:02 C'est ce qui engresse des têtes de réseau qui se servent de notre jeunesse comme de la chair à canon.
08:07 C'est pourquoi nous avons multiplié les opérations PlaceNet pour harceler les dealers avec des résultats.
08:12 Grâce aux opérations PlaceNet XXL, près de 8 500 personnes ont été interpellées, plus de 13,5 millions d'euros ont été saisis, ainsi que 3,7 tonnes de cannabis.
08:24 C'est la raison pour laquelle nous allons encore renforcer toute notre stratégie contre la drogue.
08:29 Le ministre de l'Intérieur présentera dans les prochains jours, comme je m'y étais engagé dans ma déclaration de politique générale, un nouveau plan STUP particulièrement ambitieux.
08:37 Nous ne laisserons aucun répit aux trafiquants.
08:39 Je crois aussi que lorsqu'on gêne les cours, lorsqu'on défie l'autorité, lorsqu'on dégrade, qu'on menace, voire que l'on agresse, cela ne doit jamais rester sans conséquences.
08:49 Et cela ne peut pas rester sans conséquences s'agissant des examens et des bulletins scolaires.
08:56 Dès lors, je suis favorable à ce que les jeunes qui perturbent le plus gravement les cours se voient sanctionnés sur leur brevet, leur CAP ou leur bac,
09:05 et qu'une mention soit apposée sur leur dossier parcours SUP lorsqu'ils ont gravement perturbé la vie de l'établissement pour que cela ait un impact.
09:13 La condition pour ne pas être sanctionné, pour effacer cette mention, ce sera la réalisation d'activités d'intérêt général et bien sûr de se tenir à carreau.
09:21 Dans le cadre de la concertation que je lance, nous travaillerons au contour exact de cette mesure.
09:27 Je veux le dire également, je fais une totale confiance aux chefs d'établissement, à leurs équipes, aux professeurs, pour faire des propositions, pour innover, pour lancer de nouvelles idées,
09:36 pour responsabiliser les élèves, pour insuffler cette culture du civisme à l'école.
09:42 Cette culture du civisme, l'État lui aussi s'engage à la faire valoir. C'est le sens de l'expérimentation du port de l'uniforme annoncé par le Président de la République.
09:50 C'est aussi la raison pour laquelle nous doublons, je le rappelle, le nombre d'heures d'enseignement moral et civique.
09:55 Enfin, Mesdames et Messieurs, l'école c'est aussi le creuset de la République.
09:59 Elle subit, elle aussi, de plein fouet, les conséquences du repli identitaire.
10:06 Aujourd'hui, soyons francs, de plus en plus souvent, les troubles ou les violences dont nous entendons parler à l'école ont un sous-texte identitaire ou religieux.
10:14 Je vous le dis, il n'y aura pas de guerre des religions à l'école. Car à l'école, la seule règle qui vaut, c'est la laïcité.
10:21 C'est un combat sur lequel je suis en première ligne depuis longtemps, un combat pour lequel j'ai déjà pris des engagements forts suivis des faits, comme l'interdiction de l'Abaya et du Camis à l'école.
10:31 Un combat autour d'un mot d'ordre. Là aussi, le pas de vague, c'est fini. Nous allons continuer.
10:36 Nous allons renforcer les équipes Valeurs de la République qui permettent d'orienter, de conseiller les professeurs, les chefs d'établissement confrontés à ces difficultés.
10:44 Nous allons désormais faire des signalements systématiques au procureur, des articles 40, en cas d'atteinte grave aux valeurs de la République.
10:51 Nous sommes prêts à trouver des propositions nouvelles, comme les propositions récentes, par exemple, du rapport sénatorial sur la laïcité à l'école.
10:58 Je souhaite là aussi qu'un travail large soit mené, que chacun soit entendu, qu'il n'y ait pas une bonne idée qui nous échappe.
11:04 Ce sera au cœur des discussions des prochaines semaines dans le calendrier que j'ai fixé.
