La chambre d'instruction de la cour d'appel de Toulouse étudie depuis le 18 janvier la demande de supplément d'information judiciaire prononcée par le procureur général, notamment concernant l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre un ancien détenu de la prison de Seysses, où est détenu Cédric Jubillar, et un proche. Une décision doit être rendue ce jeudi. L’enquête pourrait être rouverte et la perspective d'un procès fin 2024 s'éloigner.
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00:00 On va essayer d'être simple et concret Adeline.
00:03 Il y a trois éléments qui peuvent justifier cette réouverture de l'enquête.
00:07 D'abord cette conversation enregistrée à la prison de Lannemezan entre un détenu et sa mère.
00:13 Le détenu a côtoyé, on le sait, Cédric Jubilar dans le quartier d'isolement, dans la même prison.
00:19 Dans la conversation, il dit à sa mère qu'il est étonné par le renvoi de Cédric Jubilar devant les assises.
00:25 Deuxième élément qui pourrait être décisif,
00:27 il y a un homme qui signale notamment la présence puis la disparition mystérieuse d'une pelleteuse
00:32 près du domicile des Jubilar au moment des faits.
00:36 Puis le troisième élément, c'est le témoignage d'un voyant, d'un médium.
00:41 Il s'est manifesté très récemment auprès des gendarmes.
00:45 Il dit avoir eu des visions sur la localisation de la dépouille de Delphine Jubilar.
00:50 Alors c'est donc une audience à huis clos qui va se tenir ici devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse.
00:56 Les avocats ne seront pas présents. Maître Alary est à Albi pour une garde à vue.
01:01 Les deux autres avocats de Cédric Jubilar sont présents au procès de Trebb à Paris.
01:07 Décision à huis clos. C'est un moment très important, pivot dans cette enquête.
01:13 Soit il y a une réouverture et ça va prendre du temps,
01:17 soit on passe directement assez rapidement au procès qui pourrait arriver à la fin de l'année.
01:22 S'il y a réouverture de l'enquête, ça veut dire encore des mois et des mois d'audition, de confrontation.
01:27 Ça ne veut pas dire un procès avant au moins 2025.
01:31 - Alexandra Conrad, je pense qu'il faut reprendre ces éléments dans le détail, notamment le premier.
01:34 Cette conversation-là entre un détenu, la mère d'un détenu.
01:40 Expliquez-nous ce qui s'est dit et ce qui intrigue.
01:42 - Alors un détenu appelle sa mère via les téléphones de prison.
01:48 La conversation est sur écoute. Le sait-il à ce moment-là ? On ne le sait pas.
01:52 En tous les cas, dans cette conversation, sa mère lui dit à un moment ou à un autre,
01:57 "Jubilar va être jugé aux assises". Il dit "Ah bon ?"
02:00 Donc il s'en étonne, il dit "Comment ça, comment ça, comment ça ?"
02:03 Elle lui donne plus d'éléments, elle lui dit "Oui, il va être bientôt jugé aux assises".
02:06 Et là, il a des phrases un peu mystérieuses.
02:10 "Sofiane, Mathieu et Sébastien, ils ne savent pas qui c'est".
02:14 Comme si c'était des éléments dans l'enquête que les enquêteurs ne possédaient pas.
02:19 - Mais qui sont ces prénoms cités ?
02:21 - Alors, ce sont des prénoms qui, par ailleurs, apparaissent dans la procédure.
02:25 Mais comme plein d'autres prénoms, ces prénoms dans la procédure,
02:28 ils correspondent aux prénoms d'amis de Cédric Jubilar.
02:31 Notamment l'un de ses amis qui a été entendu mis en cause de suspecter un temps
02:36 d'avoir prêté sa voiture pour que Cédric Jubilar transporte le corps de Delphine Jubilar.
02:41 Cette piste a finalement été complètement refermée
02:43 puisque la voiture a été auscultée de fond en comble
02:47 et ça n'a absolument rien donné.
02:48 Les enquêteurs n'ont rien mis au jour dans cette voiture.
02:51 - Mais il y a un lien entre ce détenu de l'admessement et Cédric Jubilar ?
02:54 - Est-ce que les prénoms qui sont cités par ce détenu
02:56 sont les mêmes que les prénoms des amis de Cédric Jubilar ?
02:59 Justement, la Défense et le Parquet Général s'interrogent
03:02 et aimeraient que ce soit creusé, aimeraient que ce détenu soit entendu en disant
03:05 "Attendez, de quoi vous parliez ce jour-là avec votre mère quand vous avez cité ses prénoms ?
