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MAISON DE PROTECTIONS DES FAMILLES / Une structure adaptée à l'audition des victimes mineures
VIOLENCES SEXUELLES SUR MINEURS / Des gendarmes formés pour intervenir dans tout le Loir-et-Cher
VIOLENCES / Première mission de la MPF : la prévention auprès des publics vulnérables

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00:00 [Générique]
00:08 Bonsoir et bienvenue dans cet invité de la rédaction.
00:12 Aujourd'hui nous allons aborder un sujet sensible, les actes de violence et notamment sur mineurs.
00:17 Alors selon l'INSEE en 2021, les violences sexuelles intrafamiliales touchaient des mineurs de moins de 15 ans dans 60% des cas,
00:24 contre 18% pour les violences physiques.
00:27 Depuis le Grenelle des violences conjugales en 2019, des maisons de protection des familles ont été créées dans tous les départements.
00:34 Elles sont gérées par les gendarmes du groupement départemental.
00:37 Dans le Loir-et-Cher, cette structure se trouve à Roux-Morentin.
00:41 Alors quelle est son utilité ? On en parle avec notre invité, l'adjudante Émilie Denechère, commandant de la maison de protection des familles 41.
00:50 Bonsoir et bienvenue sur notre plateau.
00:53 Alors pour commencer, c'est quoi une maison de protection des familles ? Quelles sont vos missions ?
00:57 D'accord, donc bonsoir.
00:59 Donc comme vous le disiez, effectivement nos maisons de protection des familles ont été créées suite au Grenelle des violences conjugales
01:06 et chaque département en possède une.
01:08 Donc nos missions sont tout d'abord de prévenir les violences, protéger les personnes vulnérables,
01:15 c'est-à-dire les victimes de violences conjugales, les mineurs, les seniors et les personnes en situation de handicap.
01:22 En coordination avec nos partenaires sociaux et associatifs du département.
01:29 On a également une mission d'appui aux unités, c'est-à-dire qu'on apporte notre expertise
01:35 en faisant des auditions aussi bien de victimes majeures que mineures
01:40 et on forme également nos camarades d'unités de terrain à l'accueil et à la prise en charge des victimes.
01:48 – Alors dans vos locaux notamment, il y a une pièce toute particulière qu'on va voir sur les images,
01:54 c'est la salle Mélanie, est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu'il y a dedans,
01:59 elle est faite comment et elle sert à quoi ?
02:01 – Alors la salle Mélanie c'est une salle spécialement aménagée
02:05 pour les auditions de mineurs victimes de faits à caractère sexuel
02:10 parce que c'est des auditions qui doivent être filmées et enregistrées
02:14 et réalisées par des enquêteurs spécialement formés comme moi
02:18 et un second camarade de mon unité.
02:21 Donc c'est une audition bien particulière où on suit un protocole.
02:26 Donc dans notre salle Mélanie, on a une caméra, un micro et deux fauteuils,
02:33 quelques peluches pour mettre l'enfant en confiance.
02:38 On l'installe, on s'installe et on commence à discuter
02:42 et on se consacre entièrement à l'enfant.
02:45 C'est-à-dire que durant cette audition, on ne prend que des notes,
02:49 on ne retranscrit l'audition qu'une fois qu'elle est terminée
02:52 et elle est suivie dans une pièce à côté par un enquêteur,
02:55 dit enquêteur binôme, qui est là pour nous aiguiller
02:58 si jamais il y a des éléments particuliers à demander à l'enfant
03:01 et qu'on n'a pas abordé.
03:03 – Et donc en mettant l'enfant, en tentant de mettre l'enfant
03:05 suffisamment à l'aise pour s'ouvrir, est-ce que vous remarquez
03:08 que cette méthode-là, elle est plus efficace que de faire une audition
03:12 à l'ancienne, on va dire, comme vous les faisiez avant ?
03:15 – Oui, exactement, parce que dans ce protocole, justement, le NICHD,
03:20 on a une première phase d'accueil où on se présente,
03:23 on donne notre prénom, on dit qui on est,
03:27 on explique ce qui va se passer et puis on présente au mineur
03:31 comment est la salle et ensuite on s'installe, on discute ensemble,
03:36 on crée un lien de confiance en lui demandant ce qu'il aime faire
03:39 et puis on vient petit à petit au fait pour lesquels il est présent
03:43 en audition avec nous le jour J.
03:45 – Alors vous avez, depuis le début du fonctionnement
03:49 de la maison de protection des familles, vous savez combien d'enfants
03:53 vous avez auditionné dans cette salle ?
03:57 – Oui, on a auditionné plus de 90 enfants.
04:00 – Ce qui est beaucoup finalement.
04:03 – Oui, ce qui est beaucoup.
