L'INVITE DE FRANCE BLEU POITOU - Hervé Vindevogel, président de la fédération des buralistes dans la Vienne

  • il y a 8 mois
Le paquet de cigarettes dépasse depuis le 1er janvier les 12 euros en moyenne. Son prix a doublé en dix ans. Les ventes sont en baisse dans les bureaux de tabac, et les fumeurs achètent des cigarettes moins chères, sous le manteau. De quoi mettre en péril les 180 bureaux de tabac dans la Vienne.

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Transcript
00:00 L'invité de France Bleu Poitou, on parle ce matin de la hausse des prix du tabac.
00:03 Avec vous, jusqu'à quel prix le paquet va monter ?
00:06 Va-t-il bientôt dépasser le cap symbolique des 15 euros ?
00:09 Est-ce que ces augmentations, ces dernières années, vous incitent, vous ont carrément fait arrêter de fumer ?
00:15 Venez nous le dire, n'hésitez pas, vous êtes les bienvenus au 05 49 60 20 20.
00:19 On en parle ce matin avec Hervé Windewogel, le président de la Fédération des Buralistes de la Vienne.
00:24 Il tient un bureau de tabac dans le quartier des Coroneries à Poitiers.
00:28 Il répond à vos questions, Thomas Régiraudeau.
00:30 Oui, bonjour Hervé Windewogel.
00:31 Bonjour Thomas.
00:32 Le paquet de 20 cigarettes coûte maintenant donc jusqu'à 12,50 euros, ça dépend des marques.
00:36 Bien sûr, il a augmenté au 1er janvier entre 50 centimes et 1 euro de plus.
00:40 Son prix a doublé en 10 ans.
00:42 On a sur Facebook, on a une auditrice, Sylviane, qui nous dit qu'elle a arrêté il y a 7 ans déjà,
00:46 dès que le paquet a commencé à augmenter.
00:48 Est-ce que des poids de vin, des poids de vines comme Sylviane, il y en a beaucoup ?
00:51 Est-ce que ça impacte beaucoup votre profession, ces augmentations de prix du tabac, des gens qui arrêtent ?
00:56 Alors nous, on considère au niveau fédéral et même confédéral des burealistes,
01:01 que le prix du tabac ne fait pas forcément arrêter de fumer.
01:07 Nous, on considère qu'il favorise la contrebande et la contrefaçon.
01:11 Il faut savoir qu'en France, il y a quand même une cigarette sur trois qui provient de ces marchés parallèles.
01:16 Oui, justement, il y a eu une affaire récente, une famille de Châtellerault qui a été condamnée,
01:21 4 de ses membres condamnés pour trafic de cigarettes,
01:23 ils allaient acheter des cartouches au Luxembourg et ils les revendaient.
01:26 Ça vous inspire quoi ?
01:27 C'est des affaires qui, peut-être, n'arrivent pas forcément souvent dans le département de la Vienne,
01:31 mais à l'échelle nationale sont importantes.
01:32 Exactement. Ici, dans la Vienne, on est peut-être encore à peu près protégés.
01:38 Parce que loin des frontières ?
01:39 Voilà, exactement.
01:40 Parce que là, on a constaté qu'au niveau français, le marché du tabac avait diminué de 8 %,
01:46 en tout cas, les volumes de tabac vendus par les burealistes.
01:50 Mais on s'aperçoit qu'à côté de ça, effectivement, les marchés parallèles,
01:54 la contrebande, la contrefaçon sont en train d'exploser.
01:58 Il y a des usines qui sont démantelées en France et en Espagne.
02:02 Ça veut dire qu'il y a moins de ventes pour vous, encore plus ?
02:05 Exactement.
02:05 Parce qu'il y a un transfert vers cette contrebande, c'est ça ?
02:07 Voilà. Et puis, l'augmentation du prix du tabac s'appuie sur une politique de santé publique
02:16 dont nous contestons les moyens, qui est de toujours faire augmenter le prix du tabac.
02:21 Il faut savoir qu'aujourd'hui, beaucoup de cigarettes sont fabriquées dans des usines clandestines,
02:26 dans des conditions de fabrication plus que douteuses.
02:29 À Toulouse, une usine a été récemment démantelée, par exemple.
02:32 Exactement. Donc, ces usines démantelées, une fois qu'on les visite,
02:34 on se rend compte que toutes les normes sanitaires sont loin d'être respectées.
02:40 Et là, il y a un vrai enjeu de santé publique à ce niveau-là.
02:44 Si on revient sur le prix du tabac, je le précise,
02:46 ces augmentations en successif, vous en bénéficiez relativement peu.
