• il y a 8 mois
Quelle place faut-il faire aux moins de 30 ans dans une société vieillissante ? Pour comprendre leurs attentes et leurs angoisses face à un avenir incertain, "le Nouvel Obs" fait débattre Salomé Saqué, autrice du best-seller "Sois jeune et tais-toi" (Payot), avec François Hollande l’ancien président de la République. Un échange vif et direct sur le choc des générations.

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00:00:00 Vous êtes le premier président dont j'ai pu vraiment observer le mandat
00:00:03 puisque c'était la première fois que j'étais adulte.
00:00:05 La jeune que j'étais, elle était très déçue.
00:00:07 Le propre de la politique, c'est de susciter de l'espoir
00:00:10 et quand la gauche est en responsabilité,
00:00:14 de nourrir des déceptions et des désillusions.
00:00:17 Moi ce qui comptait au moment où je suis devenu président,
00:00:20 c'était de lutter contre le chômage.
00:00:21 C'était moi, ma seule obsession.
00:00:23 Depuis maintenant plusieurs années, je parcours la France
00:00:40 pour rencontrer des lycéens, des étudiants, des jeunes,
00:00:46 pour à la fois que je leur transmette ce que j'ai appris,
00:00:49 ce que je sais, ce que j'ai fait ou pas fait,
00:00:52 et aussi qu'ils me renvoient ce qu'ils ressentent,
00:00:55 ce qu'ils vivent, leurs inquiétudes, leurs angoisses,
00:00:58 leurs espoirs, il y en a,
00:01:00 et de manière à ce que cet échange puisse contribuer
00:01:02 à la solidarité entre générations.
00:01:05 Car dans les crises que l'on traverse,
00:01:07 c'est la jeunesse qui est elle-même la plus exposée,
00:01:11 mais elle ne pourra trouver véritablement une réponse
00:01:15 à ces difficultés que s'il y a une solidarité
00:01:19 des générations précédentes,
00:01:20 qui ont leur propre part de responsabilité
00:01:23 dans la situation d'aujourd'hui.
00:01:24 Moi, en tant que jeune, j'avais connu des difficultés
00:01:27 telles qu'une forme de précarité, une certaine inquiétude,
00:01:30 une certaine éco-anxiété,
00:01:31 donc j'étais touchée par certaines thématiques
00:01:33 qui touchent une partie des jeunes,
00:01:36 et je trouvais qu'on n'était pas forcément pris au sérieux
00:01:38 par une partie des générations précédentes,
00:01:40 et je m'étais confrontée personnellement
00:01:42 à des situations d'incompréhension générationnelle,
00:01:45 notamment sur le contexte, par exemple,
00:01:47 du marché du travail qui avait changé.
00:01:49 Et à partir de cette intuition,
00:01:51 une fois que je me suis penchée sur les chiffres,
00:01:53 sur les données économiques dont nous disposions,
00:01:55 sur les études qui existaient sur la sociologie de la jeunesse,
00:01:59 j'ai réalisé qu'une partie de mes intuitions
00:02:00 sur mon cas personnel était fondée,
00:02:03 et que mon cas n'était pas du tout représentatif de la jeunesse,
00:02:08 je pense que ça c'est vraiment important de le préciser,
00:02:09 et qu'il n'y a pas une jeunesse, mais des jeunesses,
00:02:12 et qu'une grande partie de ces jeunesses
00:02:13 rencontrent des difficultés majeures,
00:02:15 se retrouvent confrontées au même mur d'incompréhension,
00:02:18 parfois d'une partie des générations précédentes,
00:02:21 et qu'il y avait urgence, pour moi en tout cas,
00:02:24 à faire entendre ces voix,
00:02:27 et j'insiste sur la pluralité de ces voix-là,
00:02:30 de ces jeunes qui ne trouvaient à mes yeux
00:02:32 pas assez d'écho médiatique, pas assez d'écho politique.
00:02:35 Beaucoup de personnes ne prennent pas au sérieux
00:02:38 les problèmes des jeunes, parce qu'ils sont jeunes,
00:02:40 et parce qu'on se dit qu'on s'adapte,
00:02:41 qu'on est à un âge où on a la vie devant soi,
00:02:43 et que finalement ce n'est pas si grave,
00:02:44 et on a absolument besoin collectivement
00:02:47 de se pencher sur ce sujet,
00:02:50 tout en y apportant la nuance qui est nécessaire,
00:02:52 parce qu'on y reviendra peut-être,
00:02:54 mais souvent il y a une tendance à mettre tous les jeunes
00:02:56 dans le même sac, et à penser que les jeunes
00:02:58 parlent d'une seule et même voix,
00:02:59 alors qu'ils ne sont qu'une génération,
00:03:01 qu'ils ne sont qu'une tranche d'âge,
00:03:02 et donc qu'ils ont aussi une pluralité
00:03:04 qu'il convient de décrire avec le plus de précision possible,
00:03:08 c'est pour ça que j'ai essayé de faire ça,
00:03:10 et donc aujourd'hui ce débat,
00:03:12 ça s'inscrit dans toute la lignée de mon travail
00:03:15 qui vise à faire entendre ces voix-là de jeunes,
00:03:19 à faire entendre les difficultés que rencontrent les jeunes,
00:03:21 pour que la majorité de la population
00:03:25 en prenne conscience en fait, tout simplement.
00:03:26 Aujourd'hui, les 18-29 ans,
00:03:32 qui est la tranche d'âge que j'ai étudiée pour ce livre,
00:03:34 ils sont deux fois moins nombreux que les plus de 60 ans,
00:03:36 donc aujourd'hui, ceux qu'on pourrait qualifier de jeunes
00:03:39 sont en minorité démographique,
00:03:42 et ont une situation qui est déséquilibrée
00:03:44 sur le plan économique,
00:03:45 ce sont eux qui sont les moins payés,
00:03:46 ce sont eux qui ont le plus de difficultés d'accès au patrimoine,
00:03:49 et ça n'a pas toujours été comme ça,
00:03:50 même si bien sûr, ça peut paraître logique
00:03:52 qu'on accumule du patrimoine au cours de sa vie,
00:03:55 les jeunes sont particulièrement, je trouve, victimes d'inégalités,
00:03:59 ils sont également confrontés à la crise écologique,
00:04:02 et ça c'est le rapport du GIEC qui le dit,
00:04:04 plus que les autres générations,
00:04:05 parce qu'ils vont y être confrontés au réchauffement climatique
00:04:09 – Ils vont subir les conséquences
00:04:10 – Plus longtemps, et de manière plus intense,
00:04:13 il y a ce chiffre, une personne qui est née en 2020
00:04:15 va subir 7 fois plus de vagues de chaleur au cours de sa vie
00:04:18 qu'une personne qui est née en 1960,
00:04:19 donc il y a une inégalité quand même de facto générationnelle,
00:04:23 et ensuite, il y a toute cette question de la politique,
00:04:27 de l'exposition aux réseaux sociaux,
00:04:29 que j'ai essayé de traiter,
00:04:30 tout plein de choses qui caractérisent ces nouvelles générations,
00:04:33 et donc l'objectif du livre n'était pas de dire
00:04:34 que les jeunes d'aujourd'hui sont mieux que les jeunes d'avant,
00:04:37 ni qu'ils sont moins bien,
00:04:38 mais simplement d'essayer de rendre compte de ce qu'ils vivent,
00:04:41 et pour beaucoup d'entre eux,
00:04:42 cela occasionne des difficultés qui sont majeures,
00:04:44 je pense qu'aujourd'hui, les chiffres que je veux mettre à l'agenda,
00:04:47 c'est les chiffres qui concernent la santé mentale des jeunes,
00:04:49 la tranche d'âge en France qui est la plus touchée par les pensées suicidaires,
00:04:53 on a quand même envie de mourir, ce sont les jeunes, les 18-24 ans,
00:04:57 selon la dernière enquête de Santé publique France
00:04:59 qui est parue début 2024,
00:05:01 on a une augmentation de ces troubles de la santé mentale,
00:05:03 un jeune sur cinq qui souffre de troubles dépressifs,
00:05:06 c'est deux fois plus qu'en 2017,
00:05:07 donc je pense qu'il y a vraiment urgence à encore une fois
00:05:09 prendre au sérieux ces difficultés-là,
00:05:12 et tous ces effets de contexte qui peuvent expliquer
00:05:16 pourquoi les jeunes sont mal,
00:05:17 sans céder à la grille de lecture un peu facile
00:05:20 qui voudrait que les jeunes soient plus sensibles ou tout simplement victimaires.
00:05:22 La jeunesse, elle a toujours été minoritaire,
00:05:24 elle n'a jamais été dans la domination des générations précédentes,
00:05:30 mais elle était toujours influente,
00:05:33 et c'est elle qui fixait l'agenda, y compris l'agenda politique,
00:05:38 notamment après mai 68, les années 70, les années 80,
00:05:42 des libertés nouvelles, des conquêtes y compris sociales,
00:05:47 et une insertion qui était déjà plus commode,
00:05:50 même s'il était difficile sur le marché du travail.
00:05:53 Mais aujourd'hui, la jeunesse, elle n'est pas minoritaire,
00:05:55 elle est très minoritaire.
00:05:57 Et pour reprendre des chiffres,
00:05:59 les plus de 50 ans sont maintenant majoritaires sur le plan électoral,
00:06:05 ce qui veut dire que les thèmes des plus de 50 ans se sont imposés.
00:06:09 De quoi parle-t-on ?
00:06:11 De la retraite, des EHPAD, de la fin de vie,
00:06:16 du poids des impôts, de l'immigration,
00:06:19 autant de thèmes qui ont une signification, une valeur,
00:06:24 mais qui sont très loin quand même des préoccupations de la jeunesse.
00:06:28 Autre réflexion, chaque génération a eu ses crises, ses catastrophes,
00:06:33 la génération, la mienne, avait connu la crise économique des années 80,
00:06:39 une inflation très forte, le Sida,
00:06:42 mais jamais une génération comme celle qu'il y a aujourd'hui
00:06:46 entre 15 et 30 ans n'a connu autant d'épreuves.
00:06:53 La question climatique qui était déjà présente dans les années 70,
00:06:57 le constat avait déjà été fait,
00:06:59 les clubs de Rome et autres avaient déjà évoqué
00:07:03 la question de l'épuisement des ressources,
00:07:06 mais ça n'avait pas été pris en compte,
00:07:07 d'autant moins que la crise économique, le chômage
00:07:10 avaient évacué cette logique-là qui laissait penser
00:07:14 que notre économie productiviste faisait acte de prédation.
00:07:19 Donc il y a l'angoisse climatique, qui maintenant est incontestable,
00:07:23 ce n'est pas simplement un phénomène d'appréhension, c'est une réalité.
00:07:27 Deuxièmement, il y a la crise sécuritaire, des guerres.
00:07:34 Jamais on n'avait connu des guerres aussi proches.
00:07:37 Bien sûr que la question du Proche-Orient n'est pas nouvelle,
00:07:39 mais enfin l'invasion d'un pays aux confins de l'Europe
00:07:42 avec une puissance nucléaire et avec un dictateur,
00:07:47 il n'est pas le seul, mais qui agite la menace d'utilisation des armes nucléaires,
00:07:51 sans compter la Corée du Nord, l'Iran, la prolifération nucléaire,
00:07:56 donc c'est une inquiétude supplémentaire.
00:07:58 Et enfin, ce qui a provoqué le Covid, c'est-à-dire l'enfermement, le confinement.
00:08:05 Jamais une génération n'avait été claustrée, n'avait été privée de liberté.
00:08:14 Et je partage le constat sur la question de la santé mentale,
00:08:19 qui touche, bon pas que les jeunes, mais qui touche particulièrement les jeunes.
00:08:24 Parce que c'est des cicatrices qui ne s'effaceront pas.
00:08:28 Je n'oublie pas non plus les attentats terroristes,
00:08:30 je peux en parler en connaissance de cause,
00:08:32 qui ont frappé quand même des jeunes qui avaient peut-être 10 ans à l'époque,
00:08:37 et dont les premières images à la télévision étaient des images tragiques
00:08:41 et qui peuvent rester dans les esprits, dans les cerveaux.
00:08:45 Donc c'est pour ça que ma génération, que les générations qui sont en responsabilité
00:08:52 ou qui ont eu des responsabilités, ont une dette à l'égard de la jeunesse.
00:08:57 Mais donc il y a une dette écologique, une dette financière,
00:09:00 une dette politique à l'égard de la génération qui vient.
00:09:03 Alors comment on répare ? C'est ça la question.
00:09:05 Eh bien il y a un acte de solidarité à engager par rapport à la génération qui arrive,
00:09:13 ou aux générations qui arrivent.
00:09:15 Parce que je pense que ça va durer sur une ou deux générations,
00:09:19 mais pas simplement sur la génération qui a entre 20 et 30 ans aujourd'hui.
00:09:22 Je dois aussi dire la réalité des choses.
00:09:25 Parce que c'est avec la réalité qu'on peut engager des politiques,
00:09:29 parce qu'il y a des politiques qui forcément redistribueront les richesses,
00:09:34 les moyens d'accéder à la connaissance,
00:09:36 parce que les grandes priorités pour les jeunes c'est climat,
00:09:40 éducation, logement et lutte contre la précarité.
00:09:43 Vous êtes le premier président dont j'ai pu vraiment observer le mandat,
00:09:46 puisque c'était la première fois que j'étais adulte, 17 ans,
00:09:49 et après le début de mes études.
00:09:51 Et je dois vous dire que j'ai été, en tout cas la jeune que j'étais, très déçue.
00:09:55 Je pense que ça a même engagé une rupture de confiance,
00:09:59 personnellement et je pense comme beaucoup de personnes de ma génération,
00:10:02 avec la politique parce qu'il y avait un écart énorme entre les promesses.
00:10:06 Et après ce qu'on a eu, moi ce qui m'a marqué personnellement,
00:10:09 et là je parle de côté personnel, ça a été l'utilisation du 49-3,
00:10:14 parce qu'il y avait cette impression que la démocratie était attaquée.
00:10:19 Moi c'est l'impression que j'ai eue à l'époque,
00:10:20 même si je n'avais pas une grille de lecture aussi complète qu'aujourd'hui.
