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Des services d'urgences continuent de fonctionner au ralenti à cause du manque de soignants, déplore le président de SAMU-Urgences de France, Marc Noizet.

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00:00 Pendant sa campagne pour sa réélection, Emmanuel Macron avait fait de la santé un
00:04 des deux chantiers majeurs du quinquennat avec l'éducation.
00:07 En janvier 2023, il annonçait un plan pour, promettait-il alors, sortir le système de
00:12 soins d'une crise sans fin.
00:14 Où en est-on un an plus tard ? Pénurie permanente de soignants, crise à l'hôpital, grève
00:19 successive chez les médecins libéraux et au gouvernement valse des ministres de la
00:24 santé.
00:25 Pour en parler ce matin, deux invités, Frédéric Valtoux, bonjour.
00:28 Vous êtes député horizon, ancien président de la Fédération hospitalière de France,
00:32 auteur d'une loi qui vient d'être adoptée sur l'accès aux soins et les déserts médicaux.
00:37 On en reparlera évidemment.
00:38 Et Marc Noiset, bonjour, à distance avec nous ce matin, on va essayer de le retrouver.
00:45 Marc Noiset, président de SAMU Urgences de France et chef des urgences de l'hôpital
00:49 de Mulhouse.
00:50 Auditrices et auditeurs, j'attends bien sûr vos questions et réactions au 01 45 24 7000
00:55 et via l'onglet Réagir de l'application France Inter.
00:58 Alors d'abord, si Marc Noiset nous a rejoint, un petit mot avec vous Marc Noiset à Mulhouse
01:03 de l'actualité chaude, c'est-à-dire la situation des hôpitaux dans cette semaine
01:08 à risque si je puis dire, entre Noël et Nouvelle-Ande et soignants en vacances forcément.
01:12 Quelle est la situation à l'heure où l'on se parle, chez vous par exemple, dans votre
01:15 service d'urgence et ailleurs en France ?
01:17 Alors j'aurais adoré pouvoir vous dire que tout se passe bien en cette période de Noël
01:22 parce que les soignants en ont besoin, mais malheureusement ce n'est pas le cas et rien
01:27 d'étonnant.
01:28 On va s'offrir un petit tour de France.
01:30 Le CHU de Strasbourg a été obligé de déployer une unité sanitaire devant ses urgences pour
01:35 éviter l'engorgement et les files d'attente de 8 à 10 heures des ambulances devant son
01:40 service.
01:41 Dans le Finistère, trois services d'urgence sont rentrés dans un mouvement de grève
01:46 début décembre juste pour avoir le droit de pouvoir exercer en fonction de la démographie
01:51 des médecins urgentistes qui avaient dans leur service.
01:54 A Bordeaux, on n'a plus la capacité de décrocher au centre 15 avec le personnel et on est obligé
01:59 de trouver des mesures extérieures au service pour pouvoir faire fonctionner le centre 15.
02:04 Dans le Var, c'est un service d'urgence sur deux qui ferme dorénavant la nuit.
02:08 Vous savez que la population du Var est nombreuse et que ça pèse lourdement, notamment en période
02:12 estivale.
02:13 Donc voilà un petit tour de France très vite fait pour vous dire que, eh bien non,
02:17 rien n'a changé.
02:18 Alors on en entend moins parler, c'est d'ailleurs assez surprenant.
02:21 Il y a une forme de résignation des personnels soignants, mais qui sont également très
02:28 fortement en attente de la suite.
02:30 Mais alors est-ce que c'est lié aussi aux épidémies hivernales, la fameuse triple
02:34 épidémie bronchiolite, Covid, grippe ou sana finalement ? Presque plus rien à voir avec
02:39 ça aujourd'hui.
02:40 Ah non, évidemment, nos services d'urgence et nos établissements actuellement sont saturés,
02:46 comme tous les hivers, et cette année, encore une fois, on a la problématique de la conjonction
02:50 de plusieurs épidémies.
02:51 Alors la bronchiolite est un tout petit peu dans notre dos parce qu'on est sur la pente
02:55 de décroissance.
02:56 Par contre, la grippe est en pleine ascension, notamment dans la partie grand, enfin, est
03:00 de la France, du nord au sud.
03:02 Et on a également une recrudescence du Covid.
03:05 Alors rien à voir avec ce qu'on a connu l'hiver dernier, en 2022.