02:51 C'est important de le préciser parce que vous, Buraliste,
02:53 je crois que c'est 80% d'un paquet qui est taxé, donc qui va directement à l'État.
02:56 Vous, vous avez à peu près 10%.
02:59 C'est un peu moins, c'est 8,25% pour être tout à fait précis.
03:02 Donc, le chiffre d'affaires n'augmente pas forcément énormément pour vous avec ces augmentations,
03:08 d'autant plus qu'il y a un transfert vers peut-être la contrebande, comme vous le dites.
03:13 Est-ce que ces augmentations successives,
03:15 donc le prix du paquet qui a doublé, je crois, en l'espace de 10 ans quasiment,
03:19 ça met en péril véritablement certains commerces dans la Vienne ?
03:23 Complètement.
03:25 Pas mal de petits Buralistes commencent à s'inquiéter
03:29 parce que ça devient très difficile pour eux.
03:32 Donc, effectivement, nous, on essaye de se diversifier de plus en plus.
03:36 On propose différents produits.
03:39 Comme quoi, allez-y.
03:40 Les produits de vin potage.
03:43 Alors, j'allais parler de la presse, mais la presse écrite, c'est...
03:45 Ça fait longtemps déjà ?
03:47 C'est un secteur qui est aussi un peu en difficulté, pour tout vous dire.
03:52 Donc, effectivement, nous, on s'est centré sur les produits de vin potage,
03:57 mais qui sont aussi un petit peu dans le collimateur du gouvernement.
04:00 On parle de...
04:01 La puf, c'est ça, notamment.
04:03 La puf, pardon, a été interdite il y a peu de temps.
04:05 Alors, elle n'est pas encore interdite, mais effectivement,
04:08 le décret sera publié dans le courant de l'année.
04:12 Voilà, ce produit...
04:13 L'interdiction a été annoncée, en tout cas.
04:15 Voilà, exactement. L'interdiction a été annoncée.
04:19 On essaye aussi de proposer d'autres services,
04:22 comme le paiement de certaines factures, etc.
04:24 Donc...
04:25 Les colis aussi, qu'on peut...
04:26 Les colis, exactement.
04:27 Nous, notre ambition, c'est d'être des commerçants de proximité.
04:31 On veut être les plus proches des plus éloignés.
04:35 On a un maillage.
04:37 Voilà, on est parfois le seul commerce qui résiste...
04:39 Combien de buralistes dans la Vienne, rappelez-nous ?
04:41 Un peu plus de 180.
04:41 Oui, donc ça couvre effectivement l'entièreté du département.
04:44 On est quand même bien implanté.
04:47 Je pense que pour les populations dans les zones rurales,
04:52 on est vraiment un commerce très important,
04:53 parce qu'on leur offre beaucoup de services.
04:55 Et ce serait franchement dommage
04:57 de voir certains de nos confrères disparaître
05:00 à cause justement de cette rentabilité
05:04 qui devient difficile avec la vente du tabac.
05:06 La diversification, justement, je crois que depuis le 1er janvier,
05:09 vous pouvez commencer à vendre des cartouches pour les chasseurs,
05:14 ou alors ça dépend des départements.
05:15 En tout cas, est-ce que vraiment c'est une source de revenus complémentaires
05:18 qui peut être importante ?
05:19 Tous ces traits anecdotiques.
05:21 De notre point de vue, ce sera marginal.
05:23 A savoir que ce n'est pas nous qui avons sollicité
05:25 auprès des services de l'État la possibilité de vendre des munitions.
05:30 Ça vient en fait de la Fédération des chasseurs,
05:33 qui s'inquiète un peu de la disparition aussi des armuriers
05:37 et qui veulent avoir un maillage un peu plus important pour les chasseurs.
05:44 Pas de quoi renverser la tendance pour vous.
05:45 Absolument pas, non.
05:46 Et donc sur ces prix du tabac,
05:49 que demandez-vous, vous, à la Fédération des Buralistes,
05:51 que ça s'arrête à un moment, qu'on arrête d'augmenter ?
05:52 Exactement.
05:53 Il y avait eu un rapport qui avait été rédigé
05:58 par Eric Wörth il y a quelques années,
05:59 qui mettait l'accent sur le fait qu'il y avait une forte disparité en Europe
06:05 au niveau des prix du tabac.
06:07 Rappelons ici qu'en Espagne, on est à un peu plus de 5 euros,
06:09 c'est à peu près dans ces valeurs-là au Luxembourg.
06:11 5 euros d'augmentation, c'est ça ?
06:13 Non, ils sont à 5 euros le paquet.
06:14 Ah pardon.
