Jérémie Stutz, de l'association OPAL, sur les garderies associatives

  • il y a 7 mois
De plus en plus de communes rurales alsaciennes voient naitre des associations de parents, qui s'occupent du périscolaire. Elles sont accompagnées par l'OPAL dans leur développement. Jérémie Stutz est chargé de parentalité et associations, ce jeudi 15 février 2024.
Transcript
00:00 Que faire Théo quand la garderie ou la cantine ferme ?
00:03 Dans certains villages alsaciens, ce sont les parents eux-mêmes qui reprennent le flambeau.
00:07 Ils remplacent le service public pour garder de la vie dans leur village.
00:11 Oui, mais est-ce que cette situation est vraiment souhaitable ?
00:14 Bonjour Jérémy Stutz.
00:15 Bonjour, bonjour.
00:16 Vous êtes chargé de développement, parentalité et association à l'Opal,
00:20 qui est une association qui anime des péris scolaires sur le Barin.
00:23 L'exemple de Nadezvillers dont on parle ce matin, c'est loin d'être un cas isolé dans la région ?
00:29 Alors, c'est loin d'être un cas isolé, mais c'est...
00:33 Oui, c'est loin d'être un cas isolé parce qu'effectivement, de plus en plus des petites communes
00:37 ont de moins en moins de moyens.
00:39 Et puis des familles qui reviennent un petit peu dans les communes
00:42 et qui souhaitent effectivement un petit peu se mettre à leur service
00:45 pour pouvoir dynamiser au-delà juste de la question de la cantine, de l'accueil de l'enfant.
00:49 Parce que l'enjeu c'est de garder les écoles ouvertes, c'est ça qui apporte de la vie dans ces villages ?
00:55 Alors, c'est la porte d'entrée en fait.
00:57 La porte d'entrée c'est les enfants, effectivement.
00:59 Et puis après, on se rend compte nous en fait, dans notre expérience,
01:02 que de plus en plus, c'est une première étape qui après en génère d'autres.
01:06 C'est aussi après des associations qui se mobilisent sur Wildersbach,
01:10 avec les lutins de la Servat, pour monter un café associatif.
01:13 Voilà, c'est des effets de boule de neige qui génèrent des effets positifs après, par la suite.
01:17 Mais est-ce que ce phénomène, il faut s'en réjouir ou s'en inquiéter selon vous ?
01:23 Les deux en fait. Je pense qu'effectivement, ce qui nous conduit un petit peu à cette question-là de villages
01:32 qui se dépérissent, qui ont peur que les écoles se ferment, que les familles partent en fait,
01:36 ou mettent leurs enfants ailleurs, dans des plus grandes villes,
01:39 effectivement ça peut inquiéter.
01:40 Et en même temps, je suis assez optimiste parce que je me rends compte que des familles,
01:44 ou des parents en fait, créent du lien ensemble,
01:47 trouvent des solutions ensemble très concrètes à leur échelle en fait.
01:49 Et c'est ce que je trouve moins positif, c'est cette réaction en fait,
01:52 liée à une situation qui semble un peu déprimante en fait, mais qui génère des initiatives.
01:58 Il y a une espèce de sursaut en fait en ce moment dans certains villages,
02:01 où on se dit qu'on n'a pas envie de laisser dépérir des communes rurales ?
02:04 C'est ça. En tout cas, c'est vraiment quelque chose de vachement intéressant parce que
02:08 on nous disait que l'engagement associatif était un petit peu difficile, un peu compliqué en fait,
02:12 et qu'il se perdait un petit peu.
02:13 Bah non, on se rend compte que sur les territoires, y compris très ruraux,
02:16 qu'il y a un renouveau de cet engagement-là.
02:18 Ils se structurent d'abord autour de leurs enfants,
02:20 mais ensuite, ça ruisselle en fait, ça déborde sur d'autres choses.
02:24 - Venez témoigner ce matin sur France Bleu Alsace.
02:26 Est-ce que dans votre commune, il y a eu la disparition de certains services publics ?
02:30 Auquel cas, venez nous dire lesquels.
02:32 Et est-ce que, comme répercussion, il y a eu des citoyens qui se sont mobilisés,
02:37 des personnes comme vous, et donc de l'entraide finalement ?
02:40 Et on l'entend avec Jérémy Stutz, qui est de l'association chargée de développement parentalité
02:46 et association à l'OPA, l'invité de France Bleu Alsace.
