"47% de nos de nos chefs d'entreprise gagnent un peu moins du SMIC", déclare Marc Sanchez, le secrétaire général du Syndicat des indépendants et des TPE
Marc Sanchez, secrétaire général du Syndicat des indépendants et des TPE était l'invité éco de franceinfo lundi pour évoquer la santé des très petites entreprises.
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00:00 - Bonsoir à toutes et à tous. Comment vont les très petites entreprises ?
00:03 Comment vont les indépendants, les artisans, les commerçants ?
00:06 On parle de tout ça avec notre invité.
00:08 Bonsoir Marc Sanchez. - Bonsoir.
00:10 - Vous êtes secrétaire général du SDI, le syndicat des indépendants et des TPE.
00:14 Vous représentez les entreprises de moins de 20 salariés.
00:17 Vous comptez 25 000 adhérents.
00:19 Dans quel état d'esprit sont-ils, ces dirigeants de très petites entreprises, en cette fin d'année ?
00:24 - Écoutez, si j'étais pessimiste, je dirais très très affecté, sans beaucoup de perspectives
00:32 en termes de développement, de chiffre d'affaires, malgré une période de fête qui, effectivement,
00:37 aujourd'hui, monte un petit peu en puissance.
00:39 Mais de manière générale, effectivement, on a des chefs d'entreprise qui sont presque un peu au bout du rouleau,
00:43 je pourrais qualifier un petit peu leur état d'esprit de cette manière,
00:46 mais qui restent quand même un peu résilients.
00:48 - Oui, vous dites "si j'étais pessimiste". - Oui, oui.
00:50 Si je suis optimiste, effectivement, ce qu'on regarde dans nos baromètres, c'est qu'on voit quand même
00:54 qu'il y en a presque plus de la moitié qui restent quand même assez confiants pour l'exercice 2024,
00:59 mais pas confiants par rapport à des facteurs économiques, mais confiants parce qu'ils n'ont pas le choix.
01:03 Parce que souvent, effectivement, leur entreprise, c'est leur vie.
01:06 Ils y ont beaucoup mis de l'argent personnel, du temps, de l'énergie, des idées, de l'influx.
01:12 Et donc, forcément, on n'a pas le choix de reculer, on ne peut qu'avancer.
01:14 Donc, de ce point de vue-là, on va dire qu'on doit rester optimiste.
01:18 - Vous disiez au bout du rouleau, Emmanuel Macron a lancé un appel en novembre dernier à ceux qui voulaient,
01:23 qui voudraient arrêter, faire une pause dans les réformes, alors que le taux de chômage est passé à 7,4%.
01:28 "Réveillez-vous", dit le chef de l'État.
01:30 Vous, Marc Sanchez, vous avez répondu en disant "nos chefs d'entreprise sont réveillés et beaucoup n'arrivent plus à dormir".
01:36 Qu'est-ce qui vous empêche de fermer l'œil ?
01:38 - Aujourd'hui, ce qui nous empêche de fermer l'œil, comme je vous l'ai dit tout à l'heure,
01:41 c'est la dégradation de la situation économique de nos entreprises, très clairement.
01:45 On a aujourd'hui 8 chefs d'entreprise sur 10 qui considèrent effectivement qu'ils n'ont pas de perspective.
01:52 Ils voient effectivement les charges qui se cumulent de plus en plus,
01:56 énormément de difficultés à rembourser, notamment ce qu'on appelle les charges Covid, c'est-à-dire PGE, Etalement, URSAF...
02:01 - Les prêts garantis par l'État. - Exactement, oui.
02:03 Et puis ensuite, tout ce qui concerne les augmentations énergétiques qu'ils ont effectuées sur 2023,
02:08 et de l'autre côté, une inflation qui, on va dire, auberge la consommation de plus en plus.
02:13 On constate aussi des changements de comportement de la part des consommateurs.
02:18 Je dirais que ça affecte tous les secteurs d'activité en plus de ça.
02:20 Donc forcément, quand on entend cette injonction,
02:24 même si elle était peut-être dite effectivement dans un contexte un petit peu différent,
02:28 on est un petit peu choqué, pour le moins, oui.
02:31 C'est ce que nous a amené à réagir, d'ailleurs.
02:32 - Parlons de l'inflation, justement.
02:34 Vous faites face à des hausses de vos tarifs fournisseurs.
02:38 Est-ce que c'est répercuté sur les prix que les entreprises qui adhèrent à votre syndicat pratiquent ?
02:43 - Alors, dans notre dernier baromètre, on a constaté en fait qu'elles étaient répercutées à moins de 30%.
02:48 C'est-à-dire qu'effectivement, beaucoup de dirigeants de TPE ont considéré qu'il n'était pas nécessaire
02:53 ou pas, on va dire, dans une certaine obligation de la répercuter,
02:56 de peur d'avoir des baisses de consommation ou des baisses de chantier, notamment.
03:00 Donc souvent, elle est supportée, on va dire, par les marges ou par les trésoreries des entreprises,
03:04 en espérant que ça redécolle.
03:06 Et c'est malheureusement pas ce qui se passe aujourd'hui.
03:08 Et avec des perspectives sur 2024, si on regarde notamment les dernières stats en macro de l'INSEE,
03:13 qui sont quand même assez compliquées.