00:10:24 Après il y a bien sûr eu aussi les questions de violences policières.
00:10:27 Moi je ne pensais pas qu'on pouvait subir des violences policières
00:10:30 quand on allait manifester.
00:10:31 J'ai connu ça pour la première fois sous votre mandat,
00:10:33 pas personnellement mais des amis à moi qui à l'époque manifestaient
00:10:36 contre la loi travail et de manière générale,
00:10:38 toute la libéralisation de l'économie dont vous êtes je pense conscients,
00:10:43 ça a été en tout cas très déceptif, je pense pour moi et pour énormément de jeunes,
00:10:50 de constater qu'un président qui avait donné tant d'espoir finalement,
00:10:54 a également nommé Emmanuel Macron comme ministre de l'économie,
00:10:57 qui est quand même responsable pour le coup aussi
00:11:00 de beaucoup des choses qu'on dénonce aujourd'hui.
00:11:02 Le propre de la politique, c'est de susciter de l'espoir
00:11:05 et quand la gauche est aux responsabilités,
00:11:09 de nourrir des déceptions et des désillusions.
00:11:13 S'il n'y a pas d'espoir, il n'y a pas d'engagement et il n'y a pas de victoire.
00:11:17 Et après, il y a le rapport à la réalité,
00:11:20 qui est un rapport toujours difficile,
00:11:23 comment aller jusqu'au bout de nos promesses
00:11:26 et comment aller au-delà même des engagements qui ont été pris.
00:11:30 Et moi ce qui comptait au moment où je suis devenu président,
00:11:34 c'était de lutter contre le chômage, c'était moi, ma seule obsession,
00:11:37 qui touchait, et qui touche encore d'ailleurs,
00:11:40 20-25% et dans certains quartiers, 40% des jeunes.
00:11:43 Ma seule priorité était celle-là.
00:11:46 Et reconnaissons que le chômage, il a baissé.
00:11:49 Et pour quel type d'emploi ?
00:11:51 Non mais ce qui comptait, c'était de sortir une population
00:11:55 qui était pas simplement fragilisée,
00:11:58 mais qui était assommée par l'empêchement de pouvoir se projeter,
00:12:04 faute d'emploi, de leur permettre d'accéder à l'emploi
00:12:07 et autant que possible à un CDI.
00:12:09 C'est pour ça que j'ai fait les emplois d'avenir pour les jeunes, 150 000.
00:12:12 C'est pour ça que j'ai fait la garantie jeunes,
00:12:14 qui a permis à des centaines de milliers de jeunes
00:12:17 d'aller dans les missions locales et d'avoir non seulement une formation,
00:12:20 mais aussi une allocation et enfin, le plus souvent, un logement.
00:12:25 C'est pour ça que j'ai augmenté les bourses étudiantes.
00:12:28 C'est pour ça que j'ai créé aussi 60 000 postes dans l'éducation.
00:12:32 Parce que c'était ça ma priorité.
00:12:34 C'est pour ça que j'ai fait aussi le crédit formation
00:12:36 qui est aujourd'hui remis en cause.
00:12:38 C'était de donner plus de conditions, plus de chances, plus de capacités,
00:12:43 notamment à la jeunesse pour accéder à l'emploi.
00:12:45 Et ce que vous appelez libéralisation n'était pas une libéralisation du tout.
00:12:49 D'ailleurs, c'était de faire en sorte que des entreprises qui allaient fermer,
00:12:52 c'est-à-dire d'entreprises qui allaient disparaître avec les emplois
00:12:56 qui allaient avec, puissent être un moment soutenu.
00:12:59 C'est parce que j'étais contre la finance que j'étais contre les entreprises.
00:13:01 S'il n'y a plus d'entreprises, il n'y a plus d'emplois
00:13:03 et il n'y a plus de capacité à vivre ensemble.
00:13:06 Donc c'est ça que j'ai engagé.
00:13:07 Par ailleurs, pour moi, ce qui était aussi important,
00:13:10 c'était de respecter une promesse que j'avais faite,
00:13:14 le mariage pour tous, qui fait qu'aujourd'hui, des familles,
00:13:18 je ne parle pas des couples, je parle des familles,
00:13:20 viennent me voir et me dire "mais si vous n'aviez pas été élu,
00:13:22 il n'y aurait pas le mariage pour tous".
00:13:24 C'est improbable.
00:13:25 Et puis enfin, sur la question écologique,
00:13:28 finalement, peut-être qu'on ne regardera que cet aspect-là,
00:13:30 mais il est le plus important.
00:13:32 Qui a eu l'accord de Paris ?
00:13:34 Même si on dit, et c'est vrai, qu'il est insuffisant,
00:13:36 qu'il manquait de contraintes,
00:13:38 mais s'il n'y avait pas l'accord de Paris aujourd'hui,
00:13:41 il n'y aurait pas d'abord le fait que le GIEC puisse régulièrement nous dire
00:13:45 que nous n'allons pas assez loin,
00:13:46 et enfin le fait qu'il soit possible d'améliorer encore,
00:13:51 par un consensus, parce qu'il faut bien que tous les pays soient là.
00:13:55 Et j'ai fait en sorte que la France, même avec retard,
00:13:58 puisse faire davantage pour le renouvelable
00:14:00 que nous le faisions jusqu'à présent.
00:14:02 Alors voilà pourquoi on ne fait pas tout en un caca-là.
00:14:06 Quant au 49.3, quand vous avez commencé par là, je me suis dit mais...
00:14:10 À l'époque c'est quelque chose qui m'a marqué.
00:14:11 Où va-t-elle ?
00:14:12 Parce que j'allais dire, le 49.3 c'est prévu par la Constitution, et qu'importe.
00:14:18 Est-ce que dans ce que j'ai fait, c'est ça le plus important,
00:14:22 face au terrorisme qui menaçait la vie de nos concitoyens,
00:14:27 et puis même notre propre cohésion,
00:14:29 est-ce qu'on a manqué à une liberté ?
00:14:32 Est-ce qu'on a entravé une seule action
00:14:38 qui pouvait être celle d'une génération
00:14:41 qui voulait prendre sa place dans la société ? Non.
00:14:44 Est-ce qu'on a créé une quelconque stigmatisation ? Jamais.
00:14:48 Est-ce qu'on a essayé de monter les Français les uns contre les autres ?
00:14:51 En aucune manière.
00:14:52 Donc c'est ça aussi qui compte,
00:14:54 savoir que les libertés ont été protégées.
00:14:57 Voilà ce que j'ai fait.
00:14:58 Et c'est pour ça que, même s'il y a des déceptions, et je les reconnais,
00:15:01 et même s'il y a beaucoup à faire, et heureusement qu'il y a beaucoup à faire,
00:15:05 parce que penser que la gauche vient au pouvoir et elle fera tout,
00:15:10 ça veut dire que les prochaines élections n'auront même plus aucune raison d'être.
00:15:15 Si, il faut qu'il y en ait d'autres.
00:15:16 Il faut qu'il y ait d'autres élections, d'autres victoires,
00:15:18 pour qu'il y ait d'autres progrès.
00:15:19 J'entends ce que vous me dites sur le fait de garantir les libertés.
00:15:22 Je pense qu'aujourd'hui les libertés ont été tellement réduites
00:15:25 qu'effectivement, quand on compare, on oublie que vous en partez à la base.
00:15:29 Moi j'avais été marquée, de toute façon, par la loi sur la déchéance de nationalité
00:15:33 qui avait été très controversée à l'époque.
00:15:34 Enfin, c'est pas moi qui le disais.
00:15:36 Juste un mot là-dessus. Elle n'a jamais eu lieu la loi de fin de...
00:15:38 Oui, mais c'était vous qui l'aviez...
00:15:39 Dans quel contexte ?
00:15:41 Vous savez que...
00:15:42 ... poussée en tant qu'homme de gauche, quand même.
00:15:44 Oui, oui. Les déchéances de nationalité existent aujourd'hui.
00:15:47 Il y en a eu plusieurs qui ont été prises.
00:15:49 Il s'agissait de la déchéance de nationalité de criminels terroristes
00:15:53 qui avaient eu la nationalité française à la naissance.
00:15:59 Au lendemain des attentats du 13 novembre,
00:16:02 il y a une demande de cohésion face à des terroristes français
00:16:07 qui ont commis les actes les plus abominables,
00:16:10 qui avaient parfois une double nationalité, pas toujours.
00:16:13 Il y a cette demande-là.
00:16:15 J'y réponds. J'y réponds pour faire consensus.
00:16:19 Je constate assez rapidement que ce qui était admis au début
00:16:23 ne l'est pas au milieu du débat.
00:16:26 Mais qu'est-ce que je fais ? Je retire le texte.
00:16:29 En tout cas, si on repart sur les questions économiques,
00:16:31 il y a quand même eu, objectivement, une précarisation des emplois des jeunes.
00:16:34 Là, il y a une vraie inégalité quand on regarde par rapport aux personnes
00:16:36 de plus de 50 ans notamment.
00:16:38 Aujourd'hui, il y a un emploi sur deux des jeunes qui est un emploi dit précaire.
00:16:41 Donc, c'est un emploi qui n'est pas un CDI.
00:16:42 C'est le statut d'auto-entrepreneur, le CDD, l'intérim.
00:16:46 Le stage !
00:16:48 Je ne pense même pas que c'est compté dans les emplois précaires.
00:16:51 En fait, c'est l'apprentissage. Il y a eu tous ces facteurs-là.
00:16:54 Et ça, ça s'inscrit quand même dans le cadre d'une certaine flexibilisation
00:16:58 du marché du travail que vous avez défendu, notamment avec la loi travail,
00:17:02 avec la loi, même l'arrivée encore une fois d'Emmanuel Macron sur cette question-là.
00:17:06 Laissons Emmanuel Macron là où il est.
00:17:07 Et quand même, vous l'avez nommé ministre de l'Économie.
00:17:09 C'est comme ça qu'il est devenu président de la République aussi.
00:17:13 Non, ce n'est pas pour ça qu'il est devenu président de la République.
00:17:14 Il l'est devenu parce que les Français ont voté pour lui.
00:17:16 Ce n'est pas pareil.
00:17:17 Et qu'il s'est présenté contre... Enfin, sans que je ne sois d'accord avec sa candidature.
00:17:21 C'est autre chose.
00:17:22 Mais sur ce qu'a fait le ministre de l'Économie comme le gouvernement, je l'assume,
00:17:26 est-ce que ça a été une libéralisation ?
00:17:27 Est-ce que la loi travail, qui n'était pas portée par lui,
00:17:30 est-ce que la loi travail a été une libéralisation ?
00:17:32 Non. La loi travail, c'était quoi ?
00:17:34 C'était de permettre qu'il y ait des accords majoritaires avec les syndicats
00:17:38 dans l'entreprise pour assurer, non pas la précarisation, mais la durée du travail.
00:17:46 Et les syndicats se sont fortement opposés à cette loi.
00:17:48 Certains syndicats, pas la CFDT, pas la CFDC, pas l'UNSA.
00:17:52 Certains syndicats, oui, et je respecte ça.
00:17:55 C'est mieux quand les syndicats sont tous d'accord.
00:17:57 Mais là, en l'occurrence, il y avait une partie du mouvement syndical qui était favorable.
00:18:01 Qui était favorable parce que ça permettait des emplois en CDI,
00:18:04 justement contre la précarisation.
00:18:06 Deuxièmement, ça évitait qu'il y ait des plans sociaux
00:18:08 qui soient actés au détriment des salariés.
00:18:11 Et enfin, dans cette même loi, il y a la garantie jeune, le crédit.
00:18:16 Le personnel d'activité, qui est quand même pour nous
00:18:19 la meilleure façon de donner du temps aux salariés.
00:18:22 Donc voilà pourquoi je revendique ce que j'ai fait.
00:18:25 Mais, et que d'ailleurs, après, voilà l'émission d'Emmanuel Macron,
00:18:29 il l'a défait, il a défait la loi Comrie.
00:18:31 Parce que pour lui, c'était une loi qui précisément
00:18:34 ne correspondait pas à ses objectifs.
00:18:35 Effectivement, ils votent beaucoup moins, ils votent de moins en moins,
00:18:38 comme d'ailleurs le reste de la population.
00:18:40 Et normalement, une fois qu'ils votent, c'est-à-dire que ce n'est pas la majorité,
00:18:43 le premier vote des jeunes est un vote pour une gauche plutôt radicale.
00:18:47 En tout cas, là, aux dernières élections, c'était la Dupesse,
00:18:50 c'était Jean-Luc Mélenchon qui a emporté quand même le vote des jeunes.
00:18:54 Juste après, effectivement, l'extrême droite.
00:18:56 Et enfin, des partis plus traditionnels, ou celui d'Emmanuel Macron.
00:19:01 Et moi, ce que je retiens de ces trois types de votes
00:19:04 qui sont l'abstention, c'est-à-dire le fait de ne pas voter,
00:19:06 mais que moi je compte quand même comme étant le phénomène politique,
00:19:10 le vote pour une gauche très radicale et le vote pour l'extrême droite,
00:19:13 c'est un rejet, c'est une volonté de changer le système.
00:19:17 C'est une insatisfaction profonde du système en place.
00:19:21 Il est quand même très intéressant de constater qu'il y a une particularité
00:19:24 de la jeunesse dans le comportement électoral
00:19:26 qu'on ne retrouve pas chez les plus âgés.
00:19:29 Et c'est quelque chose qu'a mis en avant notamment le politiste Vincent Tiberi,
00:19:33 que je cite dans le livre, qui a essayé d'étudier ces comportements électoraux.