06:15 Ils sont à un peu plus de 5 euros le paquet.
06:17 Donc plus de 2 fois moins par rapport à la France.
06:19 Et citons par exemple le Luxembourg,
06:22 ce sont 3 milliards de cigarettes qui sont commercialisées dans ce pays chaque année,
06:26 alors que le besoin pour la population est de 600 millions.
06:30 Donc il y a 5 fois plus de cigarettes commercialisées au Luxembourg
06:34 que le besoin du pays.
06:36 Il faudrait quoi, harmoniser les tarifs au niveau européen ?
06:38 Demander à nos voisins d'augmenter aussi le paquet
06:40 pour atteindre quasiment le niveau chez nous en France ?
06:43 Je pense que la priorité c'est déjà de faire un moratoire sur les prix en France,
06:47 de maintenir le prix du paquet
06:51 et de faire en sorte qu'il y ait une harmonisation au niveau européen,
06:54 voire de mettre en place des quotas par pays.
06:59 Après on ne va pas vers la fin des augmentations.
07:01 Le paquet de cigarettes devrait coûter au minimum 13 euros en 2027,
07:03 c'est ce qu'annonce le gouvernement.
07:05 On va juste écouter une poids de vignes qui dit qu'à partir d'un certain seuil,
07:09 elle commencera à songer à arrêter de fumer.
07:11 De toute façon ça va augmenter jusqu'à ce qu'à un moment,
07:13 on n'a plus le pouvoir d'achat pour ça.
07:14 Un paquet de cigarettes à 25 euros, je pense que ça va en arrêter plus un.
07:17 Donc on va trouver des solutions avant.
07:19 On n'arrivera sûrement pas à 25 euros,
07:21 mais est-ce que vous comprenez l'objectif des pouvoirs publics
07:24 de dissuader notamment les jeunes de fumer par l'argument de l'argent ?
07:27 Parce qu'on le sait, le tabac...
07:28 Alors il y a des études de santé publique France qui estiment
07:31 que le tabagisme engendre le décès de plus de 75 000 personnes.
07:39 Alors il peut y avoir l'alcool à côté, etc.
07:42 Donc ce sont des estimations, mais c'est tout de même évidemment très important.
07:46 Ça coûte aussi aux finances publiques, les frais de santé, etc.
07:48 Vous comprenez qu'il faille peut-être aller vers une réduction du tabagisme en France ?
07:54 Nous, on ne conteste pas le fait qu'il y ait une politique de santé publique.
07:59 Moi-même, en tant que père de deux enfants,
08:02 je suis heureux de savoir qu'on ne vendra pas un paquet de cigarettes à mes enfants.
08:07 Donc ça, je ne le conteste pas.
08:08 Nous, ce qu'on conteste, c'est ce moyen qui est mis en œuvre par les pouvoirs publics
08:14 de toujours augmenter les prix,
08:17 qui nuit donc au pouvoir d'achat des consommateurs français
08:21 et qui nuit aussi à la rentabilité de nos petits commerces
08:24 qui, je le rappelle, sont considérés comme d'utilité locale.
08:28 Une dernière chose brièvement.
08:29 Vous êtes aussi buraliste dans le quartier des couronneries,
08:33 la galerie commerciale qui a été touchée par les émeutes fin juin.
08:35 Vous êtes commerçant dans le quartier.
08:37 Les travaux de démolition de ces commerces débutent aujourd'hui.
08:40 Ceux qui ont brûlé, est-ce qu'il était temps, en fin six mois d'attente ?
08:43 Oui, il était temps.
08:44 Après, on sait bien que ce genre de dossier prend du temps.
08:48 Il y a quand même beaucoup d'expertises qui ont eu lieu.
08:50 Vous attendez quoi de la mairie maintenant ?
08:51 Maintenant, on attend de la mairie qu'elle mette tout en œuvre
08:54 pour que le centre commercial puisse être reconstruit le plus vite possible
08:58 et que, je pense notamment à ma collègue,
09:00 elle puisse retrouver son commerce, son tabac.
09:04 Je pense que c'est très très attendu par la population locale
09:08 qui a vu disparaître sa poste,
09:11 enfin voilà, tous les services dont elle avait besoin.
09:13 Je pense que si un message à adresser à la mairie de Poitiers,
09:17 c'est de faire le maximum pour que notre quartier
09:22 puisse revivre le plus tôt possible.
09:24 Merci Hervé Vaindevaugel d'avoir été notre invité ce matin.
09:27 Écoutez, franchement, c'était avec plaisir.
09:29 Et bonne journée à vos auditeurs.
09:30 (Générique)

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