03:08 Mais néanmoins, on a quand même beaucoup plus de cas de Covid et on sent véritablement,
03:12 une fois, l'épuisement de la problématique de la vaccination, qui après les moultes
03:19 problématiques et discussions qu'il y a eu autour du Covid, eh bien, il y a un retentissement
03:24 important, notamment sur la grippe, où la campagne de vaccination n'a pas été à
03:28 la hauteur de nos attentes.
03:29 Vous parliez d'une forme de résignation.
03:32 Frédéric Valtout, si je prends l'exemple de l'Alsace où travaille Marc Noiset, on
03:36 a des plans blancs qui ont été déclenchés pour toute l'Alsace il y a quelques jours.
03:41 C'est devenu presque habituel, les plans blancs, ça n'a presque plus rien d'exceptionnel
03:45 à l'hôpital.
03:46 Ça ne fait pas la une.
03:47 Il y a une résignation.
03:49 On s'est habitué à cette situation de tension et de crise permanente à l'hôpital ?
03:53 Alors sur les plans blancs, il y a plusieurs degrés de plans blancs et le plan blanc qui
03:56 a été activé dans le Grand Est n'implique pas la convocation des personnels et le rappel
04:04 de personnels qui sont en congé.
04:06 Donc il y a plusieurs degrés dans les plans blancs.
04:07 Mais effectivement, les plans blancs, l'hiver, il y en a quasiment malheureusement chaque
04:13 année.
04:14 C'est lié à la situation épidémique.
04:16 Ça n'est pas lié qu'au sujet de la désorganisation ou de la pression sur l'hôpital.
04:20 Mais c'est vrai que pour revenir à votre question, non, il ne faut pas s'habituer
04:24 à la résignation et il ne faut pas s'habituer à cette situation.
04:27 Mais il faut voir aussi une chose, c'est que la situation qui est décrite très bien,
04:33 ce n'est pas simplement la désorganisation de l'hôpital ou les difficultés de l'hôpital.
04:37 C'est les difficultés globales du système de santé qui pèsent aussi sur l'hôpital.
04:42 C'est-à-dire, effectivement, l'hôpital, c'est un peu la variable d'ajustement des
04:47 dysfonctionnements de l'ensemble du système.
04:49 De ce qui est en dehors de l'hôpital.
04:50 Et quand à Strasbourg, ils mettent en place un service d'accueil de "tri" des patients
04:58 qui viennent aux urgences, qui sont gérés par les pompiers, c'est bien parce que certains
05:01 relèveraient normalement la médecine de ville.
05:03 Mais la difficulté, effectivement, c'est que la crise, elle est aussi dans la médecine
05:08 de ville, malheureusement.
05:09 Un chiffre est tombé la semaine dernière.
05:10 6700 lits d'hospitalisation complète supprimés l'an dernier.
05:14 Pour le gouvernement, ce n'est pas pour des raisons budgétaires, mais avant tout parce
05:17 qu'il n'y a pas assez de soignants.
05:18 Toujours cette pénurie.
05:19 Je vais vous poser la question à tous les deux.
05:21 D'abord, Frédéric Valtoux, qu'en dites-vous ? Ce n'est vraiment plus une question, une
05:25 problématique budgétaire ? C'est uniquement de la pénurie de soignants ?
05:27 Pendant des années, on a fermé des lits pour des raisons budgétaires et comptables,
05:33 très clairement.
05:34 A partir des années 2005-2007 jusqu'à la fin des années 2010, on a régulé le système
05:41 de santé en fermant des lits.
05:42 Aujourd'hui, réellement, c'est une question de recrutement, mais c'est aussi une question
05:46 d'évolution du système de santé.
05:48 Parce que ce qu'on ne dit pas, c'est que dans le même temps, il y a 2700 lits qui
05:51 ont été créés, qui sont des lits d'ambulatoire, c'est-à-dire de l'hospitalisation le jour.
05:55 Et donc, c'est cette adaptation du système de santé qui fait que, comme on garde moins
05:59 les gens, on ferme des lits d'hospitalisation complète pour des lits d'hospitalisation
06:05 de jour, dont on sait d'ailleurs qu'on fait passer plus de patients dans un même
06:09 lit, si on peut dire ça comme ça, en tout cas dans un même service.
06:11 Et donc, c'est une évolution aussi du système de santé.
06:14 Je ne dis pas que c'est la seule explication.
06:16 L'explication principale reste que les tensions sur les recrutements.
06:19 Et là où on peut recruter, on réouvre des lits.
