Va-t-on vers une nouvelle alliance Russie-Chine ?

  • il y a 7 mois
Les Vraies Voix avec Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits

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Transcript
00:00 Les vraies voix Sud Radio, le code projecteur des vraies voix.
00:04 Pékin qui accuse l'Alliance de remettre au devant de la scène les vestiges de la guerre froide.
00:13 Les alliés craignent que la Chine ne fournisse un soutien matériel à l'invasion russe.
00:16 La Chine a fourni à la Russie un soutien politique, notamment en diffusant des mensonges flagrants, en faisant de la désinformation.
00:24 Nous espérons que les Etats-Unis et l'OTAN pourront réfléchir à leur rôle dans la crise ukrainienne,
00:30 assumer les responsabilités qui leur incombent pour améliorer la situation.
00:35 Jamais la Chine n'avait aussi clairement pris position à propos de la guerre en Ukraine.
00:38 Le nouveau ministre chinois de la Défense assure la Russie de son soutien tout en dénonçant les pressions des Etats-Unis et de l'Europe sur le dossier ukrainien.
00:46 Jusqu'ici, Pékin avait affiché une posture plutôt neutre sur le sujet.
00:50 Alors êtes-vous surpris par le soutien officiel de la Chine à la Russie, quasiment deux ans après le début du conflit en Ukraine ?
00:56 Est-ce que cette union peut faire balancer et basculer les équilibres du monde,
01:00 entre l'usine du monde qu'est la Chine et les plus grandes réserves de matières premières du monde qui sont en Russie ?
01:05 Voyez-vous une nouvelle guerre froide entre deux blocs ?
01:07 L'Occident d'un côté, l'alliance Chine-Russie de l'autre.
01:10 Va-t-on vers une nouvelle alliance Chine-Russie ?
01:12 Vous dites oui à 96%.
01:14 Vous voulez réagir ?
01:15 Odatons vos appels au 0826 300 300.
01:17 Et nous recevons Jean-Baptiste Nau et rédacteur en chef de la revue "Conflit".
01:21 Merci d'être avec nous.
01:22 Philippe, cette relation récente Chine-Russie vous inquiète-elle ?
01:28 Oui, mais cette alliance qui s'est, on vient de le dire, officiellement concrétisée,
01:34 alors qu'elle existe de manière officieuse, si j'ose dire, sur le plan international depuis deux ans,
01:44 d'abord m'étonne un petit peu parce que, avant le délai de deux ans qui vient d'être évoqué,
01:50 j'avais cru comprendre que la Chine, par exemple, avait proposé un plan de paix dont on avait d'ailleurs apprécié,
01:59 on avait considéré qu'il n'était pas très plausible pour l'Ukraine,
02:03 mais en tout cas, elle avait cherché à donner l'impression
02:06 qu'elle s'intéressait de très près à la paix en Ukraine.
02:11 Et est-ce qu'au-delà des deux ans, ce que vous venez d'évoquer, Jean-Baptiste Noé,
02:17 ça n'est pas quelque chose qui relève d'une forme d'inquiétude que nous pourrions avoir ?
02:23 Parce que si cette alliance se concrétise et devient officielle,
02:29 ça veut dire que les deux participants ont compris qu'ils étaient en position de force
02:35 et que leurs adversaires, évidemment, eux-mêmes, étaient en perte de vitesse.
02:39 C'est une question que je pose et à laquelle vous répondrez tout à l'heure, bien sûr.
02:45 Jean Dorito.
02:47 - Oui, j'aurais tendance à effectivement craindre cette alliance.
02:52 De toute façon, dès que les situations internationales se tendent, c'est toujours anxiogène.
02:57 Il y a la situation de Taïwan, notamment.
03:01 Certains spécialistes expliquent que c'est presque imminent une invasion de Taïwan par la Chine.
03:09 Je serais bien sûr curieux, je suis curieux, c'est la question que je pose à notre invité Jean-Baptiste Noé,
03:14 savoir si c'est de l'ordre du crédible, du probable.
