Morgane a revu des photos d'elle en troisième et a repensé à cette époque. La cruauté des enfants était déjà ce qu’elle est MAIS il n'y avait pas les réseaux, donc les insultes s'arrêtaient à 18h.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-chronique-de-morgane-cadignan
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AmusantTranscription
00:00 Et nous on va embrasser Morgane Cadignan dans la bande originale !
00:03 Oh oui ! Toute Morgane Cadignan !
00:06 En avant ! Bonjour les amis, j'ai lu la récente enquête sur le harcèlement scolaire.
00:11 5% des enfants sont victimes du CE2 au CM2.
00:14 Ça n'a pas l'air fou comme ça, mais attends 5% c'est déjà énorme !
00:17 Disait Valérie Pécresse aux présidentielles.
00:19 Elle ne le disait pas comme ça parce que ce n'est pas Philippe Manoeuvre.
00:22 Mais blague à part, c'est énorme, c'est un élève par classe en moyenne.
00:26 Du coup je me réjouis des préventions pour le harcèlement scolaire.
00:28 Enfin contre le harcèlement scolaire, c'est une faute de français que je fais très souvent ça.
00:32 Genre journée pour la violence faite aux femmes.
00:35 C'est contre bien sûr, sinon ça fait une campagne un peu étrange.
00:39 Face au manque de violence faite aux femmes, tous vigilants.
00:42 Si vous voyez une femme en paix, un seul geste, la clé de bras.
00:46 Parce que chaque gifle compte.
00:48 Rendez-vous sur www.adriencatnins.org
00:52 C'est important de communiquer sur le harcèlement scolaire,
00:55 parce que je crois qu'au fond les gamins, ils commencent à savoir qu'ils peuvent parler à un adulte.
00:58 Il faut surtout éduquer les adultes à être à l'écoute et à ne pas minimiser.
01:01 "Oh ça va, moins de mon temps, je me faisais chahuter, ça t'apprend la vie."
01:04 Bah oui mais ça t'apprend quelle vie Michel ?
01:06 "La tienne !"
01:07 La vie à toi qui n'arrive pas à dire "je t'aime" à ton gosse hors funérail
01:10 et qui ne pleure pas autrement qu'en disant "non mais c'est parce que je suis en colère !"
01:14 Un enfant, un gosse, c'est pipelette à la base.
01:16 C'est pour ça que je n'en ai pas un enfant.
01:18 Seigneur, ça jacte quoi !
01:20 "Pourquoi t'as du ventre dans le dos maman ?"
01:23 "Les mardis Domino's Pizza, gamin !"
01:26 "Pourquoi il est noir le monsieur ?"
01:28 "Parce que ça rit Roselle Mack."
01:29 "Et elle est où mamie quand elle est morte ?"
01:30 "En enfer."
01:31 "Et c'est qui mon papa ?"
01:32 "Bon allez, qui veut de la pizza ?"
01:35 Un enfant qui ne parle pas, il n'est peut-être pas dans la lune, il est peut-être dans la merde.
01:40 Quand je vois à 33 ans à quel point je n'arrive pas à gérer une insulte,
01:42 je ne sais pas comment on faisait entre 10 et 18 ans,
01:44 aux âges où t'es le moins armé pour tout et où, rétrospectivement, t'es franchement laid.
01:49 Je me suis fait un peu moquer à l'école et en repensant à mes harceleurs, je comprends de ouf.
01:53 Honnêtement, là, cas particulier, j'ai revu des photos de moi en 3ème, énormément de chance d'être en vie.
01:58 Je ne dis pas que j'ai vécu une enfance difficile.
02:00 Non, pas du tout.
02:01 Mais moi, j'ai été en léger surpoids à l'époque de la mode des jeans taille basse.
02:05 Donc, en gros, j'ai été engoncée de 98 à 2010.
02:08 C'est terrible.
02:09 Sur chaque photo, on dirait un peu un Mr Freeze coincé à mi-paquet.
02:12 La cruauté des enfants, elle était déjà ce qu'elle est.
02:16 Mais nous, notre génération, on n'avait pas les réseaux sociaux.