02:49 Il répond à vos questions Théo Bauchet.
02:51 - Et on parle bien de parents qui sont bénévoles dans ce cadre-là,
02:54 et qui n'ont même pas tellement de compétences pour encadrer les enfants,
02:58 autre que celle d'être parent.
02:59 - Complètement. C'est vraiment l'intérêt de notre travail, ou en tout cas de notre soutien,
03:03 c'est que nous nous apportons effectivement toute la question de la technique, de l'ingénierie,
03:06 parce que ce sont des parents qui se retrouvent employeurs après,
03:09 où ils peuvent salarier des gens pour accompagner leurs enfants,
03:12 pouvoir être dans le bus, à la cantine.
03:14 Il faut des fois des professionnels pour ça.
03:16 Et nous, notre travail, c'est un petit peu de les accompagner, de les encadrer,
03:20 de les soulager de ça, pour qu'ils puissent vivre pleinement leur engagement bénévole dans leur commune.
03:24 - Et vous en avez régulièrement à l'OPAL, de plus en plus,
03:27 des associations ou des gens qui viennent toquer à votre porte pour avoir de l'information là-dessus.
03:30 - Oui, c'est un mouvement de fond, de petites associations,
03:33 même de très petites associations, on parle de 15-20 bénévoles qui se mettent ensemble.
03:38 Donc oui, c'est un mouvement de fond qu'on voit effectivement sur des territoires un peu plus ruraux
03:43 que sur l'Euro-Métropole, oui, tout à fait.
03:45 - Ces associations, vous le disiez, elles arrivent à aller peut-être un peu plus loin
03:49 que juste la garderie ou que juste la cantine,
03:51 mais est-ce qu'elles arrivent quand même à tenir sur le long terme ?
03:53 Parce que c'est un engagement quand même fort de la part de toutes ces personnes
03:56 qui ont un boulot à côté, qui ont tout ça. Est-ce que ça arrive à devenir pérenne ?
04:00 - Ça arrive à pérenne si tout le monde fait...
04:04 Je vais le formuler comme ça, c'est peut-être maladroit, mais si tout le monde fait son travail,
04:07 c'est-à-dire que ça devient pérenne, sinon on est suffisamment attentif à leur écoute
04:11 pour pouvoir les accompagner dans toutes les tâches administratives,
04:13 dans toutes les lourdeurs, où ça demande beaucoup de techniques en France,
04:17 de pouvoir s'y retrouver.
04:19 Ça tient à long terme s'ils vivent ce qu'ils souhaitent vivre,
04:23 c'est-à-dire de dynamiser leur commune, d'être auprès de leurs enfants,
04:27 et de pouvoir peut-être s'ouvrir à d'autres projets, d'autres démarches.
04:31 - Et ça demande de l'argent aussi ? Ça coûte assez cher à entretenir ce genre de structure ?
04:35 - Alors ça dépend des lieux, ça dépend aussi un petit peu du projet initial.
04:41 Pour nous c'est moins une question d'argent, enfin je ne sais pas comment le formuler,
04:45 c'est beaucoup une question de mobiliser les énergies, vraiment.
04:49 Parce que bien souvent on se rend compte qu'avec des petites choses à droite et à gauche, on arrive.
04:53 Pour nous c'est vraiment d'être très concret, au plus près de leurs besoins,
04:57 et de ne pas monter des usines à gaz, ni de se lancer dans des projets complètement hubuesques ou disproportionnés.
05:03 - Oui mais lorsqu'on salarie des gens, Jérémy Studes, on imagine qu'il y a quand même besoin de les payer,
05:07 il y a des aides pour ces structures-là ?
05:09 - Alors c'est vrai que nous on propose aussi un petit peu de les accompagner au tout départ au lancement,
05:14 parce que quand il y a un premier salaire à verser, il n'y a pas toujours le fonds de caisse, la trésorerie pour pouvoir le faire.
05:19 Il y a des financements auprès de la caisse d'allocation familiale,
05:22 les communes abondent énormément aussi, participent aussi avec beaucoup de force à ça.
05:27 Voilà, c'est un petit peu ces grands enjeux-là.
05:29 - Ça interroge quand même comme fonctionnement de se dire,
05:32 est-ce que c'est le rôle des parents de faire ça, la garderie, la cantine,
05:36 normalement c'est le rôle de la commune ?
