IL TUE LA FILLE DE SON VOISIN ⚠️ _ Sur la scène du Crime _ Épisode entier
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00:00 L'affaire qui suit relate des faits réels dont le déroulement est illustré par des reconstitutions.
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01:17 On a l'impression de débuter un film d'Hitchcock.
01:32 Voilà, c'est tout à fait l'ambiance qu'on a vécue.
01:37 Jeudi matin, 8 février 2001 à 8h10, le corps d'une adolescente de 14 ans
01:42 est découvert en contrebas d'un chemin goudronné qui mène à la ferme de la glacière
01:46 dans le petit village des Écrins en Seine-et-Marne.
01:49 Vêtue d'un pyjama rose couvert de sang, le corps de la victime est lardé de coups de couteau.
02:01 On voit qu'elle est encore en pyjama, pieds nus, d'où elle vient, pourquoi elle est là à cette heure-ci,
02:09 est-ce qu'on nous l'a déposée ?
02:13 Ma première peur, je me suis dit j'espère que c'est pas un tueur en série.
02:23 Ça, ça a été mon premier réflexe de penser ça,
02:29 parce que là, vraiment, on a tout de suite compris qu'on avait affaire à un meurtre d'exception.
02:36 Les enquêteurs de la brigade de recherche départementale de Melin
02:39 gèlent immédiatement cette scène de crime et font leur première constatation.
02:43 Les techniciens d'identification criminelle ont pris la scène de crime en compte,
02:47 ils vont commencer par s'intéresser au corps.
02:50 Le corps se trouve dans un chemin qui va de la ferme à la route départementale.
02:56 Le corps se situe à environ 300 mètres du corps de ferme.
02:59 Je crois me souvenir que les premiers comptages faisaient part de plus d'une quarantaine de coups de couteau.
03:07 Le crime était récent, c'est certain, vu la victime était relativement fraîche, je dirais.
03:14 À 2,50 mètres du corps, les techniciens en identification criminelle font une étrange découverte.
03:22 Un masque de déguisement en latex rouge qui représente un visage de diable.
03:27 Le masque n'est pas tout à fait découvert à côté du corps, il est à quelques mètres.
03:33 Il est encore sur la partie goudronnée de la route.
03:36 Il est tout de suite photographié, mesuré et tout.
03:39 Mais tout de suite placé sous scellé et mis dans une boîte particulière pour être envoyé tout de suite en analyse.
03:45 On découvrait une scène de crime horrible.
03:47 Ce masque nous a tous horrifiés, tous les enquêteurs et les témoins qui l'ont vu.
03:53 On se dit que si c'est un tueur en série, il faut qu'on le trouve rapidement.
03:56 La victime est identifiée par l'employé agricole qui a découvert le corps.
04:01 Alors en fait, c'est quelqu'un qui va travailler à la ferme, qui va tous les jours,
04:05 qui nous identifie formellement cette jeune fille comme étant Priscillia Sciatti,
04:09 la fille d'un couple qui habite dans la ferme, les seuls occupants de la ferme.
04:15 Et manifestement, de nombreux indices nous permettent de dire que la personne venait du corps de ferme.
04:22 Et c'était des traces de sang, des traces de pas, des traces de pneumatiques
04:25 qui apparemment nécessitaient un travail plus approfondi.
04:29 Et donc là, j'ai décidé de monter vers la ferme, aller voir ce qu'il y avait dans cette ferme.
04:36 On n'y était pas encore allé.
04:38 Il y avait beaucoup de temps qui s'était passé, mais il fallait s'occuper de la scène de crime, la protéger.
04:42 Et donc on n'est pas monté tout de suite sur la ferme.
04:45 Donc moi, je me suis dirigé tout seul en regardant, en écoutant, pour voir un petit peu ce que j'allais y trouver.
04:53 J'ai fait le tour de la maison qui nous intéressait, la maison de Sciatti,
04:57 en passant par l'extérieur de la ferme, j'ai trouvé des traces de pas
05:03 et j'ai vite constaté qu'un carreau avait été cassé à l'arrière.
05:07 La maison vide, sans lumière, a été pénétrée par effraction.
05:11 Et sur l'autre façade, l'enquêteur découvre une fenêtre grande ouverte par laquelle la chaleur s'échappe encore au dehors.
05:18 C'est une deuxième scène de crime, à protéger d'urgence.
05:22 Les parents de la victime sont rappelés à leur domicile.
05:27 Ils révèlent aux enquêteurs l'emploi du temps de la famille.
05:30 Chaque matin, ils partent travailler vers 6h30 et c'est le quart de ramassage scolaire qui vient chercher Priscilla vers 8h pour l'emmener au collège.
05:37 L'adolescente passait donc plus d'une heure seule dans la maison pour se préparer.
05:41 Pour pouvoir poursuivre les constatations au domicile, on ne pouvait pas, au vu de ce qui s'était passé dans un premier temps,
05:51 laisser la famille Sciatti récupérer son domicile.
05:54 Donc les techniciens, comme ils n'avaient pas terminé leurs constatations, on a demandé au Sciatti d'aller chez des amis.
06:00 C'est dans la maison que l'auteur du crime a surpris sa victime.
06:05 Premier indice, une empreinte de pas fraîche sous la fenêtre fracturée.
06:09 Un élément précieux, soigneusement photographié par les techniciens en identification criminelle,
06:14 qui effectue ensuite un moulage en plâtre de l'empreinte.
06:17 On fait le moulage de cette trace, et comme ça, après, si on trouve des chaussures chez X potentiels auteurs présumés,
06:25 on peut faire une comparaison.
06:27 Et dans la comparaison, ce qui nous intéresse, c'est de retrouver les défauts caractéristiques d'une chaussure.
06:31 Sur une chaussure neuve, vous n'avez pas de défauts.
06:33 Automatiquement, sur une chaussure qui a été légèrement usée, on retrouve des défauts qui sont inhérents à la chaussure.
06:40 Avant de trouver le même défaut sur une chaussure, multiplié par X millions, c'est quasiment impossible.
06:45 Avec ce moulage, les gendarmes possèdent une information précise sur le meurtrier.
06:51 Ils s'intéressent ensuite à la fenêtre fracturée.
06:54 Le carreau a été recouvert de scotch avant d'être brisé.
06:57 Un procédé bien connu des enquêteurs, qui rappelle les méthodes des cambrioleurs.