02:18 Donc, les insultes s'arrêtaient à 18h.
02:20 Pour ceux qui avaient des parents sains, pour les autres, écrivez le scénario, ça peut prendre une palme à Cannes.
02:24 Après, attention, il y en a que là, j'essaye de vendre une série sur une enfance heureuse.
02:28 Les diffuseurs sont frileux.
02:29 C'est terrible.
02:31 Maintenant, avec les réseaux sociaux, ça ne s'arrête pas.
02:32 C'est comme avoir quelqu'un qui te suit et qui te dit en boucle « t'es moche, suicide-toi, t'es moche, suicide-toi jusqu'à chez toi »
02:36 et qui t'insulte jusque dans ton lit.
02:37 « Waouh, je dors avec Natacha Saint-Pierre ou quoi ? »
02:39 Référence aux déjà un peu ringardes, mais je me permets la vanne vu qu'on parle d'histoire de collégienne.
02:45 Moi, par exemple, j'étais amoureuse d'un garçon de ma classe et je n'avais pas encore les méthodes de séduction de la morgaine adulte.
02:50 Ne rien faire et attendre qu'il devine tout seul.
02:52 Et s'il ne se passe rien, dire qu'il est impressionné par les meufs drôles.
02:56 Donc, je lui ai envoyé un mot.
03:00 J'ai écrit « tu veux sortir avec moi ? » avec une case à cocher oui et une case à cocher non.
03:05 Et il m'a répondu, il a lu le mot devant moi, il a refait passer le mot par des camarades et il a répondu en cochant non et en écrivant à côté « car tu es moche et grosse ».
03:13 À quel moment dans la consigne, j'ai demandé de justifier ta réponse, connard ?
03:17 Redescend, Guimauquais, je t'ai pas demandé une lettre, fallait juste cocher.
03:20 J'ai mis le mot dans ma trousse en restant très digne parce que bon, déjà, qui me trouve moche quand je ne pleure pas ?
03:24 N'empêche que ce jour-là m'a marqué alors que j'ai vécu une fois de manière isolée, contrairement à plein d'enfants.
03:29 Je me souviens qu'on avait musique juste après.
03:31 Laissez-moi vous dire qu'à l'époque, en cours de musique, on ne reprenait pas Zaho de Sagazin au canon pour balancer sur TikTok.
03:36 On avait flûte, c'est tout, pas d'autres instruments, pas de chant, flûtasse, sec, sans artifices.
03:42 Et nous, on apprenait Omari de Johnny à la flûte.
03:45 Et j'en ai pris des râteaux dans ma vie, mais très peu où j'ai claqué les accords de Omari, premier degré dans le quart d'heure, casse-suivi.
03:50 J'ai plus appris la résilience ce jour-là qu'en enterrant mon père.
03:53 Franchement, avec le gars qui me regardait jouer de la flûte en se disant « bah, elle va bien finir par la manger sa flûte, notre petit porcinelle ».
03:59 J'ai jamais eu de suicide dans mon collège alors que j'ai grandi dans l'Est de la France, bord du Rarden.
04:05 Un endroit où dans chaque épisode, on l'a de raconte « oh bah tu reconnais un voisin ».
04:09 D'ailleurs, on ne parle pas assez des gens qui ont vécu dans l'Est de la France.
04:12 Il est où notre hashtag, les gars ? Il est où notre podcast engagé ?
04:14 Les minorités, là, ouin ouin à longueur d'année.
04:17 Mais un arabe qui a grandi à Thionville, il sait pourquoi il chiale lui.
04:21 Écoutez vos enfants, écoutez vos gosses, harcelez-les pour qu'ils vous parlent.
04:25 De toute façon, ils sont déjà harcelés en classe, ils ne seront pas dépaysés.
04:27 Et s'il y a des enfants qui nous écoutent, la scolarité, ce n'est pas toute la vie.
04:30 Ceux qui vous harcèlent aujourd'hui vous demanderont des places pour l'avant-première de votre film dans 10 ans.
04:33 Courage à tous !
04:35 (Applaudissements)