03:18 Et puis une autre question aussi, c'est que la France est, d'un point de vue diplomatique,
03:22 engagée d'une certaine façon dans ce conflit.
03:26 On donne pas mal d'armes à l'Ukraine, nous sommes partie prenante.
03:32 Et cette fameuse question, en cas d'un conflit de haute intensité, comme disent les spécialistes,
03:38 la guerre à l'ancienne, si j'ose dire, dans quelle mesure est-ce que notre pays est encore suffisamment armé,
03:44 c'est le cas de le dire, pour tenir le coup.
03:46 - Élisabeth Lévy.
03:47 - Oui, je peux ajouter quelques questions à la liste,
03:50 parce que la réalité, c'est que j'ai pas l'impression, si vous voulez, que cette alliance,
03:54 effectivement, vous l'avez dit, cher Jean-Baptiste, soit si nouvelle.
03:59 Et puis qu'il y a forcément une dialectique, si vous voulez, entre la rivalité, quand même, russo-chinoise,
04:05 qui est une rivalité structurelle et ancienne, alors est-ce que celle-là a complètement disparu ?
04:09 Parce qu'il me semble tout de même qu'ils n'ont pas les mêmes manières diplomatiques exactement, par exemple.
04:14 Et ça, j'aimerais bien que si vous avez le temps de me répondre, Jean-Baptiste, en Afrique,
04:18 je n'ai pas le sentiment, si vous voulez, que les Chinois ont des manières un peu moins brutales que les Russes.
04:25 Peut-être je me trompe.
04:27 Et, dernière question très précise, est-ce que les Chinois vont acheter,
04:32 est-ce qu'ils peuvent acheter en Yuan leur pétrole et leur gaz à la Chine ?
04:36 Alors là, Jean-Baptiste Noé, vous répondez dans l'ordre ou dans le désordre, comme vous voulez.
04:41 Ah oui, bon, je commence par la fin, alors.
04:43 Oui.
04:44 La fin est très intéressante.
04:46 Effectivement, il y a eu une alliance ponctuelle sur l'Ukraine, mais ça, c'est un vieux couple qui officialise sa relation,
04:52 parce que ça fait déjà deux ans qu'ils sont alliés.
04:55 Mais ce qui est très intéressant, c'est de constater qu'avant la guerre en Ukraine,
04:59 la Chine acceptait le pétrole russe à le payer en dollars,
05:03 et maintenant elle le paye en monnaie chinoise, qui est le RIMBi.
05:07 Ça, c'est un tournant major.
05:08 C'est quand même quelque chose qu'on a vu se mettre en place et qui prend de plus en plus d'importance.
05:14 Mais s'il y a accord au niveau de l'Ukraine, et d'ailleurs la Chine est l'un des principaux propriétaires de terres ukrainiennes,
05:23 parce que l'Ukraine produit des céréales, la Chine assez peu,
05:27 et donc une grande partie des céréales produites en Ukraine servent à nourrir les Chinois,
05:31 via des entreprises chinoises qui possèdent des terres en Ukraine.
05:34 Donc il y a une entente autour de l'Ukraine, mais il y a effectivement une opposition qui va être de plus en plus marquée,
05:40 d'un côté en Afrique centrale, et l'Afrique centrale c'est le cœur du monde,
05:45 c'est notamment par là que passent les grandes routes commerciales,
05:48 et puis également en Afrique.
05:49 Mais l'Afrique, c'est important d'un point de vue géographique, ça l'est un peu moins au niveau économique,
05:54 mais par exemple la Russie est en train de perdre son influence en Afrique centrale,
05:58 les pays adaptants par exemple sont en train de se détacher de la Russie,
06:03 et c'est la Chine qui prend le relais.
