• il y a 9 mois
Emmanuel Macron s'est rendu ce vendredi à Bordeaux pour la cérémonie de prestation de serment des élèves de l'École nationale de la magistrature.

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Transcription
00:00 Messieurs les ministres,
00:02 mesdames et messieurs les parlementaires,
00:04 monsieur le préfet,
00:05 monsieur le 1er président de la Cour de cassation,
00:09 monsieur le procureur général
00:12 près de la Cour de cassation,
00:13 monsieur le membre du Conseil supérieur de la magistrature,
00:18 madame et monsieur les chefs de cour de Bordeaux
00:21 qui ont permis l'organisation de cette audience
00:23 de recueil de prestations de serment,
00:26 monsieur le maire,
00:29 madame la directrice de l'Ecole nationale de la magistrature,
00:33 mesdames et messieurs les personnalités
00:37 en vos grades et qualités,
00:39 chères auditrices et auditeurs de justice de la promotion 2024,
00:47 chères familles des dix auditeurs de justice,
00:51 mesdames et messieurs.
00:55 En ce jour où je suis venu à Bordeaux parler de justice,
01:00 en ce jour où vous, auditeurs de justice,
01:04 venez prêter serment,
01:07 la nation, vous l'avez rappelé à l'instant,
01:11 a appris la disparition de Robert Badinter.
01:14 Ce jour, dont vous vous souviendrez toute votre vie,
01:20 sera à jamais marqué par l'empreinte de cet avocat
01:24 de caractère et de profession
01:27 qui combattit sa vie durant pour les Lumières,
01:30 pour la justice, pour la France,
01:33 ce qui était pour lui trois fois le nom de son idéal.
01:37 Avocat, il se porta auprès des réprouvés,
01:41 des accusés, des condamnés
01:43 avec cette même soif ardente de justice.
01:47 Garde des Sceaux, il abolit la peine de mort
01:51 et oeuvra pour la rénovation de notre autorité judiciaire.
01:55 Président du Conseil constitutionnel,
01:58 il fut le gardien des lois
02:00 dans toutes leurs forces et leurs grandeurs.
02:03 Il savait dans sa chair ce que l'injustice, l'iniquité,
02:08 les lois vidées de leurs principes humanistes signifiaient.
02:12 La nation a perdu un grand homme.
02:18 Hommage national lui sera rendu.
02:21 Oui, ce jour,
02:25 vous vous en souviendrez toute votre vie,
02:29 toute votre carrière de magistrat.
02:32 Cette prestation de serment parachève
02:35 des années d'études, de travail, de sacrifices,
02:38 vous l'avez parfaitement rappelé.
02:41 Elle est l'aboutissement d'un élan,
02:47 elle scelle une passion.
02:49 Et après le temps de l'espoir et avant celui de la carrière,
02:53 au centre de ce qui vous réunit tous,
02:56 votre vocation à servir la justice,
03:00 notre justice,
03:02 celle de notre République, de notre nation.
03:06 Rien ensuite ne sera acquis.
03:09 Le métier est devant vous,
03:13 dans sa rigueur, dans ses bonheurs,
03:15 avec son exigence,
03:17 mais aussi la part de jugement,
03:20 d'éthique, de déontologie, d'humanisme,
03:23 cela fut rappelé à l'instant.
03:25 Mais d'ores et déjà,
03:28 cette vocation s'est concrétisée.
03:31 Et avoir vos familles avec vous, je sais leur fierté légitime.
03:36 Un fils, une fille, une compagne, un mari, un parent magistrat,
03:41 ce n'est jamais anodin.
03:44 C'est savoir que celui qu'on aime va passer ses jours,
03:47 quelques fois ses nuits,
03:49 dans une oeuvre souvent obscure
03:51 pour nombre de nos compatriotes,
03:54 mais déterminante.
03:56 Qu'il est désormais,
03:58 pour tous ceux qui viendront placer entre ses mains
04:00 un litige, une douleur, un chagrin,
04:03 le visage de la République.
04:06 Oui, vous vous souviendrez de ce jour toutes vos vies,
04:10 car vous avez prononcé les mots du serment,
04:14 vous avez juré à l'instant la main droite levée
04:18 de garder le secret professionnel
04:20 et de vous conduire en tout
04:22 comme un digne et loyal auditeur de justice.