00:19:37 Et donc, pour l'abstention, je pense qu'il y a vraiment une conviction
00:19:43 chez une grande partie des jeunes que la politique ne peut pas,
00:19:47 la politique au sens traditionnel, institutionnel,
00:19:49 ne peut pas changer leurs conditions,
00:19:51 c'est pas par là qu'on change les choses,
00:19:53 et que donc ils ne vont pas voter alors,
00:19:56 et c'était ça qui était vraiment très intéressant à observer,
00:19:59 qu'ils vont quand même manifester,
00:20:00 qu'ils vont s'engager dans des associations,
00:20:02 qu'ils vont parfois utiliser d'autres modes d'engagement,
00:20:05 et donc qu'ils ne croient pas en la chose politique,
00:20:08 alors c'est multifactoriel, c'est parce que c'est aussi leur âge
00:20:11 qui fait qu'ils sont en période de mobilité souvent,
00:20:13 donc ils ne sont pas proches de leur bureau de vote,
00:20:15 c'est un effet d'âge, c'est-à-dire que les jeunes ont toujours moins voté,
00:20:19 parce que c'est aussi un moment où se construit politiquement,
00:20:22 et c'est pour beaucoup aussi un rejet des hommes et des femmes politiques
00:20:27 qu'ils estiment corrompus, qu'ils estiment incompétents,
00:20:30 ça c'est des choses qui sont quand même beaucoup revenues,
00:20:32 qu'ils estiment faire de la langue de bois, qu'ils font de la langue de bois,
00:20:34 que de toute façon on ne s'intéresse pas de toute manière à leurs problématiques,
00:20:39 et qu'ils sont "asbines" en fait,
00:20:42 c'est quelque chose qui est beaucoup revenu
00:20:44 dans les fragments de déclarations politiques qu'ils voient passer
00:20:47 aujourd'hui dans les années 2020,
00:20:48 ils ont l'impression que de toute façon ce n'est pas à la hauteur,
00:20:51 que de toute façon ça ne change rien, et il y a un mépris en fait.
00:20:55 Alors j'insiste, c'est la partie-là qui s'abstient,
00:20:57 et ce n'est pas tous les jeunes,
00:20:58 mais il y a un mépris de certains politiques,
00:21:01 de toute façon, et c'est sur ça que je terminerai,
00:21:05 ne parlent pas de leurs problèmes,
00:21:06 et quand on regarde les préoccupations des jeunes,
00:21:08 pour le coup vous l'avez bien souligné,
00:21:10 ce n'est pas que leur destin,
00:21:12 même si bien sûr c'est la première préoccupation,
00:21:14 c'est qu'est-ce que je vais faire de ma vie,
00:21:16 comment je vais me nourrir, et préoccupations matérielles,
00:21:19 mais dans quelle filière je vais aller, quel métier je vais faire,
00:21:21 et ensuite on a l'écologie,
00:21:23 on a ces grandes thématiques de société,
00:21:25 vers quel avenir aussi collectif on se dirige,
00:21:28 et on constate que les discours politiques,
00:21:31 et encore plus les actes politiques,
00:21:33 ne vont pas en direction des jeunes,
00:21:35 et que ça explique donc ce désintérêt,
00:21:38 et donc après quand on passe à l'extrême droite et gauche radicales,
00:21:40 c'est quand même toujours des partis qui sont dans l'opposition,
00:21:43 des partis qui veulent un peu tout recommencer,
00:21:48 il y a cette idée de ne pas rester dans les institutions,
00:21:51 dans la politique telle qu'on la connaît,
00:21:53 avec ne serait-ce que la forme aussi,
00:21:55 qu'on prenne la nupèce,
00:21:58 ou qu'on prenne l'extrême droite,
00:22:00 il y a des questions de forme, de manière de s'exprimer,
00:22:02 de quels canaux ils utilisent,
00:22:04 qui tranchent avec ce qui a pu être fait plus traditionnellement,
00:22:07 et donc moi vraiment la grande conclusion que je tire,
00:22:11 c'est qu'il y a un rejet global de ce système là,
00:22:13 mais qu'en parallèle il y a une volonté chez énormément de jeunes,
00:22:17 de s'impliquer, qu'ils se sentent concernés,
00:22:19 qu'ils sont préoccupés,
00:22:20 qu'ils espèrent que les choses vont changer,
00:22:23 donc c'est pas du tout un désintérêt,
00:22:25 mais simplement ils ne pensent plus,
00:22:26 et je crois que c'est vraiment l'échec absolu des derniers quinquennats,
00:22:30 ils ne pensent plus qu'on change les choses avec la politique.
00:22:31 C'est vrai, et ça remonte à plusieurs années,
00:22:35 il y a une abstention qui est beaucoup plus forte chez les jeunes
00:22:40 qu'elle l'est chez les plus âgés.
00:22:42 Pour rester sur un chiffre,
00:22:43 chez les 18-25 ans, la participation au scrutin présidentiel c'est 67%.
00:22:49 Pour les plus de 85 ans c'est 86%.
00:22:52 Deuxièmement, cette abstention,
00:22:54 elle est le fait des catégories les plus modestes de la population,
00:22:57 des jeunes les plus modestes de la population,
00:23:00 qui sont les plus loin de l'acte électoral.
00:23:03 Ça ne veut pas dire que d'autres ne s'abstiennent pas,
00:23:05 parce que pour des raisons d'éloignement ou pour des raisons de rejet,
00:23:07 mais c'est d'abord le fait que ces jeunes de milieux populaires
00:23:11 se sentent peut-être moins,
00:23:14 s'intégrer à tout point de vue, y compris sur le plan politique.
00:23:17 Alors quelles sont les explications ?
00:23:19 Parce que l'abstention, elle continue à être élevée de 25 à 35 ans.
00:23:24 C'est-à-dire par rapport à une génération qui a déjà sa place
00:23:28 et qui n'est pas satisfaite non plus de ce qui lui est proposé.
00:23:34 Sûrement qu'il y a un problème d'offre politique.
00:23:36 Pour qu'on ait envie de voter, il faut qu'il y ait une espérance.
00:23:41 Pas simplement un rejet, une espérance.
00:23:43 On vient voter, pas simplement contre,
00:23:45 on vient voter pour, et encore davantage quand on est jeune.
00:23:48 Parce qu'il faut qu'il y ait un moment, une conquête,
00:23:52 qu'il y ait un progrès, une avancée,
00:23:55 qui peut se retrouver sur l'écologie, qui peut se retrouver sur le social,
00:23:58 qui peut se retrouver sur la culture, sur les libertés.
00:24:01 Il faut qu'il y ait ça. Et c'est ce qui a manqué.
00:24:03 C'est ce qui manque aujourd'hui, y compris dans la radicalité.
00:24:06 La radicalité n'offre aucun espoir.
00:24:08 La radicalité c'est quoi ? C'est pour LFI,
00:24:12 la contestation et la protestation contre un système,
00:24:16 qu'on peut entendre, mais qui ne se traduit pas.
00:24:18 - Mais ils proposent autre chose.
00:24:20 - Bien sûr qu'ils proposent, mais ça ne se traduit pas victorieusement.
00:24:24 Il n'y a aucun espoir que LFI puisse arriver aux responsabilités du pays.
00:24:28 Aucun. Il n'y a aucune raison, aucune chance, aucune condition
00:24:33 qui permette à LFI de devenir président de la République.
00:24:37 Donc c'est vrai que ce n'est pas motivant.
00:24:39 Même quand on est sur ces positions-là, ce n'est pas très motivant.
00:24:42 - On ne vote pas uniquement parce qu'on pense que ça peut réussir.
00:24:44 - Si, mais bien sûr. - On vote par idéal, comme vous dites.
00:24:46 - Mais on vote par idéal. - On ne vote pas parce qu'on a une...
00:24:48 - Bien sûr, on vote par idéal, mais... - On a une promesse devant nous.
00:24:50 - Mais une promesse qui va se réaliser. - Non.
00:24:53 - Si, autrement... - Ça dépend.
00:24:55 - Autrement... - Comme vous, de ne pas dire si.
00:24:57 - Ah si, je pense que la politique c'est fait pour gagner.
00:25:00 Ce n'est pas fait pour témoigner.
00:25:02 Ça a longtemps été la position du Parti communiste français
00:25:05 ou de l'extrême droite, d'être témoigné.
00:25:07 - Justement, les partis susceptibles de gagner, ils les intéressent pas.
00:25:09 - Et donc ce qu'il faut, et je vous rejoins,
00:25:11 ce qu'il faut c'est arriver à offrir un projet politique
00:25:15 qui emmène les jeunes vers des solutions possibles,
00:25:19 des solutions même idéales.
00:25:21 Deuxièmement, pourquoi il y a un vote d'extrême droite dans la jeunesse ?
00:25:25 Précisément parce qu'il y a une dépolitisation.
00:25:27 C'est parce que si les partis, si les mouvements,
00:25:32 s'il y avait un travail qui était mené,
00:25:36 si l'idéologie avait encore une place,
00:25:39 il y aurait assez peu de jeunes qui voteraient
00:25:42 pour des solutions qui excluent, qui écartent.
00:25:45 C'est pas spontanément ce qu'on trouve chez les jeunes.
00:25:48 Et bien pourtant, il y a à peu près, sur le corps électoral,
00:25:51 30% des jeunes qui votent extrême droite.
00:25:53 Et la popularité, qui est incontestable,
00:25:55 qui me touche d'une certaine façon parce qu'elle me paraît inquiétante,
00:25:59 la popularité de Bardella chez les jeunes
00:26:01 tient à une forme de dictatisation de la politique.
00:26:05 C'est-à-dire, en gros, ce qui compte, c'est même plus les idées messiers,
00:26:08 une forme de personnalité, d'utilisation du système des réseaux sociaux,
00:26:13 et qui fait qu'effectivement, l'extrême droite et le populisme
00:26:16 ont plus d'entrées qu'ils n'en avaient jamais eues dans une génération de jeunes.
00:26:22 Dans ma génération, il était impossible même d'être d'extrême droite.
00:26:25 On n'osait pas le dire. Il y en avait qui y étaient.
00:26:28 Sauf que là, ça touche une partie de la génération.
00:26:31 Donc, qu'est-ce qu'il faut faire ?
00:26:33 Parce que c'est ça la question, c'est qu'il faut répondre,
00:26:35 non pas pour chercher le vote des jeunes,
00:26:37 je ne crois pas à cette démarche.
00:26:40 Vouloir une politique de la jeunesse, ce n'est pas vouloir le vote des jeunes.
00:26:44 C'est vouloir le vote de toute la société pour les jeunes.
00:26:48 C'est très différent.
00:26:49 Il faut emmener toute la société, enfin, emmener tout le corps électoral,
00:26:52 toute génération, vers l'enjeu de la jeunesse.
00:26:55 Parce que c'est cet enjeu-là qui compte.
00:26:58 Et pas chercher à séduire particulièrement l'électorat jeune.
00:27:02 Il viendra, à ce moment-là, dans un mouvement général.
00:27:05 Moi, j'aimerais juste revenir sur cette question
00:27:07 de pourquoi les jeunes votent à l'extrême droite.
00:27:09 Je ne suis pas d'accord.
00:27:10 Je pense que c'est souvent une induction qu'on fait.
00:27:11 On se dit, bon, ils sont sur TikTok, les jeunes sont sur TikTok.
00:27:13 Bon, du coup, c'est pour ça que le vote à l'extrême droite
00:27:15 ou sur une gauche radicale augmente.
00:27:17 Alors, oui, ces canaux peuvent jouer.
00:27:19 Ça peut faire une première communication.
00:27:21 Mais moi, chez les jeunes, notamment d'extrême droite,
00:27:23 que j'ai pu interviewer,
00:27:25 il y avait parfois une certaine culture politique
00:27:27 qui n'est pas la même que, forcément, la nôtre,
00:27:30 mais qui est quand même, qui avait un certain degré d'information
00:27:32 sur ce que proposait l'extrême droite.
00:27:34 Et il y avait une colère, évidemment, évidente,
00:27:38 chez beaucoup de jeunes,
00:27:40 un rejet des classes politiques,
00:27:42 parce que c'est aussi la stratégie politique
00:27:44 de certains partis, c'est de s'inscrire en opposition A.
00:27:48 Et, effectivement, les jeunes ont quand même
00:27:50 beaucoup de raisons de vouloir s'inscrire en opposition A.
00:27:52 Et, ensuite, il y a le fait qu'on leur parle,
00:27:55 qu'on leur parle de leurs problèmes,
00:27:56 et qu'on leur décrit leurs problèmes.
00:27:58 Ça ne veut pas forcément dire que la réponse apportée est adéquate.
00:28:00 Et moi, en tant que journaliste, c'est de toute façon pas mon rôle,
00:28:03 mais de simplement pointer du doigt
00:28:05 que quand on va parler aux jeunes,
00:28:07 qu'on leur dit qu'on va leur proposer autre chose,
00:28:09 que ce sont des partis aussi qui n'ont jamais été au pouvoir,
00:28:11 et je pense que c'est important de le souligner,
00:28:13 parce que les partis qui ont été au pouvoir ont déçu,
00:28:15 et bien ça crée des phénomènes de popularité
00:28:17 qui sont, je pense, aussi à relativiser,
00:28:19 parce qu'encore une fois, on a quand même
00:28:21 un tiers des jeunes qui ne votent même pas à la présidentielle.
00:28:24 Donc, ce n'est pas tous les jeunes qui sont impliqués là-dedans.
00:28:27 Et moi, je crois que tant qu'on continue
00:28:29 à justement faire l'impasse sur les jeunes,
00:28:32 à ne pas proposer, à ne pas s'adresser à eux,
00:28:34 et peut-être leur proposer de nouvelles figures,
00:28:37 on continuera à avoir cette polarisation,
00:28:39 puisque c'est le phénomène,
00:28:41 c'est vraiment une vraie polarisation politique
00:28:43 au sein des jeunes de génération.
00:28:45 Et sur la politique de la jeunesse,
00:28:47 encore une fois, moi, ce n'est pas mon rôle de journaliste
00:28:49 de dire ce qu'il faut faire.
00:28:51 Je constate que les grandes priorités des jeunes,
00:28:53 enfin, moi, je crois que c'est la lutte contre la précarité,
00:28:55 qui est absolument, extrêmement grave.
00:28:59 Je n'ai même pas les termes adéquats pour décrire ça,
00:29:01 parce que c'est vraiment un phénomène qui augmente.
00:29:03 On a les files d'attente pour de l'aide alimentaire des jeunes
00:29:06 qui augmentent d'année en année.
00:29:08 Aujourd'hui, la moitié des personnes qui font la queue
00:29:10 pour recevoir de l'aide alimentaire au Resto du Cœur
00:29:12 ont moins de 26 ans.
00:29:14 Parmi les premières personnes qui sont touchées
00:29:16 par la crise du logement, ce sont les jeunes.