06:05 Donc ça veut dire qu'il y aura des tensions dans les mois ou les années qui vont venir,
06:10 parce que les Russes ne vont pas apprécier de se faire cacher par les Chinois,
06:13 dans des zones qu'ils considèrent comme étant leur zone d'influence.
06:16 - Et pour la question de Jean Dorido, vous pouvez la répéter ?
06:19 - Il y a la question de Taïwan, est-ce que c'est crédible et probable ?
06:22 Et puis la question de la France, où est-ce qu'on en est militairement ?
06:25 - Voilà.
06:26 - Oui, alors sur Taïwan, la réponse, on la connaît,
06:29 puisque la Chine a dit qu'elle voulait prendre Taïwan et qu'elle voulait annexer Taïwan,
06:34 et elle veut le faire avant 2049, qui sera le centenaire de la Nouvelle-Chine.
06:39 Donc c'est comme dans un film d'horreur,
06:41 vous avez le compte à rebours qui est lancé, les secondes qui défilent.
06:45 Après la question c'est, est-ce qu'ils vont mener une opération militaire ?
06:47 Ça c'est pas certain, après oui tout est possible,
06:51 mais c'est moins certain parce que c'est quand même très périlleux,
06:53 et on sait bien qu'une guerre, on peut la gagner sur le papier,
06:56 mais l'affrontement et les combats sont quand même assez différents.
07:00 Donc il y a peut-être d'autres moyens pour la Chine de conquérir Taïwan,
07:02 notamment par un aspect si économique.
07:04 - Philippe Bligère, votre question c'était ?
07:06 - Ma question, en fait, c'était à peine une question,
07:10 c'était une affirmation discutable sans doute,
07:13 mais là j'ai une vraie question si je peux la poser.
07:16 Jean-Baptiste Noé, est-ce que cette alliance entre la Chine et la Russie
07:22 n'est pas évidemment infiniment favorisée
07:25 par ce que j'appellerais la faiblesse américaine,
07:28 les perspectives de l'élection présidentielle
07:32 entre quelqu'un pour être gentil,
07:35 qui a du mal à conserver son équilibre physiquement,
07:39 et de l'autre côté quelqu'un qui ne brille pas par la normalité,
07:44 est-ce que ça ne peut pas rassurer la Chine et la Russie
07:47 sur le fait que le champ libre est ouvert pour elles deux
07:53 sur le plan international ?
07:55 - Oui, le problème c'est que les Etats-Unis ne font plus peur,
07:59 or la Chine et la Russie font peur.
08:01 Et en relation internationale c'est important de faire peur.
08:04 Iran fait peur par exemple, parce qu'ils ont l'arme nucléaire,
08:08 enfin ils ont des armes assez puissantes et des armes en nucléaire
08:11 qui sont capables de s'en servir.
08:12 Donc le gros problème des Etats-Unis
08:15 c'est qu'ils ont la puissance économique,
08:16 ils ont la puissance militaire,
08:17 mais ils ne font plus peur parce qu'ils ont connu une série de défaits
08:20 notamment en Irak et en Afghanistan.
08:22 - Avant de donner la parole à Jean Dorido,
08:24 on parlait de l'hypothèse d'une attaque de Taïwan par la Chine populaire.
08:27 Ça conduirait inéluctablement à une troisième guerre mondiale
08:30 pour vous Jean-Baptiste Noé,
08:31 parce qu'évidemment il risque d'y avoir un nouveau conflit
08:34 dans ces cas-là, la Corée du Nord qui attaquerait la Corée du Sud, etc.
08:37 et ça poserait certainement,
08:38 ce serait un très gros foyer de tension on peut le dire.
08:41 - Alors oui, d'autant plus que les Etats-Unis ont dit
08:44 qu'ils protégeraient Taïwan comme un Etat américain,
08:46 ils le considèrent comme l'équivalent du Texas ou de l'Alaska,
08:49 donc ça veut dire qu'en cas d'attaque, ils interviendraient.