06:21 Dans mon hôpital du Sud-Sélémarne, on a réouvert des lits parce qu'on a pu recruter
06:25 des professionnels.
06:26 Il y a quelques frémissements justement à la PHP.
06:29 Il y a quelques signaux positifs.
06:30 La PHP, 400 lits annoncés réouverts en septembre.
06:34 Le CHU de Grenoble a annoncé aussi qu'ils réouvraient des lits parce qu'ils ont pu
06:37 recruter.
06:38 Donc, ce n'est pas une volonté de réguler budgétairement par la fermeture des lits.
06:42 C'est dès qu'on a des professionnels, on peut réouvrir des lits.
06:44 Docteur Noisez, vous êtes d'accord avec ce diagnostic ?
06:46 Alors, le diagnostic est juste.
06:49 Effectivement, il y a eu une contrainte budgétaire qui était très forte avec une volonté de
06:53 changer la trajectoire du mode d'hospitalisation avec l'ambulatoire, donc ces hospitalisations
06:58 de jour.
06:59 Simplement, on n'a pas piloté le reste de l'hôpital.
07:01 C'est-à-dire qu'on ne s'est pas dit jusqu'où doit-on aller et qu'est-ce qu'on doit garder
07:04 dans nos hôpitaux.
07:05 Donc, on est quand même sur une contrainte budgétaire, malgré tout, qui consiste à
07:09 dire qu'aujourd'hui, la tarification est toujours à l'activité, même si on sait
07:13 que dans la PLFSS qui a été votée, on a un démarrage.
07:16 C'est une promesse du président Macron, la fin progressive de la tarification à l'acte.
07:20 Tout à fait.
07:21 Mais on n'en voit pas encore arriver les effets.
07:23 Donc, on continue à demander aux hôpitaux de remplir les lits à 100% et on sait que
07:27 ce n'est pas possible de garder une place pour l'activité non programmée, l'activité
07:31 d'urgence, quand on est tout le temps plein.
07:32 Et c'est ce qu'on constate.
07:33 Et c'est la raison pour laquelle tous les jours, dans les services d'urgence de France,
07:37 il y a des fils de patients qui attendent qu'un lit d'hospitalisation puisse se libérer.
07:41 Et qu'on sait que c'est parfaitement délétère, notamment pour les patients les plus âgés
07:45 qui ont une mortalité qui est augmentée à chaque fois qu'ils passent une nuit sur
07:49 un brancard dans un service d'urgence.
07:50 Donc, il y a cette problématique.
07:52 Mais deuxièmement, il y a également la problématique de l'attractivité.
07:54 Parce qu'on dit qu'il y a une problématique de démographie.
07:57 Mais il faudrait savoir pourquoi il y a une problématique de recrutement à l'hôpital
08:00 public.
08:01 Et l'attractivité, ce n'est pas que la problématique de la paie.
08:06 Et ce sera important.
08:07 Alors justement, il y a eu les revalorisations du Ségur.
08:10 Il y a, à partir du 1er janvier, la revalorisation des gardes de nuit et de week-end à l'hôpital.
08:16 Vous dites quoi ? C'est un premier pas ? Ou c'est que le petit bout de la lorniette ?
08:20 Les deux.
08:21 Alors le Ségur, vous savez qu'effectivement, il y a une revalorisation importante.
08:25 Mais qui a oublié une part des praticiens hospitaliers, qui est quand même majoritaire
08:31 aujourd'hui.
08:32 Donc pour parler des médecins, les jeunes médecins sont mieux payés que des médecins
08:35 qui sont là depuis 5 ou 6 ans à l'hôpital.
08:37 Cherchez la logique.
08:38 Pour les personnels soignants, effectivement, là, le 1er janvier, il y a une revalorisation
08:43 du travail de nuit et de week-end.
08:44 Et c'est très bien.
08:45 On souhaite que ça continue comme ça.
08:48 Mais derrière ça, la revalorisation, c'est aussi les conditions d'accès.
08:51 C'est aussi la façon dont les gens peuvent travailler tous les jours dans leur service.
08:55 Si je peux reparler des services d'urgence, aujourd'hui, les professionnels souhaitent
09:00 juste que ces conditions de travail soient restaurées.
09:02 Pouvoir soigner un patient de manière respectueuse, dans la confidentialité, dans l'intimité,
09:06 et non dans un couloir.
09:07 Pouvoir offrir à chaque patient un lit d'hospitalisation sans devoir le faire attendre 24 heures, comme
09:12 je le disais, avec le risque d'augmenter sa mortalité.