04:25 C'est un serment fait au peuple français
04:28 que vous servez désormais.
04:31 Un serment fait au nom de la conception républicaine
04:35 de notre justice.
04:37 Autorité qui applique les lois que le peuple s'est choisi,
04:43 le respect des principes fondamentaux de notre droit
04:46 à la lumière de nos traditions et nos valeurs.
04:49 C'est aussi un serment à vous-même.
04:53 Être fidèle à l'auditeur de justice
04:56 que vous êtes en cet instant,
04:59 avec sa part de doute,
05:01 ce supplément inentamé d'idéal,
05:04 d'envie de servir,
05:07 délesté de tout préjugé, de toute lassitude,
05:10 de tout accommodement,
05:13 résolu à oeuvrer,
05:15 à penser parfois contre soi-même,
05:18 indépendant vis-à-vis de tout,
05:21 esprit de corps, passion publique,
05:24 sentiments personnels,
05:26 seulement guidés
05:28 par le sens de votre fonction.
05:31 J'ai tenu à me trouver parmi vous aujourd'hui
05:35 pour vous dire d'abord cela
05:38 et parce qu'il s'agit aussi
05:41 d'un jour majeur pour notre nation.
05:43 Vous constituez en effet
05:45 la promotion la plus importante
05:48 de l'histoire de notre République.
05:50 Tel est le sens de cette promotion,
05:53 redonner à notre justice les moyens de faire
05:56 laquelle fut si longtemps sous-dotée.
05:59 C'est un effort massif, inédit de la nation,
06:03 et dans une institution où il est courant de dire
06:06 que l'on manque de place,
06:09 la justice a dû pousser les murs
06:10 et tenir cette prestation de serment ici,
06:12 dans le palais des congrès,
06:14 plutôt qu'à la cour d'appel de Bordeaux,
06:16 tant cette promotion de l'Ecole nationale de la magistrature
06:19 est importante,
06:21 la plus importante, donc,
06:23 depuis la création de l'école en 1958.
06:27 Vous voilà 459
06:32 qu'en certaines années, il n'y a pas si longtemps,
06:35 les promotions ne comptaient
06:38 que centaines d'auditeurs de justice.
06:40 Ceci est le fruit de vos travaux
06:45 et nombre d'entre vous les ont nourris
06:47 et je vous en remercie,
06:49 ceux des Etats généraux de la justice
06:51 qui ont ensuite conduit à des engagements
06:53 que j'ai pu prendre, parole tenue.
06:56 Autant de futurs substituts du procureur de la République,
07:01 de juges qui épauleront les magistrats
07:03 du parquet et du siège dans toutes les juridictions de France
07:07 d'ici 30 mois.
07:08 Cet effort de la nation représente,
07:10 sans aucun doute,
07:12 une opportunité,
07:14 mais aussi pour vous, une responsabilité,
07:17 constituer l'avant-garde
07:20 de cette transformation de notre justice
07:22 que porte la nation.
07:24 Ce réarmement est la traduction concrète
07:29 de notre volonté de redonner à la justice
07:31 les moyens dont elle manquait cruellement.
07:35 Depuis 2017, les moyens de la justice
07:36 sont augmentés de moitié
07:39 et en 2027, nous aurons augmenté
07:42 le budget de la justice de 60%.
07:45 En 7 ans, nous avons déjà recruté
07:48 1 000 magistrats et 1 050 greffiers.
07:51 Depuis 2020, nous avons recruté 2 400 contractuels
07:56 qui viennent en soutien aux magistrats et greffiers.
07:59 Ces contrats sont transformés en CDI
08:02 et nous avons créé la fonction d'attaché de justice.
08:04 D'ici 2027,
08:07 nous recruterons en plus
08:10 1 500 magistrats, 1 800 greffiers
08:13 et au moins 1 100 attachés de justice.
08:16 Jamais la nation n'avait consenti un tel effort.
08:21 Nous avons mis fin à 30 ans
08:25 de sous-investissements et ce faisant
08:28 d'abandons humains, budgétaires
08:31 et financiers.
