Café de Campagne #29 FEMMES EN RURALITÉ

  • il y a 7 mois
Alors que 11 millions de femmes (une sur trois) vivent dans les territoires ruraux, quelles solutions innovantes, réseaux de solidarité et initiatives font-elles émerger ? Quels rôles jouent-elles dans le monde agricole, entrepreneurial ou encore politique ? Comment favoriser le retour à la terre au féminin et construire de nouveaux récits pour les campagnes ?

Avec toute l'équipe d'InSite, nous vous avons donné rendez-vous jeudi 22 février à 13h pour échanger sur ces questions à l'occasion de notre 29ème Café de Campagne. Un grand merci à nos 3 intervenantes de choc :

Emmanuelle Coratti, fondatrice de l’association Back To Earth qui organise la 2ème édition des Rencontres nationales du retour à la terre et de l’avenir des territoires sur le thème du féminin
Sabine Delbosc-Naudan, conseillère municipale de la commune de Lassouts, Présidente déléguée Aveyron MSA Midi-Pyrénées Nord et éleveuse bovins (12)
Olivia Bertrand, fondatrice et directrice de la SCIC Laines paysannes - La mode à rebrousse poil, lauréate 2023 du prix Innover à la campagne et basée en Ariège (09)
Transcript
00:00:00 Après la grande phase de la métropolisation, c'est peut-être le temps de la ruralité qui est en
00:00:07 train de s'ouvrir. C'est des solutions finalement peu coûteuses pour la collectivité, mais toujours
00:00:14 à chaque fois pleines de bon sens. Moi je ne crois pas qu'il y ait une ruralité. La ruralité
00:00:20 ça se conjugue en pluriel. Les cafés de campagne avec INSIT. Je vous propose que nous démarrions ce
00:00:31 café de campagne. Très très heureux de démarrer ce 29e café de campagne qui est sur un sujet fort
00:00:42 important. Vous savez que notre réseau INSIT est très attaché à la question de l'égalité,
00:00:48 de l'équité, de la coopération, de la transversalité. Et donc il était tout à fait
00:00:53 naturel de traiter ce sujet des femmes en ruralité. Le premier constat que l'on peut
00:01:00 faire c'est que sur ce café de campagne, je vous disais plus de 130 inscrits, nous avons 6% d'hommes
00:01:07 dont je vois quand même pas mal de collègues INSIT. Donc bon c'est à la fois toujours une
00:01:16 surprise et une déception. Ce combat de l'égalité c'est un combat qu'il ne faut jamais relâcher et
00:01:26 que sur cette problématique là on le voit malheureusement tous les jours dans l'actualité,
00:01:30 il est fondamental. Et donc pour nous il méritait très largement d'être traité. Je pense que ça
00:01:36 fait partie des sujets qu'il faut traiter régulièrement. Comme tout acte pédagogique
00:01:42 nécessite de la répétition et donc on répétera parce que 6% me paraît complètement hallucinant.
00:01:51 Bon en tous les cas merci à toutes et à tous d'être là sur ce café. Merci à Sabine, à Emmanuel et
00:02:01 à Olivia de nous avoir fait l'honneur de participer à ce café. Marie-Elie vous présentera mieux que
00:02:07 je ne le ferai. En tous les cas il était pour nous fondamental d'avoir ce prisme, ce regard,
00:02:14 ce regard particulier, ce prisme d'intervention autour des questions de solidarité, de place dans
00:02:22 le monde dans le monde agricole, entrepreneurial, politique, des nouveaux récits qu'il faut que nous
00:02:28 racontions au service de la ruralité avec une image qui est souvent une image finalement assez
00:02:33 masculine des territoires ruraux. Mais j'aurais tendance à dire des territoires ruraux comme dans
00:02:38 bon nombre de nos territoires ou de sujets importants. Très souvent un prisme masculin.
00:02:43 Et bien voilà, avec INSITE on essaye aussi à notre échelle de faire changer les choses et
00:02:49 de regarder ces problématiques avec un autre angle et surtout affirmer et défendre cette égalité,
00:02:59 cette transversalité dont nous avons tellement besoin dans notre société. Voilà, sans autre
00:03:05 forme de procès entre guillemets, je passe la parole Marie-Elie pour démarrer l'animation
00:03:10 de ce 29e café de campagne. Merci Thibault, bonjour à toutes et à tous et merci de nous
00:03:18 avoir rejoint nombreuses au regard du pourcentage que Thibault vient d'annoncer pour ce café de
00:03:26 campagne sur la thématique "Femmes en ruralité". Donc pour les intervenantes, j'imagine que vous
00:03:32 avez déjà pris connaissance de qui était qui, mais je le rappelle quand même, on a Emmanuel
00:03:36 Khorati, fondatrice de l'association Back to Earth, Olivia Bertrand, fondatrice de l'AIME
00:03:41 Paysanne et qui est basée en Ariel, j'ai Sabine Delbosque-Nodant, elveuse bovin et élue MSA en
00:03:47 Aveyron. Peut-être avant de commencer, je trouvais que c'était important de faire une petite
00:03:52 parenthèse pour introduire le sujet et notamment poser des précautions de langage et de démarche.
00:03:59 Donc on n'a pas la prétention en une heure d'épuiser le sujet des femmes en ruralité et surtout on
00:04:05 voudrait se prémunir d'une essentialisation de genre. Donc vous allez voir des intervenantes
00:04:10 qui portent des casquettes qui sont multiples, ce sont des femmes, ce sont des habitants de
00:04:14 territoires ruraux, ce sont aussi des agricultrices, des élus local, des entrepreneuses, des maires
00:04:19 ou encore des dirigeantes. Donc voilà, c'est important d'avoir ces différents éléments en
00:04:24 tête. Donc on ne va pas chercher à dresser un portrait qui soit exhaustif de la moitié de la
00:04:28 population qui vit en ruralité, donc les femmes, mais plutôt à identifier à travers des témoignages
00:04:33 croisés de nos intervenantes les obstacles auxquels elles peuvent être confrontées,
00:04:37 les initiatives qu'elles font émerger et/ou encore comment elles participent à construire des nouveaux
00:04:42 récits pour les campagnes. Donc Emmanuel, on va commencer avec toi pour ouvrir ces échanges et
00:04:47 dresser un premier état des lieux sur le sujet, sur lequel tu as quand même travaillé pendant une
00:04:53 grosse année. Donc tu viens de clôturer les rencontres nationales du retour à la terre et
00:04:58 de l'avenir des territoires, qui allait pour thématique le féminin. Est-ce que tu peux nous
00:05:03 présenter Back to Earth et comment expliquer que vous soyez venu à identifier cette question des
00:05:09 femmes comme focale de la deuxième édition des rencontres ? Bonjour à toutes et à tous,
00:05:15 merci de m'accueillir. Alors oui, je sors tout juste de nos rencontres nationales,
00:05:20 qui étaient un très très beau moment. On a eu la chance pour le coup d'avoir un public assez
00:05:24 mixte, donc c'était une grande satisfaction. Très rapidement, qu'est-ce que c'est que Back to Earth ?
00:05:29 C'est une association qui a quatre ans maintenant, qui a pour objectif de promouvoir le retour à la
00:05:34 terre, un retour à la terre au sens large, c'est-à-dire qu'il y a évidemment des enjeux
00:05:37 agricoles dans un contexte de renouvellement des générations qui est quand même à risque,
00:05:44 d'évolution de pratiques agricoles. Nous, on promeut une nouvelle place des agricultures et
00:05:49 des paysans en France, je pense que l'actualité nous donne assez raison sur le fait que c'est un
00:05:54 enjeu. Il y a un deuxième sujet qui est en prise directe avec la ruralité, qui est le retour à la
00:06:00 terre au sens rééquilibrage des territoires entre des métropoles trop denses et des territoires
00:06:05 moins denses que sont les petites moyennes villes et territoires ruraux. Donc nous, vraiment,
00:06:10 on promeut le fait que les gens s'installent en ruralité, y entreprennent, y vivent,
00:06:14 s'y installent aussi en agriculture. Et puis donc un troisième sujet qui est le retour à la terre
00:06:19 au sens transition écologique. Pour nous, c'est absolument fondamental qu'il y ait une reconnection
00:06:25 au vivant qui s'opère à l'échelle des individus et des organisations. Sur ce vaste thème, on fait
00:06:31 deux choses. On promeut des initiatives qui sont extrêmement nombreuses, portées par des
00:06:37 agriculteurs, des entrepreneurs, des chercheurs, des chercheuses, des associations, qui contribuent
00:06:41 à ce retour à la terre au sens large. On a un observatoire qui nous permet de travailler sur
00:06:45 ces sujets et j'y reviendrai. On a travaillé pendant un an sur cette question du féminin,
00:06:49 justement. Et puis donc, on a vocation à rassembler autour de ces sujets de retour à la
00:06:55 terre des parties prenantes extrêmement diverses, puisque les enjeux sont complexes et donc
00:06:59 nécessitent d'être aussi bien adressés par le monde agricole, les élus, les chercheurs, le monde
00:07:04 de l'enseignement, les porteurs de projets, les financeurs et le monde agricole dans sa
00:07:10 grande diversité. Voilà pour qui on est. Et effectivement, c'est la première année qu'on
00:07:15 a une focale thématique, parce que les enjeux sont extrêmement vastes. Et en fait, c'est parti
00:07:21 d'un constat hyper pragmatique qui était que dans tout ce qu'on pouvait lancer comme sujet au sein
00:07:27 de Back to Earth, que ce soit nos vidéos, nos clubs de porteurs de projets, nos parrainages
00:07:33 entre ruraux et urbains, et puis nos diverses interventions, en fait, on s'est rendu compte
00:07:42 qu'il y avait une grande majorité de femmes. Et donc, ça nous a amené à nous questionner sur
00:07:46 finalement leurs contributions au renouvellement des générations et des pratiques agricoles.
