• il y a 8 mois
Interview ou reportage d'une émission cinéma produite par CANAL+ autour d'un film disponible sur CANAL+ ou sortant en salles, un événement ou une actualité du 7ème Art
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Transcription
00:00 On connaît bien les frasques de Mathieu Kassovitz, sa grande gueule, son envie de bastonner tout le cinéma français,
00:05 ses accidents de moto gravissimes dont il ressort miraculé avec juste une jambe à rééduquer.
00:10 On connaît aussi Kassovitz mal au tru dans « Le Bureau des Légendes » ou discrètement romantique dans « Amélie Poulain ».
00:15 On connaît beaucoup moins Kassovitz acteur de pure comédie comme dans « Les Rois de la Piste » de Thierry Cliffa,
00:21 l'histoire d'une famille de malfrats à la petite semaine dont la matriarche est l'ardentissime Fanny Ardent.
00:26 - Fais pas la tête ! Quoi ?
00:31 - Tant qu'on en sait pas plus, tu me contactes plus, on se parle plus, tu ne m'appelles plus !
00:38 - Mais de toute façon j'avais pas l'intention de t'appeler ! - Et pourtant mieux !
00:43 - Prends-toi soin quand tu marches !
00:45 - Bonjour Mathieu. - Bonjour Antoine.
00:48 - Avant de m'intéresser à l'artiste, je voudrais parler un peu de l'homme. Comment va la fameuse guitare ?
00:52 - La guitare va bien, elle reprend du rythme, il faut juste que mes doigts de pied reprennent le long des cordes.
00:59 - Avec l'espoir de remonter sur un ring par exemple ?
01:01 - C'est le but, oui, j'ai commencé l'entraînement déjà.
01:04 - Sur une jambe ? - Non, assis. C'est la boxe assise.
01:07 - La boxe assise, c'est douce ! - Pas mal, ça fait travailler tous les hauts du corps.
01:10 - Bon, après la sortie de « Les Rois de la Piste », « Abitransition » avec le film de Cliffa qui est une vraie comédie
01:19 et un registre dans lequel on ne vous avait pas vu depuis un certain temps.
01:22 - Mais on ne m'a jamais pris au sérieux pour faire rire. - Pourquoi ?
01:26 - Parce qu'on pense que je suis un mec qui est super méchant et que je n'aime personne et que je ne suis pas drôle.
01:32 - C'est vrai que vous n'aimez personne. - Non, je n'aime personne mais je suis drôle.
01:35 - Oui, c'est pas compatible. - Non mais c'est l'humour juif qui vient de mon père
01:40 et cet humour n'a pas besoin d'être en empathie avec les gens, il a besoin juste de faire un petit résumé de la situation.
01:47 L'humour juif c'est « ne sois pas trop heureux aujourd'hui car demain tu seras peut-être mort ».
01:53 - Donc ce n'était pas par goût en fait que vous faisiez votre comédie ?
01:56 - Non, non, moi j'adore. J'ai fait des comédies, « La haine » c'est une comédie, « Métis », mon premier film, est une comédie.
02:01 Bon, après c'est parti un petit peu dans la non-comédie, dirons-nous.
02:05 - C'est marrant parce que « La haine », je ne l'avais pas envisagé comme une comédie, moi, tout à fait.
02:07 - Si, le succès de « La haine », Dieu a sa comédie, oui, bien sûr.
02:10 - C'est que ça fait rire les gens et les gens se sentent bien et c'est les 30 dernières secondes qui sont terribles.
02:15 Mais tout le reste, c'est plutôt drôle.
02:17 Puis moi, sinon je fais des blagues, je suis vachement drôle.
02:20 Mais je ne sais pas pourquoi on ne m'a jamais confié ce truc.
02:23 Si, on m'a proposé les comédies, mais qui ne me faisaient pas rire.
02:26 - C'est autre chose. - C'est autre chose, c'est un autre truc.
02:28 - C'est quoi d'ailleurs une bonne comédie, une comédie qui vous fait rire ?
02:30 - Une comédie qui me fait rire ?
02:30 - En tout cas, une comédie dans laquelle vous pourriez avoir envie de jouer, en dehors de moi.
02:34 Ce genre-là, c'est une comédie où tu peux t'exprimer, où tu peux faire le con.
02:38 Vraiment, où tu peux exprimer toute gaminerie qui est en toi et tu peux vraiment...
02:46 Vous savez, parce que le travail de comédien est assez humiliant quand tu travailles pour moi, en tout cas.
02:49 Quand tu travailles dans les émotions, quand tu es obligé de te mettre à nu devant des gens.
02:53 C'est pour ça que je ne me sens pas très bien.
02:55 Mais par contre, la peur du ridicule ne me fait pas peur.
02:59 - Oui, il n'y a pas peur, oui.
03:01 - Donc, quand il m'a proposé ça, je me suis dit, il y a de la marge pour faire le con.