00:29:18 On a un jeune sur deux, un étudiant sur deux
00:29:20 qui n'arrivait pas à se chauffer correctement cet hiver.
00:29:22 Donc, on a un problème de précarité alimentaire,
00:29:24 de précarité du logement, de difficultés matérielles énormes.
00:29:27 Donc, ça, je pense que c'est vraiment quelque chose
00:29:29 qu'il faut apporter une réponse.
00:29:32 Ensuite, il y a cette question des études de l'enseignement supérieur,
00:29:35 sans oublier que tous les jeunes ne sont pas des étudiants
00:29:38 et qu'il y a plein de jeunes qui ont cette nécessité
00:29:40 de s'intégrer directement dans des filières professionnelles,
00:29:43 d'avoir des débouchés professionnels.
00:29:45 Et ensuite, il y a ces questions, bien sûr, écologiques,
00:29:47 d'assurer leur avenir, de leur permettre d'avoir
00:29:49 un cadre de vie qui est apaisé
00:29:51 et qui n'est pas aussi anxiogène.
00:29:53 Et pour savoir ce qu'il faut faire,
00:29:55 je renvoie à des travaux de sociologues
00:29:57 qui sont spécialistes de ça,
00:29:59 qui ont travaillé depuis parfois des décennies là-dessus,
00:30:01 notamment au travail de Camille Penny,
00:30:04 que je cite de nombreuses reprises dans le livre,
00:30:06 qui a écrit un ouvrage qui s'appelle
00:30:08 "Pour une politique de la jeunesse",
00:30:10 où il propose notamment de remettre l'État
00:30:12 au centre de ce qu'on peut proposer à la jeunesse.
00:30:15 Il propose d'apporter déjà une définition aussi de la jeunesse,
00:30:18 d'avoir une vraie réflexion philosophique.
00:30:20 Et il déplore qu'on n'ait pas des politiques adaptées,
00:30:22 alors qu'on a du budget, et qu'on met en réalité,
00:30:24 depuis des années, un budget assez conséquent
00:30:26 dans la politique de la jeunesse,
00:30:28 mais qu'aujourd'hui elle est complètement inadaptée
00:30:30 aux besoins des jeunes.
00:30:31 Et alors pour rester sur la personne qui dirige actuellement,
00:30:33 qui est Emmanuel Macron,
00:30:35 j'en propose une étude de cas dans le livre,
00:30:37 pour montrer que c'est juste inadapté
00:30:39 aux besoins premiers des jeunes,
00:30:41 quand on regarde tous les baromètres,
00:30:43 toutes les études sociologiques qui ont été réalisées sur le sujet.
00:30:46 Non, c'est pas vrai que les moyens...
00:30:49 Non mais je disais, ils existent !
00:30:51 Non, les moyens existent bien sûr.
00:30:53 Mais les priorités ne sont pas celles qui doivent être choisies.
00:30:58 Dans la répartition des politiques, aujourd'hui,
00:31:03 ça va... c'est nécessaire vers la défense,
00:31:07 ça va vers la sécurité,
00:31:10 ça va vers la santé,
00:31:13 c'est légitime, ça va vers l'éducation, heureusement.
00:31:16 Mais ça ne va pas forcément,
00:31:18 autant qu'il serait nécessaire,
00:31:20 vers les dépenses d'avenir.
00:31:21 C'est-à-dire, les dépenses d'avenir, c'est la recherche,
00:31:24 c'est l'université, c'est la formation,
00:31:27 et c'est également l'insertion des jeunes.
00:31:30 C'est ça, l'avenir.
00:31:32 Donc, dans les arbitrages qui sont faits,
00:31:35 peut-être qui ont été faits depuis longtemps,
00:31:37 ça a été fait au détriment des dépenses d'avenir,
00:31:40 plus pour les dépenses qui sont celles des transferts sociaux,
00:31:43 qui sont tout à fait légitimes,
00:31:45 mais qui bénéficient, comme je l'ai dit,
00:31:47 à un électorat ou à des publics plus âgés.
00:31:51 Alors, que faire sur les politiques de jeunesse ?
00:31:55 La première chose, c'est vrai,
00:31:57 c'est qu'il y a une éducation qui oriente mal les jeunes.
00:32:02 Il y a un gâchis considérable des jeunes dans l'enseignement supérieur,
00:32:06 qui ne sont pas accompagnés suffisamment,
00:32:08 qui ne sont pas orientés convenablement,
00:32:10 et qui, finalement, sont autant de pertes pour la nation
00:32:14 et de pertes de temps et d'argent pour les jeunes ou leurs parents.
00:32:19 Deuxièmement, il y a une précarisation,
00:32:21 mais je dirais même une paupérisation,
00:32:23 et c'est ça qu'on a constaté ces dernières années.
00:32:26 C'est-à-dire, effectivement, on a vu des files d'attente
00:32:29 dans les universités pour se nourrir,
00:32:32 après le Covid en particulier, et ça continue.
00:32:35 Enfin, il y a la question du logement.
00:32:37 Ce n'est pas simplement le logement étudiant,
00:32:39 c'est le logement, l'accès au logement.
00:32:42 C'est beaucoup plus difficile pour un jeune couple,
00:32:45 pour une personne seule, d'accéder aujourd'hui
00:32:48 à un logement social ou à un logement dans le marché locatif
00:32:51 que ça n'était pour les générations précédentes.
00:32:53 Et je ne parle même pas de l'accession à la propriété,
00:32:56 qui est donc une impossibilité pour une grande partie des moins de 35 ans.
00:33:02 Et puis, enfin, il y a les questions d'égalité femmes-hommes
00:33:05 qui préoccupent à juste raison les jeunes,
00:33:08 et notamment les jeunes femmes qui veulent prendre leur place
00:33:12 et qui sont dans les précarités qui sont subies,
00:33:16 souvent des précarités féminines,
00:33:19 et avec des orientations professionnelles
00:33:21 qui ont été particulièrement mal choisies ou contraintes.
00:33:26 Donc il y a aussi dans la jeunesse, et je pense aux femmes,
00:33:29 une volonté que leur situation soit prise en compte politiquement,
00:33:33 pas simplement dans les mobilisations.
00:33:35 Enfin, je vais revenir à ce qu'est la politique.
00:33:39 Parce que si on veut qu'il y ait une politique de la jeunesse,
00:33:42 il faut aussi qu'il y ait des changements politiques,
00:33:44 ou alors on restera sur l'incantation ou sur les travaux sociologiques.
00:33:48 La politique, c'est la conjugaison de trois facteurs.
00:33:52 Le premier, il n'y a pas de politique s'il n'y a pas d'engagement associatif,
00:33:57 militant, et de forme de contestation,
00:34:02 ou de bataille, de combat pour arriver à des solutions.
00:34:09 Moi je respecte toutes les manifestations,
00:34:12 toutes les contestations, toutes les occupations,
00:34:15 c'est une forme d'engagement.
00:34:17 Mais ensuite, il y a un deuxième temps de la politique,
00:34:20 c'est au-delà de ce que l'on peut contester,
00:34:22 ce qu'on peut essayer de combattre,
00:34:24 ou de ce qu'on peut essayer d'arracher par les manifestations,
00:34:28 il y a l'engagement partisan.
00:34:30 S'il n'y a pas de parti,
00:34:32 s'il n'y a pas d'organisation pour porter des revendications,
00:34:36 il n'y a pas de démocratie.
00:34:38 Ou alors une démocratie qui est faite simplement
00:34:40 à travers des personnalités qui surgissent,
00:34:42 ou des phénomènes, hélas, le plus souvent populistes.
00:34:46 Et puis, la troisième composante de la politique, c'est le vote.
00:34:50 C'est-à-dire que si on veut arriver à ce que les revendications
00:34:55 qui ont été à un moment portées,
00:34:57 puissent aboutir à devenir des lois, des acquis, des progrès,
00:35:03 il faut qu'il y ait le vote.
00:35:05 C'est pour ça que c'est si important que les jeunes viennent voter.
00:35:08 Non pas simplement pour ajouter d'autres suffrages
00:35:11 à ceux qui sont déjà exprimés,
00:35:13 mais pour qu'ils imposent leurs thèmes et leurs enjeux.
00:35:17 Comme je l'ai dit, comme ils sont minoritaires,
00:35:20 le rôle, peut-être que dans ma génération,
00:35:23 nous devons nous assigner,
00:35:25 comme je l'ai dit, des politiques pour les jeunes,
00:35:28 c'est de faire comprendre à la société
00:35:31 que lorsque la jeunesse est maltraitée,
00:35:33 c'est l'avenir qui est trahi.
00:35:35 - Je peux me permettre de rajouter quelques chiffres,
00:35:37 parce que là, je les retrouve, et je pense que c'est quand même important,
00:35:39 quand on parle de précarité des jeunes, de précarité alimentaire.
00:35:42 La dernière étude de la FAGE nous montrait
00:35:44 qu'un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim.
00:35:46 C'est ça, quand même, vivre sous le seuil de pauvreté.
00:35:49 Que le logement, aujourd'hui, c'est vraiment un gros enjeu,
00:35:52 ça représente 60% dans le budget d'un étudiant,
00:35:54 et il y a un chiffre d'une étude d'OpinionWay
00:35:56 que je trouvais particulièrement éloquent,
00:35:58 qui nous disait que 22% des jeunes, l'année dernière,
00:36:00 ont renoncé à un métier qui leur plaisait,
00:36:03 à cause, du coup, du logement.
00:36:05 Et c'est ça, aussi, c'est cette précarité matérielle
00:36:08 qu'on décrit et qu'on décrira jamais assez,
00:36:10 qui brise des rêves, qui brise des destinées,
00:36:13 et qui empêche beaucoup de jeunes de se projeter
00:36:15 dans un avenir qui serait désirable.
00:36:18 - C'est pourquoi, dans les propositions
00:36:20 qui peuvent être faites aujourd'hui,
00:36:22 il y a l'idée d'un revenu étudiant
00:36:25 ou d'un revenu jeune,
00:36:27 avec, bien sûr, toutes les conditions de ressources,
00:36:29 et des contreparties qui doivent être posées,
00:36:31 parce qu'à chaque fois qu'il y a
00:36:33 une attribution d'une prestation,
00:36:36 c'est nécessaire de demander aussi une participation
00:36:40 sous forme de services civiques ou sous toute autre forme.
00:36:43 - Je trouve ça très intéressant que vous ayez pointé
00:36:45 cette idée que si on donne une aide sociale aux jeunes,
00:36:48 première chose qui vient, c'est qu'il faut bien avoir conscience
00:36:51 qu'il faut qu'il y ait une contrepartie,
00:36:53 qu'il faut que ce que la société vous donne
00:36:55 doit être restitué,
00:36:57 comme si finalement les jeunes n'avaient pas ça en tête,
00:37:00 alors qu'on n'a pas ce type de mentalité-là
00:37:03 quand on donne des aides aux entreprises, par exemple,
00:37:05 qui peuvent parfois être massives.
00:37:07 Il y en a beaucoup d'entreprises, notamment que vous avez mis en place,
00:37:09 qui n'avaient pas de contrepartie.
00:37:11 - Oui, mais on le fait. Chaque fois qu'on donne une aide,
00:37:13 on fait en sorte qu'il puisse...
00:37:15 Contrepartie en termes d'embauche, etc.
00:37:17 Mais là, je ne pensais pas du tout en termes de contrepartie,
00:37:20 de... d'activité.
00:37:23 Je disais, c'est aussi sur l'engagement
00:37:26 qu'on peut demander aux jeunes d'agir un peu plus...
00:37:29 Ils le veulent.
00:37:31 Parce qu'il y a aussi...
00:37:33 Peut-être que... Pardon de vous avoir là-dessus coupé,
00:37:35 mais moi, ce qui m'a frappé depuis plusieurs années
00:37:37 que je préside cette fondation,
00:37:39 c'est la vitalité d'engagement.
00:37:41 C'est-à-dire que cette jeunesse dont on dit
00:37:43 "Oh, elle est simplement dans la précarité",
00:37:46 oui, elle est dans la précarité,
00:37:48 mais il y a une autre jeunesse qui va très bien.
00:37:50 Parce qu'il ne faut pas oublier que s'il y en a un quart
00:37:52 qui sont dans la précarité, il y en a d'autres
00:37:54 pour qui la vie, ça va quand même...
00:37:56 Ça suit son cours et c'est un cours ascendant.
00:37:59 Mais pour toute la jeunesse,
00:38:02 parce que je crois que c'est vrai,
00:38:04 heureusement, au-delà des frontières sociales,
00:38:06 il y a une participation,
00:38:09 il y a une volonté,
00:38:11 il y a une créativité même.
00:38:13 Que l'on soit dans les banlieues, dans les villages,
00:38:16 dans les quartiers,
00:38:18 tous les quartiers de métropole ou d'autres,
00:38:21 il y a un engagement.
00:38:23 Et moi, je suis frappé de ça.
00:38:25 C'est-à-dire qu'il y a plus d'innovation,
00:38:28 d'invention dans la génération qui pourtant souffre
00:38:31 qu'il y en avait dans la précédente.
00:38:33 Ça, tout à fait, je vous rejoins sur ce constat-là.
00:38:36 Mais pour revenir sur la question des solutions,
00:38:38 parmi les solutions évoquées par Camille Penny,
00:38:40 qui reprend notamment les propos des études
00:38:42 du politiste Tom Chevalier,
00:38:44 je pense que c'est important de citer son travail
00:38:46 parce qu'il a fait une étude très intéressante
00:38:48 comparée des aides aux jeunes à travers l'Europe,
00:38:51 où on constate qu'on est un des seuls pays
00:38:53 qui conditionne les aides des jeunes à leur famille.
00:38:56 Et donc on a une politique finalement très familiale,
00:38:58 c'est-à-dire que quand on est étudiant
00:39:00 et qu'on veut bénéficier des aides du CRUS,
00:39:02 à part quelques exceptions,
00:39:04 on a besoin de donner les revenus de ses parents.
00:39:07 Quand on veut bénéficier du RSA,
00:39:09 aujourd'hui, à part encore une fois quelques exceptions,
00:39:11 on doit avoir plus de 25 ans, au nom de quoi
00:39:13 les jeunes ne pourraient pas toucher ces aides-là.