03:16 - Autre question, le gouvernement, vous parliez, vous évoquiez les charges d'énergie.
03:19 Le gouvernement prolonge l'amortisseur électricité.
03:22 Est-ce que ça, c'est un soulagement ?
03:24 - Alors, ça répond à une demande du SDI, puisque au départ, il n'y avait rien quand même.
03:27 On avait un stop and go à partir du 1er janvier.
03:30 Donc effectivement, ils ont pris en considération le cas des entreprises qui ont signé des contrats
03:34 l'année dernière, notamment à des prix relativement exponentiels
03:37 et qui sont dans des contrats pluriannuels.
03:40 Donc qui auraient été obligés de continuer à payer très cher leur électricité.
03:43 L'amortisseur a été maintenu à partir d'un montant de 250 euros du mégawatt,
03:48 alors qu'il était à 180 dans l'amortisseur classique.
03:51 Dans les études d'impact qu'on a fait sur cette thématique,
03:53 on constate que malheureusement, ce ratio à 250 euros reste encore trop haut,
03:59 notamment pour les TPE.
04:00 C'est-à-dire que c'est un bénéfice qui va être impactant pour les PME notamment,
04:04 mais qui sera peut-être plus compliqué à acquérir pour les TPE.
04:07 Donc de ce point de vue-là, l'inquiétude demeure.
04:09 - Et quelle en est de la rémunération des dirigeants des entreprises que vous représentez ?
04:15 - Là aussi, notre baromètre a montré au mois d'octobre dernier
04:18 qu'effectivement, on avait quand même 47% de nos chefs d'entreprise,
04:22 commerçants, artisans, professions libérales et dirigeants de TPE,
04:26 qui gagnaient depuis, on va dire, le cours 2023,
04:30 un peu moins du SMIC, aux alentours de 800 ou 900 euros par mois.
04:34 En tenant compte effectivement d'un travail de 48 heures hebdomadaire,
04:37 ce qui est quand même relativement important.
04:39 Et effectivement, on explique ces éléments-là par le fait que le chef d'entreprise
04:43 est tellement, on va dire, pressé par les charges,
04:45 qu'il préfère effectivement utiliser ce qui peut lui rester de rémunération
04:49 pour pouvoir notamment payer des charges, je pense au PGE notamment,
04:52 où beaucoup nous disent effectivement que c'est un élément
04:55 qui auberge quelque part la rémunération et la marge des entreprises.
04:59 Alors même qu'au départ, il était quand même considéré comme une aide
05:02 qui devait justement nous permettre de sortir de la crise Covid,
05:05 aujourd'hui on a l'impression qu'il nous enfonce de plus en plus.
05:07 Il faut voir que le PGE aujourd'hui, c'est quand même, pour une entreprise,
05:10 un fleurist, un boulanger, c'est 2000 euros par mois à rembourser sur une base de 4 ans.
05:15 Et c'est ce qui avait fait d'ailleurs que l'USDA avait demandé justement son étalement
05:19 pour les entreprises qui en font la demande bien évidemment,
05:21 sur une période de 2 ou 3 années supplémentaires.
05:24 - Vous, de quoi auriez-vous besoin en urgence aujourd'hui ?
05:28 - Je vous dirais déjà qu'on arrête de nous expliquer que tout va bien.
05:30 Parce que tout va pas bien.
05:31 Alors bien évidemment, l'idée c'est pas d'être dans le misérabilisme total,
05:35 mais quand on regarde toutes les enquêtes qui sont faites par tous les instituts,
05:39 par celles du SDI, par celles de Rexecode, d'Altares, etc.
05:42 On constate qu'il y a, d'un point de vue micro,
05:45 on constate qu'il y a une vraie tension au niveau des TPE aujourd'hui,
05:48 dans tous les secteurs d'activité.
05:50 Le président de la Fédération française du bâtiment a expliqué encore
05:53 la semaine dernière que sur 2024-2025,
05:58 il y aurait quand même, je crois à peu près 90 000 à 150 000 emplois
06:02 qui seraient supprimés parce qu'effectivement,
06:03 il y a un ralentissement de la consommation.
06:06 Sur les entreprises de seconde heure,
06:08 ce qu'on constate chez nous, les entreprises qui sont adhérentes chez nous,
06:10 on est exactement dans la même logique.
06:12 Et on a un discours, quelque part, on nous explique que bon,
06:15 pas circuler, rien à voir, mais bon, ça va passer, ça va aller mieux, etc.
06:18 Donc c'est bien la méthode Coué, mais au bout d'un moment,
06:20 il faut aussi tenir compte des vrais sujets et essayer d'apporter des réponses.
06:24 Alors même si le gouvernement n'a pas réponse à tout,
06:26 le fait d'être quand même un petit peu plus non-entendu
06:28 et écouté sur ces éléments-là permettrait effectivement
06:31 d'être peut-être un petit peu plus positif.
06:34 - Votre appel est lancé. Merci beaucoup, Marc Sanchez.
06:36 Vous êtes secrétaire générale du Syndicat des indépendants et des TPE,
06:40 le SDI, et vous êtes ce soir l'invité Echo de France Info.