08:52 Mais la question c'est,
08:53 un, est-ce qu'on a les moyens d'attaquer,
08:55 et deux, est-ce qu'on en a la volonté ?
08:57 S'il n'y a reste qu'en Europe,
08:58 on est prêt à envoyer des jeunes Européens mourir pour Taïwan.
09:01 Pour faire la guerre, il faut des armes, il faut des hommes.
09:04 Donc il faut être beaucoup d'armes pour faire une des guerres longues.
09:07 Aujourd'hui, ce que produit la France en une année,
09:09 c'est trois jours d'usage en Ukraine.
09:12 C'est trois jours d'obus.
09:14 Donc on ne produit pas assez pour faire une guerre longue.
09:16 Et je ne pense pas qu'on soit prêt non plus à envoyer une partie de la jeunesse
09:19 mourir ni sur le plan ukrainien ni sur le plan taïwanais.
09:22 - Jean-Henri de Vaulet-Régard.
09:24 - Oui, non, la question par rapport au fait que les Etats-Unis ne font plus peur,
09:28 je vous écoute, vous êtes spécialiste, donc je vous crois,
09:31 et je vous entends expliquer que
09:33 c'est dû à une succession de défaites américaines.
09:37 Pour autant, la Russie qui, elle, fait peur,
09:40 elle a échoué à l'époque, c'était il y a très longtemps,
09:43 c'était à l'époque de l'Union soviétique, elle a échoué en Afghanistan.
09:46 L'Iran n'a pas de politique d'expansion territoriale.
09:51 Il y a eu la guerre Iran-Irak pendant très très longtemps,
09:54 à l'époque où Saddam Hussein était l'allié de l'Occident.
09:56 - 1980 et 1988.
09:57 - Et du coup, je me demande si, j'ai votre avis sur le sujet,
10:00 ce n'est pas le fait que finalement les USA restent dans cette histoire
10:04 la seule vraie grande démocratie.
10:06 Est-ce que ce n'est pas ça sa faiblesse ?
10:07 On a quand même des démocraties, c'est discutable pour la Russie,
10:11 la Chine c'est une dictature communiste,
10:13 l'Iran, n'en parlons pas, c'est une théocratie.
10:16 Est-ce que ce n'est pas finalement la limite
10:18 de ces grandes puissances militaires,
10:20 le fait des puissances démocratiques,
10:21 est-ce que ce n'est pas ça qui fait que finalement
10:23 elles font moins peur sur le plan international ?
10:26 - Oui, en fait, on a une asymétrie,
10:28 on pourrait dire une asymétrie morale.
10:30 C'est-à-dire qu'on sait que Russie, Chine, Iran
10:33 sont prêts à faire usage de la force,
10:35 ils peuvent sortir de ce qui est pour nous un cadre rationnel.
10:39 L'Iran, nous, quand même, elle a depuis plusieurs années
10:40 qu'elle veut régler Israël de la part.
10:42 Ce n'est pas très rassurant pour les Israéliens.
10:44 Alors que les Européens et les États-Unis
10:46 restent malgré tout dans un cadre rationnel
10:48 et veulent donner l'impression,
10:49 même si en Irak et en Libye, ils n'ont pas vraiment fait,
10:52 de respecter le droit international.
10:53 Donc là, ça crée une asymétrie
10:55 parce qu'eux sont prêts à faire des choses
10:57 que nous ne sommes pas prêts à faire.
10:58 - D'accord.
10:59 - Jean-Baptiste Noué, est-ce que dans le fond
11:01 la grande asymétrie entre l'Occident et ce monde
11:05 émergent, ce n'est pas que l'Occident,
11:07 en plus d'être fatigué et vieilli,
11:09 est un monde idéologiquement post-national,
11:12 qui n'a plus grand rapport avec l'idée même de la puissance ?
11:15 Alors peut-être qu'il faut distinguer
11:16 l'Amérique et l'Europe de ce point de vue-là.