07:02 On scotche, on donne un coup de coude ou un coup d'un objet contendant.
07:07 Cela permet à l'auteur de pénétrer à l'intérieur de l'habitation sans faire de bruit.
07:12 C'est photographié, c'est mesuré, bien sûr.
07:14 Et ensuite, le scotch est prélevé, conditionné, pour une exploitation qui permettra soit de découvrir des empreintes digitales,
07:22 soit des fivres ou des poils qui ont pu se coller sur la surface collante,
07:26 ou alors éventuellement un profil génétique qui pourrait être sur le scotch.
07:31 Les constatations extérieures terminées, ils peuvent maintenant pénétrer à l'intérieur de la maison.
07:37 On rentre dans la pièce où était les fractions et on s'aperçoit qu'il y a de la terre.
07:43 On voit un espèce de cheminement dans la maison.
07:46 C'est comme si l'auteur nous disait que moi je suis passé par ici, je suis revenu par là et je vais là.
07:52 En analysant les traces et indices laissés dans la maison, le scénario du crime se dessine clairement dans l'esprit des enquêteurs.
07:59 La personne est entrée par la chambre de Jennifer, la soeur de la victime, ensuite a été dans la cuisine pour couper le compteur électrique.
08:10 Ce qui va permettre à l'auteur d'être dans le noir et de surprendre sa victime qui elle est encore au lit.
08:15 Priscillia, elle entend quand même le bruit, elle sait qu'il y a quelqu'un dans la maison,
08:20 elle prend peur et elle va se réfugier dans la salle de bain.
08:23 On s'aperçoit que manifestement l'auteur des faits a essayé de passer par dessus le muret qui sépare la salle de bain des toilettes.
08:35 Priscillia visiblement va sortir de la salle de bain et c'est là que visiblement elle part dans la salle à manger par où elle va s'enfuir par la fenêtre.
08:48 Compte tenu des déplacements dans la maison, les enquêteurs sont persuadés que l'auteur connaissait les lieux.
08:53 Ils s'orientent vers la piste d'un familier, une hypothèse renforcée par le créneau horaire auquel le crime a été commis.
09:00 Il n'y avait plus personne dans la firme, donc il y avait les parents qui partaient au boulot à deux heures différentes.
09:07 Donc là l'auteur sait que Priscillia est toute seule.
09:12 Alors que les constatations s'achèvent, les résultats de l'expertise ADN réalisé en urgence sur le masque de Diable sont communiqués aux enquêteurs.
09:20 Après observation de ce masque, il s'est avéré qu'à l'extérieur il y avait plusieurs traces brunâtres qui se sont avérées être des traces de sang.
09:29 J'ai déterminé une empreinte génétique de femme qui par la suite s'est avérée correspondre à celle de la victime, Priscillia Asiati.
09:39 Et à l'intérieur du masque, j'ai déterminé sur plusieurs prélèments au niveau du front, des yeux, du nez, de la bouche, des tempes, du menton,
09:48 une empreinte génétique masculine, la même, mais je n'avais pas encore à ce moment-là d'éléments de comparaison.
09:55 Il n'y avait aucun autre ADN, il n'y avait pas de tierce personne au niveau de ces empreintes génétiques.
10:03 L'autopsie est pratiquée par le Dr Voroer le vendredi 9 février à l'Institut Médico-Légal de Paris.
10:09 Le comptage des plaies fait état de 60 coups de couteau.
10:13 Les premières plaies ont été portées dans le dos en particulier, profondes d'ailleurs pénétrantes puisqu'il y a eu une blessure de la horte.
10:21 Et ensuite il y a eu des plaies de face si je puis dire, et d'autant plus des plaies de défense puisque la victime a saisi le couteau qui était brondi vers elle,
10:29 puisqu'on retrouve ces plaies au niveau de la paume de la main.
10:33 Et donc ensuite il y a une distribution entre guillemets de très nombreux coups de couteau au niveau du cou et du thorax.
10:39 À l'examen d'une plaie par arme blanche au niveau du revêtement cutané, on peut voir un côté arrondi qui correspond à une lame à bord arrondi supérieur
10:55 à un côté à bord tranchant et filet inférieur. Donc ça nous donne une idée de l'alture de la lame.
11:02 C'est une arme blanche qui peut évoquer un couteau banal, un couteau de cuisine si vous voulez.
11:07 Ce n'est pas un couteau de chasse, ce n'est pas un poignard, ce n'est pas un couteau à cran d'arrêt parce que les lames sont plus fines, plus effilées.
11:16 Ce n'est évidemment pas une hache. Vous voyez, c'est par élimination qu'on va procéder.
11:23 Vous avez 60 coups de couteau dans des régions très diverses et donc il y a un facteur d'acharnement, de dérèglement de la part de l'auteur.
11:33 Donc là, il y a un facteur psychiatrique qui se rajoute.
11:39 La victime est donc morte d'une hémorragie massive. Elle a reçu 60 coups de couteau répartis sur le thorax.
11:46 L'arme du crime est une lame à un côté tranchant et à bout pointu qui mesure 11 à 12 centimètres de long minimum et 20 à 25 millimètres de haut.
11:55 Les coups ont d'abord été portés de dos et ensuite de face. La victime n'a subi aucune violence sexuelle.
12:02 C'est une enquête qui paraît très difficile dès le départ et le temps joue contre nous. Là, on n'a pas une minute à perdre et on a obligation de résultat.
12:12 Et là, on commence à lancer les auditions de témoins. Tout renseignement nous intéresse. On part dans toutes les directions.
12:19 Les gens savent très vite qu'une adolescente a été assassinée dans les conditions que l'on connaît.
12:26 Et des renseignements arrivent à la brigade du Châtelet et là, on vérifie tout.
12:32 On va voir les gens qui ont vu quelque chose, une voiture suspecte, un individu dans un abri de bus qui n'avait rien à y faire. Tout est vérifié.
12:43 Mais le mobile du crime est obscur. Le meurtrier n'a rien volé dans la maison et Priscilla est une adolescente de 14 ans qui fait l'unanimité dans son entourage.
12:53 Sur la victime, on apprend dans les premières heures de l'enquête, c'est une gamine de 14 ans qui est la quatrième d'une fratrie.
13:02 Elle a deux frères et une sœur, mais qui ne vivent plus au domicile. Il y a un gros décalage, un gros écartage entre Priscilla et ses frères et sœurs.