03:10 Est-ce que vous parliez de prénoms de personnes qui sont dans l'entourage de Cédric Jubilar ?"
03:14 - Parce que là-dessus se greffe aussi le correctif de la mère au mi-janvier,
03:18 cité par la Dépêche du Midi, qui dit "Non mais ça n'a rien à voir,
03:22 vous surinterprétez les propos, donc on a du mal à comprendre en fait."
03:25 - On a du mal à comprendre et c'est aussi pour cela qu'il y a cette demande
03:29 d'investiguer plus ces éléments.
03:31 Est-ce que ce sera le cas ou non ?
03:33 Eh bien justement, on aura la réponse dans quelques minutes.
03:36 - Est-ce que vous espérez mettre à l'arrie
03:38 qu'il y ait un supplément d'information décidée ?
03:42 - Eh bien écoutez, nous avons, Maître Emmanuel Franck, Alexandre Martin et moi,
03:48 toujours souhaité que l'ensemble des actes nécessaires
03:52 à la manifestation de la vérité soient réalisés.
03:55 Il apparaît que, alors même que des magistrats instructeurs
03:58 ont considéré non seulement que l'instruction était close,
04:01 mais ont écrit noir sur blanc que Cédric Jubilar était l'auteur du meurtre de son épouse,
04:05 il apparaît que d'autres éléments postérieurs
04:09 pourraient être utiles à la manifestation de cette vérité,
04:13 ce qui est déjà extrêmement surprenant.
04:16 Donc bien sûr que nous avons souscrit tout simplement à la demande du Parquet général.
04:22 - Donc vous êtes pour parce que vous estimez en creux
04:24 que toutes les pistes n'ont peut-être pas été exploitées, c'est ça ?
04:28 - C'est-à-dire que si au bout de maintenant plus de trois ans d'instruction,
04:32 nous sommes encore en train de rechercher des éléments
04:35 qui pourraient être utiles à la manifestation de la vérité,
04:38 cela signifie très clairement que l'instruction n'est pas complète,
04:42 que le dossier n'est pas suffisant.
04:44 Alors certains pourront nous taxer d'excès lorsque l'on dit que le dossier est vide,
04:49 mais enfin bon, regardez, nous avons des juges qui l'ont déclaré coupable
04:53 alors qu'elle n'avait pas à le faire, et puis quelques semaines plus tard,
04:56 on nous explique que finalement, il existe encore des actes utiles
05:00 à la manifestation de la vérité.
05:01 Cela pose quand même une difficulté sur la chronologie des choses.
05:05 - Et c'est pour cette raison d'ailleurs que vous avez déposé une plainte
05:07 auprès du Conseil supérieur de la magistrature contre les deux juges instructeurs.
05:11 Cédric Jubilar, il vit comment cette situation ?
05:13 - Lui, il vit la situation comme il vit l'instruction depuis le début,
05:19 c'est-à-dire que l'on lui explique ce qui se passe,
05:22 on essaie de le rassurer autant que possible sur un certain nombre de choses,
05:27 tout en étant lucide sur le fonctionnement de la justice dans ce dossier.
05:31 Donc il subit les choses comme il doit les subir malheureusement.
05:35 - Fort de ces éléments qu'on a évoqués, Alexandra,
05:38 est-ce que les juges de la Chambre de l'Instruction
05:40 peuvent dire non au ministère public dans les minutes qui viennent ?
05:43 - Oui, tout est possible, ils ont la possibilité de dire non.
05:46 Écoutez, en fait, on a regardé ces premiers éléments
05:50 qui nous sont parvenus par le parquet général et par le parquet,
05:53 il n'y a pas matière à aller plus loin.
05:55 Lors de l'enquête est suffisante, l'instruction est suffisante,
05:59 et donc on ordonne le procès, enfin en tout cas on examine maintenant,
06:03 parce qu'il y aurait une autre étape procédurale, c'est technique,
06:05 mais on examine l'appel des avocats sur l'ordonnance d'envoi, ça c'est technique.
06:08 En tout cas, on ne relance pas l'enquête, c'est ce qu'ils peuvent dire.
06:11 Ils peuvent dire également, il y a matière à fermer d'éventuelles portes,
06:17 il faut aller au bout de toutes ces pistes,
06:19 et alors on relance l'enquête pendant quelques mois sur ces points précis,
06:23 c'est pas non plus sur un large panel d'éléments.
06:27 Il y a deux autres points dont parlait Jean-Wilfried Forcès tout à l'heure,
06:30 il y a cette affaire de pelleteuse, et puis, pardon, cette affaire de voyant.