00:07:51 Est-ce qu'il y avait peut-être un retour à la terre au féminin ? Quel rôle pouvaient jouer les
00:07:58 femmes dans l'installation de familles à la campagne ? Comment est-ce qu'elles entreprenaient
00:08:02 dedans et pour les territoires ruraux ? En fait, c'est vraiment venu de notre observation. Et puis,
00:08:07 du coup, on a décidé de traiter cette thématique pendant un an, au travers à la fois d'une enquête
00:08:12 et puis de l'organisation de ces rencontres qui ont eu lieu il y a deux jours maintenant. Et on
00:08:18 a exploré effectivement aussi bien des thématiques agricoles, transition, entrepreneuriales, pour
00:08:23 essayer de faire, de comprendre de façon un petit peu plus fine cette question des femmes dans le
00:08:28 retour à la terre. Et donc, j'abonde dans ton sens, Marélie, d'essayer de ne pas faire de choses
00:08:34 binaires, essentialistes, d'essayer de comprendre un petit peu plus finement le pourquoi, le comment,
00:08:39 les freins et les opportunités, surtout. Du coup, justement, c'est quoi les constats que
00:08:44 vous avez pu établir sur cette notion de contribution des femmes dans les territoires
00:08:48 et à l'agriculture ? Oui. Alors, en fait, on s'est rendu compte qu'il y avait vraiment aujourd'hui…
00:08:56 Alors, si je prends le champ agricole et puis j'élargirais juste après, parce qu'on a fait un
00:09:00 travail particulier sur l'agriculture, mais ce n'est pas notre seul focal, on s'est rendu compte
00:09:05 qu'en fait, les femmes contribuaient vraiment aujourd'hui au renouvellement des générations
00:09:09 et des pratiques agricoles. Elles s'installent plus tardivement, il y a une féminisation du métier,
00:09:14 même si elle n'est pas suffisante aujourd'hui, puisqu'on a que 26% de chefs d'exploitation qui
00:09:18 sont des femmes, que 10% en revanche dans la gouvernance, alors qu'elles sont 50% quand même
00:09:23 sur les bancs de l'école. Donc, il y a un petit sujet de mixité, de perte en ligne. On y reviendra
00:09:29 après sur les freins et qu'est-ce qu'on peut faire pour les débloquer. Et quand on regarde,
00:09:33 en fait, la contribution des femmes au renouvellement des pratiques agricoles,
00:09:38 comme elles arrivent en fait plus tardivement à l'agriculture que les hommes, et souvent pour
00:09:44 celles qui ne sont pas issues du monde agricole après des premiers parcours dans le monde tertiaire,
00:09:49 et ça va être le cas aussi pour les femmes qui sont issues du monde agricole mais qui ne s'installent
00:09:54 pas tout de suite en reprise, elles apportent de nouvelles compétences et de nouvelles façons de
00:09:59 conduire la désexploitation. Il y a de la vente directe, il y a beaucoup d'ouverture à l'extérieur
00:10:03 de la ferme, ça c'est hyper important et en plus très bénéfique dans un contexte où l'agriculture
00:10:08 a besoin de se relier à la société. Une contribution vraiment très claire et nette,
00:10:13 on y reviendra sur le sujet des transitions, qu'elles soient sociales ou environnementales,
00:10:20 et puis j'irais une approche du métier qui va peut-être être un petit peu moins sacerdotale,
00:10:26 puisque comme elles vont du coup peut-être avoir des contraintes au départ d'ergonomie,
00:10:32 elles vont contourner ces contraintes en adaptant le métier, avoir aussi une focale qui va être un
00:10:40 petit peu plus sur les équilibres de vie. Et donc il y a de nouvelles approches du côté en tout cas
00:10:45 de l'agriculture où vraiment dans la féminisation du métier, il y a aussi de nouvelles pratiques
00:10:51 qui s'installent. Et si on élargit après aux entrepreneuses et puis plus largement aux femmes
00:10:58 qui arrivent en réalité, puisque nous notre prisme c'est les néos du côté de Back to Earth,
00:11:05 donc ce n'est pas celles qui sont déjà sur place, donc les néos rurales, néos paysannes,
00:11:10 néos agricultrices, on se rend compte que finalement du côté des entrepreneurs en tout
00:11:15 cas, on est moins dans des projets du type "start-up nation" que dans de l'entreprenariat
00:11:22 on va dire du quotidien, où finalement beaucoup de femmes entreprennent pour pouvoir vivre là
00:11:27 où elles sont et contribuent à des problématiques très pragmatiques en réponse aux enjeux des
00:11:32 territoires. Il y a un vrai ancrage territoriel pour rebondir sur cette notion des territoires
00:11:37 avec des femmes qui sont très en prise avec leur environnement. Et puis sur le volet agricole
00:11:42 aussi, c'est la même chose, vraiment une connexion au territoire qui est très forte,
00:11:48 qui est manifeste. Dernier point que je mettrai en exergue pour aussi mettre, non pas un portrait
00:11:56 robot, mais en tout cas tisser des points communs dans ce qu'on a pu identifier dans les parcours.
00:12:00 Il y a beaucoup d'engagement qui peut prendre diverses formes dans ces parcours féminins et
00:12:07 surtout beaucoup d'entraide. Parce que, et ça s'explique, il y a des difficultés, donc forcément
00:12:12 il y a de l'entraide et donc on voit, et on en parlera dans les pistes pour accompagner tout ça,
00:12:17 une contribution forte des femmes au collectif. C'est autant de constats que Olivia et Sabine
00:12:27 pourront illustrer ensuite avec leur parcours respectif. Tu as mentionné tout à l'heure la
00:12:32 question des transitions, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur la contribution des femmes
00:12:36 aux transitions en cours et à mener ? Oui, déjà sur la question des transitions, on pourrait avoir
00:12:43 une intuition qui serait de dire "les femmes sont plus connectées au vivant parce qu'elles portent
00:12:49 la vie, etc." Il y a sans doute un petit peu de ça, mais pour dépasser assez vite ce constat,
00:12:56 essentialiste, là on avait du coup le témoignage dans nos rencontres d'une anthropologue qui
00:13:02 s'appelle Karine Pionetti, qui est vraiment spécialiste des questions du genre et qui a
00:13:06 particulièrement travaillé la question de l'agroécologie et à une échelle internationale,
00:13:09 c'est ça qui est intéressant. Ce qui explique que les femmes contribuent aux transitions,
00:13:14 c'est surtout qu'elles sont les premières victimes des changements climatiques, des crises aussi
00:13:22 sociales qu'on peut traverser, et donc du coup il y a une prise en main de ces questions des
00:13:27 transitions qui se fait pour cette première explication. Et la deuxième chose, c'est que
00:13:36 comme elles ont été plutôt consignées pour certaines en marge du modèle dominant, qui était
00:13:43 plutôt masculin dans la performance, si on trace à très gros traits, en tout cas dans le monde
00:13:47 agricole, la façon dont se sont développées les pratiques lors des dernières décennies,
00:13:53 elles ont pu en marge de ce modèle dominant expérimenter avec une forme de liberté d'autres
00:14:05 pratiques plus en lien avec le vivant. Et donc on constate en tout cas que déjà dans l'agriculture,
00:14:11 nous sur les 120 agricultrices en cours d'installation qui ont répondu à notre
00:14:16 questionnaire, 98% sont dans des pratiques agroécologiques, donc ça c'est quand même
00:14:22 notable. Elles ne sont pas toutes en certification bio, et puis on voit bien que le bio a des coûts,
00:14:27 et puis l'actualité montre que c'est problématique ces questions de certification, mais en tout cas
00:14:32 elles sont toutes inscrites dans des pratiques agroécologiques. Beaucoup de projets entrepreneuriaux
00:14:37 sont connectés à la question du sens, c'est-à-dire que de toute façon le retour à la terre avec un
00:14:42 mouvement vers la ruralité s'accompagne très souvent de transition professionnelle, qui
00:14:50 s'inscrivent en général dans un changement de cap où on a envie de donner plus de sens à sa vie,
00:14:56 et donc ça rejoint la question des transitions qui peuvent être des transitions sociales. Je
00:15:00 terminerai sur le volet social et puis démocratique, puisqu'on avait la chance d'avoir Fanny Lacroix,
00:15:05 qui est vice-présidente de l'association des maires locaux de France, et qui est en charge de ces
00:15:11 questions de transition, pour dire que dans ces parcours de femmes qui s'installent dans la
00:15:20 ruralité, il y a un souhait de se connecter avec les réseaux locaux, avec la vie démocratique
00:15:25 locale, et donc un souhait de s'investir dans des projets collectifs qui peuvent prendre