00:39:15 Alors maintenant, j'allais dire qu'ils sont inconditionnels,
00:39:17 maintenant c'est en train de devenir conditionné,
00:39:19 mais ça n'était pas jusqu'à présent.
00:39:21 Et en fait, pourquoi est-ce que c'est la seule partie
00:39:25 de la population que jusqu'à présent,
00:39:27 on a estimé qu'elle ne méritait pas les mêmes aides
00:39:30 que le reste de la population,
00:39:32 dans le cas du RSA, et quand même particulièrement éloquent,
00:39:34 donc Camille Penny plaidé pour une défamilialisation,
00:39:38 je suis arrivée, de ces aides-là,
00:39:40 parce que ce que veulent beaucoup de jeunes,
00:39:42 et je dirais même là, pour le coup, les jeunes,
00:39:44 c'est un accès à l'autonomie aussi.
00:39:46 Et si on a les mêmes devoirs,
00:39:48 avoir aussi les mêmes droits que le reste de la population.
00:39:51 Ça c'est une très vieille revendication,
00:39:53 qui n'est pas propre à la génération d'aujourd'hui.
00:39:56 Très vieille revendication,
00:39:58 qui est le droit des jeunes à l'autonomie.
00:40:00 C'est-à-dire de pouvoir assurer sa propre émancipation,
00:40:03 en dehors même de sa famille.
00:40:06 D'accord.
00:40:08 Et donc c'était la location d'études
00:40:10 qui a été portée pendant très longtemps
00:40:12 par le syndicalisme étudiant,
00:40:14 et aujourd'hui le revenu jeune peut correspondre à ça.
00:40:17 De délier par rapport au revenu des parents,
00:40:20 peut apparaître comme, effectivement,
00:40:22 une étape vers l'autonomie,
00:40:24 mais peut apparaître aussi comme un facteur d'inégalité,
00:40:27 dès lors qu'il y a des parents qui sont plus favorisés que d'autres,
00:40:31 et qui pourraient encourager davantage leurs enfants.
00:40:34 Mais une des façons de restituer,
00:40:36 parce que c'est important de restituer,
00:40:39 c'est-à-dire qu'il y a des jeunes qui vont suivre des études longues,
00:40:43 et d'autres qui n'auront pas cette possibilité.
00:40:46 Les plus défavorisés, notamment.
00:40:48 Oui, bien sûr.
00:40:50 Ceux qui vont échouer dans l'enseignement supérieur,
00:40:53 ceux qui ne vont même pas accéder aux universités,
00:40:56 et qui vont peut-être très vite se professionnaliser.
00:40:59 Donc il y a d'une certaine façon une correction à apporter.
00:41:03 Et donc il y a le droit,
00:41:05 et moi je l'ai porté par le crédit personnel formation,
00:41:08 mais on peut aller plus loin.
00:41:10 Il y a un droit qu'il faut accorder aux jeunes
00:41:13 qui n'ont pas pu suivre des études,
00:41:15 de pouvoir se former tout au long de leur existence.
00:41:18 C'est un élément très important de correction des inégalités.
00:41:22 Ceux qui ont des études doivent avoir absolument l'accompagnement.
00:41:27 Et donc un revenu étudiant peut se justifier jusqu'à 25 ans.
00:41:31 Et je préfère qu'on l'appelle revenu jeune que RSA,
00:41:35 parce qu'on ne demande pas la charité chez les jeunes,
00:41:40 on demande la reconnaissance d'un droit.
00:41:42 Après le RSA n'est pas la charité.
00:41:44 Non, mais c'est par rapport à des conditions de ressources,
00:41:47 et là on n'est pas dans les conditions de ressources précisément,
00:41:50 puisque c'est un droit à l'autonomie.
00:41:52 Je n'ai pas de conditions de ressources à apporter.
00:41:54 Et enfin, une fois qu'on a réussi ces études,
00:41:56 qu'on est dans un parcours professionnel,
00:41:58 on a un retour à donner.
00:42:00 Ce retour peut être sur le plan fiscal,
00:42:02 pour ceux qui ont plus de revenus,
00:42:04 et qui payent davantage d'impôts,
00:42:06 ce qui me paraît nécessaire.
00:42:08 Ça peut être sur un plan de restitution,
00:42:10 en termes d'accompagnants d'autres jeunes.
00:42:13 C'est aussi nécessaire de le faire.
00:42:16 Ça peut être aussi d'aller dans les endroits
00:42:18 où précisément personne ne veut aller,
00:42:20 quand on est médecin par exemple,
00:42:22 pour éviter les déserts médicaux,
00:42:24 ou quand on est avocat,
00:42:26 pour assurer la défense des plus faibles et des plus fragiles.
00:42:29 Donc il y a aussi, c'est pour ça que quand on parle de solidarité intergénérationnelle,
00:42:33 c'est ça que je veux mettre en évident.
00:42:36 C'est qu'à un moment, on doit favoriser la jeunesse,
00:42:41 mais ensuite, ça doit se faire tout au long de la vie,
00:42:45 par une forme de restitution.
00:42:47 C'est ça la solidarité qui doit exister,
00:42:49 y compris pour les plus âgés.
00:42:51 Les plus âgés méritent effectivement
00:42:53 qu'on les accompagne,
00:42:55 au-delà même de leur retraite,
00:42:57 pour leur permettre de vivre dignement.
00:42:59 Mais il y a aussi un rôle qui doit leur être attribué.
00:43:04 Les retraités peuvent aussi servir les jeunes.
00:43:07 Le fait qu'il puisse y avoir des duos entre des jeunes
00:43:10 et des retraités qui leur apportent une transmission,
00:43:13 qui leur apportent un accompagnement scolaire pour les plus petits.
00:43:16 Voilà ce que c'est qu'une société de l'entraide.
00:43:18 C'est très important l'entraide et l'engagement.
00:43:20 C'est ça qu'il faut essayer de promouvoir.
00:43:22 Je pense que beaucoup de gens appellent de leur vœu.
00:43:24 Je reviens juste sur un dernier point,
00:43:26 puisque vous l'avez évoqué vous-même sur l'enseignement supérieur.
00:43:28 C'est un endroit, moi je vous le dis,
00:43:30 j'ai fait toute ma scolarité dans le public.
00:43:32 J'ai eu les bourses de l'État.
00:43:34 J'ai pu bénéficier de l'université publique.
00:43:36 Et vraiment, j'en suis extrêmement heureuse.
00:43:38 Je ne sais pas ce que j'aurais fait
00:43:40 s'il n'y avait pas eu cette université publique.
00:43:42 Et quand on voit aujourd'hui
00:43:44 à quel point depuis des années
00:43:46 les budgets qui conseillent l'enseignement supérieur
00:43:49 sont réduits par étudiants,
00:43:51 ça va à l'encontre même de ce que vous promouvez.
00:43:54 Et pourtant, ça a commencé sous votre mandat
00:43:56 cette chute du budget total de l'enseignement supérieur
00:43:58 de 16% entre 2012 et 2022.
00:44:00 C'est les données de Thomas Piketty et Lucien Chancel.
00:44:02 Mais je ne suis pas sûre que vous avez les bonnes données.
00:44:04 J'ai même le graphique sur mon portable.
00:44:06 Je vous le montre.
00:44:08 C'est quand même, moi je trouve, très préoccupant.
00:44:10 Et pourtant, c'est un des endroits
00:44:12 de la redistribution justement,
00:44:14 qui ne passe pas que par les budgets
00:44:16 dont on a parlé d'un revenu potentiel étudiant,
00:44:18 d'une aide étudiante jeune.
00:44:20 C'est aussi les infrastructures publiques
00:44:22 dans lesquelles les jeunes évoluent
00:44:24 qui sont fondamentales
00:44:26 si on veut pouvoir leur assurer ce futur-là.
00:44:28 Et aujourd'hui, je ne vous apprends pas
00:44:30 que la plupart des professionnels de l'université publique
00:44:32 tirent la sonnette d'alarme depuis longtemps
00:44:34 et disent que leurs conditions ne leur permettent plus
00:44:36 d'exercer correctement leur profession.
00:44:38 Là, il faudra avoir du courage.
00:44:40 Parce que, aujourd'hui,
00:44:42 pourquoi y a-t-il eu
00:44:44 cette diminution par étudiants ?
00:44:46 Parce qu'il y avait effectivement
00:44:48 une augmentation du nombre d'étudiants.
00:44:50 C'est ça qui fait le calcul.
00:44:52 Et qui fait le résultat.
00:44:54 Comme il y a plus d'étudiants,
00:44:56 à budget constant,
00:44:58 même amélioré,
00:45:00 le rapport par étudiant diminue.
00:45:02 Donc, soit,
00:45:04 il y a deux options,
00:45:06 soit on accueille toujours plus d'étudiants,
00:45:08 alors il faut augmenter le budget,
00:45:10 mais faut-il encore que l'on soit sûr
00:45:12 que les étudiants que l'on accueille
00:45:14 ne vont pas abandonner en cours de chemin.
00:45:16 Or, c'est le cas.
00:45:18 60 à 70 % des étudiants inscrits
00:45:20 aux premières années abandonnent.
00:45:22 Est-ce qu'on peut tolérer ça ? Non.
00:45:24 Est-ce qu'on doit, pour autant,
00:45:26 faire une sélection à l'entrée,
00:45:28 que nous récusons,
00:45:30 parce que ce serait un moyen d'écarter
00:45:32 et de faire en sorte que le principe
00:45:34 d'accès à l'université ne soit pas consacré.
00:45:36 Mais c'est pas acceptable
00:45:38 qu'on puisse ne pas avoir,
00:45:40 comment faut-il les appeler,
00:45:42 de cycles qui seraient
00:45:44 pas encore universitaires,
00:45:46 mais de cycles d'intégration
00:45:48 dans l'université pour éviter l'abandon.
00:45:50 Ce qu'il y a de pire pour une société,
00:45:52 c'est de faire croire
00:45:54 qu'on peut entrer dans l'université,
00:45:56 d'y passer deux ans, trois ans quelquefois,
00:45:58 sans sortir avec un diplôme,
00:46:00 alors même qu'on s'arrange
00:46:02 le principe de la démocratie.
00:46:04 C'est pas la démocratisation
00:46:06 de l'enseignement supérieur.
00:46:08 Et qu'est-ce qui se passe en ce moment ?
00:46:10 Il se passe que l'enseignement supérieur privé...
00:46:12 Pourquoi les familles populaires
00:46:14 mettent leurs enfants
00:46:16 dans l'enseignement supérieur privé ?
00:46:18 Parce qu'ils ont l'illusion
00:46:20 que ça va être mieux
00:46:22 que l'université qui les a pas
00:46:24 accueillis convenablement,
00:46:26 et que ça va leur permettre
00:46:28 d'avoir des diplômes
00:46:30 qui sont même pas reconnus
00:46:32 sur le plan des titres universitaires.
00:46:34 Donc quand on est face à cette situation,
00:46:36 où on dit "il faut augmenter le budget",
00:46:38 non, il faut pas simplement
00:46:40 augmenter le budget,
00:46:42 il faut changer les structures
00:46:44 pour qu'il y ait une meilleure orientation,
00:46:46 qu'il y ait l'accueil de jeunes
00:46:48 qui ne sont pas tout de suite prêts
00:46:50 à rentrer dans l'université,
00:46:52 ou d'autres qui veulent se professionnaliser
00:46:54 dans un cadre qui est celui
00:46:56 de l'enseignement supérieur.
00:46:58 Donc si on est à un moment,
00:47:00 on n'est pas prêts,
00:47:02 mais c'est pas à vous que je dis ça,
00:47:04 parce que vous n'avez pas cette responsabilité,
00:47:06 mais si on n'est pas prêts
00:47:08 à remettre en cause l'organisation
00:47:10 et le fonctionnement de nos services publics,
00:47:12 pour les cours secondaires ou primaires
00:47:14 et pour l'université,
00:47:16 si on n'est pas prêts à changer l'organisation
00:47:18 et le fonctionnement, qu'est-ce qu'on fera ?
00:47:20 On demandera toujours plus de moyens
00:47:22 sans qu'il y ait davantage de résultats.
00:47:24 C'est ça qui est important.
00:47:26 Et pour les jeunes, vous dites "il y a un moment,
00:47:28 il faut casser", ben oui, moi je suis plutôt du...
00:47:30 Non, un moment, pas de casser ce qui existe,
00:47:32 au contraire, mais de faire en sorte
00:47:34 que nous puissions repenser notre système
00:47:36 d'enseignement supérieur.
00:47:38 En tout cas, on a tendance à créer des destins brisés,
00:47:40 comme vous l'avez pu mettre en avant dans le livre.
00:47:42 Un dernier point peut-être sur ces questions économiques,
00:47:44 c'est l'inégalité de patrimoine.
00:47:46 Absolument, je voulais en parler.
00:47:48 Vous parlez d'une société de rentier,
00:47:50 est-ce qu'on peut attaquer ça ?
00:47:52 Est-ce qu'il y a moyen de changer des choses ?
00:47:54 Ben ça justement,
00:47:56 vous disiez, les jeunes ont toujours été une minorité,
00:47:58 économiquement ça n'a pas toujours été le cas,
00:48:00 en tout cas pas dans ces proportions.
00:48:02 Là, c'est un chiffre que je sors souvent,
00:48:04 mais qui je pense est vraiment fondamental
00:48:06 pour comprendre à quel point les modalités ont changé,
00:48:08 parce que moi c'est quelque chose que j'entendais souvent.
00:48:10 "Tu sais, moi aussi à ton âge j'ai travaillé,
00:48:12 puis après j'ai investi, j'ai acheté un petit appartement,
00:48:14 puis une maison, puis je ne me plaignais pas."
00:48:16 Et c'était normal. Aujourd'hui, ma génération,
00:48:18 pour une partie d'entre elles,
00:48:20 on insiste, il y a une minorité d'héritiers,
00:48:22 de jeunes qui vont très très bien,
00:48:24 qui accèdent très bien au patrimoine,
00:48:26 mais pour beaucoup de jeunes, c'est très compliqué d'accéder
00:48:28 à un patrimoine par la force de son travail,
00:48:30 qui est pourtant ce qu'on nous répète à longueur de journée.
