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  • il y a 2 ans
Nous avons interviewé Marc Dufumier, agronome, ancien enseignant-chercheur à AgroParisTech, auteur de nombreux livres : L’agroécologie peut nous sauver, De la terre à l’assiette... avant sa conférence intitulé "L’agro-écologie pour faire face au changement climatique et la pluviométrie."

Cette conférence avait lieu dans le cadre du "Carrefour des Transitions", 2 jours pour découvrir les initiatives du territoire autour de la transition, à travers des animations, des expositions, des débats, des ateliers, les 8 et 9 octobre 2023 à la Halle Raphalen de Plonéour Lanvern (Finistère)

En 2022, un groupe de personnes membres des associations Citoyens à Plonéour (Plonéour-Lanvern 29) et Sur un Air de Terre (Pont-L’Abbé 29) se sont organisées en Comité de Pilotage pour mener un projet de Carrefour des Transitions pour mettre en avant les initiatives locales inspirantes. Ce projet a tout de suite trouvé écho, auprès d’une cinquantaine d’associations du Pays Bigouden et autant de commerçants artisans qui se sont joints à nous.

Mettre en lumière les initiatives existantes, toucher un public le plus large possible, faire se rencontrer les différents acteurs et initier les actions futures. L’évènement de 2022 n’est donc pas une fin en soi mais l’amorce d’une démarche de transformation réelle et durable du territoire.

Le changement climatique, la pollution de la terre, de l’eau et de l’air entraînent de graves perturbations sur le Vivant. De nombreuses instances internationales, nationales et locales en font l’écho chaque jour et la prise de conscience de chacun-e est de plus en plus grande.
Nous n’avons pas d’autre choix que d’agir à tous les niveaux. Sans changement majeur, la vie sur la planète est gravement menacée.
Sur notre territoire, les initiatives des élu-e-s, des citoyen-ne-s, des entreprises et des associations sont déjà nombreuses.
Ensemble, nous pouvons créer un grand mouvement pour mettre en avant les idées et pratiques et pour montrer que l’intelligence collective peut apporter des solutions.