00:15:32 différentes formes, ça peut être de l'engagement citoyen, ça peut être dans des associations,
00:15:37 et puis comme je l'évoquais, très vite des connexions sociales qui se font pour des raisons
00:15:46 d'entraide, en fait, elles rentrent très vite dans des collectifs pour pouvoir sortir de leur
00:15:52 isolement, en fait, et s'entraider. Et sur le volet social, je rajouterai effectivement que,
00:16:00 en tout cas, si on prend plus spécifiquement le volet de l'agriculture, il y a une relation
00:16:09 particulière au care, voilà, aux soins, qui est apportée tant vis-à-vis des animaux quand on est
00:16:16 dans l'élevage que vis-à-vis des équipes, et donc la notion de qualité de vie au travail est assez
00:16:23 vite apportée par la question des femmes, ça s'explique de façon très simple, on en discutait
00:16:30 hier lors d'une émission radio avec Anne Dumon et les quatre Vox Déméter, des hommes qui portent
00:16:36 des sacs de 50 kg, les femmes ne sont pas en capacité de porter des sacs de 50 kg, donc elles
00:16:42 vont avoir une réflexion hyper pratique, qui va être de se dire "je ne vais pas me casser le dos,
00:16:45 donc on va passer à des sacs à 25 kg", et bien tout ça, ça va bénéficier à tout le monde,
00:16:50 en fait, c'est-à-dire que les hommes derrière vont être très contents de pouvoir porter des
00:16:55 sacs de 25 kg plutôt que 50 alors qu'ils ne s'étaient jamais posé la question, parce qu'ils
00:16:59 avaient une approche qui était d'emblée dans la force, et donc cet apport des femmes va aussi
00:17:04 passer par cette approche hyper pragmatique, et de se dire "moi je n'ai pas forcément cette
00:17:11 capacité physique, donc qu'est-ce que je vais faire pour que le travail, je puisse quand même
00:17:15 le faire, tout en étant dans des approches de pénibilité qui sont plus prises en compte",
00:17:23 et ça se retrouve aussi sur la notion d'équilibre de vie et de prise en compte des équilibres de
00:17:28 vie qui sont des éléments majeurs quand on entreprend, entreprendre ça bouffe du temps
00:17:33 perso, et entreprendre en agriculture ça bouffe aussi beaucoup de temps perso, et il y a une prise
00:17:39 en compte des équilibres de vie notamment familiaux qui est plus importante du côté des femmes.
00:17:45 Voilà donc pour les transitions au sens large. Merci beaucoup, alors je vois le temps qui file,
00:17:52 mais quand même je pense que ce serait intéressant parce que vous avez travaillé aussi sur des
00:17:55 mesures et des propositions de mesures pour accompagner les femmes au regard des différents
00:18:00 éléments que tu as amenés, est-ce que tu peux nous en détailler quelques-unes ?
00:18:03 Oui, quelques-unes très rapidement, elles sont de divers ordres, il y a des mesures qui peuvent
00:18:09 être de l'ordre de l'empowerment des femmes et de leur montrer que c'est possible en fait,
00:18:13 parce qu'il y a un manque de confiance chez les femmes, on l'a constaté avant hier lors de nos
00:18:20 rencontres des femmes qui ont des parcours incroyables mais qui manquent de confiance
00:18:24 et de personnel, donc tout ce qui peut être de l'ordre de l'accompagnement des femmes pour
00:18:27 leur donner confiance, les accompagner à se poser la question, il y avait une femme qui
00:18:33 résumait bien cette formule en disant "les hommes se posent la question de pourquoi pas moi,
00:18:44 et les femmes pourquoi moi", alors je résume ça très très mal, mais en tout cas il y a une
00:18:50 légitimité du côté des femmes qu'il faut accompagner, il y a des stéréotypes à combattre
00:18:56 du côté des financeurs, puisqu'il y a une discrimination et donc il y a vraiment une
00:19:00 éducation à faire auprès des financeurs sur le fait qu'une femme peut entreprendre seule,
00:19:04 notamment en agriculture, elle n'a pas besoin d'avoir un associé pour que ces modèles fonctionnent,
00:19:09 donc il y a l'accompagnement à la lutte contre les stéréotypes qui est très importante,
00:19:12 un travail à faire évidemment dès le plus jeune âge dans les collèges pour montrer que certains
00:19:18 métiers qui sont peu associés aux féminins sont en fait potentiellement compatibles avec
00:19:26 la féminité, et ça je pense que c'est le travail principal à faire, le fait de faire héberger des
00:19:35 rôles modèles, de donner la parole aux femmes pour donner envie aussi à des femmes d'aller sur
00:19:41 ces sujets-là, puis après il y a évidemment beaucoup beaucoup de sujets liés à l'accompagnement
00:19:46 de la maternité, le remplacement etc, comme ça ça concerne plus le monde agricole, on a identifié
00:19:52 plus d'une trentaine de mesures, je ne vais pas toutes les détailler, mais en tout cas voilà il
00:19:56 y a plein plein de choses à faire, et je terminerai par le fait de les relier en fait, pour pouvoir
00:20:01 faire en sorte qu'elles s'entraident et qu'elles puissent discuter des problématiques qui leur
00:20:06 sont spécifiques dans des cadres qui sont des cadres de confiance en fait, où elles peuvent
00:20:11 s'exprimer sur la réalité de ce qu'elles traversent. Voilà. Merci beaucoup Emmanuelle, c'était
00:20:17 passionnant, puis ça permet vraiment de dresser un état des lieux et un panorama de la question,
00:20:21 je vois qu'en dans le chat il y a des gens qui demandent pour avoir accès aux résultats de
00:20:25 l'étude, donc peut-être que tu pourras les partager, ou sinon dans le mail avec le replay
00:20:30 je pourrais envoyer, et Sadline reviendra peut-être plus longuement sur la question de la maternité,
00:20:34 notamment sur comment favoriser via la MSA l'accès à un congé maternité, etc. Du coup Sabine,
00:20:43 Emmanuelle va rappeler, donc toi tu interviens aussi dans un contexte qui est particulier,
00:20:47 puisque tu es éleveuse et donc agricultrice, et dans un contexte qui est celui de la crise
00:20:51 agricole qui fait la lune de l'actualité depuis quelques semaines, et juste avant le salon de
00:20:56 l'agriculture où tu vas également intervenir pour représenter la MSA. C'est marrant parce que tout
00:21:01 à l'heure Emmanuelle parlait d'une question de confiance, et quand on a préparé le café de
00:21:05 campagne la dernière fois, tu avais commencé avec beaucoup d'humilité en me disant que tu n'avais
00:21:10 pas fait grand-chose d'extraordinaire, et en fait au fur et à mesure de la préparation, je pense
00:21:14 que c'est tout le contraire qui s'est dessiné, et voilà, donc j'aimerais si tu veux bien revenir
00:21:19 sur, te présenter, et puis nous présenter ton parcours de vie qui, en tout cas à mes yeux,
00:21:26 a plein de choses d'extraordinaire. Donc bonjour à toutes et à tous, donc merci de m'avoir invitée,
00:21:32 et c'est vrai que mon témoignage va être un exemple de ce que vient de nous faire part
00:21:37 Emmanuelle. Donc j'ai 46 ans, je suis mariée, je suis la maman de cinq enfants, qu'ils soient âgés
00:21:46 de 17 ans et demi, 15 ans, 10 ans, et les deux dernières jumelles qui ont 8 ans. Je suis
00:21:53 agricultrice et leveuse en Gaec, donc c'est en société avec mon époux. Donc j'habite une petite
00:22:01 commune de 300 habitants dans le nord de l'Aveyron. Donc notre exploitation en fait est une exploitation
00:22:07 en agriculture très très raisonnée. Nous avons un troupeau de 75 vaches de race limousine, donc
00:22:15 vaches à viande, sur 110 hectares. Donc une agriculture dans un territoire quand même qui
00:22:21 est relativement difficile. Donc je n'ai jamais voulu reprendre l'exploitation parce qu'en fait,
00:22:28 donc j'avais vu mes parents quand même galériers, et ensuite mon papa est décédé dans un accident
00:22:35 de tracteur quand j'avais 13 ans. Donc voilà, j'avais fait le choix d'avoir un cursus et un
00:22:40 parcours universitaire, donc à Toulouse en sciences sociales, sciences éco et statistiques. En fait,
00:22:47 je voulais travailler à l'INSEE et donc quand j'ai eu ma maîtrise, donc c'était un bac +4,
00:22:53 j'ai décidé de revenir donc en Aveyron pour garder avant tout le patrimoine, le patrimoine
00:22:59 familial. Donc j'ai décidé de m'installer en reprenant, enfin en repassant un nouveau diplôme
00:23:08 qui était un BTS agricole pour prétendre justement aux aides à l'installation. Donc
00:23:15 l'exploitation, voilà, il y avait une trente vaches sur 50 hectares et ma maman l'avait gardée
00:23:25 toute seule pendant dix ans, mais dans des conditions de travail très très difficiles.