00:48:32 C'est qu'on doit travailler, qu'on doit rendre,
00:48:34 justement, qu'on doit s'investir
00:48:36 dans notre propre destin,
00:48:38 alors qu'en fait on ne le peut pas.
00:48:40 Et là, c'est vraiment deux chiffres importants.
00:48:42 En 1986, le patrimoine net médian des trentenaires
00:48:44 était 45% plus élevé
00:48:46 que celui des 70 ans.
00:48:48 Aujourd'hui, il est trois fois plus faible, en 2015.
00:48:50 Donc on a vraiment eu une inversion
00:48:52 de cette répartition du patrimoine.
00:48:54 Et on a eu des changements dans la transmission.
00:48:56 Et là, c'est effectivement très économique,
00:48:58 qui est qu'aujourd'hui, on hérite de plus en plus.
00:49:00 Et c'est les chiffres du Conseil d'analyse économique
00:49:02 les plus récents, qui sont les chiffres
00:49:04 les plus récents, qui nous disent, je cite,
00:49:06 qu'on prend le risque de redevenir
00:49:08 une société d'héritiers.
00:49:10 C'est le terme du Conseil d'analyse économique.
00:49:12 La part de la fortune héritée dans le patrimoine total
00:49:14 représente 60% aujourd'hui,
00:49:16 alors que c'était seulement 35%
00:49:18 dans les années 70.
00:49:20 Donc il faut bien avoir l'image et l'idée
00:49:22 de ce que ça veut dire. C'est que dans les années 70,
00:49:24 il y avait 35% de ce qu'on possédait,
00:49:26 qu'on héritait aujourd'hui. C'est 60%.
00:49:28 Merci beaucoup.
00:49:30 Et ça, je pense que ça acte un changement
00:49:32 et ça permet d'expliquer beaucoup
00:49:34 du constat et du désespoir
00:49:36 et de la frustration. C'est qu'on nous dit de travailler
00:49:38 et qu'on voit bien qu'on est de plus en plus
00:49:40 dépendant de notre condition sociale
00:49:42 de départ. Et ça,
00:49:44 c'est quelque chose de très générationnel
00:49:46 pour le coup, et d'extrêmement injuste.
00:49:48 Sur la question de l'immobilier,
00:49:50 par exemple, c'est vraiment comme si
00:49:52 on arrivait à une partie de monopolie au dixième tour.
00:49:54 On ne peut pas gagner avec
00:49:56 les prix de l'immobilier. Et là, puisqu'on est sur
00:49:58 les questions politiques, il n'y a absolument pas eu
00:50:00 de politiques qui permettent de mieux répartir
00:50:02 ça ou de corriger cette inégalité.
00:50:04 Et c'est un constat qu'a, je vais citer
00:50:06 quelqu'un de plus âgé que moi, un journaliste
00:50:08 qui s'appelle François de Cleuset, qui a aujourd'hui
00:50:10 a plus de 80 ans, si je ne me trompe,
00:50:12 qui a écrit un livre qui s'appelle
00:50:14 "La parenthèse boomer", où il explique justement
00:50:16 que toutes les politiques, et il parle de cette question
00:50:18 du patrimoine, de l'immobilier, ont été mises en place
00:50:20 pour favoriser la génération que,
00:50:22 sociologiquement, on appellerait la génération des boomers
00:50:24 et que ça se fait au détriment des nouvelles
00:50:26 générations dont je fais partie.
00:50:28 Alors, d'abord, la première priorité
00:50:30 des jeunes, quand on parle
00:50:32 des jeunes, c'est de 18 à 30 ans,
00:50:34 mais pas de devenir
00:50:36 propriétaire. La première priorité
00:50:38 d'un jeune, d'une jeune,
00:50:40 d'un couple ou d'une personne,
00:50:42 c'est d'accéder à un logement,
00:50:44 tout simplement un logement.
00:50:46 Et c'est devenu de plus en plus difficile,
00:50:48 difficile pour
00:50:50 les professionnels
00:50:52 qui rentrent sur le marché du travail
00:50:54 et dont les revenus ne sont pas suffisants pour
00:50:56 accéder à un logement locatif
00:50:58 et qui sont sur les files
00:51:00 d'attente du logement social, très difficile
00:51:02 pour les étudiants, et très difficile
00:51:04 même pour les jeunes couples. Avec
00:51:06 aussi une inégalité
00:51:08 générationnelle, c'est-à-dire que
00:51:10 les générations qui ont eu
00:51:12 des logements sociaux il y a 20 ou 30 ans, ou 10 ans,
00:51:14 restent dans leurs logements sociaux
00:51:16 alors même que leur famille
00:51:18 s'est partie
00:51:20 ou s'est décomposée,
00:51:22 et les jeunes n'accèdent pas
00:51:24 au logement. Donc un des premiers
00:51:26 problèmes que nous avons à régler
00:51:28 est d'abord l'accès à un
00:51:30 logement digne et au logement
00:51:32 aussi proche que possible du travail.
00:51:34 Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui ? Pourquoi il y a un malaise
00:51:36 aussi fort, aussi bien dans l'éducation
00:51:38 que dans la santé ? C'est pour des raisons qui tiennent
00:51:40 au service lui-même, mais qui tiennent aussi aux conditions
00:51:42 de logement, qui font que les gens font
00:51:44 une heure et demie de transport. Pourquoi
00:51:46 il y a des jeunes fonctionnaires qui dorment
00:51:48 dans leur voiture aujourd'hui
00:51:50 parce qu'ils ne peuvent même pas accéder
00:51:52 à un logement ? Alors ensuite, à partir
00:51:54 de 35 ans, c'était
00:51:56 l'âge à partir duquel
00:51:58 une vie de famille pouvait
00:52:00 s'imaginer dans
00:52:02 l'accession à la propriété.
00:52:04 Alors ça c'est tout à fait exact,
00:52:06 c'est-à-dire que c'est devenu, là aussi,
00:52:08 plus difficile, non pas parce que
00:52:10 les conditions de crédit
00:52:12 ont été plus durcies,
00:52:14 puisque en fait les taux d'intérêt ont été
00:52:16 à un moment assez faible, mais parce que le prix
00:52:18 de l'immobilier a considérablement
00:52:20 augmenté, et donc,
00:52:22 que ce soit d'ailleurs à Paris ou dans
00:52:24 les principales villes de France.
00:52:26 Et alors,
00:52:28 même avec un crédit très peu cher,
00:52:30 les conditions qui sont posées par
00:52:32 les banques, compte tenu du prix
00:52:34 du bien qu'un couple serait,
00:52:36 ou une personne serait susceptible d'acquérir,
00:52:38 rend la chose impossible.
00:52:40 Donc,
00:52:42 pas de possibilité d'avoir un logement
00:52:44 locatif dans les bonnes conditions,
00:52:46 et pas de possibilité plus tard
00:52:48 d'accéder à la propriété,
00:52:50 sauf à s'endetter quand même sur
00:52:52 25 ou 30 ans.
00:52:54 Alors, il y a une inégalité générationnelle,
00:52:56 parce que la génération des boomers,
00:52:58 elle a pu accéder à la propriété
00:53:00 à un moment où le prix
00:53:02 de l'immobilier était beaucoup plus faible,
00:53:04 et au moment où il y avait une inflation forte,
00:53:06 et où les taux d'emprunt étaient
00:53:08 inférieurs au taux d'inflation. Ce qui explique très bien
00:53:10 l'inversion patrimoniale dont vous parlez,
00:53:12 c'est-à-dire que les plus de 70 ans
00:53:14 ont acquis un patrimoine
00:53:16 il y a 30 ou 40 ans,
00:53:18 qui s'est considérablement valorisé.
00:53:20 Et vous parliez de l'héritage,
00:53:22 alors je fais juste une correction.
00:53:24 Le problème de l'héritage, c'est que
00:53:26 ça se fait de plus en plus tard,
00:53:28 on hérite de plus en plus tard.
00:53:30 Et même ces jeunes qui pourraient espérer,
00:53:32 ce serait très triste,
00:53:34 que leurs parents puissent leur transmettre,
00:53:36 faire des donations,
00:53:38 ils n'héritent pas nécessairement
00:53:40 aussitôt qu'ils le souhaiteraient.
00:53:42 Donc on a ce phénomène.
00:53:44 Comment on arrive à le corriger ?
00:53:46 Comment arriver à retrouver
00:53:48 une possibilité d'accéder
00:53:50 au crédit ?
00:53:52 Nous, quand j'étais président,
00:53:54 on avait fait des formules de prêt à taux zéro,
00:53:56 pour faciliter l'accès
00:53:58 à la propriété,
00:54:00 pas simplement dans le logement social,
00:54:02 mais aussi sur le marché privé.
00:54:04 Et de ce point de vue,
00:54:06 c'était plutôt efficace.
00:54:08 C'est-à-dire qu'on avait créé,
00:54:10 parce qu'il faut construire aussi,
00:54:12 un logement au moment où j'ai quitté la présidence.
00:54:14 Donc il y a nécessité de construire,
00:54:16 nécessité de construire dans le logement social,
00:54:18 et formule de prêt
00:54:20 à taux le plus faible possible,
00:54:22 et peut-être de caution,
00:54:24 parce qu'il y a aussi les garanties
00:54:26 qu'il faut accorder,
00:54:28 pour que les jeunes familles
00:54:30 puissent accéder à la propriété.
00:54:32 Enfin, sur l'héritage,
00:54:34 si on veut éviter
00:54:36 qu'il y ait cette reproduction des inégalités,
00:54:38 la question de la taxation
00:54:40 de l'héritage est forcément posée.
00:54:42 Et elle est posée,
00:54:44 et je ne dirais pas pour les jeunes,
00:54:46 vous allez voir comment on peut raisonner,
00:54:48 si on dit, voilà,
00:54:50 vous allez payer des droits de succession
00:54:52 pour les jeunes.
00:54:54 Dans, on paie des droits de succession pour tout le monde,
00:54:56 si on doit en payer davantage.
00:54:58 Mais les personnes âgées
00:55:00 coûtent de plus en plus cher,
00:55:02 par rapport à l'allongement de la durée de vie.
00:55:04 C'est légitime.
00:55:06 Donc il est assez,
00:55:08 d'abord tout à fait nécessaire
00:55:10 d'accompagner,
00:55:12 la location personnelle et l'autonomie,
00:55:14 d'accompagner le grand âge.
00:55:16 Mais c'est assez logique de demander un prélèvement
00:55:18 sur l'héritage.
00:55:20 C'est-à-dire que c'est ce qui permet
00:55:22 d'avoir justement cette redistribution,
00:55:24 et aussi cette contribution supplémentaire
00:55:26 pour assurer,
00:55:28 pas seulement pour les jeunes,
00:55:30 mais assurer l'accompagnement du grand âge.
00:55:32 - Mais il y a donc ça, il y a des économistes qui l'ont chiffré,
00:55:34 qui le proposent, je me réfère évidemment aux travaux
00:55:36 de Thomas Piketty sur le sujet.
00:55:38 - Oui, mais Piketty c'est toujours...
00:55:40 - C'est un des économistes.
00:55:42 - C'est la formule "impôt miracle". Non, c'est pas ça qui va nous rapporter
00:55:44 beaucoup d'argent. L'impôt sur les successions,
00:55:46 ça va pas rapporter beaucoup d'argent,
00:55:48 mais il est très important.
00:55:50 - Il parle de re-répartir le patrimoine,
00:55:52 et de donner des chances aux jeunes aussi en début de vie.
00:55:54 C'est en ça qu'il peut être étudié,
00:55:56 il peut être intéressant.
00:55:58 - Oui, il y a l'idée bien sûr de l'impôt sur les successions
00:56:00 qui peut être majoré pour les hautes successions.
00:56:02 Mais ce ne sont pas des sommes considérables
00:56:04 qu'on va tirer...
00:56:06 Mais disons 5 à 10 milliards,
00:56:08 on est très loin de ce que...
00:56:10 - À 10 milliards, c'est par exemple le prix
00:56:12 de ce qu'il faut rembourser dans le prochain budget
00:56:14 en 2024, qu'on est en train de faire des économies.
00:56:16 - Oui, mais...
00:56:18 - C'est quand même considérable.
00:56:20 - Si c'est pour simplement payer ce qui existe,
00:56:22 ça n'a pas beaucoup d'intérêt. Ce qui est intéressant
00:56:24 quand on fait un prélèvement, c'est pour payer ce qui n'existe pas.
00:56:26 Pas ce qui existe déjà.
00:56:28 Si on doit faire quelque chose pour...
00:56:30 - Non mais je dis ça pour donner un ordre de grandeur.
00:56:32 - Mais enfin, ça reste peu
00:56:34 par rapport au budget.
00:56:36 L'autre solution, c'est de pouvoir,
00:56:38 même si là aussi, c'est des sommes,
00:56:40 de doter chaque personne
00:56:42 d'un montant...
00:56:44 - Ce qu'on propose,
00:56:46 c'est un... - Oui.
00:56:48 Mais c'est des sommes qui restent forcément limitées.
00:56:50 Ça peut être 20 000 euros
00:56:52 par personne. Ça reste très limité.
00:56:54 C'est pas avec ça que vous avez un apport.
00:56:56 Mais peut-être qu'il faut réfléchir
00:56:58 pour certains types de jeunes
00:57:00 qui sont dans
00:57:02 certaines situations, d'avoir des formules
00:57:04 qui puissent leur apporter.
00:57:06 - Moi, je pense que
00:57:10 cette forme de stigmatisation de la jeunesse
00:57:12 a toujours existé. C'est pas nouveau
00:57:14 qu'on stigmatise politiquement,
00:57:16 médiatiquement, les jeunes. La différence
00:57:18 aujourd'hui, c'est qu'on a établi
00:57:20 ce constat. Les jeunes sont vraiment une minorité.
00:57:22 Ils sont dans une position de fragilité
00:57:24 vraiment particulière par rapport aux autres générations.
00:57:26 Et qu'il y a un écho médiatique aussi
00:57:28 qui est rendu très important.
