Delphine Horvilleur, rabbin et philosophe, était l’invitée de Ce n’est pas tous les jours dimanche.
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00:00 Dans ce livre, chaque chapitre est une discussion réelle ou imaginaire avec plusieurs personnes.
00:06 Il y a un chapitre qui m'a beaucoup plu, c'est ce dialogue que vous imaginez avec vos grands-parents,
00:09 rescapés de la Shoah, qui ne parlaient jamais de ce qui leur était arrivé.
00:13 Il y a votre grand-père qui est passionné de grammaire, il y a votre grand-mère, c'est assez savoureux.
00:18 Vous imaginez des dialogues avec un accent yiddish à couper au couteau.
00:23 Ce dialogue, c'est parce qu'au fond, le 7 octobre a réveillé une peur ancestrale
00:27 qui vous a ramené à ce qui leur était arrivé pendant la Seconde Guerre mondiale.
00:32 Il y a cette sorte de filiation directe qui a été faite.
00:35 Oui, le sentiment d'un réveil de l'histoire, de ces fantômes, de ces démons.
00:39 Il se trouve que moi, je suis l'enfant de deux histoires juives très différentes.
00:42 Une famille paternelle très ancrée dans la France et la République,
00:46 une famille qui avait été sauvée par des non-juifs et par des justes,
00:49 et qui était très redevable et dans la gratitude à l'égard de ceux qui les avaient sauvés.
00:53 Et une famille maternelle très traumatisée, survivante des camps,
00:57 ayant perdu tout le monde et apatride,
01:00 et qui était plutôt dans un discours ou plutôt dans un mutisme,
01:03 parce qu'ils ne parlaient pas beaucoup, mes grands-parents,
01:05 mais leur silence racontait le manque de confiance en l'autre.
01:08 J'ai eu l'impression de grandir entre ces deux narratifs, entre ces deux récits,
01:11 et d'avoir toujours fait le choix du premier dans tout ce que j'ai pu faire dans ma vie,
01:15 y compris et particulièrement dans mes engagements de rabbin,
01:18 dans le dialogue interreligieux, dans l'engagement pour la République.
01:21 Le choix très puissant de la confiance en l'autre.
01:24 Et j'ai eu le sentiment, après le 7 octobre,
01:26 que l'autre voix de ma famille parlait un peu plus fort dans ma tête.