09:15 Ça, c'est des choses simples qui redonneraient du sens aux soignants.
09:18 Et les soignants ont besoin de ça.
09:19 - Frédéric Valtho, Frédéric Valtho, là-dessus.
09:22 - Oui, on a quand même changé d'époque un chiffre.
09:26 On a demandé aux hôpitaux, jusqu'en 2018-19, 10 milliards d'euros d'économie sur 10 ans.
09:34 Ce qui a été un effort financier énorme.
09:35 On parlait de l'adaptation au nombre de lits.
09:36 On a changé d'époque parce qu'aujourd'hui, on a remis du vent dans les voiles.
09:40 On a remis du budget.
09:43 Il y a eu effectivement les 8 milliards d'euros sur les rémunérations des soignants.
09:49 Il y a eu les mesures pouvoir d'achat l'année dernière, qui ont d'ailleurs concerné l'ensemble
09:53 des fonctionnaires.
09:54 Il y a eu la revalorisation des points d'indice, qui ont aussi concerné l'ensemble des fonctionnaires,
09:59 mais donc aussi les hospitaliers.
10:00 Et puis, il y a cette revalorisation du travail de nuit, qui était très demandée et attendue
10:04 et normale, normalement attendue par les hospitaliers.
10:08 Donc aujourd'hui, on voit qu'on est dans une logique d'accompagnement qui est très différente.
10:12 Bien sûr, ça va prendre du temps et des années parce qu'on partait de très très
10:16 bas.
10:17 - Alors justement, en janvier dernier, il y a eu ce grand plan promis par Emmanuel Macron
10:20 pour sortir le système de santé de la crise.
10:23 Recrutement d'assistants médicaux, revalorisation de la permanence des soins pour les médecins
10:27 libéraux.
10:28 On en parlait fin de la tarification à l'acte.
10:31 On en est où un an après ?
10:32 - Écoutez, il y a certaines mesures qui figurent dans la proposition de loi que j'ai eu l'honneur
10:37 de défendre et de faire voter, puisqu'elle doit sortir au JO dans quelques jours.
10:41 - Mais il y avait par exemple cette promesse très forte.
10:44 - Il y avait la promesse sur la permanence des soins que les cliniques allaient d'un
10:46 oreille d'avant partager et assumer la permanence des soins auprès de l'hôpital.
10:51 Il faut savoir aujourd'hui que 85% de la permanence des soins de l'établissement est portée
10:55 par l'hôpital.
10:56 Un blessé qui est au bord de la route, qui a besoin d'une intervention chirurgicale,
11:00 presque 9 fois sur 10, il est emmené à l'hôpital.
11:03 Demain, la charge va se répartir entre le public et le privé, là où bien sûr il
11:07 y a des établissements privés.
11:08 Et ça va malgré tout soulager aussi l'hôpital.
11:10 - Mais il y a eu des promesses très fortes qui n'ont pas été tenues.
11:12 Tous les malades chroniques devaient avoir un médecin traitant d'ici la fin 2023.
11:17 Là, sur les 700 000 dans ce cas, la ministre Firmin Le Baudot a reconnu récemment que
11:21 seuls 180 000 en avaient retrouvé un.
11:24 Ça c'était une promesse forte, très concrète, qui n'a pas été tenue.
11:27 - C'est en cours, mais effectivement on peut dire qu'au 1er janvier la promesse ne sera
11:31 pas au rendez-vous, puisqu'il n'y a qu'une partie du chemin qui a été faite, il y a
11:36 une grande partie qui reste à faire.
11:37 - Vous évoquiez votre loi adoptée définitivement la semaine dernière avec toute une série
11:42 de mesures.
11:43 Interdiction de l'intérim pour les jeunes diplômés, des mesures contre le nomadisme
11:45 médical, d'autres pour les déserts médicaux.
11:47 Par exemple un médecin qui souhaite s'arrêter définitivement, il devra prévenir six mois
11:51 avant l'ARS.
11:52 Nombreuses mesures, mais rien de coercitif.
11:55 Aucune obligation d'installation, aucune mesure de régulation.
11:58 Il sert vraiment à quelque chose ce texte ?
12:00 - Alors d'abord la coercition, moi je ne suis pas défavorable sur le fond, je suis défavorable
12:04 aujourd'hui.
12:05 Je trouve que d'obliger des médecins à aller travailler dans certains endroits, quand
12:09 on a si peu de médecins, jeunes médecins, qui entrent dans la carrière, à répartir
12:14 dans le territoire, c'est un peu vain et c'est malheureusement un chiffon rouge.