13:12 C'est une gamine qui est douce, intelligente, drôle, gaie, qui est en quatrième dans un lycée de Châtelet-en-Brie.
13:23 C'est une enfant qui ne pose pas de problème particulier, qui n'est pas issue d'un milieu particulièrement favorisé, des parents modestes.
13:31 Je crois que son père était jardinier, sa mère était secrétaire dans une boîte d'informatique.
13:36 Ils vivaient là tous les trois dans cette maison qui avait, je crois, été mise à leur disposition par l'employeur d'elle ou de lui.
13:43 Au fil de leurs investigations, les enquêteurs vont apprendre qu'il se passe des choses bizarres dans cette ferme de la glazière depuis quelques temps.
13:52 Ses parents auraient constaté que les chaises du mobilier de jardin bougeaient à peu près toutes les nuits.
14:00 C'est-à-dire qu'ils les rangeaient le soir et le lendemain matin, elles avaient changé de place.
14:04 Des chaises qui se déplacent toutes seules, mais aussi un carreau qui a déjà été deux fois la cible d'attaque.
14:10 Drôle de coïncidence, c'est justement ce même carreau qui a été fracturé le jour du meurtre.
14:15 Une autre fois, la lanterne au-dessus de la porte d'entrée avait été cassée.
14:20 C'était bizarre. Au moins à trois reprises, ils ont pensé qu'ils avaient été victimes de tentatives de cambriolage.
14:26 Pourtant, en y regardant de plus près, ces événements étranges semblent plus particulièrement diriger vers Priscilla.
14:33 Assez rapidement, on a su que la gamine était assez tourmentée ces derniers temps.
14:39 Elle évoquait des appels téléphoniques anonymes, des menaces. On la menaçait au téléphone.
14:47 Elle avait vu quelqu'un rôder. Elle avait vu une forme humaine rôder autour de chez elle.
14:52 Le matin, quand elle se préparait justement, quand les parents étaient partis, elle en avait parlé à ses copines.
14:58 Elle leur avait dit qu'elle avait peur, qu'elle se sentait terrorisée. Elle leur a dit "J'ai la trouille. Je sens que je suis épiée. Je sens qu'on me surveille.
15:07 Vous allez voir un de ces jours, vous allez toutes venir à mon enterrement. C'est horrible."
15:12 Mais ces inquiétudes, Priscilla ne les avait confiées qu'à ses amis, jamais à ses parents.
15:18 Une avancée significative de l'affaire, c'est la sœur de la victime qui appelle le directeur d'enquête
15:26 et qui lui dit "Voilà, il y a quelque chose que je tiens à vous signaler.
15:32 Vous nous avez envoyés chez des amis parce que vous avez besoin de faire des constatations à notre domicile.
15:40 Et là, notre ami se justifie alors qu'on ne lui demande rien, que ça ne peut pas être lui parce qu'il était sur Paris."
15:49 Et là, elle a été sidérée parce qu'elle est toute source stupide. "Pourquoi il me donne son alibi alors que d'une, je ne lui demande rien?"
15:57 Et à partir de là, il s'est mis une mécanique en place dans sa tête. Elle en a parlé à, je crois, un de ses frères.
16:09 Et le frère Steve va dire à sa mère "Ecoute maman, si tu n'en parles pas au gendarme, moi c'est simple, je prends ma carabine, j'y vais et je lui fais la peau."
16:17 La mère s'affole, évidemment, en parle au gendarme. Et les gendarmes tiltent tout de suite.
16:23 Alors moi, je suis en pleine audition de témoin à quelques kilomètres de là et le directeur d'enquête m'appelle.
16:30 Il me fait part de ce que vient de lui dire Jennifer et me dit "Qu'est-ce que tu en penses?"
16:38 Et là, je lui dis "Il faut tout de suite aller le chercher."
16:43 Didier Leroux, 38 ans, marié, deux enfants. Ce boulanger père de famille se retrouve tout à coup au centre de l'enquête.
16:50 Pourtant, Leroux n'a pas vraiment la carure d'un meurtrier.
16:54 C'est quelqu'un qui ne pose absolument aucun problème, qui est parfaitement bien considéré par son entourage.
17:01 C'est quelqu'un de vraiment sans histoire. Il est gentil, serviable, très travailleur.
17:08 On le décrit comme très courageux. Il est boulanger, il se lève à l'heure où les gens vont se coucher.
17:13 Et il travaille toute la nuit. C'est vraiment quelqu'un qui se donne au travail et qui ne rechine pas.
17:22 Il a échoué, je crois, deux ou trois fois à son CAP de boulanger. C'est pas une lumière.
17:28 Mais en même temps, c'est un bon ouvrier.
17:30 D'ailleurs, quand on a sa patronne en ligne, elle nous dit "Mais c'est pas possible, vous faites fausse route.
17:36 Il est incapable de tuer quelqu'un. C'est quelqu'un de très bien. Vous devriez vous occuper vraiment des vrais délinquants."
17:44 - Il a l'air généreux aussi. Il donne beaucoup aux autres en apparence,
17:49 puisqu'il vient souvent chez les Siatis pour donner des pains au chocolat, des croissants pour les enfants.
17:55 Il amène du pain, il fait pas payer.
17:58 Un homme d'autant plus difficile à soupçonner que les deux familles sont très proches.
18:03 Une amitié naît sept ans auparavant, à l'époque où ils habitaient le même lotissement.
18:08 - Donc Priscillia, à ce moment-là, doit avoir sept, huit ans.
18:12 Ils sont voisins avec la famille Leroux. Les Siatis et les Leroux sont voisins.
18:17 Et les Leroux ont une petite fille qui a un an à peu près.
18:23 Et Priscillia va s'intéresser à cette gamine. Elle joue avec.
18:29 Et elle va s'en occuper. C'est une espèce de grande sœur. Elle est très souvent chez les Leroux.
18:34 - En réalité, les liens vont se tisser à partir du moment où Priscillia va prendre l'habitude de jouer avec Marion.
18:41 Les années vont passer. Elle va rester très habituée chez les Leroux.
18:45 - Et bien évidemment, ça crée un rapprochement. Ils sont voisins.
18:48 Les parents vont finir par se croiser, se rencontrer et devenir des relations.
18:55 Et puis dans le temps, ça va déboucher sur une histoire d'amitié. Ils deviennent amis.
19:00 Les deux couples sont des couples amis.