11:18 Peut-être que l'Europe est en pointe,
11:20 si vous voulez, dans ce renoncement à la puissance
11:22 et à la nation et qu'en face,
11:24 une des grandes forces, me semble-t-il,
11:26 et de la Chine et probablement encore de la Russie,
11:28 c'est quand même le patriotisme
11:30 d'une grande partie des habitants.
11:32 Je veux dire, les Chinois aiment la Chine,
11:35 si vous voulez, vous n'entendrez pas des élites chinoises
11:37 dire sur leur pays ce que des élites françaises
11:40 peuvent dire sur le nôtre.
11:41 Ils ont le choix. Elles ont le choix.
11:43 Oui, à l'étranger, ils auraient le choix.
11:45 Je veux dire, c'est quand même...
11:47 Jean-Baptiste Noué.
11:49 C'est fondamental. La question, c'est
11:51 pourquoi est-on prêt à mourir ?
11:53 Effectivement, les Russes, les Chinois
11:55 sont prêts à mourir pour leur pays.
11:56 Il n'est pas certain que beaucoup d'Européens
11:58 soient prêts à mourir pour leur pays.
12:00 Mais il faudrait voir aussi si jamais
12:02 les États-Unis étaient attaqués.
12:03 On pensait pareil de l'Ukraine.
12:04 Les Italiens, depuis deux ans,
12:06 montrent qu'ils sont prêts à mourir pour leur pays
12:07 et pour le défendre.
12:08 Donc c'est vrai que ça change quand même
12:09 pas mal de choses.
12:10 Mais on meurt pour sa patrie.
12:12 On ne meurt pas pour l'Union européenne.
12:14 Mais il n'y aura pas forcément
12:16 un bloc militaire de la Russie
12:19 et de la Chine contre le reste du monde.
12:21 En tout cas, quand je dis le reste du monde,
12:23 je parle bien sûr des États-Unis
12:24 et des pays occidentaux.
12:26 Non, je vois mal la Chine...
12:28 Alors, la Chine prête et vend des armes à la Russie,
12:31 mais je la vois mal faire une coalition militaire avec elle
12:33 pour mener une guerre en Ukraine.
12:35 Non, pas du tout.
12:36 Mais qui a le plus besoin de l'autre ?
12:38 La Chine a plus besoin de la Russie
12:40 ou la Russie a plus besoin de la Chine
12:42 dans l'état actuel des choses ?
12:43 Jean-Baptiste Noé.
12:45 C'est un besoin mutuel.
12:47 La Chine a besoin de l'énergie de la Russie
12:50 et des céréales qui viennent d'Ukraine.
12:53 Et la Russie a besoin de vendre son énergie.
12:55 Et elle a besoin d'acheter des armes.
12:57 C'est une levée de sanctions aussi peut-être
12:59 en passant par la Chine pour la Russie.
13:01 Exactement. C'est une manière de contourner les sanctions
13:03 et d'ailleurs de vendre aux Européens
13:05 du gaz et du pétrole russes.
13:07 Jean Dorido.
13:09 Précisément, puisqu'on est sur la question de l'aide,
13:11 c'est très difficile à suivre
13:13 l'avancement de ce conflit russo-ukrainien.
13:18 C'est compliqué d'avoir des infos claires.
13:23 Aujourd'hui, est-ce que vous pouvez nous dire
13:25 où est-ce qu'on en est ?
13:27 L'action militaire de la Russie contre l'Ukraine ?
13:32 Sur le front, on n'a pas beaucoup changé depuis un an.
13:35 La Russie contrôle toujours à peu près 20% du territoire.
13:38 Il y a des avancées ou des reculades ici ou là,
13:40 mais fondamentalement ça n'a pas changé.
13:42 Ce qui a changé, c'est l'épuisement en termes de matériel
13:45 et c'est surtout l'épuisement en termes d'attrition humaine.
13:48 Les Ukrainiens arrivent un peu au bout
13:50 en matière d'hommes et en matière de matériel
13:52 alors que la Russie a davantage de ressources.