08:33 Mais là où, de manière légitime,
08:37 nos compatriotes demandent la sécurité,
08:39 une vie tranquille,
08:41 souvent, il avait été oublié,
08:44 il faut évidemment, pour cela,
08:47 réarmer nos forces de sécurité intérieure,
08:50 ce qui est fait en parallèle, là aussi,
08:52 par une loi d'orientation, une loi de programmation,
08:55 mais qu'il faut, dans le même temps,
08:57 permettre à notre justice
09:01 de pouvoir instruire et juger
09:05 points de sécurité et points de vie tranquille
09:08 sans un tel investissement.
09:11 Ce réarmement judiciaire s'est aussi accompagné
09:14 de la modernisation de notre droit
09:16 pour gagner en célérité, en effectivité des peines,
09:20 suppression du rappel à la loi,
09:21 augmentation des moyens donnés
09:23 aux travaux d'intérêt général,
09:24 création du Code de la justice des mineurs
09:27 et j'en passe.
09:30 Nous traversons,
09:32 vous l'avez d'ailleurs rappelé,
09:34 un instant,
09:36 un moment de bascule,
09:39 des grandes mutations technologiques,
09:41 géopolitiques aussi, climatiques,
09:43 qui créent du trouble
09:45 et suscitent de plus en plus la violence
09:47 dans notre société.
09:49 Nous avons, plus encore que Naguère,
09:52 besoin de sens, de règles,
09:55 de restauration de l'ordre
09:57 sans lequel aucun programme de justice
09:59 ni de progrès n'est possible.
10:01 L'ordre et le progrès sont bien à la racine
10:03 de notre République,
10:05 de ses principes même.
10:07 C'est pourquoi j'ai engagé
10:11 ce réarmement de l'Etat,
10:13 réarmement de nos forces de sécurité intérieure
10:15 avec la loi de programmation,
10:17 réarmement de nos armées,
10:19 réarmement de l'autorité judiciaire.
10:22 Nos institutions sont rongées par le doute
10:25 et soyons lucides,
10:27 nos compatriotes,
10:28 vous l'avez là aussi rappelé,
10:30 doutent de leur justice.
10:32 Quand 60% des affaires
10:34 ne sont pas celles qui font les gros titres des journaux,
10:37 dans le quotidien du pays,
10:39 la justice paraît trop longue,
10:41 parfois trop fragile.
10:43 Je pense à ces dossiers du droit de la consommation,
10:45 de la famille, des pensions alimentaires,
10:47 de l'autorité parentale, des tutelles,
10:49 de la protection des mineurs.
10:52 Je pense à ces faits de délinquance du quotidien,
10:55 délinquance qu'on dit parfois petite ou moyenne,
10:59 mais dont les conséquences sont immenses pour chaque victime.
11:03 Chaque fois, il s'agit du dossier d'une vie
11:08 pour les justiciables,
11:10 pour lesquels ils attendent une réponse de l'Etat.
11:13 Alors, pour réconcilier nos concitoyens
11:15 avec l'autorité judiciaire,
11:17 pour être à la hauteur aussi du moment que nous traversons,
11:21 il faut que notre République
11:24 gagne la justice avec rapidité,
11:28 efficacité et responsabilité.
11:32 Rapidité d'abord,
11:34 car dans une époque d'accélération,
11:37 le temps de la justice est par essence trop long.
11:40 Nous devons savoir garder cette vision de long terme.
11:43 Elle est essentielle.
11:45 Mais si la justice ne gagne pas en efficacité,
11:48 en proximité, en célérité,
11:50 alors qu'on se le dise,
11:52 chacun trouvera toujours d'autres moyens de juger les litiges.
11:55 Chacun les trouve d'ailleurs déjà
11:58 par l'opprobre médiatique, par le bannissement social
12:01 au mépris de la présomption d'innocence
12:03 dans notre vie publique,
12:05 ou par la vengeance, l'abus de pouvoir,
12:08 la violence dans la vie quotidienne.
12:11 Or, notre République s'est bâtie sur l'idéal inverse.
12:15 Très clairement.
12:21 Celui des droits et des libertés,
12:25 celui des services publics qui protègent et tiennent la nation.
12:30 Nous devons donc diviser les délais de notre justice
12:33 par deux d'ici à 2027.
12:36 Ce n'est pas un objectif, c'est un impératif,
12:39 un impératif que porte le garde des Sceaux.
12:42 Ce n'est pas un impératif provenant du pouvoir politique,
12:45 mais bien du peuple français,
12:47 au nom de qui la justice est rendue.