19:02 - On se fréquente assidûment et on fête Halloween, on fête Noël, on fête le Nouvel An ensemble.
19:08 Toutes les réunions familiales, en réalité, retrouvent ces deux familles réunies.
19:13 Mais Leroux est d'un tempérament taciturne, du genre introverti.
19:17 À la lumière des révélations de l'enquête, le doute s'insinue sur la personnalité de cet ami.
19:23 - Qu'est-ce qu'on peut dire de lui à part qu'il travaille ? Pas grand-chose en fait.
19:28 - Il est marié, il a deux enfants, il a un travail, il a acheté une maison à Écrane.
19:36 Il gagne sa vie. Oui, il est insoupçonnable.
19:42 - En faisant son environnement, ce qu'on appelle environnement poli-gendarmerie,
19:46 on apprend qu'une plainte a été déposée à son encontre pour des comportements à caractère sexuel
19:54 à Danemarie-l'Élise, là où il habitait avant.
19:56 Le vernis de respectabilité du boulanger s'écaille.
20:00 D'autant que, comme chaque jeudi, Didier Leroux était en repos le jour du crime.
20:04 - On n'a pas de certitude, mais il y a un certain nombre d'éléments, un faisceau de présomption, on va dire.
20:11 D'abord parce qu'il pense que c'est un proche. Or, Leroux est un proche.
20:15 Il faut que ce soit quelqu'un qui connaisse parfaitement les lieux,
20:18 parce que quand on voit la façon dont l'agression a eu lieu,
20:21 la façon dont il a pénétré à l'intérieur de cette maison, il fallait connaître les lieux.
20:26 Il y a son passé judiciaire. Il a deux toutes petites condamnations, mais qui existent pour exhibitionnisme.
20:33 Bon, donc ça fait quand même des petits éléments qui font qu'il n'est pas tout à fait inutile
20:40 d'aller rendre une visite de courtoisie à ce monsieur Leroux.
20:43 C'est ce que les gens arment vont faire, donc, le 10 février.
20:46 - Quand on arrive chez lui, on frappe à la porte, il nous ouvre.
20:49 Il est avec ses deux enfants. Sa petite fille est en train de faire un dessin sur la table.
20:54 Le petit dernier est dans ses jambes et ne nous pose aucune question.
20:59 On est surpris. On lui explique pourquoi on vient, mais il n'a aucune réaction.
21:08 Il laisse faire et il exécute tout ce qu'on lui dit, c'est-à-dire on lui dit il faut venir avec nous dans telle pièce.
21:14 Il vient et il est là, il ne bouge pas et il fait ce qu'on lui dit.
21:19 On était quatre enquêteurs à ce moment-là. Je crois qu'on a ressenti tous les quatre la même chose.
21:26 On savait que c'était la personne qu'on cherchait.
21:33 - Son comportement et puis, je ne sais pas, l'intuition peut-être.
21:38 - Lorsque cette percussion a été effectuée par les enquêteurs, j'ai voulu assister à celle-ci car,
21:45 comme vous le savez, on avait découvert des traces de pas, de semelles.
21:51 Et tout de suite, on s'est attaché à faire toutes les chaussures, à retourner les chaussures, voir les semelles, si ça pouvait correspondre.
21:59 Effectivement, on a retrouvé tout de suite les chaussures qui pourraient correspondre.
22:05 À un moment, on prend une paire de tennis et on s'aperçoit que la semelle est meulée.
22:11 Mais la mauvaise partie, parce que la partie qui était vraiment caractéristique, suite au moulage que nous avions effectué, ressortait dans ces chaussures.
22:20 Et c'est vrai qu'on a pu retrouver des éléments sur le moulage et sur la chaussure qui nous permettaient de dire que c'était bien cette chaussure-là.
22:28 - Le plus gros élément, c'était les chaussures. Elles portent des traces de sang et elles ont été meulées.
22:34 Ce qu'on voit encore correspond parfaitement aux traces qu'on a découvertes dans la ferme. Ça peut être que les chaussures de l'auteur.
22:40 - Donc uniquement avec les baskets, déjà, entre parenthèses, il est mort.
22:44 Les preuves s'accumulent. Dans le garage de Leroux, les enquêteurs saisissent une ponceuse sur laquelle apparaissent des marques de gomme.
22:54 - Les analyses qui ont été faites sur le scotch, qui était donc imposé sur le carreau afin de le briser en silence, ont permis de déterminer que ce scotch avait été manipulé avec des gants, genre *****, sur lesquels on trouvait des petits losanges au bout des doigts.
23:10 Donc l'auteur portait ce genre de gants.
23:12 Et lors de la perquisition, on va retrouver un conditionnement d'une boîte de 10 paires de gants, sauf qu'il en manquera une.
23:19 - Ils vont trouver un masque, un masque de vieillard, qui n'a rien à voir avec le masque qu'on a retrouvé sur les lieux du crime.
23:25 Mais la présence de ce masque, je ne sais pas, moi, j'ai pas de masque chez moi, je ne sais pas si vous en avez, mais c'est pas du meilleur effet. Dans le contexte de l'enquête, il y a mieux.
23:37 - On fait même des prélèvements au niveau de la tuyauterie. On va prélever l'eau qui se trouvait dans les siphons.
23:44 - Vous pouvez découvrir du sang, du sang enlavé. Ensuite, des poils, des fibres qui peuvent revenir des vêtements de la victime ou de l'auteur des vêtements de la victime et qui sont dans le siphon.
24:00 Ça laisse une trace, un passage. Donc on récupère cette partie de siphon qu'on met dans un bocal qui ensuite part en analyse.
24:09 - Effectivement, on peut, nous, experts, espérer trouver une empreinte génétique à partir de cellules sanguines qui resteraient dans les siphons des lavabos.
24:20 Une personne a pu nettoyer des traces de sang ou se laver et donc laisser du sang de sa victime dans ce siphon.
24:27 - Mais il n'y aura pas forcément une coloration rougeâtre de l'eau parce qu'elle sera diluée. Mais malgré tout, on peut quand même trouver dans certains cas une empreinte génétique exploitable.
24:41 Les prélèvements effectués sur le siphon n'apporteront aucune preuve supplémentaire. De toute façon, les enquêteurs ont déjà largement de quoi incriminer le rouleau.