04:06 – Et ce protocole, il s'applique principalement à des très jeunes enfants
04:10 ou aussi à des adolescents plus âgés ?
04:13 – Alors ce protocole avec de très jeunes enfants,
04:16 il faut aussi prendre en compte le développement de l'enfant.
04:18 Sur un enfant qui va être âgé de 2 ans, la parole, le lexique,
04:23 ce n'est pas très riche donc c'est compliqué.
04:26 Mais sur les enfants de 6 ans jusqu'à 18 ans,
04:30 ce protocole s'adapte parfaitement.
04:33 De même que sur les personnes en situation de handicap,
04:35 même si elles sont adultes, on peut utiliser ce protocole
04:38 et ça donne de très très bons résultats.
04:41 – Alors vous êtes 4 gendarmes à la maison de protection des familles.
04:45 – C'est ça.
04:46 – Il y a une astreinte qui est partagée 24h/24 ?
04:50 – Alors oui, on fonctionne sur une semaine d'astreinte
04:54 où on répond aux sollicitations de nos camarades.
04:58 Mais nous ne sommes pas comme une unité opérationnelle,
05:00 comme une brigade de gendarmerie qui part sur des interventions.
05:04 Nous on apporte, comme je le disais tout à l'heure, une expertise.
05:07 Donc on donne des conseils et puis on se déplace.
05:09 – Mais ça, on peut vous solliciter pour des conseils à tout moment.
05:13 – Bien sûr, bien sûr.
05:14 – Vous êtes amenée à intervenir un peu partout dans le département ?
05:18 – C'est ça, sur tout le département de Loire-et-Cher.
05:22 – Alors pour faire ça, pour pouvoir faire votre travail,
05:26 vous avez dû suivre une formation particulière
05:29 que certains de vos collègues n'ont pas suivie.
05:32 – C'est ça.
05:33 Donc pour être militaire en maison de protection des familles,
05:36 on suit déjà un stage maison de protection des familles
05:39 où on nous explique comment on fait de la prévention,
05:43 avec quels partenaires on peut travailler.
05:47 Moi j'ai suivi la formation aussi expert en mécanisme violence intrafamiliale,
05:52 ce qui me permet de dispenser des formations à mes camarades
05:55 pour améliorer l'accueil et la prise en charge des victimes
05:58 qui se présentent en unité.
06:01 Et pour les auditions de mineurs, j'ai également suivi une formation
06:06 enquêteur spécialisé au recueil des auditions mineurs.
06:09 – Et parce qu'auditionner un mineur,
06:10 ce n'est pas du tout la même chose qu'auditionner une personne adulte ?
06:14 – Non, absolument pas.
06:16 Il ne faut pas suggérer les réponses,
06:19 il faut que les réponses viennent de l'enfant.
06:21 – Donc c'est toute une méthode de questions
06:25 pour ne pas amener l'enfant à des réponses…
06:30 – C'est ça, on utilise les questions ouvertes
06:32 qui permettent à l'enfant de nous donner un récit libre.
06:36 – Vous n'êtes pas amené du coup, comme vous le disiez,
06:38 à poursuivre l'enquête ensuite,
06:40 quand on vous appelle pour faire une audition,
06:42 vous êtes là juste pour faire l'audition.
06:45 – C'est ça, on s'occupe de la partie victime,
06:50 en revanche la partie auteur est gérée par une unité,
06:55 une brigade de recherche ou la brigade ou les cellules
06:58 qui gèrent les violences intrafamiliales.
07:01 Pour autant, s'il y a besoin de faire un suivi,
07:03 par exemple d'une victime de violences conjugales
07:06 ou d'un mineur victime de violences sexuelles,
07:08 nous on peut faire le lien avec les partenaires sociaux et associatifs.
07:13 Parce qu'au-delà de la procédure, il y a l'après.
07:17 La victime, il faut qu'elle puisse bénéficier d'un suivi,
07:21 après le suivi, la prise en charge judiciaire.
07:24 Donc nous on a aussi ce rôle-là.
07:27 – Une autre part aussi très importante de votre travail,
07:30 c'est la prévention, auprès de qui ?
07:33 – Alors la prévention, on en fait effectivement
07:37 principalement en milieu scolaire,
07:40 mais également auprès des personnes du milieu médical,
07:45 notamment sur les formations d'élèves aides-soignantes,
07:48 sur la thématique des violences conjugales.
07:51 On fait aussi de la prévention auprès de personnes en situation de handicap,
07:56 dans les IME par exemple, dans les ESAT,
07:59 et aussi auprès des seniors.
08:02 – Parce que ce sont des publics vulnérables ?
08:04 – C'est ça.
08:06 – Il faut savoir parler de tel sujet à des jeunes enfants,
08:10 parfois dans les écoles, comment on fait ?