12:52 Lorsqu'autant de moyens sont attribués à un service public
12:55 aussi important, notre responsabilité à tous
12:58 est que ces moyens soient suivis des faits.
13:01 Les citoyens français ne pourraient comprendre l'inverse
13:04 et la confiance ne ferait que s'effriter davantage.
13:08 Dans cet esprit, j'ai voulu, avec le garde des Sceaux,
13:11 que nous progressions sur la simplification
13:13 des procédures pénales ou civiles,
13:16 notamment pour ces dernières, avec le déploiement plus massif
13:19 des procédures amiables.
13:21 Nous avons aussi poursuivi, accéléré la numérisation.
13:26 Là aussi, c'est un travail, vous l'avez parfaitement rappelé,
13:29 qui ne doit pas enlever l'humanité de la fonction.
13:34 Mais tant de temps est à gagner
13:38 pour nos policiers, pour nos gendarmes,
13:41 pour nos greffiers, nos magistrats,
13:43 par la numérisation de la plainte et des procédures,
13:46 parce que nous sommes en train de déployer,
13:47 avec une modernisation inédite,
13:50 50% des procédures pénales sont d'ores et déjà...
13:53 seront dématérialisées d'ici la fin d'année,
13:55 en même temps que sera généralisée totalement
13:59 la plainte en ligne à l'été, etc.
14:04 J'ai aussi fixé l'objectif qu'en 1re instance,
14:07 à la fin de ce quinquennat, les décisions de justice
14:10 soient rendues en moins d'un an de délai.
14:12 C'est déjà le cas dans plusieurs tribunaux,
14:15 cela doit être le résultat bientôt partout en France.
14:19 La rapidité, donc, pas pour de la précipitation,
14:25 pour garder le temps aux affaires les plus complexes,
14:28 sur lesquelles celui-ci est légitime,
14:31 mais pour garder à l'esprit que cette rapidité
14:35 est source de légitimité.
14:38 Rendre la justice avec efficacité et effectivité,
14:42 c'est le mot même aussi que j'avais utilisé
14:44 il y a quelques années à Agen, quand je m'étais exprimé
14:48 devant plusieurs d'entre vous.
14:50 Je ne parle pas, évidemment, des éditeurs de justice,
14:53 vous êtes trop jeunes pour cela,
14:55 mais plusieurs ici présents, sur la peine.
14:58 Une justice forte, en effet,
15:01 n'est pas une justice aveuglement répressive,
15:04 c'est une justice de proximité et d'efficacité,
15:08 mais dont les peines sont effectives.
15:11 Nous avons pour cela supprimé les remises de peines automatiques,
15:15 nous avons son aussi à marche forcée
15:18 pour la livraison du programme de construction
15:20 des 15 000 places, que nous avons même porté à 18 000,
15:23 avec la livraison depuis 2017 de 19 établissements pénitentiaires.
15:28 L'un d'entre eux est tout près d'ici.
15:31 C'est tout le sens aussi du colossal travail engagé
15:35 sur les travaux d'intérêt général
15:37 dont le nombre de places a doublé.
15:39 Une sanction doit s'appliquer, une peine s'effectuer,
15:43 un jugement rétablir l'ordre républicain et démocratique.
15:47 Et avoir la réponse pénale apportée aux émeutes de l'été dernier,
15:50 notre justice a été à la hauteur
15:53 de cette exigence de fermeté et d'efficacité.
15:57 Les chiffres sont là qui le démontrent,
15:59 les faits sont là qui le démontrent,
16:02 et il ne faut laisser aucun commentaire fallacieux s'installer.
16:07 Cette exigence doit nous pousser à aller encore plus loin,
16:10 en particulier en termes de restauration de l'autorité
16:14 chez les mineurs délinquants,
16:16 et plus largement en continuant de réformer,
16:21 transformer l'administration pénitentiaire,
16:25 le travail d'intérêt général,
16:27 et le garde des Sceaux aura l'occasion dans les semaines à venir
16:31 de revenir sur ces sujets.
16:34 Une justice forte, effective,
16:38 n'est pas une justice figée dans des formes
16:40 ou des idées du passé, c'est une justice qui se modernise.
16:44 Et c'est ce que, collectivement, nous sommes en train de faire
16:47 au gré des préoccupations et des aspirations légitimes de l'époque.