24:51 Des chaussures dont les semelles correspondent parfaitement à l'empreinte relevée sur la scène du crime. La ponceuse que Leroux a utilisée pour meuler ses semelles.
25:00 La paire de gants de ménage manquantes. Le masque de vieillard. Une paire de jumelles à vision nocturne.
25:06 Didier Leroux est placé en garde à vue à la brigade de Châtelet-en-Brie le samedi 10 février 2001 à 23h.
25:13 - On est à deux enquêteurs pour l'entendre. Il répond à nos questions. On essaie de lui poser des questions sur sa vie intime. Il répond.
25:28 On essaie de voir un petit peu ce qu'il vit avec la famille Ciatti. Il répond. Il va nous raconter sa vie. On va apprendre que ça va pas trop bien dans son couple.
25:40 Que sa femme lui reproche d'être trop proche justement de la famille Ciatti. Donc on a le lien entre les deux familles.
25:48 - Il dit que sa femme ne lui cause pratiquement plus. Et en allant chez les Ciatti, il s'aperçoit que Presilia s'intéresse à ce qu'il fait.
25:57 - Alors ça peut être des gâteaux, ça peut être n'importe quoi. Elle s'intéresse. Il nous parle de Presilia. Il parle de Presilia et il explique qu'il est amoureux d'elle.
26:06 - Et au fil des phrases, on s'aperçoit qu'en fait il est très amoureux d'elle. Il se fait complètement des films.
26:12 - Il nous a raconté qu'il voulait partir vivre dans je sais plus quel pays. Qu'ils avaient prévu ça tous les deux depuis longue date.
26:19 Le Roux affirme donc qu'il vivait une véritable relation amoureuse avec Presilia. Pour les enquêteurs, c'est surtout un premier élément sur l'aumobile du boulanger.
26:29 - Et ensuite au bout de 17h30, on a commencé à parler des indices qu'on avait découverts. Notamment cette fameuse paire de chaussures.
26:37 - On a fait avancer la situation en lui expliquant que des chaussures quand on marche, elles ne s'usent absolument pas de cette façon. Elles étaient usées. On voyait très bien la trace de la disqueuse.
26:49 - On lui a dit mais c'est pas possible ça. C'est pas une usure normale d'une chaussure. Ça a été fait avec une disqueuse. Et on avait trouvé la disqueuse à son domicile.
26:58 - Donc on lui a dit c'est quoi ça ? Il faut nous donner une explication. Et là à un moment donné, en un quart de seconde, il a basculé en avouant que c'était lui l'auteur, qu'il était amoureux de Presilia, qu'il la voulait pour lui et qu'il a fini par la tuer.
27:12 Mais Didier le Roux déclare qu'il n'avait absolument pas l'intention de tuer Presila. Ce matin là, il serait simplement venu pour lui déclarer son amour.
27:21 Le masque et le couteau ne devaient servir qu'à effrayer l'adolescente pour mieux la faire succomber.
27:27 - Je voulais qu'elle perde conscience, qu'elle se réveille et qu'elle s'aperçoive que c'était lui qui était en faveur. Et il aurait pu lui dire enfin qu'il l'aimait.
27:38 - Il nous a indiqué qu'il s'était inspiré d'un film que tout le monde connaît, Scream. Sauf que le masque était encore pire que celui de Scream.
27:48 Le Roux prétend qu'il a perdu la tête lorsque Presila s'est enfuie. Mais les enquêteurs ne croient pas à ce scénario sentimentalo-accidentel.
27:57 De nombreux éléments prouvent que le Roux avait méticuleusement préparé son crime et son alibi.
28:04 - Depuis plusieurs semaines, il avait dit à sa femme, alors que c'était son jour de repos, je te préviens, tel jour, jeudi 8 février, je dois aller à la... Donc j'ai besoin d'être seul. Il faut mettre les enfants chez la nounou. C'est ce qui a été fait par son épouse.
28:24 Il avait donc prévu la date. Ensuite, il prépare tout. Le masque, le couteau, le scotch, les gants. Il emmène tout le matériel.
28:36 Puisque la préméditation semble avérée, il s'agit donc d'un assassinat. Le crime le plus grave en droit français.
28:45 - A la fin de la garde à vue, on sait comment il a agi, c'est-à-dire qu'il avait préparé son acte depuis longtemps. Tout est bouclé, il n'y a plus qu'à attendre les preuves formelles, je dirais, de la police scientifique.
28:56 Les comparaisons ADN sont sans surprise. L'empreinte génétique de Didier Leroux correspond bien à celle trouvée à l'intérieur du masque sur la scène de crime.
29:08 - Alors c'est très probant de trouver ces deux traces associées, puisqu'on peut dire qu'en fait, on peut affirmer là que c'est monsieur Didier Leroux qui portait ce masque.
29:18 - Et de trouver des projections de sang de la victime à l'extérieur de ce masque, ça confirme le fait qu'ils ont été en contact et en rapport, en contact suffisamment près pour que les projections de sang puissent se retrouver sur ce masque.
29:35 Les preuves sont là, mais le mobile de l'assassinat reste difficile à déchiffrer. Comment Didier Leroux est-il tombé amoureux de la fille de ses voisins ? Et pourquoi a-t-il finalement décidé de la supprimer ?
29:45 Pour comprendre, il faut remonter à la jeunesse de ses sentiments. A l'époque, Priscilla a 12 ans.
29:53 - La relation entre Priscilla et Didier Leroux va évoluer au fil des années parce qu'ils passent beaucoup de temps ensemble en réalité. Et aussi du temps lorsque la femme n'est pas là.
30:06 - Et très curieusement, alors que bon, ça paraît ahurissant comme ça, mais c'est pourtant comme ça que ça s'est passé, dans l'esprit complètement dérangé de Leroux va naître une attirance.
30:19 - Elle n'est même pas formée, elle est comme toutes les ados de 12 ans, de taille moyenne. C'est vrai qu'elle est très jolie, mais en même temps, elle est coiffée de façon très sage.
30:30 - Elle a une queue de cheval, un chouchou, ou les cheveux laissés au vent. Et voilà, elle n'a pas de tenue affriolante, elle n'est pas effrontée. Ce n'est pas une gosse provocatrice. Non, c'est juste une gosse.
30:44 - Elle n'a pas résolu son oedypse, c'est-à-dire que c'est quelqu'un qui reste avec le fantasme de désirer quelque chose qui est interdit. Il n'a pas accompli ce fantasme, mais le fantasme est resté actif.