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Transcription
00:00 [Musique]
00:10 Je suis professeur à l'Institut National Agronomique de Paris-Grignon, qu'on appelle aujourd'hui Agro-Paris Tech.
00:16 Je suis à la retraite depuis une douzaine d'années.
00:19 J'ai eu la chance de pouvoir travailler dans les pays qu'on qualifiait du tiers-monde autrefois,
00:24 on dit les pays du sud aujourd'hui.
00:26 J'ai même coutume de dire que c'est dans ces pays où j'ai été initié à ce qu'on appelle l'agroécologie.
00:32 L'agroécologie, c'est ce dont je vais parler là cet après-midi.
00:36 Je vais présenter ça comme une discipline scientifique, la discipline des agroécologues,
00:40 mais c'est une source d'inspiration pour des formes d'agriculture alternative
00:44 avec l'idée de pouvoir nourrir correctement et durablement l'humanité tout entière,
00:50 sans faim, sans malnutrition, sans hormones dans le lait, sans antibiotiques dans la viande,
00:55 sans perturbations endocrinales dans les fruits et légumes,
00:57 sans érosion des sols, sans perte de biodiversité.
01:00 On va ressusciter les pollinisateurs et en plus s'adapter au réchauffement climatique global,
01:06 qui est aussi un dérèglement climatique, à savoir des accidents,
01:09 une fréquence et une intensité accrue des accidents climatiques extrêmes,
01:13 les inondations, les canicules, les sécheresses et autres.
01:16 Il y a l'urgence de pouvoir aujourd'hui mettre en œuvre des formes d'agriculture alternative très différentes.
01:23 C'est ça dont on va parler, très différentes de celles auxquelles on s'est accoutumés,
01:28 l'agriculture industrielle.
01:30 Ce sont des formes d'agriculture très savantes, mais qui sont très artisanales.
01:35 C'est une agriculture, c'est soigné, c'est bichonné, c'est exigeant au travail.
01:39 C'est évidemment très économe en intrants de synthèse, donc très peu d'énergie fossile,
01:44 pas de produits pesticides et des intrants de synthèse le moins possible.
01:49 Donc on va faire un usage intensif à l'hectare de ce qui est gratuit et renouvelable.
01:54 Pour fabriquer nos calories alimentaires, on va utiliser l'énergie solaire,
01:58 pas de pénurie avant 10 milliards d'années.
02:00 Pour fabriquer nos hydrates de carbone, l'amidon, le glucose, le fructose, les lipides,
02:04 les molécules carbonées, on va prendre le carbone du gaz carbonique de l'atmosphère.
02:08 Il y en a trop.
02:09 Donc faisons un usage intensif à l'hectare de ces rires du soleil,
02:12 faisons un usage intensif à l'hectare de ce gaz carbonique pléthorique qui nous est donné gratuitement.
02:18 La plante va prendre le gaz carbonique, va libérer de l'oxygène, ce n'est pas mauvais pour nos poumons,
02:24 et avec ce carbone, va nous fabriquer des hydrates et tout,
02:26 et même peut-être d'ailleurs de la paille, des racines,
02:28 qui si ça se décompose bien, permettent de séquestrer du carbone dans le mus des sols.
02:33 Donc l'agriculture servit de l'intérêt général qui va contribuer à atténuer ce dérèglement climatique,
02:37 atténuer ce réchauffement climatique en atténuant la teneur de gaz carbonique dans les sols.
02:42 Et puis c'est quand même vrai qu'on a aussi besoin de protéines,
02:44 c'est des molécules azotées, mais où trouve-t-on l'azote ?
02:46 L'azote de l'air, 79% d'azote dans l'air, pas de pénurie avant des siècles,
02:50 on va faire un usage intensif de cet azote de l'air,
02:53 mais on sait que quand même fabriquer des protéines c'est coûteux en énergie,
02:56 et là l'agriculture industrielle apporte des engrais azotés de synthèse,
03:00 du rai, l'ammonitrate, le sulfate d'ammonium,
03:03 mais qui ont été coûteux en énergie fossiles, du gaz naturel russe,
03:07 je vous dis ça pour vous faire peur,
03:09 donc ça c'est des huées, c'est passé,
03:11 la dépendance à l'égard des huées fossiles,
03:14 la dépendance éventuellement à l'égard de la Russie,
03:16 les quelques bénéficiaires de ces puits pétroliers,
03:20 mais l'alternative que connaissent tous les paysans du monde,
03:23 ce sont ces fameuses légumineuses, les trèfles, les saufoins, les lentilles, les musernes,
03:26 les lentilles, les pois chiches, l'haricot, ça peut être du soja,
03:29 mais pourquoi aller chercher du soja au Brésil, Transiligne ?
03:32 Est-ce qu'on ne pourrait pas en France, avec des lupins, des pois fourragés,