13:54 Il y a ce petit jeu-là, c'est celui qui a le plus de ressources,
13:56 qui a le plus de points, voilà encore plus.
13:58 - Je suis une question évidemment très pertinente d'Elisabeth tout à l'heure.
14:05 Est-ce qu'au fond, ce n'est pas aujourd'hui la démonstration
14:10 de la grande faiblesse des démocraties face aux dictatures ?
14:14 Je suis tout de même frappé de voir à quel point
14:17 Poutine comme le leader chinois dont je ne veux pas écorcher le nom,
14:23 évidemment sont infiniment plus puissants,
14:26 parce que réalistes, cyniques.
14:29 Est-ce qu'à l'avenir, ça ne va pas être une terrible faiblesse
14:33 pour les pays civilisés ?
14:36 - Ça a toujours été le cas.
14:38 On se posait le même problème avec la Deuxième Guerre mondiale,
14:40 l'avantage des dictatures par rapport aux démocraties.
14:43 Il y a quand même un élément qui est la question des populations.
14:46 On le voit par exemple en Russie,
14:47 une grande partie de l'intelligentsia russe est partie,
14:51 une partie de la jeunesse est partie,
14:53 parce qu'elle ne voulait pas mener la guerre en Ukraine,
14:56 donc elle a quitté le pays et ne reviendra probablement pas.
15:00 Et puis la Russie est un pays avec un problème démographique
15:04 très important, plus important que l'Europe.
15:06 Donc il y a cette puissance de l'État, de la structure politique,
15:10 mais une population qui ne se dit pas toujours.
15:13 Donc il traîne un peu les pieds.
15:14 - Jean-Baptiste Noé, depuis deux ans,
15:16 on parle de l'effondrement de l'économie russe
15:18 et pourtant on a l'impression qu'il se maintienne quand même.
15:22 - Oui, alors dans "Conflit", on a publié un article
15:25 dès que les sanctions économiques avaient été mises en place,
15:27 en disant que ces sanctions ne seraient pas efficaces
15:29 parce que les sanctions économiques n'ont jamais fonctionné.
15:32 Et ça n'a pas fonctionné.
15:34 Ça n'a pas fonctionné pourquoi ?
15:35 Parce qu'il y a toujours des manières de contourner les sanctions.
15:38 Ça, on l'a toujours vu dans l'histoire,
15:39 donc ça n'a rien changé.
15:41 Et on voit bien qu'aujourd'hui, la Russie contourne les sanctions
15:43 via l'Arménie, via l'Inde, via la Chine.
15:46 Donc c'est sans surprise.
15:48 Ça a pénalisé les Européens
15:49 parce qu'il a fallu trouver de l'énergie ailleurs.
15:52 D'ailleurs, on achète une partie de l'énergie russe plus cher,
15:54 mais ça n'a pas vraiment pénalisé la Russie.
15:56 - Depuis les Tsars, l'emblème de la Russie, c'est l'aigle à deux têtes,
16:00 un qui regarde vers l'Europe, un qui regarde vers l'Asie.
16:02 Est-ce que désormais, la Russie regarde définitivement vers l'Asie,
16:05 Jean-Baptiste Noé ?
16:07 - Alors, elle regarde vers l'Asie, mais le fait que...
16:10 - L'Ukraine, ce n'est pas vers l'Asie.
16:12 [Rires]
16:14 - Le fait qu'elle fasse la guerre à l'Ukraine
16:16 montre qu'elle a la tête bien tendue dans la question européenne.
16:20 - Oui. - Ça l'intéresse.
16:22 - Donc pour l'instant, elle est plus européenne qu'asiatique.
16:26 - Merci beaucoup d'avoir été avec nous, Jean-Baptiste Noé,
16:30 rédacteur en chef de la revue "Conflit".
16:32 Vous voyez, on a tout compris.
16:34 C'est ça qui est bien avec nos experts du jour.

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