00:23:28 Donc je me suis installée et juste pour la petite histoire, quand j'ai commencé mon BTS,
00:23:34 donc c'était en formation adulte, le directeur du centre de formation adulte m'a tout de suite
00:23:40 proposé d'intervenir en tant que formatrice à la fin de mon BTS, donc je suis restée formatrice
00:23:45 pendant une dizaine d'années. Alors je suis un petit peu engagée, donc je suis concierge
00:23:53 municipale, donc c'est mon deuxième mandat sur la commune. Donc je n'y consacre pas le temps que
00:24:00 j'y devrais parce que vous verrez mon engagement à la MSA me prend quand même trois jours par
00:24:04 semaine au minimum et j'ai l'exploitation. Je m'occupe essentiellement de la rédaction d'un
00:24:10 bulletin municipal et je participe quand même à tous les conseils, toutes les réunions de travail.
00:24:16 Et je suis engagée en tant que déléguée et administratrice à la MSA et par loisir,
00:24:23 parce que c'est du loisir, je suis engagée à l'association des parents d'élèves de la
00:24:29 petite école. Donc nous avons 300 habitants, une école en classe unique d'une vingtaine d'enfants,
00:24:35 donc moi j'en ai déjà trois qui sont scolarisés sur place. Et donc voilà,
00:24:39 nous organisons des petites manifestations dont le bénéfice sert à financer des voyages scolaires,
00:24:46 à payer du transport par exemple pour aller à la piscine puisque nous il faut quand même,
00:24:52 la piscine la plus proche c'est 15 km, voilà des petites choses comme ça.
00:24:57 Tu mets en avant du coup une diversité d'engagement qui est assez impressionnante
00:25:04 du politique en passant par le mutualiste, je sais pas peut-être que tu pourrais décrire
00:25:09 un peu ce que c'est que la MSA pour les auditeurs. Et du coup ce qui serait intéressant aussi,
00:25:15 ce serait de savoir qu'est-ce qui te motive, qu'est-ce qui t'a poussé à t'engager et
00:25:21 puis peut-être ce qui te décourage parfois aussi. Alors juste peut-être pour revenir sur mon mandat,
00:25:28 la MSA, donc rappelez rapidement, la MSA c'est le régime de protection agricole des ressortissants
00:25:35 agricoles, donc service public, c'est-à-dire que nous prélevons les cotisations qu'elles soient
00:25:42 patronales, salariales ou personnelles et nous versons toutes les prestations en guichet unique,
00:25:46 donc famille, santé, retraite. Parallèlement à ça, nous avons un service d'action sanitaire et
00:25:53 sociale qui permet d'accompagner individuellement les ressortissants, donc ce sont des ressortissants
00:25:59 qui sont agriculteurs mais qui sont aussi salariés d'entreprises agricoles ou d'organismes
00:26:03 professionnels agricoles. Et nous avons aussi un grand service de santé, sécurité au travail avec
00:26:09 un grand service de prévention des risques professionnels. Donc le rôle de délégué,
00:26:14 en fait quand je me suis engagée en 2005, je me suis posé la question que fait un délégué
00:26:19 cantonal ou local ? Donc en fait il a deux missions, il est le lien entre les adhérents qui l'ont
00:26:25 élu parce que nous sommes en régime démocratique, c'est-à-dire que tous les cinq ans nous avons
00:26:29 des élections. Le délégué a aussi un rôle de veille et de sentinelle, c'est-à-dire qu'il va
00:26:37 accompagner les adhérents qui ont des problèmes administratifs de gestion de dossiers de prestations
00:26:46 familiales mais également aussi accompagner les adhérents qui ont des problèmes de mal-être.
00:26:50 Et ensuite notre deuxième mission c'est d'animer un peu des territoires ruraux puisque les
00:26:56 agriculteurs vivent souvent dans les territoires ruraux. Alors je vais vous donner un exemple,
00:27:01 par exemple nous avons organisé une conférence en lien avec des missions de la MSR, prévention
00:27:06 santé sur la maladie de Lyme. Nous avons été interrogés donc les délégués de notre territoire,
00:27:13 ça fait à peu près un an, parce qu'en fait il y avait eu un constat sur un territoire du nord
00:27:19 de l'Aveyron, c'était les médecins généralistes qui avaient fait un constat, comme quoi il y avait
00:27:24 beaucoup d'accidents de travail sur la zone. Alors accident de travail c'est aussi des suicides et
00:27:29 du burn-out ou de l'épuisement professionnel et donc ils s'étaient rapprochés de la CPTS,
00:27:34 Communauté Professionnelle des Territoires de Santé, pour faire part de leur constat. Et donc
00:27:41 une des idées ça a été de faire une sorte de spectacle autour de cette problématique d'accident
00:27:48 de travail et donc les délégués ont été interrogés justement sur leur parcours de vie,
00:27:54 pour faire part justement de leur expérience. Donc voilà c'est le rôle d'un délégué.
00:28:01 Donc maintenant je suis rentrée au conseil d'administration de la MSR en 2010, de la KSM,
00:28:09 il dit Pyrénées Nord, quatre départements, et en 2020 en fait j'ai été élue en tant qu'administratrice
00:28:15 au conseil d'administration centrale. Alors moi j'ai jamais choisi de m'engager parce que mes
00:28:20 parents déjà n'étaient pas du tout engagés, mais c'est vrai qu'en 2005, donc ça faisait deux ans
00:28:24 que j'étais installée, on me l'a proposé, mais bien évidemment j'ai accepté parce que c'était
00:28:29 avant tout pour mon équilibre personnel. La profession d'agriculteur ou d'agricultrice
00:28:34 quand même, éleveur, voilà on a quand même beaucoup d'astreinte quand on a un troupeau,
00:28:40 24/24, 7 jours sur 7 et 365 sur 365 si on ne prend pas de congés. Et c'est vrai qu'on peut vite être
00:28:48 enfermée par le travail, isolée, et moi c'est vrai que voilà je venais quand même d'une ville très
00:28:55 étudiante, donc voilà moi je ne me voyais pas vivre comme ça. Donc le premier engagement,
00:29:02 ma première cause c'était ça. Après le deuxième c'est que moi j'ai une devise,
00:29:08 alors il y a un proverbe africain qui dit "seul on va plus vite, ensemble on va plus loin". Je
00:29:14 crois à la force du collectif, surtout et plus particulièrement dans une société qui
00:29:20 s'individualise énormément. La troisième chose c'est que le mandat de la MSA est quand même un
00:29:26 mandat particulier parce que nous avons affaire à des personnes. Donc ce n'est pas un mandat quand
00:29:36 on est agricole dans une COP ou un mandat à la chambre d'agriculture où on est sur quelque chose
00:29:39 d'économique ou de technique, on est vraiment sur du social. Je pense que j'ai quand même cette
00:29:46 fibre sociale et voilà j'aime les gens donc voilà c'était aussi le pourquoi de mon engagement. Et
00:29:54 puis le dernier qui est quand même un des plus importants c'est que je suis vraiment attachée à
00:29:58 notre territoire, là où j'habite. Je sais que voilà, attachée à ces valeurs, des valeurs paysannes,
00:30:05 des valeurs rurales et même si je m'aperçois que c'est compliqué de les faire exister,
00:30:12 de les faire émerger, je souhaitais aussi amener ma pierre à l'édifice pour que justement ces
00:30:19 territoires ruraux soient visibles et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai aussi accepté de
00:30:25 m'engager au niveau national. Je précise qu'Emmanuel et Sabine ne se sont jamais rencontrés
00:30:30 et que donc ça montre aussi à quel point on est sur une illustration concrète d'une situation plus
00:30:37 large. Et peut-être du coup tu nous as précisé les raisons de ton engagement, peut-être qu'il y en a
00:30:43 d'autres, j'espère que je ne t'ai pas coupé. Non mais par contre ce qui est parfois compliqué,
00:30:47 c'est qu'on a quand même des fois l'impression que les choses n'avancent pas aussi vite qu'on
00:30:55 le voudrait, qu'on a aussi en tant qu'institution MSA des contraintes budgétaires qui nous font
00:31:00 prendre des décisions qui forcément ne correspondent pas peut-être un peu moins à des valeurs que l'on
00:31:08 porte. Les valeurs de la MSA c'est la solidarité, c'est le mutualisme, la proximité et puis parfois
00:31:16 c'est quand même compliqué l'équilibre vie perso, vie familiale, vie professionnelle et
00:31:22 engagement et parfois un peu fragile. Je me suis présentée tout à l'heure en disant que j'étais
00:31:27 mariée et que j'avais cinq enfants, ma priorité reste quand même mes cinq enfants. Mais on sent
00:31:35 quand même, je suis particulièrement occupée et on sent parfois que ça peut être fragile. Un
00:31:42 engagement national ce sont des déplacements, pratiquement une fois tous les quinze jours à
00:31:47 600 km de chez moi. Je sais que derrière moi je laisse l'exploitation mais je laisse aussi
00:31:52 ma famille et mes enfants. Merci pour tous ces éléments et ce témoignage. Si on revient à la
00:32:00 question de ton statut d'agricultrice au-delà de tes engagements, c'est quoi les freins et les
00:32:07 opportunités que tu identifies pour les agricultrices ? Une des périodes les plus
00:32:16 compliquées en tant qu'agricultrice ça a été la période de maternité, puisque j'ai eu quand même
00:32:22 quatre grossesses. En élevage on a quand même un métier physique, on a quand même un métier
00:32:26 risqué, donc c'est quand même une période compliquée. Alors on a un dispositif d'accompagnement
00:32:35 qui est le congé parental et une allocation de remplacement. Mais par contre, comme dans
00:32:44 toutes les professions, on a des problèmes de main d'œuvre. Et pour trouver un remplaçant
00:32:49 polyvalent, ça a été compliqué et c'est toujours compliqué. Donc ça c'est un des freins. Tout ce
00:32:59 côté autour de la maternité, il y a bien évidemment, Emmanuel l'a dit, on est quand même sur des
00:33:07 métiers pénibles avec du matériel qui n'est pas forcément adapté. Je vais vous donner un exemple
00:33:15 que j'aime bien citer. Quand on a un gros tracteur et derrière on a un gros matériel, il faut qu'on
00:33:21 attelle une cardan, c'est une cardan de transmission entre le matériel et le tracteur. Parfois la
00:33:32 cardan pèse 40 kilos. Donc voilà, c'est quand même un frein. Et après, en tant que femme engagée,
00:33:42 ce que j'ai pu remarquer, et je le remarque encore, c'est qu'on est peu nombreuses à être engagées
00:33:49 dans les conseils d'administration des COP, des OPA. J'ai deux exemples. Il existe au niveau
00:33:56 national ce qu'on appelle le CAF, c'est le Conseil de l'agriculture française. Et il y a également
00:34:02 un CAF départemental. Depuis 2015 que je suis présidente pour l'AMSA de mon département. Le
00:34:09 CAF, c'est une rencontre trimestrielle entre les présidents et les directeurs de ces OPA.