12:17 C'est-à-dire que c'est le risque qu'une partie d'entre eux pose leur valise, change
12:20 de métier et finalement ne serve pas ce pour quoi ils ont été formés.
12:23 Et évidemment le résultat, de manière très concrète, serait absolument nul.
12:27 Le jour où on retrouvera des effectifs plus importants de médecins qui rentrent dans
12:32 la carrière, là on pourra effectivement, on essaie de réfléchir avec la profession,
12:35 mettre en place un système où on évite les erreurs du passé, c'est-à-dire la concentration.
12:39 Aujourd'hui un spécialiste sur 4 est concentré sur 5% du territoire, ce qui est énorme.
12:44 Et donc évidemment il faut arriver à inventer, à mettre en place avec la profession, un
12:48 système de meilleure régulation de l'installation.
12:51 - Mais pourquoi vous n'êtes pas allé plus loin ? Parce que c'est un chiffon rouge, c'est
12:53 les syndicats de médecins ?
12:54 - Parce qu'on a été jusque là où on pouvait penser que ce serait acceptable par la profession.
13:01 Il faut emmener avec nous les professionnels de santé lorsqu'on a aussi peu aujourd'hui,
13:05 on a une telle crise, il y a aujourd'hui plus de médecins qui quittent la profession que
13:09 de médecins qui rentrent dans la profession.
13:11 Et l'urgence est telle qu'il faut effectivement amener avec nous les patients.
13:15 Après les syndicats de médecins c'est le gouvernement qui les a traités, c'est pas
13:19 toujours des gens faciles et très ouverts.
13:21 - A ce propos Marc Noiset, vous êtes à l'hôpital, mais quel est votre avis sur cette loi et
13:27 ses limites ? Est-ce qu'il y a un problème de corporatisme chez les médecins qui fait
13:30 qu'on ne peut pas aller plus loin sur les déserts médicaux ?
13:32 - A l'évidence, il y a un problème de corporatisme, il y a un problème de crainte de se voir imposer
13:37 des choses.
13:38 C'est un esprit qui est très français.
13:40 Néanmoins aujourd'hui on a des déserts médicaux.
13:42 Alors la solution d'imposer le lieu d'exercice n'est sans doute pas la meilleure, mais elle
13:49 fait partie de ce qui pourrait être tout à fait entendable, d'autant plus en espèce
13:53 de retour sur l'investissement qu'a fait l'État sur la formation des professionnels
13:59 de santé.
14:00 En tous les cas, on a besoin de réhabiter nos territoires, ça c'est une certitude,
14:03 et puis on a besoin de partager différemment la tâche.
14:08 On en parlait tout à l'heure sur la permanence des soins en établissement de santé.
14:11 Oui, effectivement, 85% est assuré aujourd'hui par l'hôpital public.
14:14 Et c'est ce qui fait fuir les praticiens.
14:15 Parce que vous savez, les jeunes chirurgiens sont comme tout le monde dans la population.
14:19 Ils n'ont pas envie de travailler la nuit, ils n'ont pas envie de travailler les week-ends.
14:21 Or, dans l'établissement de santé privé, on n'opère pas la nuit, on n'opère pas
14:25 les week-ends.
14:26 Et ça c'est la réalité.
14:27 On est en train, tout doucement, de saigner l'hôpital public de ses professionnels les
14:31 plus experts.
14:32 Donc on avait besoin effectivement d'une loi, c'est la loi de M.
14:36 Valtout, sauf qu'elle est, encore une fois, très participative.
14:40 On demande aux établissements de santé d'être volontaires.
14:42 Et s'ils ne sont pas, on demande à l'ARS de les réunir et de trouver une solution.
14:46 Alors une question là-dessus, justement, contrainte ou non, une question là-dessus
14:49 au standard.
14:50 Bonjour Irène.
14:51 Oui, bonjour.
14:52 En fait, je pense à toute l'équipe d'abord et à vos intervenants.
14:54 Je pense en fait que vous avez dit ce que je pensais, à savoir cette obligation.
15:00 J'entends les arguments, c'est pas facile.
15:02 À l'Assemblée, vous avez eu du mal à voter parce que je crois que le Front National
15:06 a voté contre et puis les médecins sont surreprésentés à l'Assemblée.
15:10 Donc c'est pas facile.
15:12 Vous n'avez peut-être pas pu aboutir, je l'entends bien.