06:35 On peut vraiment rouvrir une enquête, une instruction,
06:38 parce qu'il y a un voyant qui dit "je sens que le corps me défile" ?
06:41 Il faut demander à mettre à l'arrive, pour moi c'est absolument pas sérieux,
06:45 on parle d'une enquête solide.
06:48 Mettre à l'arrive ?
06:50 Dans la mesure où au cours de l'instruction,
06:53 comme dans bon nombre d'instructions, lorsque nous sommes en face
06:57 à des situations particulières, avec des difficultés dans l'organisation de la preuve,
07:02 et puis là, plus précisément, dans le fait de retrouver la trace de quelqu'un qui a disparu.
07:07 Je ne parle pas spécifiquement de ce dossier.
07:09 La justice a régulièrement recours à des voyants ou à autre forme de recherche
07:15 pour essayer de trouver une solution que les moyens techniques
07:20 qui sont à sa disposition ne lui permettent pas de trouver.
07:23 Parce qu'on peut faire des expertises tant qu'on veut,
07:25 mais lorsqu'elle ne donne rien, il n'est pas étonnant que la justice puisse interroger
07:31 d'autres formes de recherche, de personnes qui seraient susceptibles
07:35 d'aider la justice dans la manifestation de la vérité.
07:38 Donc en réalité, même dans cette instruction-là,
07:41 il y a déjà des pistes qui ont été évoquées par des médiums
07:45 et qui ont fait l'objet de vérifications.
07:47 On va fermer toutes les pistes, même les plus incongrues, alors Alexandra.
07:50 C'est vrai que quand des signalements parviennent à des enquêteurs,
07:53 ils vont jusqu'au bout de chaque signalement,
07:56 mais que ce soit un médium, un voyant ou une personne lambda,
08:00 ce n'est pas parce que c'est un médium, parce que c'est un voyant,
08:03 que les enquêteurs prennent cette dimension en compte.
08:07 J'ai peut-être un esprit trop cartésien, mais en tous les cas,
08:09 avec tous les contacts avec qui j'ai pu parler,
08:11 lorsqu'ils vérifient des signalements, ils les vérifient parce que ces signalements existent,
08:15 mais pas parce qu'il s'agit d'un voyant ou d'un médium.
08:17 Si le feu vert est donné à un supplément d'information,
08:19 ça va décaler forcément la date du procès, qui est fixée d'ailleurs ou pas ?
08:23 Non, qui n'est pas fixée pour l'instant, ce n'est pas encore audiencé,
08:27 mais on pourrait s'orienter vers un procès en fin d'année
08:30 si l'instruction est définitivement close,
08:32 donc l'instruction c'est-à-dire l'enquête,
08:34 ou alors un procès l'an prochain si l'enquête est relancée.
08:37 Mais s'il y a un supplément d'information, ça peut décaler la date de début du procès ?
08:41 De quelques mois.
08:42 De quelques mois, mais on parlait déjà d'un procès en fin d'année, début 2025,
08:45 donc là on parlerait d'un procès en courant de l'année 2020.
08:48 Ça veut dire, maître Alaric, que vous allez continuer de déposer des demandes
08:51 de remise en liberté pour Cédric Jubilard, qui est incarcéré depuis bientôt trois ans ?
08:56 Oui, mais on saute une étape.
08:59 C'est-à-dire qu'avant de dire que la date d'un procès est retardée,
09:03 il y a quand même une échéance qu'il convient de ne pas oublier.
09:07 Qu'il y ait un supplément d'information ou non,
09:10 la Chambre de l'Instruction sera amenée à examiner l'appel que nous avons formé
09:15 contre l'ordonnance de mise en accusation, tant sur la forme, on en a déjà parlé,
09:19 que sur le fond.
09:21 Et sur le fond, nous demandons à la Chambre de l'Instruction,
09:24 et nous lui demanderons un jour, de prononcer un non-lieu.
09:27 Ce qui alors annulerait toute idée de procès.
09:30 Donc avant de parler de date de procès, j'aimerais déjà qu'on ait éventuellement ce débat
09:35 devant la Chambre de l'Instruction et qu'on laisse à ses magistrats
09:38 la plénitude de leurs fonctions, sans leur dire
09:41 "écoutez, c'est un débat qui est tronqué, maintenant on est en train de parler de chronologie et de date de dossier".
09:45 Laissons-les la possibilité de décider ce qu'ils souhaitent décider
09:50 avant de parler d'une date de procès qui serait reportée.
09:53 Et décision d'ouverture d'un supplément d'information, en principe, d'une minute à l'autre.
09:57 C'est Jean-Baptiste Fortes qui surveille tout ça.