00:57:30 Je cite dans le livre beaucoup de propos d'éditorialistes
00:57:32 qui, s'ils étaient tenus à l'encontre
00:57:34 des plus âgés, ou d'ailleurs contre n'importe quelle
00:57:36 autre catégorie de la population, seraient considérés
00:57:38 comme extrêmement choquants. Et quand on parle
00:57:40 de jeunesse narcissique, de jeunesse égoïste,
00:57:42 de jeunesse fainéante, on ne se permettrait jamais
00:57:44 de faire ça avec d'autres catégories
00:57:46 de la population. Aujourd'hui, il y a quand même cet écho
00:57:48 que je trouve quand même particulier
00:57:50 et qu'on peut... Une tolérance
00:57:52 quand même assez impressionnante dans l'espace public
00:57:54 pour ce type de stigmatisation à l'encontre
00:57:56 des jeunes. Alors, j'importe quand même
00:57:58 la nuance nécessaire, ce n'est pas tous les plus âgés,
00:58:00 c'est important de le préciser, qui font ça.
00:58:02 C'est une partie particulièrement
00:58:04 peut-être bruyante
00:58:06 qu'on entend et que
00:58:08 j'entends dénoncer quand même dans le livre
00:58:10 parce qu'effectivement c'est particulièrement
00:58:12 insupportable. Mais ce qui est
00:58:14 notable, c'est que ce ne sont pas que
00:58:16 des propos qu'on entend dans la bouche de personnes âgées.
00:58:18 Ce sont aussi des propos qu'on a entendus
00:58:20 là, plus récemment. Moi, ce que je considère faire partie
00:58:22 de la stigmatisation des jeunes, c'est les propos de Gabriel Attal
00:58:24 dans son discours de politique générale
00:58:26 qui a eu ces mots sur
00:58:28 les jeunes où il dit "tu casses, tu répares,
00:58:30 tu salis, tu nettoies, tu manques de respect,
00:58:32 on t'apprend l'autorité". Ça, c'est
00:58:34 quand même une manière de s'adresser à la jeunesse
00:58:36 qui est
00:58:38 je pense pas adaptée en fait
00:58:40 à ce qu'elle vit et à tout ce qu'on vient de
00:58:42 décrire. Comment dépasser ça ? Parce que
00:58:44 j'imagine que c'est la question qu'on va se poser, mais déjà en se rendant compte
00:58:46 que ce n'est pas acceptable. De toujours
00:58:48 présupposer que les jeunes sont
00:58:50 sénéants, de présupposer qu'ils sont potentiellement
00:58:52 dangereux et d'avoir un
00:58:54 exemple médiatique qui est la
00:58:56 Rêve Party en Bretagne pendant
00:58:58 le Covid, où ça a fait un scandale
00:59:00 d'État pour
00:59:02 quelques milliers de jeunes qui s'étaient effectivement rassemblés
00:59:04 à un moment où on n'avait pas le droit de se rassembler
00:59:06 et où ça a pris
00:59:08 des proportions, où c'est allé jusqu'au ministère de l'Intérieur.
00:59:10 On ne se permettrait pas ça avec d'autres générations.
00:59:12 Donc essayons de... Je ne dis pas
00:59:14 qu'il faut laisser les jeunes tout faire, et qu'il faut
00:59:16 avoir aucun cadre, mais
00:59:18 essayons quand même de comprendre le contexte dans lequel ils s'inscrivent
00:59:20 et surtout, je disais de jamais
00:59:22 parler de "la jeunesse" parce qu'en fait
00:59:24 ça n'a aucun sens. C'est vraiment
00:59:26 une petite partie de la jeunesse dans un contexte
00:59:28 donné, et donc
00:59:30 c'est évidemment le rôle des journalistes de traiter ça avec nuance.
00:59:32 J'insiste, ce n'est pas tous les journalistes
00:59:34 qui ont participé à ce type de débat.
00:59:36 Il y a aussi des articles d'une très
00:59:38 grande qualité sur lesquels je me suis appuyée pour le livre
00:59:40 qui rendent compte de la jeunesse dans sa complexité
00:59:42 et
00:59:44 qu'on peut louer. Donc c'est le rôle des
00:59:46 journalistes et c'est le rôle des hommes et des femmes politiques
00:59:48 à un moment de prendre la question
00:59:50 des jeunes au sérieux et de ne pas participer à leur
00:59:52 stigmatisation. Ça me semble quand même être le minimum
00:59:54 dans le contexte dans lequel nous nous trouvons.
00:59:56 Et je terminerai sur Gabriel Attal, qui est le plus jeune
00:59:58 Premier ministre, qui a une cote de popularité
01:00:00 particulièrement élevée auprès des plus âgés
01:00:02 et pas auprès des plus jeunes.
01:00:04 Comme quoi, vous disiez "il faut des figures nouvelles",
01:00:06 vous voyez que c'est la limite... C'est pas suffisant !
01:00:08 C'est pas suffisant ! C'est la limite du raisonnement.
01:00:10 C'est pas suffisant. On peut même faire plus jeune
01:00:12 La jeunesse n'est pas gage de compétences.
01:00:14 Et vous aurez les mêmes déceptions.
01:00:16 Le temps ne fait rien à l'affaire.
01:00:18 Et parfois même peu aggraver.
01:00:20 Je reviens, parce que je suis globalement d'accord
01:00:22 avec ce qu'a dit Salomé Sake.
01:00:24 Nous sommes dans une société
01:00:26 vieillissante.
01:00:28 C'est pas propre à la France.
01:00:30 Nous sommes dans des sociétés occidentales vieillissantes.
01:00:32 Et qui donc
01:00:34 vivent davantage
01:00:36 les problèmes à l'aune
01:00:38 de ce qu'elles ont elles-mêmes connus.
01:00:40 D'où ce fantasme
01:00:42 du "c'était mieux avant", de la nostalgie,
01:00:44 de l'âge d'or qui n'a jamais existé.
01:00:46 C'était plus dur avant.
01:00:48 D'une certaine façon.
01:00:50 Ça dépend sur quoi ?
01:00:52 D'une certaine façon,
01:00:54 on n'aurait pas envie,
01:00:56 pas vous, parce que vous n'avez pas connu...
01:00:58 En tout cas en tant que femme, clairement pas.
01:01:00 Mais il n'y a pas qu'en tant que femme.
01:01:02 Même en tant que salarié qui était privé d'un temps de l'ordre droit,
01:01:04 même en tant qu'homosexuel
01:01:06 qui était pénalisé,
01:01:08 je pourrais continuer.
01:01:10 Bien sûr.
01:01:12 Mais ça porte la technologie, quand même,
01:01:14 qui a pu améliorer la vie,
01:01:16 la condition humaine.
01:01:18 Ça c'est la première chose.
01:01:20 Deuxièmement, nous sommes dans une société inquiète.
01:01:22 J'évoquais l'angoisse pour les jeunes,
01:01:24 mais d'une certaine façon il y a une inquiétude générale
01:01:26 qui fait que quand il y a ce qui se passe autour de nous,
01:01:28 des guerres, des crises,
01:01:30 des intempéries, même si on ne les rapporte pas toujours
01:01:32 au réchauffement climatique,
01:01:34 mais enfin quand même,
01:01:36 il ne pleut pas à Perpignan,
01:01:38 il pleut sans discontinuer à Boulogne-sur-Mer.
01:01:40 Donc il y a une inquiétude.
01:01:42 Et quand il y a de l'inquiétude,
01:01:44 il y a du repli.
01:01:46 Et le repli, il est aussi générationnel.
01:01:48 C'est-à-dire qu'on se replie autour des siens.
01:01:50 Et donc on se méfie
01:01:52 de ce qui arrive.
01:01:54 Troisième élément, qui permet de comprendre
01:01:56 l'éventuel conflit que je veux éviter
01:01:58 de génération,
01:02:00 c'est qu'on est dans une société fragmentée
01:02:02 où nous ne communiquons plus
01:02:04 entre nous.
01:02:06 Nous nous ignorons.
01:02:08 Les personnes qui parlent des jeunes n'ont pas de jeunes.
01:02:10 Ils ne rencontrent pas de jeunes.
01:02:12 Il peut arriver aussi qu'il y ait des jeunes
01:02:14 qui ne rencontrent pas d'autres parties de la société.
01:02:16 Donc il y a cet écart qui peut exister.
01:02:18 Mais il y a aussi,
01:02:20 heureusement,
01:02:22 au-delà des préjugés, des clichés,
01:02:24 il faut absolument
01:02:26 permettre l'échange,
01:02:28 permettre l'interpellation, permettre le dialogue.
01:02:30 Parce que si la solidarité
01:02:32 ne se fait pas,
01:02:34 si l'incompréhension s'installe,
01:02:36 si l'inconfrontation se fait,
01:02:38 le risque, on le connaît,
01:02:40 c'est le fait qu'on n'arrive plus à vivre ensemble.
01:02:42 C'est ça l'enjeu principal.
01:02:44 Et c'est ce que l'extrême droite produit
01:02:46 par son discours,
01:02:48 par son attitude,
01:02:50 y compris auprès des jeunes.
01:02:52 On ne peut plus vivre ensemble.
01:02:54 On ne se comprend plus.
01:02:56 On n'a plus de lien les uns avec les autres.
01:02:58 On n'a plus les mêmes valeurs.
01:03:00 C'est faux.
01:03:02 J'en ai toujours eu la preuve.
01:03:04 L'intérêt citoyen, c'est d'être
01:03:06 capable de porter
01:03:08 les valeurs communes et de vivre ensemble.
01:03:10 Faut-il encore se connaître et se rencontrer.
01:03:12 D'où l'importance du dialogue entre les générations.
01:03:14 Je pense que sur la question climatique,
01:03:20 elle a été beaucoup plus ardente,
01:03:22 exigeante que nous ne l'avons été,
01:03:24 alors même que nous étions
01:03:26 déjà informés, parce que j'évoquais les années 70.
01:03:28 Elle a donc été beaucoup plus combattante.
01:03:32 De ce point de vue-là,
01:03:34 même s'il y a toujours des excès,
01:03:36 y compris dans les formes de manifestations,
01:03:38 il faut l'entendre et la comprendre.
01:03:40 La nature a été
01:03:42 quand même
01:03:44 sagagée
01:03:46 dans tellement d'endroits.
01:03:48 Nos villes ont été massacrées
01:03:50 sur le plan de l'urbanisme pendant des années,
01:03:52 même si on a corrigé, heureusement,
01:03:54 pendant ces derniers mandats.
01:03:56 Il reste que, voilà,
01:03:58 on est obligés d'entendre ce que
01:04:00 les jeunes nous disent.
01:04:02 Et aussi,
01:04:04 les quartiers populaires,
01:04:06 parce que la jeunesse des quartiers populaires,
01:04:08 c'est celle que je veux rencontrer.
01:04:10 C'est une chance d'avoir des jeunes
01:04:12 qui ont encore cette volonté de réussir.
01:04:14 Et je crois, en plus,
01:04:16 même s'il faudrait nous conforter,
01:04:18 que notre système d'enseignement
01:04:20 permet à beaucoup de jeunes, encore,
01:04:22 de pouvoir connaître des destins.
01:04:24 C'est quand même ça qu'il faut essayer de porter.
01:04:26 Oui, mais ça reste l'exception.
01:04:28 Je parle beaucoup, à Blast,
01:04:30 dans le livre, mais à Blast de manière générale,
01:04:32 de cette question de la reproduction des inégalités.
01:04:34 Aujourd'hui, 18% des élèves issus de familles
01:04:36 les plus défavorisées ont un diplôme de l'enseignement supérieur
01:04:38 contre 68% pour les enfants de cadre.
01:04:40 On est quand même dans un pays où l'origine sociale
01:04:42 et le territoire,
01:04:44 donc c'est souvent lié d'ailleurs à l'origine sociale,
01:04:46 déterminent en grande partie
01:04:48 le destin. Et ça, c'est quelque chose
01:04:50 qui est extrêmement difficile à vivre pour beaucoup de jeunes.
01:04:52 Alors on continue à leur dire que nous sommes
01:04:54 dans une méritocratie, c'est un terme qui est
01:04:56 déployé par des membres du gouvernement régulièrement,
01:04:58 que quand on veut, on peut, alors que la réalité,
01:05:00 c'est que quand on peut, on veut.
01:05:02 Je reprends les mots de Chantal Jaquet,
01:05:04 qui met en lumière
01:05:06 toujours plus cette baisse
01:05:08 de la mobilité sociale, par certains aspects,
01:05:10 qui est liée à une politique,
01:05:12 et pour le coup, c'est directement lié à des fois politiques.
01:05:14 C'est pas une fatalité,
01:05:16 c'est pas "Oh, l'école reproduit les inégalités",
01:05:18 c'est comme ça. Et sur la question des quartiers populaires,
01:05:20 ce sont évidemment les jeunes,
01:05:22 vraiment les grands oubliés,
01:05:24 ce sont les jeunes qui subissent en plus des discriminations,
01:05:26 qui subissent une violence sociale
01:05:28 qui est absolument inouïe, où il y a des taux de pauvreté
01:05:30 qui sont deux ou trois fois supérieurs à tout le reste du territoire.
01:05:32 Et c'est ce que je retiens, moi,
01:05:36 de toute cette enquête sur la jeunesse,
01:05:38 c'est à quel point les inégalités fracturent
01:05:40 cette jeunesse, et à quel point il est difficile
01:05:42 quand on est, entre guillemets, du mauvais côté de la barrière,
01:05:44 d'avoir de l'espoir en l'avenir,
01:05:46 parce que le système français, s'il nous le permet
01:05:48 plus que dans d'autres pays, c'est une évidence que je ne nie pas,
01:05:50 ne nous permet pas du tout autant que ce qu'on nous dit.
01:05:52 Et aujourd'hui, il y a besoin, au moins,
01:05:54 de ne serait-ce que reconnaître
01:05:56 cette injustice profonde.
01:05:58 Un des problèmes majeurs que nous avons,
01:06:02 et qui explique pour beaucoup
01:06:04 la reproduction des inégalités,
01:06:06 est la répartition spatiale de la population.
01:06:08 Qui tend à se fragmenter de plus en plus.
01:06:12 Ce sont les populations les plus pauvres,
01:06:14 modestes, qui vivent dans les mêmes quartiers,
01:06:18 dans les mêmes ensembles,
01:06:20 et qui fréquentent les mêmes écoles.