15:15 Pourtant, moi, il me semble que les étudiants, notamment en médecine, leurs études sont
15:21 payées par nos impôts.
15:23 Et que ça devrait faire partie des obligations.
15:28 Ils doivent rendre à l'État et à nous un petit peu…
15:33 Un juste retour des choses selon vous, Frédérique Walthout.
15:37 D'autres étudiants sont dans ces situations.
15:41 Dans de nombreux corps d'État, les étudiants, après, je crois même que notre président,
15:46 lui, pour ses besoins de cette obligation, avait dû payer, rembourser quelque chose.
15:52 C'est particulier pour les étudiants qui sont considérés comme fonctionnaires dans
15:56 certaines filières.
15:57 Frédérique Walthout là-dessus.
15:58 Alors dans cette proposition de loi, qui n'est qu'une proposition de loi et qui
16:00 évidemment ne résout pas tous les maux du système de santé, sinon ça se saurait,
16:05 mais qui essaie de faire bouger les lignes, il y a aussi l'extension du contrat d'engagement
16:09 de services publics.
16:10 C'est-à-dire le contrat que peut signer l'État avec les étudiants.
16:13 On la baisse dès la deuxième année, là où jusqu'à présent c'était à partir
16:15 de la cinquième année.
16:16 Donc dès la deuxième année et on étend à toutes les études médicales la possibilité
16:20 pour un étudiant de percevoir en contrepartie d'une indemnité mensuelle, il s'engage
16:25 à aller travailler dans des zones qui sont des zones soudantes.
16:29 C'est là où on a besoin d'eux.
16:31 Donc on progresse dans cette voie-là, de même qu'on a progressé avec la suppression
16:35 du numerus clausus, puisqu'aujourd'hui il y a quand même 15 à 20% d'étudiants
16:38 en plus en deuxième année qu'il n'y en avait pas en 2019.
16:40 C'est-à-dire que c'est un long chemin bien sûr à faire.
16:42 Ça va mettre 10 ans à se voir.
16:43 Oui, mais bien sûr ça va mettre 10 ans à se voir.
16:44 Mais si on ne change jamais les choses, même 10 ans après, il n'y aura pas d'impact.
16:47 Progressivement, c'est un pack-ballant le système de santé.
16:50 Enfin, c'est un pack-ball le système de santé.
16:51 Entre le moment où on donne un coup de barre et le moment où il manœuvre, il se passe
16:54 du temps.
16:55 Et effectivement, on va voir dans les années qui viennent à nouveau plus d'étudiants.
16:57 Mais aujourd'hui, les bonnes mesures sont prises pour que demain ça aille mieux.
17:01 Il y a juste un passage qui va être difficile et douloureux.
17:03 C'est les prochaines années où effectivement on risque de voir la situation continuer
17:07 malheureusement à se tendre.
17:08 Donc, des urgences à gérer.
17:10 Et pour ne rien arranger, l'aval des ministres de la Santé.
17:13 Cinq ministres en deux ans.
17:14 Aurélien Rousseau vient de démissionner sur fond des accords sur la loi immigration.
17:17 Sa remplaçante, Agnès Firmin, le bodo à peine nommé, déjà fragilisé en raison
17:21 d'une enquête qu'il avise dans ses précédentes fonctions de pharmacienne.
17:24 Marc Noiset, j'imagine que ce n'est pas aisé pour vous de changer d'interlocuteur,
17:30 surtout vu les enjeux ?
17:31 C'est même impossible.
17:34 On commence à établir une relation de connaissance.
17:37 Et notre ministre s'en va.
17:41 Notre président de la République fait des engagements très forts le 6 janvier dernier.
17:46 Et comment voulez-vous qu'un ministre qui s'en va au bout de six mois après ses engagements,
17:50 puis le suivant qui s'en va de nouveau au bout de six mois, que ses engagements soient
17:53 portés par le ministre qui est en charge de les mettre en œuvre ?
17:57 Donc, évidemment, tout ça crée des distances qui sont encore beaucoup plus longues et une
18:02 absence de visibilité.
18:03 Je pense que les professionnels de santé et la population ont besoin de cette visibilité.
18:08 Vous savez, la santé, c'est la première préoccupation des Français.
18:11 Dans les enquêtes d'opinion, les enquêtes de l'IFOP notamment, la dernière enquête
18:17 de l'IFOP le montre.
18:18 C'est 83% des Français qui mettent ça en numéro un, devant le pouvoir d'achat.
