Utiliser la démocratie participative pour lutter contre la pédocriminalité. C'est initiative lancée par l'association Mouv'enfant qui a arrêté sa caravane hier à Marseille au sein de l'hôtel de ville. ...
Vidéo publiée le : 08/02/2024 à 15:49:00
Lien vers l'article de Maritima.info :
https://www.maritima.info/actualites/societe/marseille/15859/lutte-contre-la-pedocriminalite-mouv-enfant-a-arrete-sa-caravane-a-marseille.html
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00:00 C'est quoi l'objectif aujourd'hui de MoveEnfant ?
00:02 L'objectif de MoveEnfant à travers cette caravane c'est d'aller à la rencontre en fait sur les territoires des professionnels, des actrices, acteurs de tous les secteurs.
00:09 Protection de l'enfance, police, justice, enseignement, on a même des pharmaciens d'ailleurs ici qui sont présents et des survivantes et survivants et leurs alliés et de se dire
00:18 évidemment on a besoin d'une forme de réparation collective. Pourquoi réparation collective ? Parce qu'on parle de 10% de la population française qui est victime de violences sexuelles dans son enfance
00:27 et donc ça signifie qu'il y a des choses que la société n'a pas vues. L'idée de l'action aussi c'est aussi de mettre en avant que sur tous les territoires, parce qu'on se déplace en 45 villes,
00:35 il y a des ressources et ces ressources à Marseille elles sont là, elles sont bien présentes et les difficultés bien souvent c'est quoi ? C'est de la coordination, c'est un manque de formation,
00:44 un manque de moyens, un manque de professionnels etc. Par contre on a des gens qui sont motivés et donc c'est important de comprendre en fait ce qui aujourd'hui ne convient pas,
00:51 de voir si nécessaire qu'il y ait des remises en question des pratiques professionnelles mais aussi de faire remonter le manque de moyens et ce sur quoi les gens voudraient que l'État agisse.
01:00 Comment on peut parler quand on est parent, quand on est enseignant, quand on est tata, tonton, comment on peut parler à son enfant de sujets aussi compliqués ?
01:10 En fait il faudrait qu'on puisse en France apporter un message fort que les Québécois ont déjà fait il y a quand même plus de 30 ans, mon corps c'est mon corps.
01:17 Donc déjà qu'on puisse commencer à avoir cette capacité à transmettre à l'enfant que son corps lui appartient et voir effectivement ce que ça signifie.
01:27 La vraie difficulté que vous posez c'est que finalement il faudrait que ce soit l'État qui impulse quelque chose en matière de soutien aux parents,
01:33 de se dire évidemment quand on est parent avec toutes les inquiétudes qu'on peut avoir finalement comment on fait ? Et le comment on fait ça nécessite aussi des moyens,
01:39 c'est à dire que ce n'est pas juste on transmet une information, on met quelque chose dans le carnet de santé même si je pense qu'il faut mettre des choses dans le carnet de santé,
01:45 comme des bons numéros comme le 119 etc. C'est à dire que quand on a un doute, pas de doute, allo enfants sans danger. Mais je pense que ce n'est pas que ça.
01:51 En réalité les parents soucieux de l'avenir de leur enfant, du bon grandissement, se posent plein de questions et très souvent démunis.
02:00 J'ai été marqué d'ailleurs à Marseille, c'est important de le dire comme ça, je crois que je n'ai jamais eu autant de témoignages, notamment ici on a eu des grands-mères qui sont venues s'exprimer,
02:06 de petites filles qui avaient été victimes d'inceste etc. Et des témoignages mais poignants qui montrent bien aussi tout le traumatisme pour les grands-parents eux-mêmes
02:16 confrontés à cette réalité de l'inceste, des violences sexuelles et on n'en parle pas assez. Et je pense que c'est tout ça en fin de compte qu'il va falloir prendre conscience collectivement
02:24 et ça fait partie des attentes. J'ai rencontré aujourd'hui un peu plus de 800 personnes sur les 18 étapes que j'ai faites et on voit bien que les gens sont en tout cas hyper concernés par le sujet.
02:35 Maintenant il faut agir et c'est ce que les gens veulent.
02:37 C'est quoi le bilan de ces rencontres que vous avez faites avec des familles qui ont été touchées de près ou de loin ?
02:42 Le bilan c'est l'incompréhension bien souvent. J'en vois encore les propos ce matin d'une personne, ça m'a marqué, c'est-à-dire que la personne dit "mais c'était impossible".
02:53 Ça ne pouvait pas arriver chez nous ?
02:55 L'inceste c'est toujours chez les autres. Et quand ça nous arrive, on ne sait pas. Et elle c'est une maman qui a eu le bon réflexe parce qu'elle a protégé sa fille.
03:04 Donc on s'est retrouvé dans quelque chose qui n'était pas simple mais elle a eu le bon réflexe.