30:58 - Tout chez Priscilla est interprété comme le fait qu'elle partage son propre fantasme.
31:06 - Dans les scènes de la vie de tous les jours, il y a des façons d'interpréter les choses. Lui, il les interprète à sa façon, c'est-à-dire qu'à un moment donné, elle va lui amener un café et elle lui tourne son sucre dans le café avec la cuillère.
31:21 - Geste naturel, presque normal pour 99,5% de la population française, du moins je l'espère. Lui, dans sa tête de dingue, pense que c'est un geste d'amour.
31:34 - Il imagine qu'elle se comporte comme une petite femme, comme justement ce que sa femme ne fait pas, parce que sa femme ne lui fait pas le café. Mais Priscilla, elle, ce matin-là, et c'est peut-être son malheur, lui a fait du café, lui a mis un morceau de sucre dans la tasse et a touillé, comme il dit, le café.
31:58 - Donc il met en parallèle sur une balance les gestes de Priscilla et les gestes de sa femme. 12 ans, 40 ans.
32:10 - Et c'est quelque chose qui va, à ce moment-là, créer un déclic chez lui. À partir de cette histoire de café, il va construire une relation amoureuse avec cet enfant.
32:24 Mais cet amour est loin d'être platonique. Didier Leroux désire physiquement Priscilla.
32:29 - Alors le couple premier que Leroux forme avec sa femme, on n'en sait pas grand-chose, on sait juste que sa femme n'a pas les attentions que Priscilla a pour lui.
32:37 - Le couple était dans un état d'échec au moment des faits, essentiellement lié à leurs horaires. Elle était secrétaire, partait le matin et revenait le soir vers 18h. Lui, allait se coucher à 20h, 20h15.
32:53 - Par conséquent, il y a ce deuxième couple qu'il imagine, qu'il fantasme, qui est lui et Priscilla. Et il dit une chose un peu étrange, on vivra ensemble et on vivra mieux.
33:06 - Chez M. Leroux, de façon permanente et durable depuis très longtemps, il encaisse des coups. Mais depuis un certain nombre de mois, et même peut-être depuis 2-3 ans, il encaisse des coups partout.
33:21 - Il encaisse des coups dans sa vie professionnelle. Il est surchargé de travail, il fait des heures supplémentaires, il travaille 12h par jour, il se lève à 1h du matin, il dort 4h par nuit.
33:33 - Il est sous le coup de tensions conjugales fortes. Il a un blocage de la communication avec sa femme. Sa femme le délaisse, le met à distance. Donc il se sent abandonné.
33:48 - Et puis alors, il y a Priscilla. Dans son désert affectif, dans son désert de tout, la seule qui illumine sa vie, c'est elle.
34:02 - Il parlera également d'un fantasme, il se met en situation, il se surprend à espérer, à rêver qu'elle l'observe lorsqu'il est nu dans la salle de bain, par le trou de la serrure, et se laisse aller à quelques gestes pour libérer son propre plaisir. Voilà où on en est.
34:21 - Le roux est persuadé qu'il y a un échange, bien sûr. Il dit "mais bien sûr, elle le savait". Je lui disais "elle était au courant, puisqu'elle venait, elle rodait, elle me cherchait". Et il ira même jusqu'à dire, à un certain moment, "elle m'aguichait".
34:38 - La gamine aime les gâteaux, elle voit un type qui fait des gâteaux, elle s'intéresse à ce type qui fait des gâteaux. Alors est-ce que parce qu'elle le regarde et qu'elle lui fait un grand sourire ou un petit bisou, on peut pour autant, quand on est un esprit normal, imaginer que l'enfant de 10 ans ou de 12 ans nous aguiche ?
34:58 Le roux croit dur comme fer à son histoire. Anecdote à l'appui, il est convaincu que Priscilla partageait ses fantasmes.
35:06 - Il va relater notamment quelques épisodes que sûrement Priscilla n'a pas vécu du tout de la même manière. Un jour, ils étaient chez lui, le roux faisait un gâteau et une crème.
35:21 Et Priscilla l'aide dans les préparations et puis va goûter comme souvent font les gosses, on met le doigt dans la casserole et puis on goûte. Et pour lui faire goûter, peut-être pour savoir s'il y a assez de sucre, assez de farine, je ne sais pas, elle va mettre le doigt dans la gamelle et puis elle va lui tendre le doigt pour qu'il suce le doigt.
35:41 Et là encore, geste naturel, je dirais d'un père qui fait ça à sa fille, lui pense que par ce geste, que ce geste est sexué.
35:52 - C'est la projection du fantasme, c'est l'attitude interprétative et c'est la responsabilisation de Priscilla dans l'érotisation du lien. C'est l'image d'une fédération évidemment que Priscilla serait, selon lui, prête à lui faire. C'est ce qu'il désire, c'est pas ce que veut l'enfant.
36:12 - Donc vous voyez, il y a une méprise totale. Ensuite, il va prendre l'habitude de faire des gâteaux plus systématiquement, là c'est Priscilla qui lui demande, mais c'est lui qui décide de les faire parce qu'il veut lui faire plaisir, soit disant.
36:26 Il lui fait notamment une énorme tarte aux fraises en forme de cœur et il dit "je savais qu'elle aimait les fraises et je lui fais un cœur parce que je suis amoureux d'elle et que c'est ma façon de lui dire que je l'aime et que je suis amoureux et elle le comprend".
36:40 Et puis à l'occasion de l'anniversaire des 13 ans de Priscilla, il amène un gâteau énorme comme ça, comme cadeau d'anniversaire, mais il est pâtissier. Est-ce qu'on s'étonne que le garagiste fasse la vidange si c'est le voisin qui va lui faire la vidange de la voiture ? Voilà.
36:56 Là encore c'est pour lui déclarer sa flamme, soit disant, et soit disant elle comprend, elle reçoit le message "je crois qu'elle a juste reçu le gâteau et voilà elle a mangé le gâteau avec sa famille, elle a rien vu d'autre".
37:09 Mais après, en sachant que l'euro est un pervers effectivement, mais seulement après hélas, on peut se dire peut-être qu'il y avait ces signes qui pouvaient inquiéter.
37:22 Le pervers est quelqu'un qui surinvestit une image sociale qu'il a parfaitement intégrée, qui lui dicte des comportements de normalité. Il est bon père, il est bon tout ce qu'on veut, il est bien sous tout rapport.