18:22 Donc c'est bien la preuve qu'il y a une vraie difficulté.
18:25 Et nos politiques aujourd'hui ont du mal à porter ça.
18:28 Parce que comme le disait M.
18:29 Valtout, la santé c'est un gros paquebot qu'on a du mal à manœuvrer.
18:32 Donc on a besoin de prendre aujourd'hui des vraies mesures qui portent l'avenir.
18:37 Et on les attend ces mesures.
18:38 On les attend et on a besoin d'un ministre qui reste suffisamment de temps pour les
18:41 porter.
18:42 Frédéric Valtout, qu'en dites-vous de cette démission alors qu'il y a ces multiples
18:45 dossiers sur le feu ?
18:46 Ce qui est évident c'est que tant qu'on n'aura pas une action gouvernementale qui
18:50 s'inscrit dans la durée, c'est-à-dire qui s'incarne dans la durée, ce sera compliqué.
18:56 Parce que, et Marc Nozet le disait à juste titre, le ministre il est aussi l'interlocuteur
19:03 d'un écosystème, d'institutions.
19:06 Et il doit effectivement inscrire son action dans la durée.
19:10 Les priorités des uns ne sont pas toujours les priorités des autres.
19:12 Et donc à partir de là, quand ça change au bout de quelques mois, évidemment c'est
19:18 très difficile à assumer.
19:20 Dans un secteur, je le redis, qui a besoin de conduire une action de fond et des réformes
19:25 de fond, parce que ce sont des réformes difficiles.
19:27 Faire bouger des lignes c'est se heurter à des corporatismes.
19:30 Et c'est savoir qu'on n'obtiendra des résultats que dans quelques années.
19:34 Et donc il faut la permanence, la ténacité, la cohérence.
19:38 Si jamais Agnès Firmin-Lebaudot devait s'en aller, c'est un portefeuille qui pourrait
19:42 vous intéresser ?
19:43 Ecoutez, ce n'est pas moi qui choisis, il faut en parler à celui qui choisit.
19:46 C'est-à-dire à la présidence de la République.
19:47 Mais en tous les cas, quel que soit le candidat qui choisira, il faudra qu'il voit avec lui
19:53 qu'il puisse assurer ce travail dans la durée.
19:55 Je le redis, je pense que c'est ce qu'il y a de plus important pour redonner du sens
19:58 à ceux qui sur le terrain, malgré les difficultés, font face.
20:02 Marc Noiset, je le connais, je sais le boulot incroyable qu'il fait à Mulhouse, les urgentistes
20:07 en général, les hospitaliers en général.
20:08 Mais l'ensemble des soignants aujourd'hui le font dans des conditions difficiles.
20:11 Ils ont besoin qu'on redonne du sens à leur engagement.
20:15 Parce que quand on s'engage avec autant de force dans un métier aussi difficile que
20:18 celui-là, il faut avoir en face de la reconnaissance, mais surtout savoir où on va à long terme.
20:23 5 000 soignants ont signé une tribune il y a quelques jours pour demander à Emmanuel
20:27 Macron le retrait de la loi immigration.
20:29 Un texte, selon eux, mortifère pour la santé publique.
20:31 Il y a sans doute des conséquences notamment sur la santé des étrangers les plus vulnérables,
20:35 les enfants.
20:36 Frédéric Waltho, vous avez voté cette loi immigration.
20:39 Que leur répondez-vous ?
20:40 J'ai lu avec attention cette tribune.
20:42 Il y a beaucoup de craintes exprimées.
20:45 Et je pense que ce sont des craintes qui doivent être autant de points de vigilance.
20:48 Notamment, il y a une inquiétude sur la réforme de l'AME, puisque l'aide médicale d'État
20:54 va être remise sur le tapis.
20:55 Moi, je suis, et je l'ai toujours dit, défavorable au détricotage de l'AME.
21:00 Qu'on puisse revoir à la marge, et le rapport qui a été fait par Claude Évin et Patrick
21:05 Stefanini le montre bien, il y a toujours des points d'amélioration de tout dispositif.
21:09 Mais qu'on puisse imaginer détricoter cette aide médicale d'État, moi je ne serais pas
21:13 de cela.
21:14 Et vous n'aurez pas voté la loi ?
21:15 Je n'aurais pas voté ce texte s'il avait contenu la réforme de l'AME, ce qui n'est
21:18 pas le cas.