11:08 Mesdames et Messieurs, je rappelais tout à l'heure quelques chiffres, quelques vérités sur la réalité de la délinquance chez les mineurs.
11:15 Face à une délinquance de masse, face à une violence qui se répand, nous nous rendons à l'évidence que nos règles pénales doivent s'adapter.
11:22 Nous avons commencé à le faire.
11:24 La réforme de l'ordonnance de 45 et la création du Code de justice pénale des mineurs ont été des avancées sans précédent et absolument considérables dans le précédent quinquennat.
11:34 Je rappelle qu'avant cette réforme, un mineur sur deux était jugé une fois devenu majeur, ce qui n'avait évidemment aucun sens et avait un impact extrêmement limité sur la destinée de ce jeune.
11:46 Grâce à cette réforme portée courageusement dans le précédent quinquennat, nous avons très sensiblement accéléré les délais et changé cette situation.
11:56 Sous l'autorité du Président de la République, avec le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, nous sommes déterminés à aller plus loin.
12:03 Pour sensibiliser chacun à la justice et aux sanctions, je souhaite que les jeunes qui commencent à partir à la dérive, qui sont identifiés au sein de leur établissement scolaire, de leur collège,
12:13 comme ne respectant pas les règles, ayant du mal à imaginer, à anticiper ce que peuvent être les sanctions du non-respect de la règle,
12:20 je souhaite que ces jeunes systématiquement assistent à une comparution immédiate au tribunal, dans le public, pour comprendre la règle,
12:28 comprendre qu'elle peut donner lieu à des sanctions si on ne la respecte pas. C'est ça aussi, je crois, le rôle de la justice.
12:34 Par ailleurs, et pour que chacun puisse répondre de ses actes, nous allons créer les mesures d'intérêt éducatif qui seront l'équivalent des travaux d'intérêt général pour les mineurs de moins de 16 ans.
12:44 Je l'avais annoncé dans ma déclaration de politique générale. Je vous annonce que la circulaire sera signée dans les prochains jours pour une entrée en vigueur dès la rentrée des vacances de printemps.
12:54 Pour éviter que des jeunes qui tombent dans la délinquance ne puissent rôder chaque nuit, nous proposons et nous travaillons à un dispositif permettant désormais de les contraindre à un accueil de nuit, ce qui n'est pas possible aujourd'hui.
13:06 Ensuite, je souhaite que des réponses plus rapides puissent avoir lieu face aux jeunes délinquants. Ma boussole, c'est l'impunité zéro, c'est la sanction immédiate.
13:15 Pour certains délits, je souhaite que nous travaillions à une mesure de composition pénale, sans juge, pour que les mineurs, à partir de 13 ans, s'ils reconnaissent les faits, s'ils acceptent la sanction, puissent désormais avoir une sanction plus rapide.
13:29 Nous pouvons aller plus loin encore. Aujourd'hui, si deux jeunes, l'un de 17 ans et l'autre de 18 ans, commettent un vol du trafic, qu'ils sont arrêtés en même temps, celui de 18 ans pourra être jugé et sanctionné le jour même en comparution immédiate.
13:44 Alors que pour celui de 17 ans, s'il peut être déféré immédiatement, s'en suivra une procédure plus longue et différenciée pour appliquer sa sanction devant le juge des enfants.
13:55 Je crois que ce n'est pas normal et que cela peut renforcer encore le sentiment d'impunité chez les jeunes.
14:00 Faut-il, et pouvons-nous mettre en place une comparution immédiate devant le tribunal pour les jeunes à partir de 16 ans, de sorte qu'ils aient à répondre de leurs actes immédiatement comme les majeurs et qu'ils soient sanctionnés immédiatement comme des majeurs ?
14:14 J'ai chargé le garde des Sceaux d'y réfléchir et d'y travailler. Le travail de concertation des prochaines semaines permettra de trancher ce débat.
14:22 [Musique]
14:26 [SILENCE]