00:34:18 J'ai été, je suis la seule femme. Alors ça va changer puisqu'il va y avoir une future présidente
00:34:24 d'un syndicat majoritaire en Aveyron, donc on va être deux, mais voilà, ça c'est un fait.
00:34:30 Et le deuxième exemple qui est très récent, c'est que la semaine dernière j'ai assisté à
00:34:35 l'Assemblée générale des jeunes agriculteurs en Aveyron. Il y a quand même 10 000 exporters en
00:34:40 Aveyron. Donc un nouveau conseil d'administration a été élu, une vingtaine, trois femmes. Donc
00:34:47 voilà, trois femmes parmi le conseil. Alors les raisons, je ne sais pas, ça a été dit. Alors je
00:34:55 pense que les femmes n'osent pas forcément s'engager parfois. Elles ne se sentent pas légitimes alors
00:35:03 qu'on pourrait leur donner la place. Par exemple, dans certains conseils d'administration dans les
00:35:08 chambres d'agriculture, il y a la parité. Et quand les responsables font des listes, ils ont du mal
00:35:13 à trouver des femmes. Mais parfois encore, on sent que la place, il faut la faire, qu'on ne la laisse
00:35:18 pas forcément. Merci beaucoup. Alors il est déjà 13h19, ça va vite parce que vous êtes toutes
00:35:26 passionnantes. Le plus rapidement possible, parce qu'on pourra peut-être revenir après dans les
00:35:32 questions, pour l'AMSA, justement, en quoi la place des femmes est centrale et peut-être les
00:35:38 propositions clés, là aussi comme Emmanuel, que vous portez sur le sujet ? Donc voilà, ça a été
00:35:44 dit. 26% de chefs qui sont des femmes, un agriculteur avec des conjoints collaborateurs
00:35:50 qui est une agricultrice. Donc c'est vrai qu'en 2024, en fait, l'AMSA a voulu rendre visible
00:35:56 justement ces femmes du monde agricole pour que leur travail et la place qu'elles occupent dans
00:36:02 un métier soient connues et reconnues. Alors trois actions ont été mises en place. La première,
00:36:07 ça a été une étude réalisée à ce début d'année auprès de 1 000 femmes qui permet de dresser un
00:36:14 panorama du quotidien de ces femmes actives du monde agricole, donc salariées et non salariées,
00:36:19 qui sont-elles, leur parcours, leur motivation, leurs difficultés. La deuxième action, en fait,
00:36:26 c'est qu'il y a eu un partenariat tout récent entre la caisse centrale de l'AMSA et le réalisateur
00:36:31 Édouard Bergeon qui vient de réaliser un documentaire "Les femmes de la terre" qui va être
00:36:36 diffusé mardi prochain sur France 2 et qui met en lumière les femmes, les pionnières, les
00:36:42 combattantes. Et plus particulièrement, il est allé interroger Jeannette Gros, qui est une ancienne
00:36:49 présidente de la caisse centrale et qui a été une figure emblématique de la lutte pour les droits
00:36:53 des femmes. Et la troisième action, c'est que nous sommes en train de réfléchir sur un livre blanc
00:36:59 qui va porter des propositions auprès des pouvoirs publics, pour l'attractivité, pour le statut.
00:37:06 Alors, rapidement, il y a une première...
00:37:09 Sabine, je vois l'heure qui tourne vraiment, il y a encore Olivia qui doit intervenir,
00:37:13 qu'on puisse recueillir des questions. Donc, peut-être que ça fera l'objet d'une question
00:37:18 pour rentrer dans le détail du livre blanc et puis sinon on pourra le transmettre par mail
00:37:22 avec le replacement, si ça te va.
00:37:23 Ok, et je vous transmettrai aussi l'étude qui a été réalisée sur les femmes.
00:37:28 Génial, super, merci beaucoup. Olivia, est-ce que tu peux te présenter ton parcours et puis
00:37:37 le projet de l'Aine Paysanne, s'il te plaît ?
00:37:40 Oui, bien sûr. Déjà, bonjour à toutes et à tous aussi. Donc, moi je suis Olivia,
00:37:45 je suis la cofondatrice de l'Aine Paysanne. Donc, pour mon parcours, rapidement, je viens plutôt du
00:37:52 milieu de l'artisanat parce que je me suis formée au tissage artisanal. Donc, c'est un métier qui
00:37:56 est très manuel et ce qui m'a conduit à rencontrer la laine, ça a été vraiment cette démarche de
00:38:01 réappropriation de savoir-faire et cette arrivée en milieu rural parce que moi je suis plutôt
00:38:05 originaire de la ville. Donc, ça a été cette découverte d'un département ici en Ariège,
00:38:11 là dans les Pyrénées, un département très pastoral avec beaucoup de moutons,
00:38:16 beaucoup d'élevages jauvins et donc beaucoup de laines qui n'étaient pas valorisées. Donc,
00:38:22 ça a été cette possibilité de travailler avec une matière qui était produite là et dont on
00:38:27 pouvait vraiment maîtriser les différentes étapes de transformation et les savoir-faire
00:38:30 qui étaient associés. Donc, ça, c'était plutôt le côté artisanat et puis rencontre avec la matière.
00:38:37 Mais il y a eu beaucoup d'apprentissage vraiment sur le tas puisque c'est une filière qui n'est
00:38:41 pas très structurée. Ça a été beaucoup de rencontres et finalement tout un travail de réseau
00:38:47 et ça a été aussi, c'est passé par une expérience de contribution à un projet collectif autour de
00:38:55 la reprise de la filature de gnaux qui est une petite filature là dans la vallée de Vigues-de-Sau
00:38:59 à côté de Tarrasque-sur-Ariège. Donc, c'est vraiment dans la montagne et c'était un projet
00:39:04 qui s'était structuré en association pour sauver ce petit outil industriel qui permettait de
00:39:09 transformer les laines locales. Donc, ça m'a permis d'avoir un peu cette vignon déjà un petit peu
00:39:15 filière depuis discuter avec des éleveurs, des éleveuses jusqu'à connaître un peu les fonctionnements
00:39:22 des outils industriels pour la transformation de la matière. Donc, c'était vraiment ça qui
00:39:26 m'intéressait dans le tissage. C'était pas tant la technique en soi mais c'était vraiment de pouvoir
00:39:30 transformer une matière naturelle, vivante, etc. et qui poussait ici, qui était local. Et puis,
00:39:37 le projet Laine Paysanne s'est vraiment formalisé quand j'ai rencontré Paul qui est devenu mon
00:39:43 compagnon, qui lui est éleveur de moutons. Donc, il élève un trocot de brebis tarascones qui est
00:39:48 vraiment la brebis des Pyrénées centrales. Il est en agriculture biologique et en plein air intégrale
00:39:52 donc il a aussi toute une réflexion un peu agroécologique par rapport à son mode d'élevage
00:39:57 et puis aussi par rapport à la valorisation de ses produits puisque tout est en vente directe.
