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Philippe Astruc, procureur de la République de Rennes, invité de France Bleu Armorique, ce jeudi 21 mars.

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Transcription
00:00 7h46, une nouvelle scène de violence hier à Rennes. Un homme a été poignardier, quartier Dublone, Valentin.
00:06 Dans ce même quartier rennais où une fusillade a éclaté il y a dix jours, place Dubana.
00:10 On en parle ce matin avec le procureur de la République de Rennes. Bonjour Philippe Astruc.
00:13 Bonjour.
00:14 Que sait-on de cette agression au couteau qui a eu lieu hier ?
00:16 Pour le moment on n'en connaît pas le contexte. On ne sait pas s'il y a un lien particulier.
00:21 Ce qui a été évoqué c'est un vol de portable mais c'est à vérifier.
00:24 L'enquête est donc en cours ?
00:26 En cours, la garde à vue.
00:27 Est-ce que vous êtes en mesure de faire un lien entre l'agression d'hier et la fusillade d'il y a dix jours ?
00:31 Non, il n'y en a pas d'établie.
00:33 Je pense que les faits de l'autre jour sont d'une toute autre gravité.
00:38 Ils répondent à d'autres logiques que celles d'affrontements de deux groupes rivaux
00:42 de trafiquants de drogue qui se disputent la place Dubana.
00:46 Est-ce qu'il y a eu de l'avancée justement sur cette enquête ? Est-ce qu'il y a eu des interpellations ?
00:50 Où en est-on ?
00:52 Pas d'interpellations, je ne vous dirai évidemment pas où nous en sommes dans nos investigations.
00:57 Il y a eu un épisode précédent, les 6 et 9 décembre.
00:59 Cinq personnes ont été interpellées le 23 janvier, incarcérées.
01:04 Donc ça vous montre un petit peu les délais dont nous avons besoin pour faire des enquêtes solides.
01:08 Moi j'ai besoin de preuves.
01:10 Philippe Astruc, procureur de la République de Rennes.
01:12 Depuis quelques jours, 4000 policiers et gendarmes sont mobilisés à Marseille pour mener une vaste opération de lutte contre les trafiquants de drogue.
01:18 Est-ce que vous êtes favorable à une opération similaire à Rennes ?
01:21 Oui, on y réfléchit avec monsieur le préfet puisque c'est une décision qu'on prend ensemble.
01:26 On le fera au moment où ça nous paraîtra le plus efficace.
01:30 Voilà, on n'est pas dans la gesticulation, on veut des résultats.
01:33 Donc on construira ces opérations là et quand ça nous paraîtra utile.
01:38 Ça veut dire quoi efficace ? Ça veut dire qu'il vous manque encore des informations pour relier tout le système qui est en place actuellement à Rennes ?
01:43 Ça veut dire qu'il faut qu'elle s'appuie sur des dossiers judiciaires, des enquêtes qui ont suffisamment prospéré pour aller interpeller des gens
01:51 auprès de qui on a des questions à poser.
01:54 Donc vous croyez en ce genre d'opération pour éradiquer, pour reprendre les termes du gouvernement, les trafics de drogue,
02:00 est-ce qu'elle est là la solution, une forte présence policière sur place au cœur des trafics pendant plusieurs semaines ?
02:05 Tout le monde a compris que c'est compliqué de lutter contre les trafics.
02:08 Donc il y a plusieurs choses à faire. Les opérations de ce type sont une des choses à faire.
02:14 Il y en a d'autres. Il faut évidemment questionner la façon dont on travaille.
02:17 Il faut peut-être raisonner différemment sur certains sujets en matière d'urbanisme, en matière de santé publique.
02:22 Et bien sûr sur les questions de police et de justice, voir ce qui marche, voir ce qui marche moins bien, s'adapter,
02:29 parce que les gens qu'on a en face, eux, ils s'adaptent tout le temps.