16:52 D'abord, en engageant un effort de proximité,
16:55 en créant, au cours du précédent quinquennat,
16:58 les tribunaux de proximité,
17:00 c'est-à-dire en réouvrant des sites judiciaires fermés autrefois
17:04 afin de rapprocher la justice des citoyens
17:07 et en demandant aux magistrats de multiplier les audiences foraines.
17:11 Ensuite, en simplifiant le traitement
17:14 des demandes d'aide juridictionnelle,
17:16 auquel il sera bientôt partout répondu en moins de 5 jours.
17:20 Nous avons su nous saisir des enjeux
17:23 qui traversent notre société
17:25 avec l'accent que j'ai voulu porter sur les violences faites aux femmes,
17:29 la lutte contre le trafic de stupéfiants
17:32 et les plaintes commises contre les élus.
17:35 Enfin, moderniser notre justice, c'est l'ouvrir à tous les talents.
17:41 Les magistrats doivent être à l'image du pays
17:44 dans la diversité de leurs origines sociales,
17:47 géographiques ou professionnelles.
17:49 C'est un effort d'ouverture déjà largement commencé
17:53 et qui va s'amplifier avec la simplification
17:56 et la diversification des modes de recrutement.
18:02 Je suis un magistrat de la justice avec et en responsabilité.
18:07 Je ne confonds pas l'indépendance et l'irresponsabilité.
18:13 En République, le peuple est souverain
18:17 et vous rendrez bientôt la justice en son nom.
18:20 Or, le serment de magistrat oblige ce dernier
18:24 à remplir ses fonctions avec indépendance, impartialité,
18:28 et à se comporter en tout comme un magistrat digne,
18:32 intègre et loyal, et de respecter le secret professionnel
18:36 et celui des délibérations.
18:38 Cette exigence dans le passé, même si les cas sont marginaux,
18:43 n'a pas toujours été respectée scrupuleusement,
18:46 et le Conseil supérieur de la magistrature joue,
18:49 et doit jouer à cet égard un rôle essentiel,
18:52 de gardien du respect du serment.
18:55 Se joue là aussi la confiance que tout un chacun doit avoir
19:00 en l'impartialité des magistrats,
19:02 mais aussi en leur strict respect de leurs devoirs de réserve,
19:06 gage de leur indépendance d'esprit et de jugement.
19:09 La liberté d'expression des magistrats
19:13 est une liberté constitutionnelle,
19:16 et nul ne doit songer à la remettre en cause.
19:19 Mais elle doit avoir pour corollaire
19:21 un déport systématique de leur part
19:24 pour juger un dossier,
19:25 dès lors que leur parole publique antérieure
19:28 fait légitimement douter le justiciable concerné,
19:31 qu'il va être jugé par un juge impartial.
19:34 Sur la question de l'expression publique individuelle ou collective,
19:39 mais aussi du droit de grève,
19:41 le garde des Sceaux a engagé une réflexion
19:44 dans le cadre aussi de l'élaboration
19:46 de la charte de déontologie des magistrats
19:50 prévue par la récente loi organique du 20 novembre 2023.
19:54 Je souhaite que cette réflexion se poursuive et s'amplifie
19:59 pour aussi adapter notre cadre
20:02 à la société médiatique et technologique
20:05 qui change profondément les usages.
20:08 Tout cela aussi est le fruit
20:11 des Etats généraux de la justice lancés à Poitiers.
20:17 Je l'ai dit, aujourd'hui est un jour que vous n'oublierez pas,
20:20 un jour que la nation n'oubliera pas,
20:23 celui où s'est levée une nouvelle génération de magistrats.
20:28 Mais à votre tour, vous serez pour beaucoup de nos concitoyens,
20:34 les acteurs et les témoins
20:37 que chaque justiciable n'oubliera jamais.
20:42 Une audience, celle d'aujourd'hui, dont il aura été une des parties,
20:46 le règlement de leur divorce, un témoignage qu'ils auront trouvé
20:49 le courage de vous livrer, une conciliation
20:52 où leur tourment financier et leur destin se décideront.
20:55 Comme je le disais tout à l'heure, oui,
20:58 à chaque fois, dans chaque dossier,
21:01 c'est un peu de la question de ce que nous sommes,
21:05 c'est-à-dire une République qui se joue.