03:05 Je lui ai dit, est-ce qu'on peut faire le con ?
03:06 Est-ce que c'est une comédie italienne des années 50 ?
03:08 Est-ce que ça correspond à ce genre de choses ?
03:10 Et il m'a dit, oui, oui.
03:11 Et puis, il y avait Fanny, il y avait Nicolas, il y avait Laetitia, il y avait tout le monde
03:14 pour pouvoir vraiment se permettre de faire une belle famille et de s'amuser.
03:18 - Et Cliffard remarque ça chez vous.
03:20 Il dit que vous n'avez pas peur du ridicule,
03:22 ce qui pour moi semble être une qualité élémentaire chez un comédien.
03:26 Comment ça se fait que ça ne soit pas plus partagé ?
03:28 - Il y a les comédiens qui n'ont pas peur du ridicule
03:30 et les comédiens qui ne se rendent pas compte qu'ils sont ridicules.
03:32 C'est souvent les meilleurs, parce que c'est ceux qui osent le plus de choses.
03:36 Et un bon comédien doit tout se permettre, doit tout oser.
03:38 Moi, j'ai trop de recul dessus parce que j'ai mon métier de réalisateur,
03:41 parce que je suis cynique avec les choses, tout ça.
03:44 Et quand on me demande de faire quelque chose de trop pointu au niveau de l'acting,
03:47 ce n'est pas mon truc.
03:49 Je refuse des rôles trop, trop, trop intenses pour moi.
03:53 Maintenant, la comédie permet d'être ridicule sans être ridicule sur le plateau.
03:57 C'est juste ça.
03:58 Tu fais rire les gens au lieu d'avoir des gens qui font,
04:03 qui regardent ta souffrance et qui rigolent à l'intérieur
04:06 parce qu'ils savent que tu es bidon.
04:08 - Alors, dans "Les rois de la piste" de Kifa,
04:10 vous êtes Sam, l'aîné de cette famille de bras cassés.
04:14 Ils sont tous plus nuls, les gens qui les aissent.
04:16 - C'est un problème, oui.
04:17 Sous la houlette de Fanny Ardant, la maman,
04:21 qui me fait penser un peu à "Mad Alton".
04:24 - Oui, complètement. C'est ce qu'on disait.
04:26 - Nous, on semble un peu "Mad Alton".
04:27 - C'est plutôt qui ? Vous êtes plutôt Joe, à vrai ?
04:29 - Non, je suis le petit, là.
04:31 - Joe ? - Oui, Joe, qui est grognant.
04:33 - Vous évoquiez la comédie italienne, il y a quelques instants,
04:37 et notamment "Le pigeon" de Madame Shelley, j'imagine.
04:39 - Oui, mon film préféré.
04:40 - Un film culte.
04:41 Là encore, c'est une histoire de bras cassés.
04:43 Ils veulent braquer une banque, finalement,
04:44 ils se rendent souvent dans la cuisine,
04:45 de l'autre côté du mur de la banque.
04:46 - Vous voulez un peu de pochiche ?
04:47 - C'est à côté de la blague.
04:49 Ils sont tous mauvais, mais ils sont tous...
04:51 Ils sont tous aimants, on les aime,
04:55 parce qu'ils sont, on les aime pour leurs failles.
04:57 J'ai retrouvé un petit peu ça dans le scénario.
04:59 - Dans "Les rois de la piste", oui.
05:00 - C'est vraiment écrit de cette façon-là.
05:02 - Et Kliva, vous avez aussi cité un film de Robert Hawkes,
05:04 "L'impossible monsieur bébé".
05:06 - Oui, bien sûr.
05:07 - Vous avez laissé parler le carré grande qui est en vous.
05:09 - Moi, j'adore "carré grande".
05:11 Parce que c'est la classe absolue,
05:13 mais c'est aussi le mec qui fait des films
05:15 où il est habillé en robe, en chaussons,
05:19 en trucs, il se ridiculise lui-même,
05:21 et il a une classe naturelle
05:23 où il peut se permettre, justement, de faire des grimaces
05:25 et toutes ces choses-là que les stars ne font plus aujourd'hui,
05:28 que les gens ne se permettent plus de faire.
05:30 - Je serais de mot de votre famille de cinéma,
05:32 dans le film de Kliva, notamment avec Fanny Ardant,
05:34 qui, paraît-il, vous êtes extrêmement bien entendue,
05:36 au point de la tutoyer.
05:38 Vous avez dû tutoyer Dame Ardant.
05:40 - Oui, parce que c'est une punk.
05:42 Ses appareils, ses trucs,
05:44 tu vois tout de suite, dans deux minutes, c'est une punk, déjà.
05:46 Moi, elle m'aime bien, parce que comme je suis un gueulard,
05:48 elle a commencé à dire "mais vous, alors !
05:50 Mais vous aussi, vous l'aimez rien !"
05:52 J'ai dit "non, Fanny,
05:54 calme-toi, c'est moi qui...