08:13 – Alors justement, on suit aussi une formation
08:17 qui nous explique comment faire de la prévention.
08:21 Alors on utilise des supports bien évidemment,
08:24 on s'adapte à l'âge de notre public, c'est ça qui est très important.
08:28 Donc on utilise des supports, on utilise aussi le jeu,
08:31 pour faire passer des messages.
08:34 – Vous êtes très sollicitée déjà, je crois,
08:37 vous avez un carnet rempli pour les prochains mois ?
08:40 – Oui c'est ça.
08:42 – Jusqu'à avril, je crois ?
08:44 – C'est ça, jusqu'à avril oui, on est déjà bien sollicité.
08:47 – Est-ce qu'il vous arrive que lors de ces séances,
08:50 ces interventions pour faire de la prévention,
08:53 des personnes vous confient à ces moments-là
08:56 des faits de violences dont elles sont victimes ?
08:58 – C'est ça, exactement.
09:00 En général, quand on fait une prévention,
09:02 on part, dès que le service le permet, à deux militaires,
09:06 ce qui nous permet, si justement un jeune sort de la salle,
09:12 notamment sur les thématiques de violences sexuelles,
09:14 de consentement et de harcèlement, cyberharcèlement,
09:17 que ce jeune qui va sortir de la salle,
09:20 soit pris en charge par un des deux militaires,
09:22 permettant à celui qui a commencé la prévention de la terminer,
09:26 et au second de prendre en charge notre élève qui est sorti,
09:30 pour aller parler avec lui et savoir ce qui se passe.
09:33 Et ça nous est arrivé quelques fois,
09:36 de prendre en charge des jeunes qui, en fonction du thème,
09:39 ont eu des échos à leurs problèmes, et puis on les a pris en charge,
09:45 et après on les a réussi à réorienter.
09:48 – Parce que, comme vous le disiez, vous pouvez faire de la prévention
09:52 tant sur les violences sexuelles que sur d'autres thématiques.
09:56 – Oui, c'est ça.
09:57 Alors, sur le consentement, une notion qui est vraiment très importante,
10:02 et pas forcément très bien assimilée,
10:05 harcèlement, cyberharcèlement, mais aussi les addictions.
10:09 Et pour la partie senior, on peut aussi faire de la prévention
10:15 sur le démarchage, parce que c'est vraiment un public
10:18 qui est très très vulnérable.
10:20 – Vous fonctionnez, comme on l'avait dit,
10:23 complètement à la maison de protection des familles,
10:25 depuis l'été 2022.
10:27 Avant, vous, vous étiez gendarme sur le terrain.
10:29 – C'est ça.
10:30 – Vous avez l'impression de faire toujours le même métier ?
10:32 – Non, non, c'est totalement différent,
10:36 parce qu'un gendarme de brigade, c'est un militaire qui est polyvalent,
10:40 qui va avoir plusieurs missions de la police judiciaire, de la police route.
10:46 Moi, j'ai choisi de me spécialiser sur le thème des violences conjugales
10:53 et des mineurs, parce que j'avais une réelle appétence pour le sujet.
10:57 Et je pense qu'il faut vraiment être intéressé par ces faits
11:02 pour pouvoir travailler dans le cadre.
11:05 – Est-ce que vous diriez que ça a un peu redonné sens à votre métier, le gendarme ?
11:10 – En quelque sorte, oui, je pourrais le dire, oui.
11:14 On se sent vraiment utile quand on reçoit, par exemple,
11:20 une femme victime de violences, ou même qui a juste besoin de parler.
11:25 Elle vient nous voir à la maison de protection des familles,
11:28 on discute et on voit que la parole se libère,
11:33 même si cette dame, elle n'ira peut-être pas forcément déposer une plainte,
11:38 on l'a orientée, on l'a prise en charge et on se sent vraiment utile.
11:42 Vous avez plus le temps, peut-être, qu'avant ?
11:45 Nous, on a plus le temps, oui, que mes camarades qui sont en brigade.
11:49 C'est pour ça que nous, on peut se permettre de recevoir.
11:53 Et en général, c'est ce qu'on leur dit aux gens qui viennent
11:56 à la maison de protection des familles, qu'on est là pour eux,
12:00 qu'on a tout notre temps et qu'ils peuvent tout nous dire.
12:03 Et en général, une fois qu'on a dit ça, on sent la pression qui redescend
12:09 et on arrive à avoir des récits de vie, des fois très très compliqués.
12:13 – Merci beaucoup, Emely de Neychère.
12:16 – Merci à vous.
12:17 – L'invité de la rédaction, c'est terminé.
12:20 Je vous dis à très bientôt pour une prochaine édition
12:23 et je vous souhaite un très bon week-end.
12:25 [Musique]

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