21:08 Et en République, force doit rester à la loi,
21:13 expression de la souveraineté du peuple.
21:16 La loi qui protège contre la violence, l'abus,
21:19 l'empire du plus fort sur les plus faibles,
21:22 la loi qui civilise, sanctionne
21:26 et remet dans le droit chemin.
21:29 La loi comme rempart du droit pour protéger les libertés
21:32 face à la calomnie ou la rumeur
21:35 qui ne frappe qu'après un jugement.
21:38 La loi, rien que la loi, mais toute la loi.
21:42 Le droit, rien que le droit, mais tout le droit
21:45 dans ses procédures, dans ses garanties,
21:48 dans son exigence et ses scrupules.
21:51 Notre justice est placée sur ce fil
21:55 qui traite le sens de votre métier.
21:58 Service public dont nos concitoyens attendent
22:01 beaucoup et vite, autorité qui ne saurait
22:05 laisser prospérer l'anomie et le désordre,
22:08 institution qui oppose la rigueur aux passions,
22:13 l'espérance de réinsertion à la vindicte,
22:17 la vigueur des principes face aux emportements des foules.
22:21 Cette contradiction féconde ne se résoudra qu'avec une justice
22:26 plus efficace, plus effective, plus proche et rapide.
22:30 La confiance de nos concitoyens sera donc pour vous,
22:33 pour nous tous, un combat permanent
22:36 et sans cesse recommencé.
22:39 Et puisque nous sommes à Bordeaux, je reprendrai
22:42 un mot de François Moriac.
22:45 La civilisation d'un peuple se mesure
22:47 à la situation de sa justice.
22:50 Une justice forte est la fierté de notre peuple.
22:54 Je crois aussi, pour compléter le théorème,
22:57 que la confiance du peuple dans sa République
23:01 se mesure à la situation de sa justice.
23:05 Confiance dans un service public qui rend bien,
23:09 vite et au miroir de nos valeurs une justice du quotidien.
23:13 La République a confiance dans sa justice
23:16 et les moyens qui lui sont accordés le montrent.
23:19 Et j'ai confiance en vous,
23:21 car je sais que vous serez à la hauteur de ces choix.
23:26 Les vents mauvais reviennent et vous aurez à vivre.
23:33 Dans cette époque ou dans notre Europe,
23:38 il existe des régimes
23:41 qui remettent en cause l'Etat de droit.
23:44 Vous aurez à vivre comme magistrats
23:49 dans une époque où des voix s'élèveront
23:53 pour dire que la justice est la source de tant de problèmes
23:57 et chercher à saper votre légitimité.
24:01 Vous vivrez dans une époque
24:06 où certains chercheront à expliquer
24:10 que ne pas respecter une décision de justice
24:15 serait, en fait, vraiment respecter le peuple souverain.
24:19 Vous aurez à vivre dans une époque, oui,
24:23 où les vents mauvais se sont à nouveau levés
24:30 et où, s'installant sur le doute,
24:35 certains chercheront à vous bousculer
24:38 et, ce faisant, à nous bousculer.
24:42 Alors il vous appartiendra,
24:46 en tant qu'autorité, institution,
24:49 mais chacune et chacun d'entre vous comme magistrats,
24:53 de rester loin de ces vents et de ces passions tristes,
24:58 de douter toujours,
25:04 mais de porter cette part d'espérance
25:08 de notre République et de notre nation,
25:11 celle qui a besoin d'une justice,
25:17 de ces rituels au service de notre loi,
25:22 celle qui a besoin d'une justice indépendante,
25:26 forte,
25:31 pour continuer à croire et à vivre ensemble.
25:35 Car c'est cela,
25:37 une République,
25:40 c'est cela, notre République et notre nation.
25:44 Et en ce moment précis, pour ces raisons mêmes,
25:49 je suis fier de l'investissement
25:51 que la nation a consenti ces dernières années
25:54 dans notre justice.
25:56 Je suis fier que vous toutes et tous
25:59 l'incarniez aujourd'hui à travers votre promotion.
26:03 Et je sais que chacune et chacun d'entre vous
26:07 relèvera l'un de ces défis,
26:12 celui de votre génération,
26:14 tenir ferme
26:17 au service de la République française,
26:20 au service de la France.
26:22 Vive la République, vive la France.
26:25 (...)

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