05:56 Oh, tous ces cons !
05:58 C'est incroyable,
06:00 cette énergie qu'elle a !
06:02 Elle me dit "mais t'es un peu comme moi !"
06:04 Je dis "non, je ne suis pas comme toi,
06:06 toi, t'es une vraie punk,
06:08 moi, je suis plus dans le cynisme,
06:10 dans la méchanceté, elle,
06:12 c'est en réaction à tout,
06:14 mais c'est quelque chose de très naturel, d'humain.
06:16 Moi, c'est beaucoup plus intellectuel.
06:18 - Ça vous donnerait envie de la diriger ?
06:20 - Ah ouais !
06:22 Il y en a deux, comme ça,
06:24 que j'aimerais vraiment mettre ensemble,
06:26 et on pourrait faire un truc de dingue,
06:28 je ne sais pas quel est le sujet,
06:30 mais elle et Catherine Deneuve,
06:32 je ne sais pas comment elles sont ensemble,
06:34 je pense qu'elles doivent être copines,
06:36 ce qu'elles sont aujourd'hui n'est que le reflet...
06:38 - À la fois des icônes, des survivantes, des pétroleuses...
06:40 - C'est un petit peu tout, mais surtout des pétroleuses.
06:42 Et ça, c'est génial.
06:44 - Je vois très bien ça, un film de Cassavitz avec Deneuve et Fanny Arnault.
06:46 - Moi, je verrais très bien ça aussi.
06:48 - OK.
06:50 - La convention, Mathieu, généralement, dans la promo,
06:52 c'est de dire que les partenaires étaient formidables,
06:54 le réalisateur, génial,
06:56 parfois même la cantine était incroyable.
06:58 Et là, pour le coup, quand on recroise tous les témoignages,
07:00 on a l'impression que ça s'est vraiment passé comme ça.
07:02 - On s'est super bien passé.
07:04 - Pourquoi est-ce que ça ne se passe pas toujours comme ça sur les films de cinéma ?
07:06 - Parce qu'on n'a pas toujours le choix en tant qu'acteur.
07:08 Il faut comprendre qu'un acteur a besoin de payer ses impôts, déjà,
07:10 a besoin d'exister sur l'écran,
07:12 et qu'il n'a pas de grande décision à prendre sur sa carrière, en fait.
07:14 C'est d'autres personnes qui prennent la décision pour lui.
07:16 C'est quelqu'un qui le choisit.
07:18 Ils doivent passer des tests,
07:20 il est en compétition avec d'autres acteurs,
07:22 et quand il est choisi,
07:24 c'est le choix du réalisateur,
07:26 c'est le choix du producteur,
07:28 c'est le choix de l'équipe qui le choisit,
07:30 mais lui, il n'a pas vraiment de décision là-dessus.
07:32 - C'est parfois un choix par défaut, même.
07:34 - C'est un choix par défaut,
07:36 et c'est 90% du temps où on accepte des films par défaut.
07:38 Parce qu'il faut travailler, parce que...
07:40 Excusez-moi.
07:42 - Quelqu'un qui appelle ?
07:44 - C'est qui ? - Mon père.
07:46 - Je suis obligé de répondre, excusez-moi.
07:48 - Allez-y, allez-y. - Peter, je suis en interview.
07:50 Je t'aime toujours.
07:54 Eh ben, va marcher.
07:56 Envoie-moi un mail.
07:58 - OK, salut.
08:00 - Peter Kassovitz ? - Ouais.
08:02 - C'est votre père ? - Ouais, c'est mon père.
08:04 - Ah, d'accord ! - Oui, oui, c'est lui.
08:06 - T'as compris, t'es vraiment le père. - Ça y est, je connecte tout.
08:08 - Et le Kassovitz réalisateur,
08:10 quel regard il jette sur le Kassovitz acteur ?
08:12 - Acteur ? - Ouais.
08:14 - En tant que réalisateur, si moi, je me prenais en tant qu'acteur...
08:18 Je me trouve pas... - Tu trouves pas la réponse ?
08:26 - Non, je me trouve pas.
08:28 Je me trouve un acteur
08:30 très... techniquement très limité.
08:32 Mais j'ai un talent,
08:34 c'est que je m'en bats les couilles.
08:36 Et ça,
08:38 c'est 80% du travail.
08:40 C'est exactement comme arriver sur un ring de boxe
08:42 et être décontracté.
08:44 C'est pour ça que j'aime la boxe-thaï, parce que la boxe-thaï,
08:46 ça se fait en souriant,
08:48 et que les entraînements, t'es là, t'as une raison,
08:50 il faut que tu souris.
08:52 Et si tu peux arriver décontracté,
08:54 tout d'un coup, t'es moins fatigué,
08:56 t'es pas forcément le meilleur boxeur,
08:58 mais au moins,
09:00 ça passe avec aisance.
09:02 - Merci Mathieu. - Merci à vous.

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