00:40:01 Et il était comme beaucoup d'éleveurs et d'éleveuses un peu désemparé pour valoriser sa laine puisque
00:40:07 80 à 90 % de la laine française sont exportées à l'autre bout du monde. Donc, la plupart du temps,
00:40:12 dans des pays où la main d'oeuvre coûte pas cher, donc principalement les pays asiatiques,
00:40:18 notamment la Chine. Donc, voilà, quand on s'est rencontré, on a eu envie de revaloriser cette
00:40:26 matière. Ça a été vraiment notre point de départ. Donc, on a créé Laine Paysanne. C'était un projet
00:40:31 très expérimental à la base. Ça l'est toujours d'ailleurs. Donc, on a monté une association en
00:40:36 2016 qui est devenue une société coopérative d'intérêts collectifs, donc une SIC en 2018.
00:40:41 Donc, c'est un statut qui relève de l'économie sociale et solidaire. Et voilà, très vite,
00:40:47 c'est devenu finalement une marque de mode éthique qui a vocation de reconnecter à la
00:40:53 fois l'humain et à la fois le textile à la nature et à ses rythmes, donc notamment au rythme de
00:41:00 l'agriculture à travers la laine des Pyrénées. Donc, ça, c'est vraiment notre vocation. Et dans
00:41:07 le concret, en fait, on se déplace pendant la tente. Donc, on travaille aujourd'hui avec 25
00:41:12 fermes partenaires et on va de ferme en ferme pendant la tente pour trier la laine à la main.
00:41:16 Donc, on sélectionne les plus belles fibres, toison par toison, donc pour cette histoire de qualité
00:41:21 et pour travailler avec les couleurs naturelles des moutons, on travaille sans ceinture et avec
00:41:26 un réseau de partenaires ensuite qui transforment soit à l'échelle artisanale, soit à l'échelle
00:41:30 industrielle. On crée des gammes de vêtements et d'accessoires, aussi des articles pour la maison
00:41:36 et on tisse des tapis avec des métiers à tisser, ce qu'on appelle à bras, donc du tissage artisanal
00:41:42 dans nos ateliers à nous. Voilà, donc le concept, c'est vraiment que pour chaque produit fini,
00:41:47 on a une traçabilité complète sur de quel troupeau vient la laine, ce qui nous permet à la fois de
00:41:51 parler des conditions d'élevage et de vrir en toute transparence. Donc aujourd'hui, on est une
00:41:57 équipe de neuf salariés, salariés EES puisqu'on est une bande de nanas, au bureau et sur toutes
00:42:04 les activités. Paul, lui, il garde vraiment son statut de paysan, il est passé journée avec les
00:42:08 moutons et on a aussi deux services civiques, donc on est une dizaine au quotidien et on travaille
00:42:12 donc avec 25 fermes à peu près, ce qui représente 12 tonnes de laine valorisées chaque année.
00:42:17 Super, merci. Est-ce que tu peux nous présenter un petit peu à quel besoin,
00:42:22 donc tu parlais de mode éthique tout à l'heure, de mode à rebrousse-poil, c'est comme c'est votre
00:42:26 slogan, à quoi ça répond comme besoin dans le contexte de l'industrie textile ?
00:42:31 En fait, on a fait un constat que beaucoup d'autres ont fait, qui est que dans nos habitudes
00:42:37 vestimentaires, on s'habille quand même la grande majorité du temps avec des vêtements
00:42:40 qui sont fabriqués en toute opacité à l'autre bout du monde, dans des conditions quand même
00:42:45 sociales et environnementales qui sont fort contestables, on sait que socialement, l'industrie
00:42:50 textile mondialisée repose sur l'esclavagisme et sur l'asservissement d'une bonne partie de la
00:42:56 planète, donc pour ne pas y citer, on a la Chine, le Bangladesh, voilà, et que c'est des conditions
00:43:01 sociales qui sont destructrices surtout pour les femmes, qui sont des populations particulièrement
00:43:07 vulnérables, et puis avec des dérives concernant les impacts de production environnementaux,
00:43:12 la surproduction, la pollution, etc. Donc c'est toujours cette ambivalence entre ce constat de
00:43:19 porter ces vêtements-là qui sont en plus des produits d'identité et des produits d'une
00:43:23 histoire accessible pour nous, et de voir toute cette matière qui est produite ici, qui pousse
00:43:30 là et qui est exportée. Donc l'idée c'est de pouvoir proposer une alternative, donc après on
00:43:36 est petits, donc l'idée c'est qu'il y ait aussi une multiplicité dans les initiatives un peu partout
00:43:41 sur le territoire pour que ça ait un impact et pour qu'à nous tous on construise des alternatives
00:43:45 qui soient viables, mais l'idée c'est vraiment de proposer une... contribuer aux alternatives
00:43:50 durables pour proposer de meilleures conditions de production des vêtements, et ça permet aussi
00:43:56 à ce besoin de rendre disponible une offre en vêtements et en textiles qui soit à très faible
00:44:04 impact en termes de production, qui soit bon pour la santé, parce que là il s'agit quand même la
00:44:10 laine d'une fibre qui est complètement écologique, qui a beaucoup de propriétés isolantes, etc.
00:44:16 et qui va apporter du confort aussi au quotidien et du bien-être dans la façon de se vêtir, et
00:44:20 puis aussi des vêtements qui racontent une histoire, donc qui retrouvent aussi une identité
00:44:24 dans la façon de se vêtir, qui donne du sens en fait, et puis qui propose, c'est pas juste des
00:44:28 vêtements, c'est aussi qu'est-ce que ça va proposer derrière comme modèle de société un petit peu,
00:44:32 et qu'est-ce que ça va porter comme valeur, voilà, avec cette transparence, cette traçabilité qui
00:44:38 permet de raconter tout ça. Donc ça c'est vraiment pour nous, c'est vraiment les fondements, et là
00:44:43 après ça fait le lien avec les sujets précédents autour de l'agriculture, c'est qu'on veut aussi
00:44:47 contribuer à porter la vision d'une agriculture paysanne, la laine est une voie de diversification
00:44:54 pour les fermes en élevage au vin, bien sûr, mais c'est aussi par rapport à cette industrie
00:45:00 textile très opaque et ce monde de la mode, de dire, bah en fait c'est réhumaniser finalement
00:45:06 les filières, de dire, bah derrière un vêtement il y a tout un tas de personnes qui vont contribuer
00:45:10 à sa fabrication, que ce soit le milieu industriel mais aussi le milieu agricole, parce que c'est
00:45:15 avant tout les paysans et les paysannes qui vont produire la matière, donc que leur travail là
00:45:19 dedans est important, que c'est important qu'ils soient représentés, parce qu'ils servent souvent
00:45:23 d'éléments de marketing pour faire de jolies images, parce qu'un trompeau c'est toujours très
00:45:27 photogénique, mais derrière comment est-ce qu'on représente leurs intérêts, comment est-ce qu'on
00:45:31 valorise mieux le prix d'achat de la matière aussi, et c'est de rappeler au grand public qu'un
00:45:36 vêtement en fibre naturelle il pousse avant tout dans les champs, donc ça contribue à cette
00:45:42 reconnexion de l'industrie textile avec l'agriculture en fait. Du coup on voit bien qu'il y a un double
00:45:50 niveau d'action à la fois commercial, celui de la marque, mais il y a aussi quelque chose de l'ordre
00:45:53 de l'intérêt général avec un projet territoire, et c'est justement comment tu te positionnes sur
00:46:00 cet enjeu de conciliation entre projet économique et projet de territoire à but finalement non
00:46:05 lucratif, la notion de faire filière, il y a plusieurs éléments si tu peux y revenir.