05:38 - Alors, je pense que la commune doit être le pilote,
05:44 doit pouvoir diriger ça parce que c'est elle qui a une vision d'ensemble aussi large,
05:48 et de plus en plus on parle d'intercommunalité, de communauté de communes,
05:51 et souvent on a des RPE, des regroupements scolaires qui se font.
05:56 Mais le fait que les parents se mobilisent, ce n'est pas nouveau en fait,
06:01 on l'a vu il y a très longtemps dans les années 50 autour des enfants en situation de handicap,
06:06 c'est quelque chose de très vieux, mais qui trouve une nouvelle forme aujourd'hui,
06:09 beaucoup plus concret sur la commune.
06:11 - Et alors dans ce cas, comment est-ce que vous êtes reçus par les élus locaux
06:15 dans ce genre de situation ?
06:17 Est-ce qu'ils sont plutôt, vous vous êtes vus un peu comme des sauveurs,
06:20 ou est-ce que ça les embête un peu de voir ces associations qui se montent à leur place ?
06:24 - Non, non, du tout, en fait, il y a beaucoup de curiosité, et de surprise surtout,
06:29 et il n'y a pas du tout de défiance parce qu'en fait, pour les élus,
06:33 ils sont eux-mêmes des bénévoles, ils sont eux-mêmes aussi un petit peu dépassés,
06:38 ils souhaitent que les familles restent dans leur commune,
06:40 ils ont des fois un petit peu peu de moyens,
06:42 et donc en fait on travaille ensemble pour pouvoir réexpliquer les choses,
06:45 faire de la pédagogie et lancer les projets.
06:48 - Et vous le disiez, à l'Opal vous constatez que les communes ont moins de moyens
06:52 pour entretenir ces structures aujourd'hui, c'est ce qu'on vous dit sur le terrain ?
06:55 - Oui, tout à fait, c'est des bâtis aussi, des bâtiments qui vieillissent,
06:58 qui ne sont plus forcément adaptés à différentes choses,
07:01 on parlait d'environnement, pouvoir les mettre aux normes aussi,
07:04 c'est aussi ces questions-là, c'est tous ces enjeux-là où on travaille avec eux
07:07 pour les rendre attentifs sur des choses de...
07:10 accueillir une dizaine d'enfants dans des classes, dans des cantines,
07:13 dans des lieux qui ne sont pas toujours appropriés.
07:15 - Et vous-même vous disiez, les maires sont dépassés parfois
07:17 par les responsabilités qu'ils ont, vous-même vous craignez pas d'être dépassé
07:20 si jamais ça fait trop des mules, ces associations-là en Alsace ?
07:25 - Si, si, on ne dit pas où il y a tout, voilà.
07:28 Pour nous, la question c'est vraiment de se retrouver autour de nos valeurs,
07:32 qui sont autour de la solidarité, et aussi de la souveraineté,
07:35 les associations sont souveraines, on propose,
07:37 après elles peuvent ne pas nous écouter, c'est leur droit le plus strict,
07:41 mais aussi pour nous, c'est peut-être des projets sur lesquels on ne se retrouve pas,
07:45 parce que c'est aussi une histoire de rencontre humaine,
07:47 mais oui, c'est aussi tout l'enjeu pour nous d'essayer de regarder,
07:50 de ne pas surcharger mes collègues à l'Opal, que je salue,
07:53 parce qu'ils font un travail énorme pour pouvoir soutenir ces bénévoles, ces familles.
07:58 - Et ça veut dire que pour des parents peut-être qui nous écoutent,
08:01 qu'est-ce que vous conseilleriez de faire si certains sont en difficulté,
08:04 comme les familles qu'on entendait dans nos reportages ce matin ?
08:07 - Alors dans un premier temps, je pense que ce qui est vraiment essentiel,
08:10 c'est de se regrouper, de pouvoir se parler entre parents, entre familles,
08:14 et puis peut-être de premier échange avec la mairie, avec la commune,
08:17 parce que des fois il peut y avoir d'autres projets,
08:20 peut-être des choses qui sont déjà en place dont ils n'ont pas forcément connaissance,
08:23 et puis en fait s'ils veulent vivre quelque chose pour leur commune
08:25 et qu'ils ont l'air de ne pas avoir trop de moyens, ils peuvent nous contacter.
08:27 - Se rapprocher de l'Opal, en effet, où vous travaillez, Jérémy Stutz,
08:31 chargé de développement et parentalité, et association dans cette association.
08:35 Merci d'avoir été avec nous et d'avoir répondu à nos questions ce matin.

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