37:40 Mais d'un autre côté, il y a ce qui ne doit justement jamais être révélé, le pervers est aussi quelqu'un qui surinvestit sa capacité de dissimulation. Rien ne doit transparaître de sa perversité cachée.
38:00 Entre les 12 ans et les 14 ans et demi, évidemment Priscilla évolue, elle perd le goût d'aller faire des gâteaux chez l'euro, elle a d'autres centres d'intérêt, d'autres préoccupations, donc elle va aussi déménager, les parents ne vont plus être dans le lotissement où ils se sont connus.
38:17 Et du coup, le roux va très mal le vivre, il se sent abandonné, il le dira, elle m'a abandonné, elle a abandonné Marion et elle m'a abandonné aussi. Il ne peut pas supporter d'abord l'abandon et il ne peut pas supporter qu'elle vive sa vie en dehors de cette espèce de vie de couple qu'il s'est imaginé.
38:35 Et il va même plus loin, il va lui déclarer son histoire, il va lui déclarer son amour, il va lui dire qu'il l'aime et elle va rigoler. Et d'ailleurs à partir de là, le compte à rebours est lancé.
38:48 Il prend conscience qu'une relation amoureuse au sens de relation affective, émotionnelle n'est pas possible, mais le fantasme reste actif et ce qui reste, alors, ce n'est plus la relation sexuelle, émotionnelle, mais la fonction sexuelle, la pulsion sexuelle brute.
39:12 Alors l'équation devient, la seule façon que j'aurai de te posséder, c'est de t'abolir.
39:26 Donc si ça ne peut pas être sa chose, c'est typiquement le cheminement des prédateurs, eh bien je supprime la chose. Et il a supprimé Priscilla.
39:36 Tuer, c'est posséder. C'est la forme ultime de la possession lorsque aucune autre forme n'est possible.
39:50 Le Roux, l'auteur de l'assassinat, a préparé son coup et il l'a préparé de longue date. C'est assez effrayant parce qu'on s'aperçoit qu'en réalité ça fait à peu près un an qu'il prémédite son action.
40:04 Et qu'en tout cas, dans les semaines ou au moins dans les jours qui ont précédé, il a rodé autour de la ferme et il a épié sa victime.
40:16 Le matin des faits, ce fameux 8 février, alors qu'il ne travaille pas, que c'est son jour de repos, il va quand même se lever à 6h30 du matin.
40:28 Et il va prendre sa voiture, il va partir. On sait qu'il a préparé un rouleau de scotch dans le coffre de la voiture et qu'il a, d'après ses dires, un couteau sur le siège passager.
40:40 Ses intentions ne sont évidemment pas les meilleures à ce moment-là. Il se cache sous le hangar et c'est effrayant, il voit les parents partir.
40:51 Il voit le père partir à 6h30, il voit la mère suivre à 7h moins le quart. Et là, il sait que la voie est libre. Il sait que Priscilla est seule dans la maison.
41:07 Il veut faire peur à Priscilla, mais pas avec les morceaux de carreaux cassés. Il veut apparaître le visage masqué et il veut que ce soit ce masque qui fasse peur à Priscilla.
41:25 À un certain moment, Priscilla va être alertée par un bruit. Elle entend quelque chose à l'extérieur. Et ce n'est pas la première fois qu'elle entend quelque chose, parce que dans les jours qui ont précédé, elle a déjà entendu des bruits comme ça.
41:45 Elle voit ce masque, ce visage horrible, cette espèce de monstre qui apparaît, et elle ne sait évidemment pas qui c'est. Elle se met à hurler et elle cherche à s'enfuir.
41:59 Elle va sortir de la salle de bain. Elle va finir par s'échapper par la fenêtre du salon. Et elle va courir dans la cour et elle va emprunter le chemin. En fait, elle court tout droit devant elle. Elle est pieds nus, en pyjama.
42:27 Le jour se lève à peine. Priscilla s'élance sur les 600 mètres de chemin goudronné qui relie la ferme à la route départementale. Son unique espoir.
42:37 Elle se met à courir dans la cour. Elle a l'impression d'être en train de se faire dégager. Elle a l'impression d'être en train de se faire dégager. Elle a l'impression d'être en train de se faire dégager.
42:48 Il la repousse peut-être, je ne sais pas. En tout cas, le corps se retrouve sur le bas-côté de ce chemin. Et puis, quand il a terminé son hurle, il s'en va.
43:16 Il va reprendre sa voiture. Il faut quand même être capable de conduire normalement, tranquillement, de reprendre possession de tous ses esprits après avoir poignardé à ce point une enfant de 14 ans et demi, de 60 coups de couteau. Ce n'est pas rien.
43:31 Dans ce contexte massif de régression psychique, il ne s'appartient plus. Une fois que la séquence qui doit aboutir à l'assassinat est enclenchée, il est à la lettre hors de lui. Il ne raisonne plus.
43:47 Cette folie meurtrière passée, il s'en va. Il va mener une vie normale.
43:53 La dissimulation ne lui pose aucun problème. Quelques heures après son crime, Didier Leroux, l'assassin, reprend son masque d'ami fidèle et bienveillant.
44:03 Le soir des faits, c'est-à-dire le 8 février au soir, les parents de Priscillia vont trouver refuge chez l'assassin d'hors-fille.
44:12 Ce n'est pas le loup-garou dont on pourrait se méfier. Non, c'est quelqu'un de normal que vous avez côtoyé tous les jours. C'est une trahison insupportable.
44:23 Ce type, c'était mon pote. Il venait boire des canons avec moi. On dinanait ensemble.
44:29 Il y a en plus une certaine dimension surréaliste, je trouve. Pour les siatis, c'est épouvantable. Il y a déjà la douleur de l'assassinat, la perte de leur enfant, leur vie brisée.
44:44 C'est quelque chose de dramatique à tout point de vue. Ça vous fout une vie en l'air.
44:56 Ce procès doit avoir lieu parce qu'il faut que le roux dise devant eux qu'il a tué leur fille. Et pourquoi ?
45:06 Par conséquent, le procès sert à ça, et c'est ça aussi qu'ils attendaient, de le voir, de le voir pour être capable de passer à l'après s'il peut y avoir un après.
45:18 On est en présence d'une personnalité totalement narcissique, totalement centrée sur elle-même, pour qui la réalité de la personne de Priscilla a totalement disparu.