03:36 nourrir nos volagnes, nourrir nos cochons, sans avoir à porter ce soja,
03:40 sans avoir besoin de déforester la forêt amazonienne,
03:42 parce que là aussi ça contribue à la perte de biodiversité,
03:45 et ça contribue au réchauffement climatique.
03:47 C'est juste pour vous dire, alors évidemment, c'est d'ailleurs assez étrange,
03:50 parce qu'on me dit toujours la terre nourricière, la pancha mama, la mer terre,
03:55 et moi je vous dis, non, l'énergie elle vient de là-haut,
03:58 le gaz carbonique il vient de là-haut, le gaz carbonique, l'azote,
04:02 en fait c'est très important l'écologie du sol,
04:06 parce que si on veut vraiment pouvoir mettre à profit ces ressources renouvelables,
04:11 gratuites, pléthoriques, eh bien il faut gérer au mieux l'eau,
04:15 il est impératif que la plante puisse transpirer,
04:18 puisque le gaz carbonique va rentrer dans la plante,
04:20 et ça rentre dans les petits trous par lesquels la plante transpire.
04:23 Et donc il est impératif que même au mois d'août, quand il ne pleut pas,
04:27 la plante ait suffisamment d'eau en réserve dans le sol,
04:30 pour continuer de transpirer, avec les petits trous ouverts,
04:33 parce que sinon, s'il n'a pas assez d'eau à boire dans le sol,
04:36 la plante, même s'il y a les rayons du soleil qui tombent sur la feuille,
04:39 eh bien c'est raté, parce qu'elle ne peut plus transpirer,
04:42 elle ferme les orifices pour ne pas se déshydrater,
04:44 et du coup les rayons de soleil ne servent plus à rien,
04:46 parce que le gaz carbonique ne peut plus rentrer.
04:49 Donc oui c'est la gestion de l'eau aujourd'hui,
04:51 qu'il nous faut gérer de façon la plus astucieuse qui soit,
04:55 et évidemment la seule eau qui nous est donnée gratuitement, c'est l'eau de pluie,
04:58 on sait que cette eau de pluie, elle nous est offerte,
05:01 de façon de plus en plus chaotique, sécheresse, inondation et autres,
05:04 mais néanmoins, c'est bien celle-là dont on va faire l'usage,
05:07 on n'est pas obligé, alors ce n'est pas la Bretagne qui est tellement concernée,
05:10 mais un peu plus au sud, c'est l'histoire des bassines,
05:13 il ne faut pas forcément aller chercher ça dans la lap créatique,
05:15 il ne faut pas forcément passer dans les rizières,
05:17 et il n'y aurait plus de poissons à la période de laitillage,
05:19 non non, c'est l'eau de pluie,
05:21 mais du coup on va empêcher son ruissellement, on va remettre des haies,
05:24 on va empêcher son ruissellement, la couverture végétale la plus totale possible,
05:26 d'ailleurs c'est cette couverture végétale la plus totale possible
05:29 qui va pouvoir intercepter l'énergie solaire,
05:31 mais c'est aussi elle qui va empêcher le petit filet d'eau de descendre,
05:33 donc on évitera des inondations dans la vallée,
05:36 Morlaix n'aura plus rien à craindre,
05:38 et puis on va remettre des prairies permanentes, des prairies temporaires,
05:42 ce n'est pas forcément de mettre du maïs et fabriquer de l'encilage,
05:46 donc on va devoir renourrir nos animaux d'une autre façon,
05:49 d'ailleurs si on pouvait remettre nos animaux sur la paille,
05:52 l'azote de l'urine n'irait pas fertiliser des algues vertes,
05:56 ce serait du fumier, et l'azote de l'urine et le carbone de la paille,
06:00 on fait du fumier et hop, ça fabrique de l'humus,
06:02 et ça séquaisse du carbone dans l'humus des sols,
06:04 ça évite l'érosion des sols et ce genre de choses,
06:06 enfin oui, finalement on n'est pas sans solutions techniques
06:09 pour nourrir correctement et durablement l'humanité toute entière,
06:11 et durablement y compris pour le bien des générations futures,
06:14 un sol qui conserve son humus, même dont on accroît le taux d'humus,
06:18 un sol qui restera fertile,
06:20 donc pour les générations futures,
06:22 pas de perturbateurs endocrinaires dans les fruits et légumes,
06:24 pas d'antibiotiques dans la viande, pour ne pas développer d'antibiotiques résistants,
06:27 et puis un environnement dans lequel il y a encore une énorme biodiversité,
06:30 des pollinisateurs, des coccinelles qui vont s'attaquer aux puissons,
06:33 des carabes qui vont s'attaquer aux limaces,
06:34 les mésanges bleus vont s'attaquer aux papillons de nuit,
06:36 on aura même des pommes sans lait,
06:38 l'arbre de Carpoclaste, et sans pesticides,
06:40 oui oui, il y a des solutions, il faut presque décourager.
06:43 [Musique]