01:06:22 Donc la répartition spatiale de la population
01:06:26 fait que nous avons, malgré tous les efforts du corps enseignant,
01:06:30 et tous les éléments budgétaires que nous pouvons mettre,
01:06:34 dans le cadre de la mixité sociale,
01:06:36 on reste devant cette espèce de plafond
01:06:38 qui fait que, même s'il y a toujours des cas,
01:06:40 et heureusement qu'il y en a,
01:06:42 et qu'il y a toujours des succès,
01:06:44 et des mérites reconnus,
01:06:46 mais il y a tellement de gâchis aussi,
01:06:48 tellement de destins brisés.
01:06:50 Ce n'est pas simplement de mettre plus de moyens,
01:06:52 c'est d'essayer d'avoir une politique du logement,
01:06:54 une politique de l'organisation de l'espace,
01:06:56 qui permette d'avoir cette mixité sociale,
01:06:58 qui est indispensable.
01:07:00 Surtout pas, ils ne doivent pas céder la place,
01:07:06 au sens, moi je ne pense pas qu'aujourd'hui,
01:07:08 mettre des jeunes au pouvoir,
01:07:10 résoudrait les problèmes qu'on vient d'évoquer.
01:07:12 Absolument pas.
01:07:14 Moi je plaide pour qu'on prenne en compte
01:07:16 collectivement,
01:07:18 les intérêts
01:07:20 des jeunesses,
01:07:22 et qu'on se rende compte de tout ce qu'on vient d'évoquer
01:07:24 aujourd'hui, qui n'est pas du tout
01:07:26 su de la majorité
01:07:28 aujourd'hui, même si quand on travaille dessus,
01:07:30 ça semble vite évident,
01:07:32 ces inégalités générationnelles, notamment,
01:07:34 on les met rapidement en lumière,
01:07:36 les inégalités territoriales, les inégalités
01:07:38 de milieu,
01:07:40 on va pouvoir documenter ça
01:07:42 assez facilement,
01:07:44 mais il n'y a pas une évidence pour tout le monde,
01:07:46 le nombre de personnes qui disent à leurs enfants,
01:07:48 ou de personnes qui disent à des jeunes autour d'eux,
01:07:50 "mais quand tu veux, tu peux, tu n'as qu'à te bouger",
01:07:52 et ça c'est un truc qu'on entend beaucoup, et qui revient dans la bouche des jeunes
01:07:54 que j'ai pu interviewer, on leur dit "mais tu n'as qu'à te bouger,
01:07:56 si tu n'es pas content, tu n'as qu'à te mobiliser".
01:07:58 Déjà, prenons conscience de cette minorité démographique
01:08:00 dans laquelle ils se trouvent, de ces inégalités
01:08:02 d'accès au patrimoine,
01:08:04 de ces inégalités économiques, 50% des jeunes occupent
01:08:06 des emplois précaires contre 7% pour plus de 50 ans,
01:08:08 de toutes ces inégalités générationnelles, là,
01:08:10 prenons-les en compte, et essayons de régler la question,
01:08:12 et là, je dis "essayons",
01:08:14 mais moi, ce n'est pas mon rôle de journaliste,
01:08:16 c'est collectivement,
01:08:18 en tant que société, essayons de régler la question
01:08:20 de manière intergénérationnelle.
01:08:22 Je pense que c'est avant tout une question
01:08:24 de tendre la main vers l'autre,
01:08:26 et à 28 ans,
01:08:28 d'ailleurs, je ne prétends absolument pas
01:08:30 apporter la réponse
01:08:32 à toutes ces questions qu'on vient d'évoquer,
01:08:34 je ne pense pas que
01:08:36 quiconque puisse seul, d'ailleurs,
01:08:38 répondre à toutes ces problématiques-là,
01:08:40 et donc on a besoin d'un dialogue,
01:08:42 mais pour ça, on a besoin de reconnaître ce problème de base,
01:08:44 et en fait, là, on est d'accord
01:08:46 sur plusieurs points du constat, mais ce n'est pas le cas,
01:08:48 et d'ailleurs, je l'ai vu dans les rencontres que j'ai pu faire
01:08:50 en librairie, donc moi, j'espère,
01:08:52 et j'espère vraiment avec ce livre, proposer un outil
01:08:54 de dialogue intergénérationnel
01:08:56 pour qu'on puisse avoir ces grands débats
01:08:58 qu'on doit avoir, et obtenir
01:09:00 des réponses politiques
01:09:02 qui permettront qu'on choisira collectivement,
01:09:04 mais dans tous les cas, la réponse n'est pas
01:09:06 entre les mains des jeunes, et pas que,
01:09:08 en tout cas, entre les mains des jeunes, et je pense qu'il faut vraiment
01:09:10 avoir ça en tête, ne serait-ce que si tous les jeunes demain
01:09:12 se mettaient à voter, ils ne pourraient pas
01:09:14 contrebalancer le vote des plus âgés, donc en fait,
01:09:16 la nécessité qu'on a, c'est que les plus âgés
01:09:18 aient envie d'aider les plus jeunes,
01:09:20 aient envie de se préoccuper
01:09:22 de ce que les jeunes vivent, de leurs conditions,
01:09:24 et pour ça, il faut informer
01:09:26 le plus possible, et moi, c'est ma bataille à moi,
01:09:28 c'est d'informer sur ces enjeux-là, après,
01:09:30 qui va résoudre ce problème, comment,
01:09:32 c'est pas mon rôle de dire
01:09:34 exactement comment ça doit être fait,
01:09:36 mais ce qui est certain, et on l'a évoqué avec le cas de Gabriel Attal,
01:09:38 c'est que l'âge n'est pas gage
01:09:40 de compétence ou d'incompétence,
01:09:42 et donc, autant,
01:09:44 j'appelle vraiment à ne pas
01:09:46 faire cette espèce de présomption d'incompétence aux jeunes,
01:09:48 qu'on fait souvent, en se disant "ils sont trop jeunes, ils ne peuvent pas
01:09:50 comprendre", c'est pas parce qu'on est jeune qu'on est forcément
01:09:52 idéaliste, irréaliste, pas
01:09:54 pragmatique, parce qu'au contraire, certains jeunes sont bien
01:09:56 plus corrélés à la réalité que leurs aînés,
01:09:58 mais c'est pas non plus parce qu'on est jeune qu'on sait
01:10:00 tout et qu'on peut y arriver,
01:10:02 donc moi je pense que, en tout cas à titre personnel,
01:10:04 évidemment que j'ai beaucoup à apprendre
01:10:06 des plus âgés, dans le monde du journalisme, c'est quelque chose
01:10:08 que je vois au quotidien,
01:10:10 ce sont bien des journalistes
01:10:12 plus âgés aussi qui m'enseignent beaucoup de choses,
01:10:14 donc je ne me positionne pas du tout en tant que
01:10:16 les jeunes savent mieux, simplement les jeunes ont une voix,
01:10:18 ils ont des voix,
01:10:20 qui méritent d'être écoutées
01:10:22 autant que les voix des plus âgés,
01:10:24 et aujourd'hui, le constat que je fais, c'est que ce n'est
01:10:26 pas le cas, et qu'il y a urgence à entendre ces voix-là,
01:10:28 et je reviens, puisqu'on a commencé par ça sur la question
01:10:30 de la santé mentale, pour moi, les jeunes
01:10:32 qui en viennent à vouloir mourir,
01:10:34 c'est des jeunes qui considèrent qu'il n'y a plus d'espoir,
01:10:36 et quand on est une société où le nombre
01:10:38 de pensées suicidaires double,
01:10:40 c'est quand même considérable,
01:10:42 en moins de 10 ans, c'est quand même
01:10:44 qu'on a un échec collectif
01:10:46 sur ce sujet-là,
01:10:48 on a échoué à donner un avenir désirable,
01:10:50 ou à offrir un avenir désirable
01:10:52 à une partie des jeunes, parce qu'il faut, autant je parle
01:10:54 des questions de santé mentale, c'est un phénomène
01:10:56 qui est dans le sens qu'il y a tous les jeunes qui sont dépressifs,
01:10:58 là encore, il faut juste qu'on en prenne conscience,
01:11:00 et qu'une fois qu'on en fait un enjeu de santé publique,
01:11:02 par exemple, avec son santé mentale,
01:11:04 ou le fait de réduire ses inégalités,
01:11:06 ou le fait de donner des opportunités désirables,
01:11:08 dignes, tout simplement, aux jeunes,
01:11:10 une fois que ça devient un objectif politique,
01:11:12 déjà on peut en discuter, mais aujourd'hui, c'est même pas le cas.
01:11:14 C'est même pas au centre du débat,
01:11:16 ce n'est même pas
01:11:18 l'électorat auquel on s'adresse.
01:11:20 Donc, après, on verra ce qui se passera.
01:11:22 La question majeure
01:11:24 pour un pays comme le nôtre,
01:11:26 une démocratie comme la nôtre,
01:11:28 bien abîmée,
01:11:30 mais néanmoins, j'espère, encore vivace,
01:11:32 c'est quel est
01:11:34 notre avenir commun ?
01:11:36 C'est ça la grande question.
01:11:38 Quel est l'avenir dans lequel nous pouvons nous projeter ?
01:11:40 Je répète toujours que c'est mieux d'être jeune
01:11:42 que d'être vieux.
01:11:44 Je peux vous l'assurer.
01:11:46 Parce que, être jeune, c'est d'avoir le temps.
01:11:48 Pour ceux qui n'ont plus le temps,
01:11:50 et c'est ça qu'il faut leur dire,
01:11:52 vous n'avez plus le temps.
01:11:54 Donc, tout ce que vous pouvez faire,
01:11:56 ce n'est pas pour vous-même,
01:11:58 si on peut vous comprendre,
01:12:00 c'est pour tout le reste de la société,
01:12:02 pour toutes les autres générations.
01:12:04 Et, de ce point de vue,
01:12:06 les priorités des jeunes
01:12:08 ne sont pas les priorités d'une catégorie de la population.
01:12:10 C'est la priorité majeure du pays.
01:12:12 Parce que, si les jeunes
01:12:14 ne rentrent pas,
01:12:16 je parle d'une majorité d'entre eux,
01:12:18 je ne parle pas de la minorité
01:12:20 qui s'en sortira toujours.
01:12:22 Mais si les majorités ne rentrent pas
01:12:24 avec une confiance dans leur propre destin,
01:12:26 alors il n'y a pas d'avenir pour le pays.
01:12:28 Et là, je pense que
01:12:30 cette génération, la mienne,
01:12:32 que je peux m'adresser
01:12:34 en disant, c'est vers la jeunesse
01:12:36 que vous devez forcément
01:12:38 tourner votre regard.
01:12:40 Mais, je m'adresse aussi à la jeunesse
01:12:42 en disant, vous pouvez reprocher
01:12:44 beaucoup de choses, et vous avez raison
01:12:46 à la génération qui vous a mis dans cette situation,
01:12:48 même si elle a aussi
01:12:50 permis des conquêtes,
01:12:52 et permis des victoires, et permis des progrès,
01:12:54 et permis que nous vivions mieux ensemble.
01:12:56 Mais, il y a une chose
01:12:58 qu'elle a faite, cette génération,
01:13:00 même si elle l'a mal faite,
01:13:02 c'est qu'à un moment,
01:13:04 elle a pensé à un rêve politique.
01:13:06 Elle l'a caressé,
01:13:08 peut-être mal,
01:13:10 c'est dans l'hypothèse révolutionnaire
01:13:12 dans les années 60, c'était pas ma génération.
01:13:14 Ou dans l'hypothèse de la gauche au pouvoir
01:13:16 à partir des années 80.
01:13:18 Mais, l'engagement politique,
01:13:20 c'est pas simplement
01:13:22 l'engagement, comme je l'ai dit, partisan,
01:13:24 c'est qu'à un moment, la jeunesse
01:13:26 ne doit pas simplement attendre
01:13:28 que la société
01:13:30 s'empare de ses priorités,
01:13:32 elle doit, au moment, se faire entendre.
01:13:34 Alors, comment se faire entendre ? C'est ça toute la difficulté.
01:13:36 Et beaucoup de jeunes viennent me voir, me dire,
01:13:38 comment je peux faire pour faire de la politique ?
01:13:40 À quelle porte
01:13:42 je peux frapper ?
01:13:44 Et je leur réponds, oui, le malheur,
01:13:46 c'est qu'il n'y a même plus de maison pour frapper
01:13:48 à une porte. C'est ça le problème.
01:13:50 Et donc, il va falloir, mais ça c'est pas votre,
01:13:52 c'est pas seulement la responsabilité de la jeune,
01:13:54 il faut recréer des lieux politiques,
01:13:56 des organisations politiques.
01:13:58 À quoi ça servait une organisation politique ?
01:14:00 Je parle presque à l'imparfait.
01:14:02 Ça servait au fait qu'il y avait plusieurs générations qui étaient là.
01:14:04 Il y avait les vieux militants
01:14:06 qui racontaient l'histoire,
01:14:08 il y avait ceux qui étaient peut-être
01:14:10 plus pressés que d'autres, occupaient des places,
01:14:12 puis il y avait les jeunes qui venaient
01:14:14 déborder.
01:14:16 Et si on n'a plus des lieux, alors ça peut être des partis,
01:14:18 ça peut être autre chose, si on n'a plus des lieux,
01:14:20 ça peut être des associations, ça peut être des groupements,
01:14:22 si on n'a plus des lieux où on partage
01:14:24 nos envies,
01:14:26 nos espoirs, nos expériences,
01:14:28 alors la démocratie est en cause.
01:14:30 Et je termine là-dessus.
01:14:32 En réalité, moi j'apprends
01:14:34 de Salomé Sake.
01:14:36 C'est la transmission.
01:14:38 J'apprends ce que me dit une génération,
01:14:40 même si je peux dire
01:14:42 je le savais déjà. Non, non, je ne savais pas
01:14:44 vraiment, au-delà du livre, etc.
01:14:46 On apprend des autres.
01:14:48 Si on n'apprend plus des autres,
01:14:50 c'est là que le risque
01:14:52 d'une fatalité
01:14:54 du populisme
01:14:56 peut s'installer.
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