45:31 Et d'ailleurs, M. Leroux, au moment de l'expertise, a cette phrase absolument sidérante. "C'est terrible ce qui m'arrive." Comme s'il avait eu une espèce de légitimité à agir comme il l'a fait.
45:51 Légitimité du fait qu'il ne serait pas responsable, mais c'est Priscilla qui serait responsable de ce qui lui est arrivé.
45:59 Le procès de Didier Leroux s'ouvre le 12 novembre 2003 à Melun. Deux ans et demi après les faits, le public découvre le vrai visage de l'assassin.
46:08 Alors moi j'ai été très surpris quand j'ai vu Didier Leroux arriver dans le box des accusés de la cour d'assises de Melun, parce que j'avais une photo de lui.
46:17 J'avais trouvé une photo de lui à l'époque des faits, au moment de l'enquête, et je ne l'imaginais pas du tout comme ça. C'est un tout petit bonhomme, petit brun, insignifiant.
46:28 C'est quelqu'un de tout à fait terne, de tout à fait banal. Vous le croisez dans la rue, vous ne le reconnaissez pas.
46:33 Le personnage ne colle pas du tout avec ce qu'on sait du crime.
46:39 Il n'a rien de particulier, il ne réagit pas, et il ne parle pas.
46:44 Ce n'est pas le bon casting, il n'a pas le bon costume, mais c'est lui quand même.
46:48 Mise en accusation pour assassinat, Didier Leroux va d'abord plaider la thèse du scénario d'épouvante qui dérape.
46:55 Une façon de nier la préméditation pour que la peine soit plus légère.
46:59 Je crois que Didier Leroux a voulu s'en sortir. Il ne voulait pas aller en prison, comme assez souvent les personnes qui commettent des infractions, c'est évident.
47:11 Il a essayé quasiment jusqu'au bout de plaider un coup de folie, en disant qu'il était devenu fou amoureux de cette jeune fille, qu'il voulait la voir pour lui parler, et qu'il avait pété les plombs, je crois que c'est sa propre expression.
47:26 Donc la crainte à ce moment-là de la famille, c'est d'imaginer que les juges puissent penser qu'il a pu agir comme ça par des pieds amoureux, et que finalement ça lui fasse peut-être bénéficier de quelques circonstances atténuantes.
47:41 Ça c'est quelque chose qui les épouvante.
47:43 La façon de se défendre de Leroux était de dire "j'avais ces objets sur moi, mais ce n'était pas pour les utiliser, c'était pour lui faire peur".
47:51 Et j'envisageais à aucun moment de les utiliser. J'avais le couteau, j'avais le masque, c'était vraiment pour lui faire peur, pour pouvoir la violer, parce qu'il reconnaissait dès le départ qu'il voulait la violer.
48:02 Mais il disait "si les choses s'étaient bien passées, je serais reparti et elle ne m'aurait pas reconnu".
48:12 Il aurait pu lui raconter des histoires effrayantes, je ne sais pas, il aurait pu même imaginer de se masquer et de lui faire peur derrière un carreau, pourquoi pas, mais dans ces cas-là, si on ne veut pas tuer, on ne prend pas tous les outils qui permettent de tuer.
48:26 Aminima va expliquer qu'il est juste venu pour lui faire peur, le résultat c'est qu'elle a reçu 60 coups de couteau et qu'elle est morte.
48:35 Donc bon, il peut aussi venir expliquer qu'il voulait lui offrir une tasse de thé et ça, ce n'est pas prévu par le code pénal.
48:43 Mais au fil des audiences, le masque tombe. Petit à petit, le roux révèle la vraie nature de son crime.
48:51 J'ai cette liberté par rapport au président qui lui doit rester totalement neutre, de pouvoir peut-être être un peu plus incisif.
48:59 Donc je l'ai interrogé longuement et il a fini par reconnaître qu'il avait prémédité les faits parce qu'il avait, je crois que c'était à propos de gants qu'il avait emporté avec lui.
49:09 Je lui pose la question de savoir pourquoi il avait amené des gants si ce n'était pas prémédité, pourquoi il avait amené un bleu de scotch et là finalement il a fini par craquer.
49:15 Et il a reconnu qu'il avait préparé à l'avance ces faits. Alors restez à déterminer s'il voulait la tuer ou non, mais la thèse qui était la thèse des policiers,
49:25 qu'ils ont repris à l'audience, était qu'il avait de toute façon envisagé de la violer et qu'il savait de façon quasi certaine qu'à partir du moment où il était reconnu,
49:34 puisqu'ils étaient très très proches, il devait obligatoirement la tuer.
49:38 Donc je crois que c'était un processus qui était inscrit bien avant que ce jour-là il aille à la ferme des écrennes.
49:44 Évidemment il y a une énorme différence entre un viol et un assassinat. L'assassinat est irréversible bien évidemment.
49:54 Mais sur un plan psychologique ce sont deux formes proches, ce sont deux façons d'annuler de toute façon la subjectivité, la personnalité, l'affectivité, la liberté de la victime.
50:10 La visée profonde et sa jouissance profonde, à ce moment-là elle est dans la destruction.
50:18 Il s'est découvert, assassin, il s'est découvert dans le plaisir de l'assassinat.
50:22 Et c'est encore une fois très fort, Rosa Syze à un moment donné il a dit "j'ai pris du plaisir en la tuant".
50:29 Donc en prenant du plaisir en tuant quelqu'un, quand on a découvert ça, et c'est le propre des meurtriers en série,
50:35 quand on a découvert ce plaisir-là on a envie de le retrouver, surtout que dans sa vie on n'en a aucun autre.
50:40 Dans cette affaire j'ai requis la réclusion criminelle à la perpétuité.
50:44 C'est une réquisition généralement assez rare, parce que j'estimais que l'individu était extrêmement dangereux.
50:55 Il avait manifesté à l'audience des sentiments de plaisir au moment de la commission des faits.
51:01 Il ne manifestait que très peu de remords et j'estimais qu'il fallait qu'il soit mis hors d'état de nuire pendant un temps relativement long.
51:08 Didier Leroux a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.
51:18 Leur récompense a été de faire un film sur la récolution de la vie de l'homme.
51:23 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
51:27 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
51:32 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
51:37 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
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51:47 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
51:52 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
51:57 Leur récompense a été de faire un film sur la récompense de la vie de l'homme.
52:02 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
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