03:09 Il y a beaucoup de parents en fait face à cette situation. Qu'est-ce qu'ils font ? Ils baissent les bras, ils ne savent pas trop comment réagir. Ils font comme ils peuvent.
03:19 Et à force de rire, des fois ils ne font pas forcément bien parce que la culture de la protection, on ne l'a pas en France et c'est bien tout le sens aussi de cette caravane.
03:27 Impulser une vraie culture de la protection des enfants. Et on voit bien qu'on n'est pas du tout là-dessus.
03:31 Aujourd'hui on est plus à se renvoyer un message, on le voit bien dans les campagnes de pub. On dit souvent "les enfants ont un secret".
03:37 Or la commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants qui a recueilli 30 000 témoignages, qu'est-ce que les gens nous ont dit ?
03:44 Tous les enfants parlaient. En fait les enfants parlent et nous ne sommes pas en capacité de les protéger.
03:49 Donc plutôt que de dire, de renvoyer des campagnes de communication qui viseraient à dire que les enfants cachent quelque chose, etc.
03:56 Je pense qu'il faudrait qu'on passe un autre message, un peu plus responsable, qui viserait surtout à dire de manière très simple "nous devons protéger les enfants".
04:03 Et je pense que ça c'est essentiel et c'est ce qu'on fait en fait à travers cette initiative.
04:06 Moi ça me tient particulièrement à cœur aussi parce que j'ai été victime moi quand j'étais enfant d'un double inceste.
04:10 Et je me dis que comme beaucoup de victimes, quand on prend la parole, c'est pour que la société fasse en sorte que ça n'arrive à plus aucun enfant.
04:20 C'est important que nous on soit ici, éradiquer la pédocriminalité. C'est un objectif ambitieux.
04:25 Mais on peut avoir un objectif ambitieux quand on voit effectivement le carnage que ça fait par la suite.
04:31 Estimez-vous que l'État aujourd'hui fait ce qu'il faut ?
04:33 Non, j'estime que l'État ne fait pas assez. C'est-à-dire que l'État a un discours de com'.
04:36 Moi je pense que la société bouge, évolue, on le voit bien. Il y a quand même des langues qui se délient.
04:40 J'étais juste avant en Corse où j'ai vu plus de 200 personnes.
04:42 Et je pense que les gens sont complètement démunis, il n'y a pas assez de moyens, etc.
04:45 Et ce n'est pas une priorité de l'État, alors même que 1) ça concerne 10% de la population française, ce qui est pas rien.
04:51 2) c'est un coût, c'est ce que la Civis avait évalué, 9,7 milliards quand même.
04:55 On évalue quand même le coût aujourd'hui du déni, c'est 9,7 milliards.
04:58 Aujourd'hui les professionnels manquent de coordination, manquent d'objectifs clairs, nets, précis, pour être en capacité d'avancer.
05:04 Y compris par moment d'ailleurs en matière de ne serait-ce que le circuit pour protéger les enfants, les signalements, etc.
05:10 Il y a des choses qui ne sont pas claires.
05:11 Et c'est de ça en fait que les gens viennent parler et donc on se rend compte que l'État n'est pas à la hauteur des enjeux.
05:16 Là où les citoyennes et les citoyens, eux le sont, parce qu'ils sont bien présents aujourd'hui.
05:20 Dernière question, j'ai vu des représentantes d'associations féministes aussi qui sont là.
05:24 La cause des femmes aussi, quand vous parlez, quand vous dites "mon corps", "mon corps", etc.
05:28 Il y a un écho quand même aussi à ce combat-là.
05:30 Il faut savoir que 80% des victimes sont des filles.
05:33 Ça veut dire que les violences sexuelles faites aux enfants sont des violences sexuées.
05:37 Et malheureusement, quand on connaît malheureusement les chiffres aussi des violences faites aux femmes,
05:41 on se rend compte que finalement il n'y a pas de hasard.
05:43 On commence à maltraiter, gérer les filles massivement et après la société maltraite mal forcément les femmes.
05:49 On se dit que si on veut vraiment changer les choses, il faut commencer dès le début.
05:52 Et peut-être qu'en commençant par de l'éducation, notamment, il y a beaucoup de choses aujourd'hui qui ont été dites sur la question de la virilité.
05:59 Par exemple, comment est-ce qu'on déconstruit cette question de la virilité de la manière dont on pense les garçons, les hommes,
06:04 qui sont très dans l'aspect public et donc la place des femmes également et des filles.
06:07 C'est un enjeu de société majeure sur une culture.
06:10 Aujourd'hui, il y a une culture du viol qui est plus supportable, culture de la pédocriminalité,
06:14 parce qu'il y a des choses qui sont inacceptables dans la manière dont on pense les choses collectivement.
06:20 Et je pense que c'est important que les gens se disent qu'on repart d'ici, de cette journée, avec des solutions.
06:25 Parce que ce n'est pas uniquement un échange, c'est aussi un moment où on peut trouver des solutions collectivement.