00:46:09 Oui, c'est toute la complexité du projet, quand on parle un peu de réinventer les modèles on est un
00:46:16 peu au cœur de ça, je disais tout à l'heure que c'est un projet très expérimental et du coup ça
00:46:21 implique effectivement par rapport à un projet qui est censé être rapidement rentable, voilà,
00:46:25 une marque, ça implique un temps très long dans trouver les bons modèles, les bons fonctionnements,
00:46:31 les bons leviers, on mène une recherche de développement qui est constante, qui est
00:46:38 quotidienne, et du coup cette dimension expérimentale, la création de l'activité en fait qui ne bénéficie
00:46:46 pas de références technico-économiques, on ne sait pas sur quoi se baser pour faire un prévisionnel
00:46:50 économique, clairement, ça demande une expérimentation au quotidien à la fois sur le modèle économique,
00:46:56 sur l'organisation collective, sur les partenariats avec les éleveurs et les éleveuses, en fait il
00:47:02 faut un peu tout inventer, donc ça c'est quand même à la fois ce qui est riche et ce qui est
00:47:05 intéressant, mais à la fois ce qui est ce qui est parfois compliqué pour la pérennité de l'activité,
00:47:11 donc il y a vraiment ce volet là, après il y a la partie de la forme coopérative qui finalement,
00:47:17 la société coopérative d'intérêt collectif, elle permet d'être une forme hybride entre
00:47:22 l'entreprise et l'association, donc ça permet vraiment de réunir ces deux volets, mais à la
00:47:29 fois ça reste un frein parce que c'est des structures juridiques qui sont encore assez peu
00:47:33 connues, qui sont assez peu répandues, et qui font l'objet de pas mal de vides juridiques en
00:47:38 termes notamment de solutions de financement, il y a un gros sujet autour du financement de
00:47:44 l'économie sociale et solidaire, et de comment on accompagne ces modèles expérimentaux de
00:47:48 structuration de filière finalement, qui rentrent pas trop dans les cases, parce qu'effectivement
00:47:52 il y a ce modèle économique, mais il y a aussi ce modèle d'animation de filière et ce modèle
00:47:56 expérimental qui relève de la transition écologique en fait, donc ça reste un peu des
00:48:02 projets ovnis, donc la complexité elle est aussi là, c'est à dire qu'on va faire des choix de
00:48:10 l'ordre de la structuration de filière, de l'ordre de l'animation de filière, qui vont de façon assez
00:48:15 directe nuire à leur rentabilité, et pour illustrer un peu mon propos, je peux donner un exemple, là
00:48:21 pour la récolte de la laine, on se déplace sur les élevages de ferme en ferme, et on ne fait pas
00:48:27 d'économie d'échelle, c'est à dire à regrouper des lots et à se dire "on pourrait faire des
00:48:30 nettoyages mécaniques, ça nous coûterait beaucoup moins cher en termes de temps plutôt que de se
00:48:34 déplacer etc." Mais nous ce qu'on défend, et ce qui nous paraît important, c'est toute la valeur que
00:48:40 ça va apporter de passer ce temps sur les fermes avec les éleveurs et les éleveuses, les tondeurs
00:48:45 et les tondeuses, et finalement tout l'écosystème que ça va créer en termes de liens sociaux,
00:48:49 d'interconnaissance, de montée en compétences, et puis de vécu commun, d'expérience commune, qui va
00:48:56 permettre finalement de faire territoire, et de construire une histoire de territoire autour de
00:49:01 nos pratiques. Et du coup c'est un peu là-dessus qu'on interpelle les collectivités locales, c'est
00:49:06 de dire "est-ce que la valeur finalement, elle ne passe que par la rentabilité économique ? Est-ce
00:49:11 que ces choix qui permettent pas d'économie d'échelle, on peut pas les valoriser autrement ?"
00:49:16 Donc ça c'est un point qui est vraiment important et qui pose pas mal de questions sur à la fois
00:49:23 où est-ce qu'on place la valeur, mais à la fois comment est-ce que les acteurs aussi publics
00:49:27 peuvent s'engager sur cette dimension de restructuration de filières. On se rend compte que
00:49:31 la filière textile elle est fragile, elle a été délocalisée, donc il reste assez peu de choses,
00:49:36 il y a des sous-traitants qui ferment chaque année, donc en fait nous en tant que porteurs de projets
00:49:40 en fait un peu privés, même si on est d'intérêt collectif, on a beaucoup d'enjeux sur nos épaules,
00:49:45 et là ce qu'on revendique c'est aussi qu'il est nécessaire de mettre en place des partenariats
00:49:50 publics privés pour arriver à porter ces enjeux de restructuration de filières avec tout ce que
00:49:55 ça implique, en termes de qualité, en termes de maintien des emplois, en termes d'appropriation
00:50:00 des communs aussi et des outils de production. Voilà c'est pas parce qu'on est lucrativité
00:50:06 limitée ou abjectement lucratif qu'il faut évincer la question des outils de production,
00:50:09 qui est quand même nécessaire dans une autonomie à la fois de production, mais dans une autonomie
00:50:15 aussi politique. Donc en fait ça pose vraiment tout un tas de questions qu'on essaye de porter
00:50:23 au fur et à mesure de nos pratiques. Là on travaille aussi sur la rédaction d'un plaidoyer
00:50:27 pour essayer de porter ces questionnements là un peu plus haut à l'échelle politique,
00:50:31 mais on se retrouve quand même pas mal confrontés toujours à comment on fait pour trouver de la
00:50:36 place pour ces modèles hybrides, comment est-ce qu'on arrive à mettre en place, finalement à
00:50:42 faire évoluer un peu la dimension systémique pour qu'on puisse avoir des dispositifs à la
00:50:46 fois de financement et d'accompagnement qui soient adaptés aux spécificités d'une filière,
00:50:50 parce que là on passe notre temps à essayer de faire rentrer des carrés dans des ronds et en
00:50:53 fait ça marche pas pour les dispositifs de financement etc. Donc comment finalement le
00:50:58 monde dans lequel on vit, qui a quand même un prisme très centré sur l'économie,
00:51:01 peut créer des écosystèmes plus favorables à l'accueil de ces projets de transition écologique.
00:51:07 Clairement je pense que ça soulève pas mal de questions transversales à toute cette problématique
00:51:13 autour des femmes et la transition écologique. Bah oui carrément, et du coup finalement comment
00:51:18 on accompagne les modèles c'est aussi comment on accompagne les personnes qui les portent,
00:51:21 et donc souvent des femmes pour reboucler avec ce qu'a mené Emmanuel en introduction. Cette heure
00:51:28 est très vite passée, merci beaucoup à toutes les trois pour vos interventions. Je vois qu'il y a
00:51:34 des commentaires dans le chat de personnes qui contribuent aussi et qui amènent des éléments
00:51:39 qui pourront être partagés ensuite avec le replay. Est-ce qu'il y a des questions pour nos intervenantes ?
00:51:43 N'hésitez pas à ouvrir votre micro et à les poser si c'est le cas.
00:51:51 C'était trop passionnant. Moi j'aimerais bien la question que j'ai posée au début pour la première
00:51:59 intervenante, si elle peut du coup partager les résultats d'études et si vous voulez envoyer à
00:52:03 tout le monde qui était présent lors du café, comment est-ce qu'on peut le recevoir ? Oui,
00:52:08 l'étude est accessible sur notre site dans le détail et donc j'enverrai le lien à Marélie
00:52:16 qui vous le transmettra. Le projet c'est "Retour à la Terre" c'est ça ?
00:52:22 "Retour à la Terre" est féminin. Ok, merci beaucoup. L'association CACIA s'appelle "Back to Earth",
00:52:29 je mets le nom dans le chat et de toute façon ce que je disais, quand j'enverrai le replay,
00:52:34 j'enverrai toutes les ressources et notamment celles qui ont été partagées aussi par d'autres
00:52:38 participants. Je vois Odile Proust qui a partagé un certain nombre de ressources qui se croisent
00:52:43 d'ailleurs avec celles que j'avais prévues de vous envoyer. Est-ce qu'il y a des gens qui ont
00:52:49 envie d'intervenir ? Parce que sinon chacune de nos intervenantes était prête à aller bien au-delà.
00:52:55 Sabine notamment que je me suis permise de couper donc c'est peut-être l'occasion si il y a personne
00:52:59 qui souhaite s'exprimer, poser des questions ou intervenir d'ailleurs et témoigner à son tour.
00:53:05 C'est ouvert.
00:53:07 Bien sûr, bravo et merci pour ce partage, c'était super. C'est la première fois que je participe,
00:53:11 je fais partie d'un projet social et solidaire aussi qui est lié avec les femmes agricultrices.
00:53:16 Donc voilà, merci, très intéressant.
00:53:18 Avec plaisir, merci CACIA pour ce retour et peut-être du coup, vu que je ne vois pas de
00:53:24 mains levées, Sabine si tu veux dérouler un petit peu plus ce projet de Libre Blanc.
00:53:31 Oui, alors ce sont des premières réflexions qui ont besoin bien sûr d'être expertisées
00:53:38 réglementairement et juridiquement. Alors il y a une première réflexion autour du statut. Donc
00:53:44 on a quand même une belle évolution du statut de la femme en agriculture mais on ne sait pas
00:53:51 encore tout à fait le dénombrer mais on pense qu'il y a entre 2000 et 5000 femmes qui n'ont pas
00:53:57 de statut, donc qui sont sans statut et qui vivent donc invisibles d'un point de vue social. La grande
00:54:03 difficulté et c'est ce qu'on veut porter, c'est justement de les recenser et ensuite de les
00:54:11 accompagner. Là, c'est notre première réflexion. On a aussi une réflexion autour de la famille.
