• il y a 8 mois
Transcription
00:00 Comment on reçoit le film quand on est contre l'avortement ?
00:04 Et moi, je n'ai pas d'idée préconçue de la réception.
00:06 Je me dis juste, c'est une chose d'être contre,
00:09 quelles que soient les raisons, religieuses, culturelles.
00:13 Et je trouve que c'en est une autre de se confronter au parcours d'avortement clandestin
00:18 et de se demander jusqu'à quel point on valide l'idée que des femmes
00:21 ont devoir passer par ce chemin-là.
00:24 Ce n'est pas vu depuis trois mois, c'est ça ?
00:28 - Cécile, vous avez mal ? - Pas seulement.
00:32 - Quel genre de douleur ? - Ça fait comme l'écran.
00:38 Mon rapport à l'œuvre d'Annie Néarno, d'abord, il est profond.
00:42 Je suis une grande lectrice et depuis longtemps.
00:45 Paradoxalement, je n'avais pas lu l'événement.
00:48 Je l'ai découvert assez tard, après avoir avorté.
00:50 J'avais envie de lire sur le sujet et une amie m'a conseillé de lire celui-là.
00:55 Et ensuite, quand j'ai voulu l'adapter, d'abord, je lui ai demandé l'autorisation.
01:01 Il faut toujours évidemment interroger l'auteur.
01:03 Je pense qu'elle a mûri l'idée.
01:06 Elle a vu mon premier film, on a discuté.
01:08 Et ensuite, pour moi, il était très important de lui soumettre un projet d'adaptation
01:15 parce que je voulais mon geste un peu dans le prolongement du sien,
01:19 parce qu'en plus d'être le texte d'une autrice, c'est un morceau de vécu.
01:23 Donc, il y avait comme une espèce de double charge à l'endroit de l'adaptation.
01:27 Et que pour m'affranchir, pour trouver ce que j'avais envie de faire,
01:30 j'avais besoin dans un premier temps de savoir ce qu'elle en pensait, elle.
01:33 - Donc, ça y est, c'est fini.
01:35 Vous allez rater vos examens ?
01:38 Oui, non ?
01:42 - Non.
01:44 Moi, j'avais le sentiment, en lisant le livre d'Agnès Arnault,
01:48 que je connaissais très peu cette histoire.
01:50 Que j'avais une idée un peu vague de l'avortement clandestin,
01:54 mais que la réalité derrière ce terme un peu balisé, je ne la connaissais pas.
02:00 Quand je suis rentrée dans le livre,
02:01 je n'ai pas pu cesser de lire avant la dernière page
02:03 parce que j'étais happée par ce qui me semblait être un suspense insoutenable
02:07 et aussi sidéré par tout ce que je connaissais mal.
02:10 Donc, je pense qu'il y a une part d'inédit qui est liée au fait que le sujet est peu traité.
02:15 Après, j'avais quelques références quand même.
02:18 Quelques films, celui de Mungiu, je pense aussi à The Tribe,
02:22 qui se déroule dans une communauté de sourds muets,
02:25 avec un avortement clandestin en pleine séquence assez fort.
02:30 Mais oui, on a peu d'images.
02:33 C'est une histoire d'argent ?
02:34 Non, ce n'est pas ça.
02:36 Alors, c'est quoi ?
02:37 Anna ?
02:47 Il vaudrait mieux que vous nous remontent.
02:49 J'arrive à Venise et en chemin, je suis encore en train de me demander
02:52 si je vais dire "moi quand j'ai avorté".
02:54 Et il faut qu'Anna Mouglalis en conférence de presse soit la première à le dire,
02:57 mais très naturellement,
02:59 pour que je réalise qu'en fait, ce dispositif de honte sociale me traverse encore,
03:04 que je le ressens moi et qu'en dépit du fait que je travaille trois ans sur le sujet,
03:08 j'ai toujours envie de me taire.

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