02:31 Des fusillades, comme on en a vu il y a 10 jours, c'est un échec pour vos services ? C'est comme ça que vous le prenez ou pas ?
02:36 Moi ça me heurte parce que je pense aux riverains.
02:40 Ça me fait mal parce que je pense à ce qu'ils vivent.
02:44 Donc ça me motive et croyez-moi, je ne suis pas prêt à lâcher le morceau.
02:49 On les a entendus d'ailleurs dans différents reportages ce matin. Selon des policiers, René, des trafiquants de drogue
02:54 viendraient de Paris et Marseille désormais. Ils seraient implantés à Rennes. Est-ce que vous êtes en mesure de nous confirmer cette information ?
03:01 Pour être précis, dans ce qu'on pourrait appeler le match-allé de la place du Bannat de décembre,
03:08 les cinq personnes interpellées, il y a un René et il y en a quatre qui viennent de l'extérieur.
03:12 Il y en a un qui vient de 95, deux du 93 et un du 59.
03:16 C'est une illustration de forme d'ubérisation du recrutement, que ce soit pour revendre, que ce soit pour faire des règlements de compte.
03:24 Le recrutement est national maintenant. Donc effectivement, sur nos points de revente, on ne voit pas que des René.
03:30 Donc on ne peut plus réfléchir au niveau local. Vous travaillez main dans la main avec vos confrères parisiens par exemple ?
03:37 Oui bien sûr, on est en liaison étroite à la fois en termes policiers, en termes judiciaires
03:42 pour effectivement détecter. Mais ça complique les choses.
03:47 Quand les gens viennent travailler 15 jours et repartent, c'est plus compliqué que si ce sont toujours les mêmes qui restent sur place.
03:52 C'est pareil pour les règlements de compte, mais preuve en est, en décembre, on a réussi à les identifier, les interpeller, ils sont à Vézins,
03:59 comme 359 autres qui sont emprisonnés pour des questions liées aux stupéfiants.
04:05 Donc ces 47% des détenus à Rennes le sont pour le trafic de stupéfiants. Il n'y a aucune impunité.
04:11 C'est donc désormais un nouveau type de trafiquants, si on comprend bien ce que vous dites.
04:16 Ce sont de puissants réseaux qui évoluent là en Bretagne désormais ?
04:20 Non, je pense qu'ils ne sont pas plus puissants qu'avant. Simplement, ils ont adapté leur méthode de travail et ils recrutent
04:25 non plus en local, mais pas que en local, mais aussi au niveau national.
04:29 Que ce soit pour revendre ou que ce soit pour faire des règlements de compte, des hommes de main s'ils voulaient.
04:33 Et c'est une digitalisation, ils recrutent via des plateformes.
04:37 Il y a deux mois, et on finira par là, Philippe Astruc, une vaste opération a été prévue au Blône.
04:42 160 policiers du RET de la BRI étaient prêts en place à l'aube pour intervenir.
04:47 Finalement, ça a été annulé à la dernière seconde, car ils ont été repérés et une fuite en interne.
04:52 Vous avez été scandalisé par cet épisode. On en est où ? La police des polices a été saisie ?
04:56 Oui, elle travaille. Elle travaille. C'est une évolution globale.
05:01 La porosité, on l'avait avec des acteurs privés, par exemple des dockers pour l'arrivée de la cocaïne, des personnes comme ça.
05:08 Et maintenant, on voit des acteurs publics aussi être corrompus.
05:11 Donc, il ne faut pas penser qu'en France, on est à l'abri de ça.
05:15 La corruption, ça peut exister. Je crains qu'il y ait eu une fuite interne.
05:21 Il faut identifier la fuite. Vous demandez une sanction exemplaire ?
05:26 Oui, évidemment. La place de ce genre de personnage qui donne des informations aux trafiquants, c'est aveux. Et c'est aveux longtemps.
05:33 Merci beaucoup, Philippe Astruc, procureur de la République de Rennes. Bonne journée à vous.

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