00:54:19 Donc je vous l'ai dit, la maternité chez les agricultrices est quand même un moment compliqué
00:54:25 de leur vie. On voudrait essayer d'assouplir ou d'adapter le congé maternité et plus particulièrement
00:54:34 le remplacement en agriculture pendant cette période-là parce que quand on est en élevage,
00:54:43 alors je parle de l'élevage mais il y a la serinte du matin, la serinte le matin, le soir,
00:54:49 il y a les week-ends et on trouve qu'il y aurait encore des choses à assouplir et à adapter. Il y
00:54:57 a aussi, donc je n'en ai pas parlé, mais il y a tout le développement de l'offre de garde en milieu
00:55:01 rural. Donc l'AMSA a été initiatrice, ça fait quelques années, de l'ingénierie de la création
00:55:09 des micro-crèches. Donc c'est des crèches, des petites structures d'accueil d'une dizaine de
00:55:15 places. Mais on voit justement qu'il y a quand même, on peut encore travailler sur le sujet
00:55:23 parce que par manque de place. Je vois une question là sur le chat, mais je répondrai après. Il y a
00:55:34 aussi toutes les réflexions autour de la santé, donc pareil, à expertiser. On a un constat, c'est
00:55:46 que les femmes, après leur période de grossesse, ne vont pas forcément se faire suivre d'un point
00:55:52 de vue personnel et gynécologique. Et on voudrait essayer d'amener une proposition sur quelque chose
00:55:58 un petit peu obligatoire, par exemple à 50 ans, un peu comme la prévention du cancer du sein,
00:56:05 mais quelque chose comme ça. Il y a bien sûr toute une réflexion de santé-sécurité au travail,
00:56:12 donc liée à la pénibilité, en développant des formations gestes et postures, mais aussi en
00:56:20 essayant que les femmes soient présentes dans les conditions d'homologation du matériel,
00:56:26 pour avoir des nouveaux critères par rapport au poids et aux morphologies des femmes,
00:56:32 sachant qu'on sait très bien, et vous l'avez dit Emmanuel, que si on adapte pour les femmes,
00:56:38 il y aura beaucoup d'hommes qui aussi pourront en profiter. Et ensuite, on a une réflexion aussi
00:56:44 sur l'accompagnement des femmes dans les métiers d'agricole à responsabilité, sur l'engagement,
00:56:49 sur la prise de responsabilité, avec de la formation, de l'initiation auprès des jeunes
00:57:00 étudiantes apprenantes, pour qu'elles aient envie de s'engager ou de prendre des responsabilités.
00:57:08 Et on a aussi toujours un sujet autour de la retraite des femmes, puisque toutes les femmes
00:57:14 justement qui ont été conjointes, mais qui n'ont pas eu de statut particulier,
00:57:21 ont quand même des retraites très très faibles.
00:57:23 Je suis allée réagir à la question qui était en commentaire, si ça te fait vouloir y aller.
00:57:30 Et sur la question de la formation, je pensais que ça vaut pour toi en question,
00:57:34 et peut-être Emmanuel aussi, puisque ça rentre peut-être dans les propositions.
00:57:37 Donc oui, ce que je n'ai pas dit, c'est que vous voyez, je suis quand même très très engagée.
00:57:45 C'est parce que j'ai quand même mon conjoint, qui est mon associé aussi, qui me soutient,
00:57:51 quand je ne suis pas là, mais même quand je suis là, dans l'éducation des enfants,
00:57:58 dans les tâches ménagères, parce que sinon je ne pourrais pas m'engager, ça c'est sûr.
00:58:03 Bien sûr sur l'exploitation, mais ça c'est un soutien vraiment très très important.
00:58:12 Donc la maternité et les hommes, je ne pourrais pas dire le contraire,
00:58:20 parce que je suis quand même bien soutenue, mais ça ne fait pas tout.
00:58:24 Même si on a un remplaçant sur une exploitation,
00:58:26 même si on a quelqu'un qui nous aide à la maison,
00:58:31 il reste encore des problématiques.
00:58:35 Et les problématiques restent aussi pour les femmes qui sont seules.
00:58:38 Oui, et puis quand on parle de maternité, on parle aussi de grossesse,
00:58:43 et là malgré tout les maris sont un peu déterminés pour porter la grossesse de leur côté.
00:58:50 Et peut-être Emmanuelle, si tu veux réagir sur la question de Nathalie,
00:58:55 donc y a-t-il une réflexion sur la formation ?
00:58:57 C'est une question effectivement qui est vaste, plusieurs éléments de réponse.
00:59:02 Déjà les instituts de formation se questionnent sur ce sujet du genre.
00:59:07 Typiquement, on était donc accueilli par l'École supérieure des agricultures,
00:59:12 qui lance une chaire sur l'agriculture et le féminin,
00:59:16 avec l'idée vraiment d'aller chercher de plus en plus de candidats à l'installation,
00:59:22 mais surtout aussi de faire en sorte de faire changer les regards au sein même des formations.
00:59:27 Sur cette dimension féminine dans l'agriculture, ça c'est un premier élément de réponse.
00:59:32 Dans les propositions qui nous ont été remontées, il y a la notion aussi de monitorer
00:59:37 et de suivre par des indicateurs les temps de prise de parole,
00:59:41 d'intervention dans les parcours de femmes,
00:59:46 pour pouvoir aussi s'assurer qu'il n'y ait pas des modèles trop masculins
00:59:50 qui soient diffusés dans le cadre des formations.
00:59:53 Ce sont des choses qui sont expérimentées à certains endroits,
00:59:58 ce suivi monitoré des temps de prise de parole.
01:00:01 Par ailleurs, il y a la dimension de formation spécifique pour les femmes.
01:00:06 Je pense à des formations qui sont proposées justement à des femmes qui s'installent,
01:00:13 et qui manquent peut-être d'éléments entrepreneuriaux ou de leadership.
01:00:18 Et là, il y a aussi des formations qui peuvent être dispensées spécifiquement
01:00:22 pour proposer un accompagnement sur des éléments qui seraient à travailler
01:00:27 plus spécifiquement quand on est une femme.
01:00:29 Il y a plein de façons de prendre ce sujet de la formation.
01:00:31 Merci pour ce retour.
01:00:35 Est-ce qu'il y a d'autres questions parmi les participants et les participantes ?
01:00:39 Christelle, vas-y, tu as la main levée, je te laisse ouvrir ton micro.
01:00:44 Bonjour à tous et toutes.
01:00:47 J'ai pris le réunir en cours, donc je n'ai pas tous les éléments,
01:00:52 mais le peu que j'ai entendu, je n'ai pas une question,
01:00:55 je n'ai plus envie de faire un feedback de ce que j'entends.
01:00:58 C'est pour ça que j'ai mis le petit mot dans le chat.
01:01:00 J'entends beaucoup que les problématiques de maternité sont des problématiques féminines.
01:01:06 En fait, non, ce sont des problématiques parentales.
01:01:09 Je trouve que là, il y a un biais qu'il faudrait vraiment commencer à mettre l'agricultrice
01:01:19 dans les mêmes conditions que les hommes, qui, eux, n'ont visiblement pas ce problème à régler.
01:01:23 Visiblement, on n'en parle pas, que les hommes doivent garder du temps pour s'occuper de leurs enfants.
01:01:28 Donc déjà, première réaction.
01:01:30 Deuxième chose, quand tu parles de mère, de cinq enfants, engagée, avec une exploitation,
01:01:39 même si tu as un mari, c'est beaucoup, je trouve.
01:01:43 Et oui, de tout ce qui est bien-être, parce qu'on a parlé de formation,
01:01:48 on a parlé de mise en place d'infrastructures, etc.,
01:01:52 mais le temps personnel et le bien-être aussi me semblent être un élément important
01:01:58 pour l'épanouissement de la femme dans n'importe quel travail.
01:02:01 Mais je trouve encore plus dans ces métiers-là.
01:02:03 Voilà.
01:02:04 Merci beaucoup, Christelle.
01:02:09 Le temps passe à fin.
01:02:12 Merci en tous les cas à toutes et à tous pour ce café de campagne,
01:02:17 tout à fait enrichissant et très intéressant.
01:02:19 Merci à Emmanuel, Sabine et Olivia pour vos interventions.
01:02:23 Ça fait du bien.
01:02:24 On a des enthousiasmes, de l'envie, des idées, des beaux projets.
01:02:28 Et on a besoin de ça dans nos territoires ruraux comme ailleurs.
01:02:31 Mais on sait que dans l'ultra-ruralité, il y a plein de choses
01:02:35 tout à fait fantastiques qui se mettent en place.
01:02:38 Vous l'avez très, très bien illustré.
01:02:41 Merci, Marélie, pour ton animation, encore une fois.
01:02:43 Et puis, on se retrouve le 26 avril.
01:02:46 N'hésitez pas à noter déjà dans vos agendas cette problématique
01:02:50 qui va tourner autour de l'énergie.
01:02:53 Alors, transition énergétique, énergie en transition,
01:02:57 on est en train de finaliser tout ça.
01:02:59 Mais voilà, c'est une question tout à fait fondamentale
01:03:01 dans nos territoires aussi.
01:03:04 Voilà, donc ne manquez pas le 30e café de campagne,
01:03:09 le 25 avril prochain.
01:03:11 Merci à toutes et à tous.
01:03:13 Très bonne journée.
01:03:15 Faites attention à vous.
01:03:16 Et vive la ruralité dynamique, innovante et solidaire
01:03:20 et ouverte sur le monde.
01:03:22 Bravo.
01:03:23 Merci à vous.
01:03:24 À bientôt.
01:03:25 Bonne journée.
01:03:26 Merci.
01:03:27 Merci.
01:03:28 Tché !
01:03:28 [SILENCE]

Recommandée