21:19 Sur le reste, la France avait besoin d'être plus efficace dans les mesures contre l'immigration
21:26 et les dispositifs, d'être aussi plus humain.
21:29 Parce qu'il y a des dispositions qui font, notamment je pense à la régularisation de
21:32 ceux qui font tourner des pantiers de l'économie, et qui sont aujourd'hui traités de manière...
21:36 Et oui, et le paradoxe c'est aussi que dans votre loi, à vous, il y a un article pour
21:39 faciliter l'arrivée de médecins étrangers hors Union européenne.
21:42 Tout à fait.
21:43 Et là aussi pour leur donner un statut qui soit plus digne de l'aide et de l'apport qu'ils
21:48 ont à notre système de santé.
21:49 Ce n'est pas contradictoire avec la loi immigration ?
21:51 Ah mais pas du tout.
21:52 Ah mais pas du tout, au contraire.
21:53 C'est la création, la facilitation d'avoir un statut d'accueil et d'insertion dans notre
22:01 système de santé, notamment à l'hôpital, pour des médecins qui viennent hors de l'Union
22:05 européenne et qui aujourd'hui, pardon, mais étaient un peu traités...
22:08 Il y avait un voile pudique, on laissait une situation perdurer et un sous-statut pour
22:14 ces gens-là, ce qui était totalement inadmissible.
22:15 Et heureusement que le gouvernement a pris le sujet à bras le corps pour créer un statut.
22:18 Mais c'est un peu la même chose pour les travailleurs qui aujourd'hui, dans les restaurants, les
22:21 hôtels, etc., ou dans l'agriculture, font tourner ces secteurs-là et ont des statuts
22:26 qui sont des sous-statuts.
22:27 Et donc la reconnaissance par la possibilité d'avoir un vrai contrat de travail et un vrai
22:30 statut en termes de nationalité et d'insertion dans la nationalité française, c'est important.
22:35 Marc Noiset, sauf erreur, vous n'avez pas signé cette tribune à Samy Urgence de France.
22:39 C'est parce que vous ne partagez pas l'inquiétude de vos collègues ?
22:42 Pas du tout.
22:43 C'est simplement parce que je ne mélange pas le travail que je fais au quotidien pour
22:47 la santé et la prise de position politique, qui à mon sens, sont deux choses qui sont
22:53 totalement différentes.
22:54 Je respecte l'engagement de mes collègues, mais je pense que moi je n'ai pas, en tous
22:58 les cas, de prise de position à avoir sur un propos politique de ce type-là.
23:03 Maintenant, sur l'AME, effectivement, nous nous avons pris part et nous avons signé
23:08 une tribune également sur l'AME.
23:10 Mais en tous les cas, sur la loi immigration, je pense que ça dépasse de loin la santé
23:13 et la compétence qui est la nôtre.
23:15 Rapidement, un autre projet de loi inquiète le secteur, dont les contours sont attendus
23:19 pour février, c'est le projet de loi fin de vie.
23:21 Quelques extraits d'avant-projets non définitifs ont déjà fuité.
23:25 Pour plusieurs organisations de soignants, le gouvernement fait, je cite, le choix d'une
23:28 mort provoquée et organisée au sein du système de santé.
23:31 C'est une loi qui va mettre mal à l'aise la profession, Marc Noiset, forcément ?
23:36 Je ne crois pas.
23:37 Je ne crois pas que ça mettra mal à l'aise.
23:39 Vous savez, la loi Leonetti de 2016 avait un certain nombre de manquements dans les
23:45 définitions, dans la précision d'application.
23:47 Et ça reste un débat depuis et déjà avant sur la problématique de la mort assistée,
23:56 sur ces problématiques qui sont très complètes parce qu'elles sont éthiques, elles touchent
24:01 au cœur de l'homme avec un grand H.
24:04 Et on sait que dans les pays qui sont autour de la France, notamment sur la sédation assistée,
24:09 il y a des recours qui sont possibles et qui permettent à des patients, notamment qui
24:15 sont obligés d'oblier dans la loi Leonetti, ceux qui ont des maladies chroniques, par
24:20 exemple très douloureuses, sans risque vital, sont écartés de la loi Leonetti.
24:24 Donc on a sans doute besoin de réfléchir plus largement, plus transversalement.
24:29 Et vous êtes prêt à ce débat ? On l'a bien compris.
24:31 Merci beaucoup, on va devoir s'arrêter là.
24:32 Marc Noiset, Frédéric Walthou, invité de France Inter ce matin, très bonne journée à tous les deux.

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